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Julia Escudero

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Carole-Pele_Essone-en-Scene_2021
Photo : Louis Comar

Tornade brune inénarrable aux accents fauviens, Carole Pelé a le bon goût de se composer un univers où art et musique se mélangent. Boule d’énergie à fleur de peau, elle se dévoile titre après titre, livre ses maux et les pose sur des riffs léchés aux arrangements divins. Appréhender sa musique revient à se glisser dans un univers entier, servi avec grâce par son passage  aux Beaux Arts et donc la garantie d’y trouver une esthétique forte. Sa musique et ses lives se vivent comme une expérience entière où la sincérité est maîtresse et où l’urbain côtoie la mélancolie avec une modernité saisissante. Après avoir oeuvré en première partie d’Hervé à la Clés Saint-Germain le 6 novembre, avant de retourner sur scène le 14 décembre au Plan, Carole Pelé a concocté une playlist de ses inspirations pour Popnshot. On y retrouve avec plaisir les comparses de Fauve avec qui elle partage un univers commun, Stromae qui fait son come back, Vianney avec qui elle a joué à Essonne en Scène ou encore Bonnie Banane et son vent de nouveauté. A écouter d’urgence donc avant de découvrir le deuxième EP de la musicienne prévue pour 2022. Quand vous aurez fini d’écouter toutes ses inspirations, faites vous plaisir et écoutez son excellent  « Premier EP » déjà disponible.

Carole, on trouve quoi dans ta playlist ?

1. Kae Tempest – Lessons

Pour moi, la meilleure chanson de tous les temps.

2. Stromae – Tous Les Mêmes

Génie d’écriture et d’interprétation. J’aime bien son nouveau son nouveau titre Santé aussi.

3. Chilla – Sale chienne. 

C’est une chanson qui m’a donné pas mal de force à un moment donné.  C’est aussi la toute première que j’ai chanté en public.  

4. Fauve – RAG #3

Pour moi, deuxième meilleure chanson de tous les temps.

5. Grems – Mandala

Titre que je trouve vraiment puissant.

6. Little Simz – Backseat

Au service des mots, parfaitement juste.

7. Bonnie Banane – Béguin

Une chanson originale avec un super groove. 

8. Vianney – Veronica (version live)

Pour revivre Essonne en Scène par les Francofolies,  c’était trop cool de faire la 1ère partie de Vianney en septembre dernier. 

9. Christine and The Queens – Narcissus is Back

Ma préférée de son album Chaleur Humaine. 

10. Hervé – Va Piano

Pour se chauffer pour le concert du 6 novembre à La Clef ! 

 

Découvrez la playlist de Carole Pelé


 

Murray Head tournée 2021Vous connaissez tous ses plus beaux succès « Say it ain’t so Joe » et « One Night in Bangkok »,  il faut dire que le talentueux Murray Head s’est fait connaître dans les années 1960.  Cet artiste entier à la folk culte s’est illustré en 1975 avec l’album « Say it ain’t so ».

Le musicien est également connu pour ses rôles au cinéma. Signé à 17 ans sur le label EMI, on le retrouve en tête d’affiche dès ses 20 ans. On le voit dans « Sunday bloody sunday » en 1971 et au théâtre dans « Hair » et « Jesus Christ Superstar ».  Il interprète également deux morceaux avec David Gilmour au chant « I must tell you why » et « Do you want to marry me? »  avant que ce dernier n’intègre Pink Floyd et ce pour la bande originale du film « A cœur joie » dans lequel il joue aux côtés de Brigitte Bardot et Jean Rochefort.

Touche-à-tout, il écrit son auto-biographie en 2011 intitulé « En passant », en 2012 il rend hommage à ses idoles avec l’album « My Back pages » sur lequel il interprète du Bob Dylan, The Who, Dido …

Ce monument de la culture a décidé de revenir saluer l’Hexagone. Pour se faire, la nostalgie sera à l’honneur puisqu’il ré-interprétera en intégralité son album phare « Say it ain’t so ». Sur scène, il sera accompagné de ses fidèles musiciens : le guitariste Phil Palmer, le violoniste Geoffrey Richardson, la bassiste Jennifer Maidman, le saxophoniste Harry Fausing Smith et le batteur Ally McDougal.

C’est donc logiquement qu’il jouera dans la salle parisienne dédiée aux plus grands musiciens de ce monde j’ai nommé l’Olympia. Il s’y produira le 8 décembre 2021. Une date qui avait malheureusement été reportée des suites de la crise du Covid. Il sera donc encore meilleur de voir ce grand monsieur sur scène, en France après une si longue attente.

Evidemment, le reste de la France ne sera pas oubliée.  Des places sont encore disponibles ici, à partir de 51 euros pour l’Olympia et de 27 euros pour le reste de la tournée française.

LA TOURNÉE MURRAY HEAD 2021

27/11/21 – Sanary sur Mer – Théâtre Galli
28/11/21 – Belfort – La Maison du peuple
2/12/21 – Châteaugiron – Le Zéphir
3/12/21 – Hem – Le Zéphyr
5/12/21 – Cambrai – Théâtre de Cambrai
8/12/21 – Paris – L’Olympia
10/12/21 – Alençon – La Luciole
16/12/21 – Chenôve – Le Cèdre
17/12/21 – Nantes – Cité des Congrès
6/03/22 – Châteauneuf sur Isère – Palais des Congrès

Murray Head – Say It Ain’t So Joe

 

Le 2 octobre 2021, les rues de Paris sont inondées. La pluie bat son plein et ne semble pas vouloir s’arrêter, lavant tout sur son passage, entraînant avec elle la réalisation glaciale que l’été indien ne nous sauvera pas cette année. Il faut alors à la place, embrasser les possibilités qu’offrent une rentrée synonyme de retour à la vie.

Dust_Lovers-La_Boule_Noire-2021
Photo : Louis Comar

Retour est certainement le mot le plus important dans cette phrase. Parce qu’il évoque l’après Covid et son envie de faire comme avant ? Peut-être. Mais aussi et surtout parce que ces années s’inscrivent dans une tendance générale de retour. L’envie conséquente de faire du neuf avec de l’ancien, de faire revivre un certain passé et de lui apporter son lot de nouveautés. Ce qui se vaut en friperie ou pour l’improbable et pourtant, c’est bien arrivé, retour de Von Dutch, se vaut également en musique. Certaines tendances reviennent, remises au goût du jour, transformées et parfois même sublimées. Si ces années permettent au rap de vivre son nouvel âge d’or, le rock, lui est moins en reste qu’on ne veut bien nous le faire croire. Le post punk déjà annonçait un vent de renouveau sur le milieu. Mais le courant stoner, lui aussi, reprend ses lettres de noblesse face à un public d’irréductibles aficionados. La preuve en est d’ailleurs donné  en cette soirée de concert qui porte en son affiche le trio féminin Grandma’s Ashes.

Grandma’s ashes : un retour sur scène très attendu

C’est face à une salle comble et chauffée à bloc que le power trio féminin fait son entrée en scène pour présenter enfin, et après avoir dû essuyer de nombreux reports, son premier EP « The Fates ». Il suffisait d’ailleurs de l’écouter cette galette, pour comprendre à quel point le live démangeait nos trois grâces. Enfin prêtes à en découdre les copines survoltées balancent avec énergie leurs guitares saturées. D’emblée, ce sont les voix qui frappent lorsque les musiciennes entrent en scène. Servies à l’unisson, la justesse qui s’en dégage porte également les titres et leur donnent au delà d’une intention post-punk une véritable force mélodique et progressiste. L’harmonie et la cohésion d’équipe ressortent d’ailleurs  tel un appel à la sororité dans cette performance franchement rock.

Un public de fans

Le look empruntant au gothique de nos maîtresses de cérémonie a par ailleurs déteint sur l’assemblée. Collier en forme de lame de rasoir, amples tee-shirts de groupes de rock underground et même du cuir habillent un public où les vingtenaires sont majoritaires. Difficile pourtant, lorsque l’on a fréquenté les salles de concerts des années 2000 et l’apogée du rock alternatif de ne pas sentir une pointe de nostalgie en voyant des doigts se lever régulièrement dans l’assemblée pour créer de petites cornes de Satan propre à un certain esprit rock. Cet esprit pourtant, libre et revendicateur, est aussi celui d’une affirmation de soi au sein d’un groupe qui se reconnait et permet de gagner en confiance en soi tout en perdant en timidité. Ce qui est vrai dans le public l’est aussi sur scène, puisque Eva, Myriam et Edith profitent de l’élan d’un public captivé pour mieux masquer le traque des premières fois sur scène. C’est pourtant cette fraîcheur qui donne encore plus de beauté à cette performance qui semble crier, « On donne tout ». Pour se donner plus de force, le groupe, qui se revendique des Monty Python, n’hésite pas à communiquer régulièrement avec l’assistance, enchaînant les blagues et les explications. Le retour en salle les habite et les titres s’enchaînent frénétiquement. Les pogos sont le partie alors que la Boule Noire semble avoir pris d’assaut uniquement ses premiers rangs.  Queen of the Stone Age résonne autant que Led Zeppelin au coeur d’instruments qui virent parfois vers des sonorités plus gothiques. Dans leur noirceur du moins qui ne manque jamais d’être contrebalancées par une esthétique plus mélodiques comme avaient pu le faire les Donnas près de 15 ans plus tôt.

Un dernier saut avant de partir

La jeunesse du groupe fait sa force, parfois aussi, son talon d’Achille puisqu’il parait évident que, comme beaucoup, frustré par le Covid, il a encore eu peu d’occasions de se roder sur les planches. Là où il restera du travail, Grandma’s Ashes compense  par une sincérité touchante et une force herculéenne qui les pousse au delà de leurs capacités. Sans jamais se laisser tomber dans l’émotion facile, elles profitent du moment pour remercier leur grand entourage. « Radish Cure » est l’occasion de tisser un long fil invisible entre les convives, maintenant possédé par les notes.

Se lâcher est mot d’ordre alors les copines préviennent qu’elles comptent stage diver pour la toute première fois. L’appréhension se sent encore une fois, écrasée par le besoin de tout vivre dans l’instant et de rendre au rock une certaine fougue. Voilà donc que nos deux front women, qui ont pris soin de demander à plusieurs reprises à l’assistance de bien les retenir, viennent jouer de leurs instruments portées par la foule. Ces derniers prennent par ailleurs une place de maître dans les compositions lives de la formation qui s’offre de nombreux moments d’instru sans chant, sorte de solo en trio où notes et aigus font loi.

Le concert se conclut dans une ambiance survolté et aussi chaude qu’une journée de canicule qui aura su inspirer son nom au groupe. Point question d’en rester là alors qu’elles convient l’assistance à un after bien mérité dans un bar tout proche. Le rock féminin sent lui aussi la bière et ne connait pas de limites. Qu’on se le tienne pour dit.


Yoko?-Ho-no!-Bus-Palladium-2021
Photo : Louis Comar

Le mois de septembre 2021 est un mois bien particulier. Il est synonyme de retour à la vie, de retour aux lieux. La première fois que l’on découvre un endroit, on peut en tomber amoureux, ou simplement ne pas y penser. Vivre dans l’instant à défaut de vivre dans l’espace.  Et puis, parfois, au détour de la vie qui changerait mondialement et spontanément en quelques affreuses journées, les lieux peuvent disparaître. Alors, finalement leur redécouverte invite à réaliser qu’ils nous avaient manqué. Le lieu finirait-on par penser peut être aussi important que l’instant.

Le 25 septembre était pour beaucoup, l’occasion de retrouver le Bus Palladium de Paris. Club rock célèbre de la capitale qui a même à son actif un film, il invite aux meilleurs concerts suivis de folles nuits à danser sur du rock pointu aux consonances anglaises. Ce soir là, trois concerts étaient programmés et la qualité au rendez-vous allait de paire avec la réputation de ce monument de la musique parisienne.

Le rock sous toutes ses formes

Si c’est à 21 heures que la salle ouvre ses portes mais il faut s’armer de patience. Au Bus Palladium, les soirées commencent tard et ne finissent pas, elle s’étirent. La fête y est belle, sent le cuir hors modes et l’assistance a toujours 20 ans qu’importe si ce n’est plus le cas depuis longtemps. Cette candeur, elle se retrouve sur scène et ce n’est pas Grenade qui fera mentir ce constat. La quatuor parisien est encore au stade de découverte pour une partie de l’assistance. Une partie seulement puisqu’à peine les premières notes jouées, la foule se compacte et s’émeut.  Certains les connaissent par coeur. Ils appellent les musiciens et chantent avec eux leurs paroles en anglais. La qualité de ce set fièrement inspiré par l’âme d’Arctic Monkeys convoque à ses côtés l’esprit des Black Keys. Alors que le formation gère à la perfection son espace scénique, son guitariste hypnotise les foules. La précision de ses notes empli le lieu et l’électrise. Sous son rock britannique pointu, Grenade cache et distille des notes de blues suaves. Si le jeu de la première partie sait souvent devenir casse gueule, il n’en est rien ce soir, tant la qualité de chaque groupe s’allie à celle du suivant et crée un moment d’une justesse exacerbée.

L’âme des Smiths survoltée

Il ne faut pas attendre longtemps pour que le combo soit relayé par Sheitan & the Pussy Magnets. L’histoire veut que les compositeurs de groupes sont rejoints par leur batteur lors d’un voyage en Angleterre. L’anecdote coule de source tant la créativité made in Grande-Bretagne transpire dans ce set à fleur de peau. Si d’aucun pourrait leur prêter une ascendance des Smiths, le groupe transpose l’esprit mélancolique de Morrissey pour lui apporter la crasse des larcens et une bonne humeur communicative. De rock, il est bien question, là où, pour la deuxième fois de la soirée, le parallèle avec le groupe d’Alex Turner et de Jamie Cook semblent être une évidence. Si le courant peut prêter au laisser aller et à la fougue révoltée, l’énergique formation y allie la précision carrée des notes. Communiquant volontiers avec une audience qui maintenant pogote de bon coeur le groupe exacerbe les sentiments et frappe très fort avec la qualité de professionnels qui tourneraient depuis des décennies. Loin d’être aussi sages qu’ils ne pourraient paraître d’emblée, Sheitan & the Pussy Magnets joue sur un équilibre remarquable. Celui qui rend la douceur d’une guitare énervée, celui qui agite autant qu’il évoque l’intime, celui qui amuse et émeut à la fois. Il fait maintenant très chaud dans la petite salle parisienne. Les corps transpirent et l’air vient à manquer. Le bouillon rock devient un tourbillon dans les esprit surchauffés. La soirée est loin d’être terminée.

Punk is not dead

La grand messe qui vient à compléter le tableau est là pour casser les codes et les fondations posées par ses compères. Exit tout ce qui pourrait être propre et léché comme l’évoque le rock anglais actuel. Cette fois-ci, le punk est de sortie. Dans cet esprit jusqu’au boutiste, le groupe a revêtu des tenues de prêtres. Il ne faut pas attendre qu’une minute entière se passe pour que les compères frappent fort. La foule suit le mouvement et vient volontiers pogoter. Le temps est gommé, bien loin des confinements à répétition, du monde aseptisé qu’on aurait voulu nous vendre, le lâcher prise des 70’s refait surface vitesse grand V. A ce charme du tourbillon musical s’ajoute la candeur des 90’s, l’humour à la Jackass. Les guitares et la rythmique tapent dure alors que le Bus Palladium semble lui aussi tourner dans tous les sens comme sous l’effet de psychotropes puissants. Bon enfant, l’assistance interpelle régulièrement le groupe, lui adresse des blagues auquel il répond avec une aisance à souligner. La chaleur monte encore et les fous furieux de Yoko ? Oh No ! ont encore des atouts secrets. Comme ceux qui se cache sous les soutanes une fois celles-ci tombées. Le guitariste a en effet des caches tétons en forme d’étoiles comme nouvel accoutrement sur un torse en sueur. Les esprits s’échauffent aussi et l’alcool aidant un tout petit groupe passe des pogos aux coups de points lors du rappel. « On a moins envie de le jouer ce dernier titre maintenant ! » lancent les musiciens pourtant un brun amusés alors que cette ambiance guerrière va dans ce cadre punk à souhaits qui ne peut que sentir le bière. Le dernier titre se savoure d’ailleurs comme un breuvage au houblon bien frais un soir de canicule. Il enivre autant qu’il délecte, il se déguste jusqu’à sa dernière gorgée. Philipe Delerme dans son ouvrage parlait de « Le première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules ». Le texte a souvent inspiré, mais il a oublié que parfois une centième gorgée peut avoir la même saveur que la toute première. Celle d’un instant retrouvé au Bus Palladium qui restera dans les esprits avec la force d’une toute première fois. L’amertume du rock est la meilleure des effluves.