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Julia Escudero

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Le cinéma d’horreur déteste les femmes ? C’est une rumeur qui s’est répandue au cours des années et qui est devenue maître mot dans un inconscient collectif. On lui prête toujours le massacre de jolies jeunes filles toujours dépeintes comme stupides, courant s’enfermer dans leurs chambres pour mieux se faire découper. Pourtant ce que la collectivité oublie souvent de dire, c’est que même dans son registre pourtant le plus propice à éliminer les femmes, le slasher donc, se cachent bien souvent des héroïnes vaillantes, fortes et puissantes appelées les Final Girls. Des modèles de détermination, capables de vaincre le plus violent et fort des personnages masculins (ou non d’ailleurs).  Sienna Shaw, la final girl de Terrifier 2 et Terrifier 3 en est aujourd’hui le nouveau visage et la nouvelle incarnation. Elle est pourtant l’héritière des plus grandes qui ont vaincu plus d’une fois Michael Meyers, Leatherface, Ghostface ou encore Freddie. Des modèles inspirants pour les jeunes filles mais aussi pour l’image du féminisme à l’écran. On en parle.

Sienna Shaw : final girl angélique

art le clown et siennaPeut-être à revers de Vendredi 13, il aura fallu 2 volets à Damien Leone, le réalisateur des Terrifier, pour mettre en lumière sa puissante héroïne, Sienna Shaw (Lauren LaVera). Si c’est elle dont on parle aujourd’hui, c’est parce qu’elle est sans nul doute le nouveau visage à connaître parmi les final girls. En cause, le récent succès inattendu de Terrifier 3 dont la sortie en salles a battu tous les records, pulvérisant au passage la suite du Joker. Face à Art le clown, personnage vicieux et diabolique, tueur fou démoniaque et monstre du cinéma sans concession, Sienna donc.

Ses traits caractéristiques il faut le dire embrassent ceux que l’on connait à beaucoup de final girls. Jeune fille candide et naïve, jamais portée sur l’horreur ou même les faits divers. Il pourrait être intéressant de noter que nombre de réalisateurs viennent à juger ou punir les personnages qui aimeraient un peu trop le cinéma de genre ou porteraient une obsessions sur les histoires vraies sanguinolentes. La scène de la douche de Terrifier 3 ira d’ailleurs punir copieusement celle qui était obsédée par Art le Clown. Randy Meeks, pourtant personnage si fort de Scream connait lui aussi un triste sort dans Scream 2, Casey Baker dans le 1er volet de la saga également, de même que tous les érudits du 4ème volet. Il y aurait de quoi pousser la psychanalyse, tant nos réalisateurs choisissent comme preuve de pureté et de personnages dignes de survie celles et ceux qui ont un profond dégout pour ce qui les pousse à créer des films.

Toujours est-il que comme ses nombreuses prédécesseuses, Sienna est avant tout une femme forte, capable de regarder le mal dans les yeux et de le combattre. Là où d’autres devront trouver la force de lutter contre les démons qui les assaillent et souvent leurs propres démons, Sienna sera prédestinée à cette lutte. Son père lui aura indiqué dans son enfance quelques clés cachées pour lui permettre de comprendre qu’elle sera le visage du bien et le seul à pouvoir contrer les pires ténèbres et les tonnes de tripes et boyaux qui le composent. Parmi les nombreux litres d’hémoglobine versés, celui de ses proches sera tout particulièrement présent. Et cette caractéristique, on la retrouvera chez de très nombreuses final girls avant elle.

Allo Sidney Prescott, la final girl qui m’a tout appris

Scream 5 Sidney et GalePeut-on parler de propos adolescent dans l’horreur ? Si le genre a de nombreux visages, celui du slasher prend souvent plaisir à offrir à ses bouchers et donc en vedette, des jeunes filles en plein dans leurs années lycéennes. Y-a-t-il un parallèle intéressant à y faire avec le quotidien ? Se fait-on plus facilement peur dans la jeunesse quand l’insouciance rend la mort si abstraite ? Se forme-t-on avec la peur pour devenir des adultes plus conscient.es qui l’éviteront par la suite ? C’est possible. En la matière néanmoins une final girl a pleinement révolutionné ma vie, celle qui participait également au film qui à lui seul allait redéfinir les codes du genre : Scream.

Le film de Wes Craven est, on le sait conscient de s’inscrire dans une vague écrite bien avant lui. Il se revendique et cite continuellement Halloween de John Carpenter mais aussi Vendredi 13 ou encore Freddy, les griffes de la nuit (avec qui il partage son réalisateur). Sidney ( Neve Campbell) est un personnage entachée par la perte. Celle de sa mère l’année précédent le film. L’adolescence est un temps pour se détacher de ses parents, de ses repères. Et cette perte est un miroir bien sombre d’une réalité que l’on éprouve lorsqu’on se construit et qu’on se sent forcément peu comprise. Laurie ( Jamie Lee Curtis, Halloween) a perdu elle aussi ses parents, tués par son frère, Michael Meyers, Sienna perd sa mère dans le second Terrifier là où même Midsommar n’échappe pas à la règle (lui pourtant issu de l’elevated horror et donc loin du slasher), tuant dans son introduction les parents de Dani. Ce fait, il sert régulièrement à isoler son personnage central, lui donnant les traits de la fragilité. Mais ces traits finalement seront aussi ceux qui parleront le plus à une jeune femme en construction qui a défaut de s’y reconnaitre – du moins on le souhaite- pourront y apprendre qu’une femme seule, isolée, n’ayant plus ses repères pourra pourtant trouver en elle une force encore plus sur-humaine que celle de ces assaillants. Et les assaillants eux sont souvent masculins.

final girl sidney scream
Sidey Prescott, Neve Campbell, Scream

Pour Sidney, souvent uniquement, puisqu’elle affrontera film après film quelques tueuses cachées sous le masque. A l’occasion du quatrième volet notamment dans lequel elle en profitera pour amplifier son statut de mythe dans sa dernière phrase « Don’t mess with the original » épousant sans le savoir un propos qui obsèdera des années plus tard « The Substance », soit la place de la femme quand elle prend de l’âge. Sidney y garde toute sa force. Et celle-ci fera écho à celle de Laurie Strode qui deviendra une véritable chasseuse de Michael Meyers dans le dernier volet d’Halloween mais aussi à Sally dans Massacre à la Tronçonneuse qui reviendra en 2022 armée et équipé pour botter le cul à Leatherface. Il faut le dire dans le dernier exemple de façon too much et trop éloigné d’un personnage pourtant bien plus candide dans son écriture d’origine. Erin (Jessica Biel) dans la version de 2003 avait elle les traits d’une final girl bien mieux écrite quitte à épouser les clichés qu’on peut en attendre. Parmi eux celui du petit ami qu’il faut sauver, qui n’est pas une aide. Sidney va plus loin alors que son petit ami, Billy Loomis, sera celui qui se cache derrière le masque. Une belle façon d’apprendre à se détacher de la gente masculine mais aussi à se méfier de la toxicité de nombre d’hommes et petits amis. Tout ça encore une fois abordé en 1996 ! Si loin avant Me TOO ! Un fait qui aurait dû se répéter dans Scream 2 si le scénario n’avait pas fuité puisque Dereck (Jerry O’Connel), le nouveau petit-ami de Sidney devait se trouver derrière le masque de ghostface aux côtés de sa meilleure amie , Hailey. Finalement Debbie Salt (Laurie Metcalf, la mère de Billy) et Mickey (Timothy Olyphant) les remplaçait pour garder le suspens.

final girl laurie halloween
Laurie, Jamie Lee Curtis, Halloween

Mère Ripley, aux origines

La final girl ne se contente pas d’exister à travers les slashers. On la retrouve également dans la grande famille du cinéma de genre. Parmi elles, une incontournable cohabite avec Alien, l’alien elle aussi femme d’ailleurs, et vient prendre une place centrale en matière de référence  : Ellen Ripley interprétée par Sigourney Weaver. Ripley est mère, quand elle quitte la Terre, sa fille Amanda a 10 ans. Pour autant, elle ne sacrifie pas sa carrière, elle est lieutenant de première classe et part en mission !

Seule survivante du premier volet, avec un chat tout de même, c’est la figure maternelle qu’elle représente, film après film. Mère avant d’embarquer nous le disions, elle devient mère de substitution dans le second opus de Niout, enfant rescapée des griffes du terrible alien. Le quatrième opus fait d’elle une autre forme de mère, celle d’un monstre, l’alien lui-même donnant vie à une relation des plus troublantes. Ripley meurt puis ressuscite. Voilà qui va à contre-pied d’un propos repris des années après par Vivarium : « Une mère ça fait quoi ? Ca meurt ». Ce jeu est d’autant plus intéressant qu’il ne force pas la femme à être un simple modèle sexy pour survivre, il ne se base pas sur sa jeunesse et sa candeur pour en tirer de la force. Chaque volet rendra Ripley de plus en plus emblématique. Et ce propos est d’autant plus pertinent lorsque l’on se rappelle qu' »Alien » sortait en 1979. Le cinéma d’horreur sait aussi se faire prescripteur.

final girl ripley alien
Ripley, Alien ( Sigourney Weaver)

Les dignes héritières

Le concept de la mère dans le cinéma d’horreur et aussi en tant que final girl passe les générations. En 2005, Neil Marshall déboule en salles avec l’un des films d’horreur les plus terrifiants et les mieux réalisés de tous les temps : « The Descent ». Le réalisateur nous offre un casting uniquement féminin. Ces dernières, férues de spéléologie, se retrouvent prises aux griffes de monstres sous-terrains aux allures d’hommes des cavernes flippants. Héroïne blessée, elle aussi privée d’une famille tuée dans les premiers instants, Sarah (Shauna Macdonald), donne une nouvelle facette à l’emblématique final girl. Mère privée de son enfant et donc d’un certain sens de la vie, personnage traumatisé, elle pourrait être celle qui rend les armes en premier. Pourtant, le souvenir de sa petite fille la pousse, sa douleur la transcende. Elle tente alors tout le film durant de sauver ses amies, de lutter, de retrouver la sortie et donc la lumière. Il semble évident d’ailleurs que le film entier est une métaphore horrifique du deuil et de la douleur. L’enfoncement dans les ténèbres personnifié par les grottes, les démons qui ne permettent pas de ressortir à la surface, la violence intérieur, l’envie de remonter malgré tout comme seul but de vie. « The Descent » est une forme d’elevated horror avant l’heure. Un joyau, à regarder dans le cadre de son terrible final européen et non dans sa version US simplifié qui donne d’ailleurs naissance à sa suite médiocre.

final girl the descent
Sarah, The Descent

Outre, le combat d’une mère, la final girl peut aussi être celle qui combat l’homme abusif. C’est explicité avec le personnage de Grace dans « Wedding Nightmare » interprétée par Samara Weaving. La jeune femme se retrouve obligée de lutter pour sa vie alors que sa belle-famille tente de la tuer le jour de son mariage. Son époux (Marc O’Brien) finit par lui aussi tenter de l’assassiner malgré ses voeux prononcés quelques heures plus tôt. L’ombre de la violence conjugale plane largement sur ce récit qui rappelle que tout ne doit jamais être accepté par amour et qu’on ne tue pas par amour. Modèle mais aussi mise en garde, les héroïnes de l’épouvante, reflète le pire de ce monde et mettent en garde. Les féminicides existent, les relations toxiques également. Il ne faut pas fermer les yeux.

Final girls protect girls

Il serait impensable de dresser un listing complet de toutes les final girls ayant marqué le cinéma d’épouvante. Ce dernier serait sans fin. Les mères vaillantes pourraient à titre d’exemple être rejointes par Sarah (Alysson Paradis), elle aussi veuve éplorée qui tente de sauver son enfant à naître face à Béatrice Dalle dans le sanglant et français « A l’intérieur ». Ou bien par la cultissime Sarah Connor qu’on ne raconte plus dans la saga « Terminator ». Pour autant et histoire de s’offrir un panel non exhaustif il sera intéressant d’ajouter un mot sur quelques figures récentes même si moins cultes pour rappeler qu’en matière de féminisme, les final girls sont celles qui jouent le plus sur la notion de sororité.

En la matière le traumatisant « The Perfection », donnait vie à un personnage complexe, Charlotte, d’abord vue comme diabolique et monstrueuse. La trame permettait de se rendre compte qu’elle ne reculait en réalité devant rien pour sauver Lizzie des griffes d’agresseurs sexuels. Une fable violente sur les femmes persécutées, troublantes et à ne pas laisser entre toutes les mains. Même schéma ou presque pour « Brimstone » avec Dakota Fanning qui mettait autant en garde contre l’inceste que les faux prêcheurs et parlait de sororité à travers le prisme de la prostitution. En matière de femme traumatisée et d’horreur, l’ombre de « Carrie » de Stephen King, certes non final girl mais « méchante » pluri-facettes n’est jamais loin.

brimstone afficheEnfin, et en dernière position, le très teen et netflixien « Fear street » avait offert son lot de sang neuf au genre avec une final girl lesbiennes (enfin !)  et une méchante sorcière dont le noir dessein se justifiait par une persécution masculine tout aussi condamnable.

Si ces personnages ont marqué des générations de jeunes-filles leur donnant de la force là où d’autres registres ont pris des décennies à enfin prendre eux aussi leur part de responsabilité, tout n’est pas encore gagné. Il faudra que scénaristes et réalisateurs.trices ouvrent à plus de pluralités de personnages pour continuer d’inspirer les nouvelles générations de jeunes-femmes. On attend évidemment plus de final girls LGBT, des héroïnes lebiennes, trans, notamment, bien écrites et en nombre ces prochaines années. Mais aussi de la pluralité dans leurs origines, leurs personnalités, leurs faiblesses, leurs caractéristiques physiques, leurs non désir de maternité, leurs handicapes. Reste en attendant et espérant à se rappeler que derrière ses messages qui semblent simplistes, le cinéma d’horreur est un exutoire et un reflet d’une réalité violente. Et que du Petit Chaperon Rouge à Sienna, le message est toujours le même : on peut toutes affronter le grand méchant loup et le vaincre.


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The Wombats - Trabendo Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
The Wombats – Trabendo Paris 2025 – Crédit photo : Louis Comar

The Wombats est un trio originaire d’Angleterre formé en 2003 qui excelle à la création d’univers indie rock solaire. A ne pas confondre avec le wombat, le mammifère de la famille des marsupiaux fouisseurs. Un des rares animaux à faire des crottes cubiques pour votre culture générale. Si ce fun fact vous semble un peu délirant, il aura au moins ce trait commun avec l’atmosphère musicale, et sûrement scénique de The Wombats, le groupe cette fois. Pour cause, la formation de retour avec le percutant « Oh ! The Ocean » a aussi la particularité d’aller doit au but dans ses composition et de savoir créer une atmosphère tout aussi joviale sur scène qu’en studio. Laissons tomber nos cubes quelques temps pour mieux se focaliser sur la musique intemporelle de nos copains qui sera vous faire dire « Chier, que c’est bon ! ».

Oh ! qu’il fait bon vivre sous le soleil des Wombats

The Wombats - Trabendo Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
The Wombats – Trabendo Paris 2025 – Crédit photo : Louis Comar

C’est le 14 février 2025 que le nouvel opus des mammifères les plus rock de la planète sortait. Jour des amoureux idéal donc pour créer le coup de cœur. Et, l’opération séduction est, il faut le dire, particulièrement efficace. Déjà parce que l’album « Oh! The Ocean » a une beauté inoubliable et une efficacité de composition radicale. Objet conçu pour s’écouter dans son intégralité, il se repose tant sur son approche easy listening que sur sa vocation tubesque. D’une écoute à l’autre, ce nouveau jet, à la production carrée pour ne pas dire cubique (wink wink),  pourrait bien vous faire coller ses refrains aux tripes de façon irrémédiable. Voilà qui est bien mieux que la poche ventrale du wombat d’Austalie, l’animal cette fois. D’ailleurs en concert, le mini ourson d’Australie fait son apparition sous forme géante, représenté par un costume qui vient semer la fête plutôt que de creuser des terriers. Voilà qui est aussi sympathique que la joyeuse troupe de fans qui les suivent mot après mot. Quand on aime, on ne compte pas, Saint-Valentin ou pas.

Notre formation a des guitares qui feraient passer le soleil de Melbourne pour une triste journée hivernale. Les originaires de Liverpool, à l’accent bien tranché savent monter dans les plus hauts sommets. Il y a de ça deux ans, leur « Fix Yourself Not The World » s’offrait la première place au Royaume-Unis, là où ils remplissent des stades. Le sixième né de leur portée musicale compte bien le surpasser en s’offrant un album ambitieux mais surtout très très honnête. C’est ainsi que pour ne pas laisser de place au hasard, on retrouve à la production John Congleton connu pour avoir travaillé avec des pointures en terme d’efficacité : Wallows, le groupe hyper tendance de Dylan Minette mais aussi du projet très pointu qu’est St Vincent. Coloré et riche il l’est et pour autant, il n’hésite pas à questionner. De trouver de la beauté chez les autres et dans le monde à pourquoi on ne s’arrête pas pour sentir les fleurs. Du sérieux et puis du moins, tout est permis et rien n’empêche la catharsis. C’est ce que laisse immédiatement entendre le premier titre de l’opus qui s’appelle quand même « Sorry I’m late I didn’t want to come ». Outre, sa traduction qui fait sourire, le groupe y est très sérieux sur son refrain aussi aérien que planant et qui évoque quelques effluves de Phoenix.  Difficile de ne pas apprécier cette sensation proche de celle qu’on ressent lorsque commence une grosse soirée avec de bons potes. Ce même sentiment qui prend d’assaut lorsque l’on se trouve au concert de la formation qui cette année s’offre une tournée géante. Elle posait d’ailleurs ses valises au Trabendo de Paris pour une soirée aussi chaude qu’un mois de janvier australien. Vous savez les saisons y sont inversées et ce soir là, mars est devenu août pour celles et ceux qui y assistaient.

The Wombats - Trabendo Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
The Wombats – Trabendo Paris 2025 – Crédit photo : Louis Comar

Dans l’œil des Wombats

L’album « Oh ! The Ocean » a pris pour couverture un œil de wombat en gros plan,  dans lequel l’océan se reflète. Ce clin d’œil était à souligner avant de bondir sur le morceau « Blood on the hospital floor » et son introduction aux doux accents synthpop qui frôlent les rythmiques pop-punk. Le courant revient en vogue en ce moment. De Sum 41 qui a fait ses adieux dans des stades, aux albums de Blink 182 remis au goût du jour, les mélodies teen s’offrent une nouvelle jeunesse. The Wombats, sans jamais tomber dans les travers de facilités du genre américain, lui piquent sa capacité à créer des titres aussi joviales qu’efficaces qui démarrent en trombe et posent leur refrain sans flancher. Facile de repenser à la période de ces créations musicales lorsque l’on voit que le morceau suivant porte le nom d’une icône d’une époque révolue : Kate Moss. Au cours des 12 titres qui le composent, le groupe va chercher la précision. Moins teinté d’électro que « This Modern Glitch », leur deuxième album, il offre une plus grande part de liberté à ses guitares. « My Head is not my friends » arrive à parfaire un équilibre doux-amer. « Pourquoi ma tête et mon corps sont-ils toujours déconnectés ? » se demandent les acolytes sur leur communiqué de presse. Si corps et tête se séparent bien souvent, les rythmiques du bassiste Tord Øverland Knudsen et du batteur Dan Haggis, elles s’accordent toujours à la perfection. La preuve en est donnée sur « I love America and she hates me ». Pays qui ne demande qu’à être remis en question avec sa politique actuelle dont on ne saurait dire assez de mal. Matthew Murphy n’aura d’ailleurs aucune retenue à en parler sur scène. L’album se conclut sur un met délicat, un peu de homard et le titre « Lobster ». Il se déguste avec les oreilles et non les doigts cette fois. Plus langoureux que ces prédécesseurs, il laisse instantanément une touche de nostalgie en fin d’écoute. Finir « Oh! The ocean » c’est finalement comme un dernier jour de vacances au bord de l’océan. Heureusement pas besoin de poser de RTT pour y retourner, il suffit d’appuyer sur « PLAY » encore et encore.

The Wombats - Trabendo Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
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Lucky Love - La Cigale Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
Lucky Love – La Cigale Paris 2025 – Crédit photo : Louis Comar

Lucky Love est un personnage à part dans le paysage musical français. Déjà parce que musicalement, il aime à varier les registres, du solaire au plus intense jouant d’un timbre hors normes pour séduire le plus grand nombre. Aussi parce qu’il multiplie les rôles et les capacités : tantôt chanteur, tantôt danseur, transformiste ou encore acteur. Il excelle en tout. Mais surtout parce qu’il redéfinie les normes, bouge les acquis et donne une nouvelle image de ce qu’est être un artiste, être un homme, à succès dans l’Hexagone. Exit, les petites cases, dans lesquelles nous étions enfermé.es depuis bien trop longtemps. Face à un public largement sous le charme, Lucky Love posait ses valises à la Cigale de Paris deux soirs de rang. Au programme de l’amour, en quantité et ça c’est déjà beaucoup de chance !

Lucky Love : beaucoup d’amour

C’est un show entier et parfaitement calibré qui attend ce 25 mars le public de la Cigale de Paris. Ce dernier s’est déplacé en masse. Il Faut dire que Lucky Love a charmé toute la France depuis l’été dernier. Fierté nationale découverte grâce à la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques, Luc Bruyère de son vrai nom, a ému tous.tes celles et ceux qui découvraient ses pouvoirs magiques lors de la cérémonie de la place de la Concorde. Ce soir là, il adaptait son titre « My Masculinity » pour en faire « My Ability ». Hymne évocateur de son handicape, lui qui est né avec un seul bras.

Lucky Love et la masculinité

Sur scène, plus qu’un étendard, qu’un reflet de sa vie, Lucky Love est surtout un très grand artiste. Rareté en concert, notre homme choisit d’ailleurs d’interpréter son single phare dans les premières minutes de son set. Pour parfaire l’instant, il en profite pour inviter « la plus belle des fleurs », Marguerite de la Star Ac à le rejoindre sur scène. Les deux voix s’y allient avec beauté et le jeu de lumière met en valeur leur duo chorégraphié.

Lucky Love - La Cigale Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
Lucky Love – La Cigale Paris 2025 – Crédit photo : Louis Comar

Cette Cigale, date de grande importance pour lui, c’est celle des surprises, de son envie d’en faire un moment unique. Il faut le dire, la très belle salle parisienne est un tournant dans nombre de carrières. Elle est le pas vers la consécration indiscutable qu’est l’Olympia. Au delà du simple concert, dans son écrin de beauté, celui de Lucky Love est aussi le marqueur indéniable d’une nouvelle aire pour la culture en France. Lucky Love, c’est celui qui n’aurait pas eu la même mise en avant, la même chance ne serait-ce qu’une quinzaine d’années plus tôt. Et qu’il était temps de mettre des coups de pieds dans l’archétype figé de la figure de l’artiste. Celui qui devait transmettre les émotions et pourtant auquel il était si difficile de s’identifier. Le talent ne suffisait pas, il fallait être dans des « normes » moroses, pré-établies. Notre artiste, ce soir, permet aux personnes LGBTQ+ de trouver un autre miroir sur scène, il permet de donner de la visibilité aux personnes en situation de handicap. Et enfin, il interroge sur cette fameuse masculinité. Qu’est-elle supposée être ? Pourquoi doit-elle obliger à des attitudes ? Des critères imposés ? Quand la Cigale reprend un tel hymne en chœur, les frissons sont forcément légion. En donnant la chair de poule à son audimat, il interroge sur ce qu’il en est de sa voix. Son droit d’expression. Et cette base posée permettra au reste du show de n’avoir plus recours qu’au grandiose.

Lucky Love : de grandes habilités

Et ce soir, avec un charme indomptable et fascinant, il apporte nombre de réponses à ces questions, et les clame haut et fort. Parfois pour parler de sujets difficiles et d’immense importance comme l’aide et l’acceptation des personnes atteintes du VIH. Souvent, les premier pas au cabaret qui a vu pousser notre garçon chanceux, prennent le pas sur sa façon de s’exprimer. Théâtral, grandiose, showman à part, il nous parle d’amour. De beaucoup d’amour, de ceux heureux et déçus. L’amour nous conte-il, il l’a attendu, mais il n’est pas venu. « A un moment donné, je me suis dit, il ne va pas me faire ça quand même! » s’amuse-t-il. Toujours à la façon d’un cabaret, il prend à partie les premiers rangs, taquine une jeune femme qui le regarde de près.

Lucky Love - La Cigale Paris 2025 - Crédit photo : Louis Comar
Lucky Love – La Cigale Paris 2025 – Crédit photo : Louis Comar

Du rire au larmes, le public n’a pas le temps de reprendre son souffle. La masculinité en 2025, ne serait-elle pas empathique et sincère ?  Enfin proche des autres. Les dés sont jetés en matière de sensibilité. Dans son costume, notre hôte d’une sincérité troublante s’ose à se se raconter. « Jveux d’la tendresse » est l’un des temps fort de ce beau moment de live. Mais la surprise de taille vient lorsque Lucky Love annonce que l’un de ses mentors à qui il doit son succès va le rejoindre sur scène. Le suspens dure quelques minutes pour laisser finalement apparaitre Gaëtan Roussel ( également meneur de Louise Attaque). Les deux livrent un duo à la complicité évidente sur « Le plus jeune sur la Terre », dernier sommet atteint avant de conclure le spectacle. Alors que les deniers morceaux sont entamés, Lucky Love donne une dernière fois de la voix, son timbre à part, véritable renouveau et bouffée d’air frais pour la scène française qui commençait à tourner autours de ses acquis. De « I don’t care if it burns » titre éponyme de son album à l’immense élégance pop jusqu’au très joyeux « Happier on my own », la promenade aura été belle. L’avenir, sous le regard de Lucky Love, il pourrait bien être radicalement différent. Et ça, ça serait une vraie chance.


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Lady Gaga est de retour ! Le très attendu MAYHEM a enfin été dévoilé le 14 mars, avec énormément d’attentes.  Artiste monumentale, les années ont fait d’elle une icône, sorte d’objet collectivement aimé, porte-parole autant que chanteuse. La célébrité aura tendu à Stefani Germanotta un miroir déformant, la personne a été oubliée au profit de la déesse, de la Mother Lady Gaga. Il fallait, après 17 années de succès, s’interroger. Déjà sur ce qui se trouvait face au miroir mais aussi sur ce qu’était l’essence même de sa musique. Sûrement, se retrouver. Voilà donc que la musicienne publie 14 titres, profondément pop, entre hommage à peine voilé à ceux et celles qui habitent ce courant musical et retour sur ses propres prouesses et débuts. Le chaos de MAYHEM donne naissance à un opus pour plaire aux fans de la première heure mais aussi pour redonner une véritable définition de ce qu’a toujours été la chanteuse. Elle face à elle-même.

lady gaga mayhemGaga un jour, Gaga toujours ?

Quand on lit son communiqué de presse officiel, le moins que l’on puisse dire c’est qu’on y est plongé des les chiffres. Giga star pour public gaga, la chanteuse s’offre tous les tops, tous les sommets, tous les nombres qui donnent le tournis. « Die With A Smile », en duo avec Bruno Mars, qu’on retrouve en fin de galette a par exemple remporté un GRAMMY Awards 2025 dans la catégorie de la Meilleure Performance Pop en Duo/Groupe. Mais on peut aussi lire que  « Sur Spotify, le single a passé plus de 100 jours consécutifs en première position du classement Monde ». Des prouesses encore et toujours. Pourtant au delà des chiffres c’est un véritable retour aux sources percutant que s’offre Lady Gaga. Et pas seulement de sa pop à elle comme elle l’explique. MAYHEM c’est surtout un immense tour de piste de la pop qui a marqué génération après génération. Mais aussi d’une redéfinition de ce que c’est qu’est Lady Gaga et de son essence même. A ses débuts, la chanteuse se revendiquait de l’âme de Madonna. Et tout était allé très vite. Sa capacité musicale allant de pair avec une gestion de son image impeccable. A tel point, qu’à la sortie de The Fame, une prestigieuse faculté américaine en faisait un sujet d’étude et de cours. Depuis la phénomène Gaga s’est éparpillé. Changeant ses gammes, faisant ses preuves au cinéma et dans la série « American Horror Story ». Un premier rôle qui lui allait bien si comme à son habitude Ryan Murphy n’était pas parti dans tous les sens en fin de saison.  Gaga extravagante s’était donc assagie, se donnant une image moins exubérante. Au placard la robe en viande … et puis finalement, l’envie de retrouver ce qui a fait ses débuts s’est imposé. Et nous voilà donc le 14 mars 2025, avec un objet reflet d’un temps passé qui ne demande qu’à pointer le bout de son nez. Preuve de son besoin de retrouver la recette de ses premiers succès, Lady Gaga nous y offre même une cinquième piste baptisée « Vanish Into you » dont la mélodie sonne comme une relecture du titre culte « Bad Romance ». A tel point qu’on pourrait presque fredonner les paroles de l’original en écoutant le nouveau.

Lady Gaga - Abracadabra (Official Music Video)

Un album en miroir brisé

La thématique du miroir brisé, c’est elle qui peuple la promo de l’album. Elle prend tout la place sur son imagerie. Une double Gaga comme on la retrouve dans le clip de « Disease ». La chanteuse lutte contre ses démons autant qu’elle les embrasse. S’était-elle perdue pour mieux se retrouver ? Les déambulations de « Joanne » ou encore de « Chromatica » avaient en effet laissé son public sur une sorte de faim. Certes l’amour pour une musicienne de sa trempe promet d’être suivie quoi qu’il arrive.  Il oblige à défendre toute composition et autorise toute déambulation musicale. Mais l’esprit de « Born this way » venait à manquer. D’ailleurs ce serait quoi finalement l’âme de la musique de Lady Gaga ? Déjà une voix forte. De ces chanteuses que seule l’Amérique peut nous offrir. Celle-là aura particulièrement sa part sur le titre « Blade of Grass », agréable ballade qui aurait aussi pu trouver sa place sur la la B.O de « A Star is born » en 2018. Mais aussi, une grande capacité a assimiler ce qu’est et ce qu’a été la pop. Pour mieux lui donner des nouveaux codes, la chanteuse les avale et les recrache avec sa propre touche. Voilà donc que « Zombieboy » sonne avec évidence comme le « Hollaback Girl » de Gwen Stephanie.  Tout comme le morceau de la leadeuse de No Doubt, la force de Stefani Germanotta c’est aussi de savoir jouer avec les rythmiques. Celles entêtantes d’ « Abracadabra » constituent un tour de force dès le lancement de ce nouveau jet. Mettant directement les bases pour rappeler qui est la « Mother » ultime.  Ce statut de Mother Monster, elle le doit surtout grâce à sa communauté et autant d’amour que de défense (essentielle)  des droits LGBTQ+.   Ainsi la musicienne ne perd jamais une occasion de parler de ce sujets, de sensibiliser, de militer. Et la communauté lui rend en masse l’amour qu’elle distribue.

« Born this way » en était d’ailleurs l’étendard premier . Le titre du morceau en lui-même, limpide. Le temps n’a fait que consolider la chanteuse dans ce statut d’icône et de porte-parole. Elle l’est aujourd’hui pour plusieurs générations, le bien qu’elle a fait par le passé en terme d’acceptation a fleuri comme de jolis bourgeons, faisant d’elle la reine couronnée d’une nature sublime. Elle fait d’ailleurs partie de ces artistes qui lient les générations, intemporelle, indétrônable, comme elle l’a toujours espéré. Aux Grammys Awards, alors qu’elle recevait le prix du meilleur duo pop pour « Die with a Smile », elle en profitait pour mettre de nouveau en avant ses engagements. Elle rappelait notamment que « Les personnes trans méritent d’être aimées. La communauté queer a besoin d’être élevée. » avant d’ajouter que « la musique c’est l’amour ». Cet amour porte depuis toujours la chanteuse, son discours n’a jamais changé, jamais pris une ride bien au contraire, il s’amplifie avec les années qui passent. Aujourd’hui d’ailleurs, il fait encore plus sens avec un Donald Trump, tout particulièrement virulent et dangereux au pouvoir et dont les propos et actions transphobes et LGBTphobe sont terrorisantes. Les artistes américain.es prennent en 2025 une responsabilité décuplée et il est important qu’elle en soit.

Lady Gaga Mayhem DeluxeThe Fame Mother

Le reflet de Lady Gaga passe par son immense succès. Devenue bien commun, la musicienne n’hésite pas à parler de succès dans un titre particulièrement catchy « Perfect celebrity ». Est-elle pour autant la poupée d’un public d’adorateurs.trices comme elle l’évoque dans ses paroles ?  Une bête à cash ? Pas forcément. Elle prouve être une artiste entière au moins qui sait passer en revue les sonorités qui l’ont bercée et accompagnée. Parmi eux, on reconnait l’âme de Prince, de Michael Jackson mais aussi de David Bowie (et son titre « I’m affraid of Americans »)  sur  le morceau « Killah ». Elle s’offre également une percée pop aussi mémorable qu’avec « Hey hey nothing else I can say » sur « How bad do you want me ». Entre références à son propre univers, passage en revue de ses meilleurs titres et introduction puissante sur ce qui restera après plusieurs écoutes, le morceau le plus fort de l’album :  » Disease », la chanteuse aura réussi sans nul doute à revenir plus forte que jamais. Gaga face à elle-même est aujourd’hui indétrônable et sa force est toujours aussi tapageuse. On en attendait pas moins de son septième album studio en solo. Reste à attendre de la voir le défendre en live. Nul doute qu’elle sera à même de lui donner cette âme entre grotesque et beauté. Tout en rappelant au monde, s’il avait oublié, qu’elle est aussi celle qui jouait du piano avec ses pieds autant que ses doigts quand l’OVNI Gaga débarquait à la conquête de notre planète chaotique. Et ça c’était une très belle introduction à une légende qui mérite de perdurer !

Lady Gaga - Disease (Official Lyric Video) clip

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