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Meilleur festival du monde, jOUR 2.

Sans être totalement remis de la première soirée, l’heure de la suite a déjà sonné. Le temps de poster notre premier report (à retrouver ici) et nous voilà déjà repartis. Un risque de pluie menace de rendre la soirée un peu plus difficile que la veille. Nous optons pour la carte déni. Finalement, pas une goutte ne tombera durant la soirée. Merci Bretagne adorée. En terme de programmation, ça n’est pas notre journée préféré, non pas que les artistes prévus ne réveillent aucune excitation en nous (bien au contraire) mais simplement du fait que rien ne peut rivaliser sur le papier avec les deux autres journées mastodontes (nous ne sommes pas prêts pour la soirée de samedi). Nous y allons tout de même avec grande joie. Porridge Radio, Baxter Dury, Kevin Morby, Snapped Ankles, ça ne se loupe pour aucun prétexte.

Beaucoup plus que la veille, cette soirée du vendredi sera fraiche. Pas de pluie mais du froid. Deal accepted. On a pensé aux vestes et aux sweats. Un festivalier prévoyant est un bon festivalier. Cette vague de froid sur le site nous a évidemment envie de nous réchauffer. Quoi de mieux pour cela qu’une foule sardines et une musique radiateur (et pas ascenseur) ? Voyons quels artistes ont le plus excellé à ce niveau. Du moins chaud vers le plus chaud, soirée du vendredi, c’est parti.

La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre

CHALEUR : Un peu

HONEYGLAZE est le premier groupe à ouvrir la journée sur la scène des remparts. Ca n’est pas le job le plus facile, on en est conscient. Il y a encore peu de monde sur le site à 18h30. Si nous le plaçons à ce niveau, dans la team qui a le moins réchauffé, c’est qu’ils ont joué à une heure où le soleil était encore là. Comment réchauffer une foule qui a déjà chaud ? On les remercie pour cette attention, de ne pas nous avoir embrasés directement. Au-delà de l’heure de passage, HONEYGLAZE ne délivre pas la musique la plus chaleureuse qui soit. Ca n’est pas un reproche, puisque nous avons plutôt apprécié leur concert. Suite à un petit problème technique – une guitare dont le son ne sortait pas – de quoi faire bien monter la pression pour les artistes, le trio londonien a assuré une ouverture tout en douceur et en légèreté. Ils viennent de sortir leur tout premier album. Leur pop/rock rêveuse est ici déployée avec maitrise et sureté, bien qu’un peu trop dans la retenue. Les morceaux sont tout de même au rendez-vous, et permettent de ne jamais perdre le fil. Timide ouverture, mais ouverture réussie.

Ca n’est pas la première fois que l’on parle de PORRIDGE RADIO ici. Suite à leur concert parisien à la Boule Noire cette année, nous avions fait un portrait de ce groupe qui ne fait que monter, suite à un deuxième album monstrueux en 2020, et un troisième album un peu en deçà mais toujours à la pointe sorti il y a quelques semaines. C’était là l’occasion de le présenter au public français. Les filles de Brighton jouaient à 20h10 sur la scène des remparts. Le monde est arrivé, les festivaliers se pressent pour les voir. Il n’y a pas foule immense, mais on sent tout de même que PORRIDGE RADIO suscite curiosité. Le concert a un peu de mal à démarrer, les morceaux choisis ne sont pas forcément les plus entrainants. Il faut dire que le dernier album détient moins de chansons puissantes comme le précédent, même si une évidence s’en dégage toujours. La voix de la chanteuse Dana Margolin ne semble pas porter assez, alors même qu’elle est toute l’identité du groupe. C’est très bien, mais ça ne décolle pas. Il faudra attendre une petite demi-heure pour que les choses s’intensifient. Elle est de plus en plus géniale. Son attitude captive les regards, entre le calme et la tempête. Les morceaux à boucle ultra répétitives, leur marque de fabrique, pointent le bout de leur nez vers la fin du show, et montrent à quel point l’incarnation est puissante : « Birthday Party », « Long »… Sur cette dernière, les cris du public redoublent, après un passage tranchant à la guitare électrique que Dana Margolin sait si bien faire hurler. C’est le cri d’une jeunesse qui a beaucoup à exprimer. Quand vient « Sweet », leur plus grand morceau, nous voilà pleinement conquis. La route est toute tracée. Pourquoi se retrouvent-elles dans la team des moins chauds alors ? Car malgré tout, leur musique dégage quelque chose de brut, de tourmenté, qui s’associe plus difficilement avec un sentiment de réconfort et de chaleur. Mais aussi parce qu’à cette heure-là, le froid n’est pas encore pleinement arrivé.

CHALEUR : BEAUCOUP

La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre

Bond dans le temps. Il est 1h20 et LES LIMINANAS s’apprêtent à clôturer la soirée. C’est un duo catalan qui fait beaucoup entendre parler d’eux sur la scène française depuis plusieurs années. Rock psychédélique aux nombreuses facettes, difficilement définissable. Il y a comme un mystère qui plane autour du groupe. A cette heure-là, beaucoup ont déjà quitté le Fort. L’heure de pointe est entre 21h et 00h. Il reste quand même du monde devant la scène du Fort. A cette heure-là, il fait aussi très froid, donc tâche encore plus difficile de nous réchauffer. Une installation vidéo est placée au fond de la scène. Elle projette des extraits de films, en rapport avec le dernier album du groupe « De Pelicula » en collaboration avec Laurent Garnier sorti en 2021.

Dès leur arrivée sur scène, à six (il n’y a pas Laurent Garnier), ils instaurent une certaine ambiance hypnotique. Le début est instrumental, et puissant. Tout de suite, nous sommes happés par ces guitares qui grondent. C’est envoûtant. Combinés aux images qui défilent derrière, la musique prend de l’ampleur. Ca fait son effet. Le son est puissant, on commence à la connaître cette scène qui sonne terriblement. Vient ensuite des morceaux chantés. Nous aimons moins. On perd la fibre hypnotique, et le concert tombe dans quelque chose de plus commun, un rock connu. Ca n’est pas déplaisant, mais ça n’arrivera pas à vaincre le froid qui terrasse le Fort. Le groupe jouera 1h15, jusqu’à 2h25.

Juste avant eux, sur la scène des remparts, SNAPPED ANKLES a livré un concert de 40 minutes d’une forte intensité. On aime beaucoup ce qu’ils font en studio depuis leur premier album en 2017. Leur dernier en date nous a un peu moins convaincu dans le genre mais reste quand même un bon cru. Nous les attendions avec impatience sur le festival, eux chez qui le rythme, les sonorités électro et le grain de folie trouvent un parfait mélange. Sur scène, ils sont vêtus bizarrement, recouverts de matière végétale. Le genre de costume qui peut faire peur aux enfants mais qui, lorsqu’on est adultes, tombent légèrement dans le guignolesque. C’est l’image qu’ils renvoient, comme des gentils extraterrestres. Leur musique est en tout cas captivante et frénétique. Sur scène, elle gagne un aspect plus expérimentale. C’est à peine si l’on a reconnu les morceaux présents sur les albums, que l’on connait pourtant bien. S’en extirpe des rythmes mélodiques servant à créer une pièce musicale géante qui ne s’arrête jamais. Le public est présent, répond par la danse. Il y a beaucoup de jeunes. Les rythmes sont envoûtants, appuyés par une batterie percutante. Pari réussi pour un groupe qui proclame que le rythme est leur business. Ils nous ont convaincu sur ce point. Les sonorités électro, quant à elles, auraient gagnées à être encore plus claires, impactantes et directes. A force, tout est un peu sur le même plan. Dommage. On comprend pourquoi ça ne dure que 40 minutes. C’est suffisant. On regrette de ne pas avoir entendu « Johnny Guitar Calling Gosta Berling », leur chanson la plus déjantée. Le froid s’est dissipé avec la danse, mais SNAPPED ANKLES n’aura pas réussi à l’évacuer complètement. On enchaine.

Sur la même scène, une heure plus tôt, nous avons pu assister au concert de DIIV. La nuage de chaleur créé par ce rock aux sonorités shoegaze nous a aidé à affronter le froid. Il y a foule pour le groupe. Ils jouent à l’heure la plus convoitée, à défaut d’être sur la grande scène, malgré leur 10 ans d’expérience. Ils sont attendus et acclamés. Capuche sur la tête, leur rock respirent l’adolescence. Leur musique sonne bien, et prend bientôt tout l’espace. Elle porte loin.  Les guitares prennent de l’ampleur, jusqu’au final de haute volée. A leur départ, une masse reste devant la scène à les applaudir encore et encore. Ils faisaient parti des vedettes de la soirée. Mais le froid persiste encore, qui pourra donc nous réchauffer comme il se doit ?

 

CHALEUR : PASSIONNÉMENT

Attention, nous passons tout à coup un cran au-dessus. Il est 21h pile sur la scène du Fort. Durant 1h10, elle s’apprête à accueillir un maitre dans son genre : KEVIN MORBY. Des roses sont placées sur la scène, ainsi qu’une grande banderole « This is a Photograph », le titre de son dernier album sorti cette année. C’est celui-ci qu’il va interpréter majoritairement. Vêtu d’un magnifique habit doré, il entre sur scène en compagnie de six compères. Nous voilà prévenus. Ils débutent avec la chanson éponyme du dernier album, que nous adorons particulièrement. Superbe entrée qui donne le ton : ça sera ample, beau, efficace, énergique. Et surtout, ça sonnera bien. Très très bien. La voix de Morby est d’une telle intensité qu’il ne pourrait faire que ça. A vrai dire non, puisque les arrangements derrière sont terriblement efficaces. Il serait bête de nous en priver. Le tout est d’une beauté fatale, toujours juste, toujours pointilleux, toujours grand. Les morceaux du dernier album défilent : le sublime « Bittersweet, TN », le rythmé « Rock Bottom », le puissant « A Random Act of Kindness ». Jamais planplan, le rock/folk de KEVIN MORBY sait viser en plein dans le mille, le tout avec classe et élégance. On sent une tension vive dans ces interprétations garnies de chaleur. On se sent d’un seul coup réchauffé, réconforté… Lorsqu’il assouplit un peu le rythme pour laisser place à la beauté de sa voix, Morby ne manque pas de nous faire sortir de notre songe en cours avec les morceaux suivants, sur lesquels l’irrésistible saxophone nous transperce de plein fouet. Ce qu’il joue va piocher un peu partout au niveau mélodique : on entend à la fois du Oasis, du Nirvana, du Velvet, du Bob Dylan, mais sans cesse adaptés à un style qui lui est propre. KEVIN MORBY est un passeur au grand talent. On entend dans sa musique toutes les admirations qui l’anime. Ses concerts sont d’une rare vitalité. Bravo à lui de nous avoir tant réchauffés, d’autant plus avec ce final resplendissant qui restera gravé : la longue progression de « Harlem River » se terminant dans un feu d’artifice d’électricité et de saxophorgasme.

Bon, il faut dire que Kevin Morby a été aidé pour vaincre le froid par ses prédécesseurs de la scène du Fort : LOS BITCHOS, à 19h15. Paradoxalement, c’est après leur concert que le soleil a disparu et que le frais a commencé à arriver. Pourtant, leur musique transpire justement le soleil. Complètement instrumentale, elle fait appel à des guitares aux sonorités sud-américaines et à une forte base rythmique. Le charme fait vite effet. Elles sont quatre filles sur scène, plus un mec, et toutes communiquent une joie incarnée dans leur musique. Même s’il commence à faire froid, comment peut-on le sentir avec cette musique tout droit sortie des plages ? Taillée pour égayer les humeurs, elle n’est pourtant pas si simplette qu’elle peut le paraitre. Leur premier album sorti cette année est d’ailleurs produit par Alex Kapranos de Franz Ferdinand. La recette est bien trouvée, et sur des morceaux comme « The Link is About to Die », elle fonctionne parfaitement. Le morceau en live balaye tout sur son passage, tant la mélodie est bien trouvée. On avait eu la même sensation sur la version studio. Mais après lui, la recette s’essouffle un peu et atteint ses limites. Sur un album et un concert relativement court, c’est oui. Mais la suite ? Bon, tant que le froid ne nous atteint pas, c’est déjà ça.

Passons au grand gagnant de la soirée du vendredi. Celui qui nous a le plus réchauffé. Et haut la main. Mesdames et messieurs, j’appelle sur la scène du Fort BAXTER DURY. Il est 23h10. L’heure des grands. L’heure de Ty Segall demain (que l’on a hâte !). L’heure de Fontaines hier (on rappelle à quel point c’était immense ?). Bon, Baxter. Sacré personnage que nous avions interviewé (à retrouver ici) il y a deux ans à l’occasion de la sortie de son dernier album « The Night Chancers ». Depuis une vingtaine d’années, le britannique, fils de Ian Dury, s’est peu à peu construit un personnage de dandy désinvolte et provocateur qui lui colle si bien à la peau. Hier fut une démonstration de force. BAXTER DURY occupe la scène comme personne d’autre. S’il peut énerver certains, force est de reconnaitre qu’il dégage un sentiment de confiance inégalé. Il se tortille avec classe, se déshabille (juste une veste) et se rhabille avec élégance, fait des gestes loufoques qui prennent toujours sens dans sa démarche. Il aime et déteste tout le monde. Mais nous devons absolument l’aimer selon lui. Ce jeu d’ego magnifiquement interprété repose avant tout sur une musique diablement efficace. Il y a une grandeur qui s’en dégage, comme si l’artiste, avec ses morceaux faussement simples, venait montrer qu’il ne suffit de pas grand-chose pour atteindre des sommets. Le son est superbe, comme toujours sur cette scène, mais encore plus cette fois-ci. Tout est carré, dans les règles de l’art. Le concert est émouvant, cela dû avant tout à la qualité des morceaux et au choix de ces derniers : de « It’s a pleasure » à « Slumloard » en passant par la sublime « Prince of Tears », BAXTER DURY trace un chemin rempli de beauté, malgré la froideur qu’il dégage. On sait o combien il apprécie convier des voix féminines sur ses morceaux. Une chanteuse, Madeleine Hart, l’accompagne donc bien évidemment. Avec elle, ils forment un duo parfait. Elle reste statique, mais obnubile par sa présence et la justesse de sa voix. Le contraste est saisissant, Baxter persévérant dans son chant parlé manière Gainsbourg pour lequel on craque tant. Le micro bien réglé, c’est d’autant plus percutant. La partie instrumentale derrière assure également. Sur une base rock, des sonorités électro se glissent. Et quand celles-ci prennent le dessus, ça finit en apothéose. Bravo Baxter. La chaleur est pleine. Tu as gagné. Nous t’adorons comme tu le voulais. Hâte de demain, pour la plus grosse journée du festival. Arriveront-ils à te détrôner ?


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