Les irlandais de the Murder Capital donnent une suite à leur premier album que nous avions tant aimé en 2019, et confirment leur réputation de l’époque de groupe plus que prometteur. Avec Gigi’s Recovery, ce nouvel opus, leur rock se fait davantage à retardement, dans une approche plus fragile et poétique.
Notre interview du groupe à l’époque de la sortie de When I Have Fears (à retrouver ici), leur premier album explosif, tornade post-punk des plus efficaces, nous avait fait réaliser à quel point Murder Capital faisait partie de ces formations importantes de la nouvelle scène du rock indé actuel. Du même pays que leurs compères Fontaines DC qui, entre temps, ont tout ravagé en l’espace de trois albums, le groupe mené par James McGovern a plutôt fait le choix de la patience, pour mieux se réinventer (non pas que Fontaines ne se soit pas réinventé sur 3 albums). Après un premier album centré sur l’Irlande, rempli de compositions et de sonorités obscures, signe d’une jeunesse pleine de colère mais aussi d’angoisses, the Murder Capital opte cette fois-ci pour une œuvre à la sensibilité diffuse, dépourvue de ses anciens filtres.
Petit à petit…
Existence fading… Disparition de l’existence… C’est ainsi que débute Gigi’s Recovery, introduction tout en lenteur et minimalisme. Comme première pierre à l’édifice, elle donne un ton grave rapidement élevé et enjolivé par les pierres suivantes : « Crying » est une sublime montée en puissance tout en raffinement, parfaite dégustation et ouverture vers les ouragans « Return my Head » et « Ethel », dévoilés en amont de la sortie de l’album. Ces deux là constituent ce que le groupe sait faire de mieux, principalement le second, subtil mélange de beauté intrinsèque à la composition et de puissance délivrée par l’instrumentation. Résultat : une chanson éperdument classe, violente et poétique.
James McGovern : Artisan maitre vocal
Si les morceaux ont cette particularité de si bien faire cohabiter ensemble une poésie tout en latence et évolution avec l’esprit post-punk, c’est en grande partie grâce à James McGovern qui parvient à être magnifiquement juste partout où il dépose sa voix. Il est le guide des morceaux, leur tronc insécable. La danse d’une extrême souplesse qu’il mène tout du long de l’album est tantôt fragile, tantôt énervée, tout le temps au bord du gouffre émotionnel. Par cette voix d’une élégance absolue, il dicte le tempo, révèle la poésie des compositions, nous fait vivre ses humeurs et états d’âmes. Sur « the Lie Becomes the Self » par exemple, pour ne citer qu’elle, le mouvement est principalement vocal, nous entrainant dans une longue escapade soutenue, sans décollage assuré, mais avec la certitude d’y trouver une certaine élévation.
LA Force d’une fragilité
Il faudra attendre le morceau suivant, « A thousand Lives », pour être pleinement secoué et retourné. La teneur des compositions font état d’une grande fragilité, au sein même de la construction des morceaux. C’est parfois quelque peu maladroit, ou encore étrangement inattendu, toujours au service d’une agréable délicatesse. « the Stars Will Leave their Stage » constitue certainement le sommet de ce subtil entre deux, dans son mouvement obsédant produit avec on ne sait trop quelles sonorités, sur lequel le chanteur, dans un ton grave tant maitrisé, s’adonne au décrochage des étoiles. Un morceau OVNI grandement apprécié.
Et puis enfin, il y a cette fin sublime avec le morceau éponyme d’une longueur de près de 6 minutes. « Gigi’s Recovery » prend l’allure d’une longue tirade sacrificielle, au romantisme poignant.
The Murder Capital relève donc haut la main le défi du deuxième album. Les trois années d’attente leur ont permis d’évoluer avant de pouvoir proposer de nouvelles teintes à leur rock torturé, cette fois-ci grandi par une sublime poésie latente.
Artiste de plus en plus remarqué au sein de la scène française depuis 2016, Adam Naas sort aujourd’hui son deuxième album, Goldie and the Kiss of Andromeda, une…
Le Bataclan accueillait dimanche 11 décembre dernier la folie furieuse Viagra Boys qui, depuis 2017 et son premier album Street Worms, a pris d’assaut le monde du rock…
Sports team décoiffe. C’est le moins qu’on puisse dire. Six jeunes anglais rencontrés à l’université qui n’ont pas froid aux yeux depuis leur petite explosion dans le monde du rock indé en pleine période de pandémie. Deep Down Happy, leur premier album en 2020, en est pour beaucoup. Et c’est maintenant au tour du petit frère à la croissance impressionnante de prendre la lumière. The Gulp est sorti cette année. Et cela presque parait étonnant à dire tant il sonne déjà comme un bon vieux vinyle réconfortant de notre collection. Avec passage bouillant à la Boule Noire le 21 novembre dernier, le groupe a confirmé qu’il était l’un des plus excitants du moment. Alors attachez bien vos sangles, et voyons ce que Sports team a vraiment dans le ventre, et dans les jambes.
Démarrage sur les chapeaux de roues
Bon, il est fort probable que vous vous en foutiez des prénoms de tous les membres, mais par respect pour eux, on va quand même vous les donner. Sports team est donc fait de six mecs (putain les gars faites un effort, merde) : Alex Rice, Oli Dewdney, Al Greenwood, Rob Knaggs, Ben Mack et Henry Young. Leur début n’a rien de plus que d’autres groupes de leur genre, juste des potes de fac qui veulent faire du rock. Et y a-t-il une plus belle ambition dans la vie que celle-ci ? Non, surtout quand ça prend. Et pour Sports team, après un premier EP en 2019, c’est directement avec leur premier album en 2020 que l’engouement autour d’eux commence à monter. Il faut bien dire que Deep Down Happy est un concentré de rock geyser, celui qui vous cogne sans vergogne jusqu’à ce que vos muscles vous prient de vous remettre au sport. Un qui se pratique en équipe évidemment. Ce premier album est donc un excellent shooter, mais n’appelle pas tellement à l’addiction. Il se déguste modérément. Surement un peu lourd sur la longueur. A noter tout de même qu’il est parvenu à atteindre la deuxième place du UK albums charts et que le groupe a aussi été sélectionné pour le Mercury Prize grâce à lui. Un franc succès donc pour une entrée en matière. Mais attendez un peu la suite.
Gulp ! : LA Consécration
C’est une dynamite qui approche… Sur un visuel façon cartoon. Dessus, on voit apparaitre en gros Gulp !, en référence à l’image de Coyotte suspendu en l’air au-dessus de la falaise après avoir essayé d’attraper Bip Bip : « Gulp! est le moment où vous espérez rester suspendu » explique un des membres. Un saut dans le vide. La fameuse épreuve tant redoutée du deuxième album. Le voilà pour Sports team, composé durant la période du confinement et révélé en septembre dernier après un léger report de quelques semaines. Au niveau de leur jeune réputation ? Et comment ! Le groupe grimpe ici d’un cran. Gulp ! est l’album ultime d’un rock intelligemment divertissant. Le dosage est parfait, la recette menée avec excellence jusqu’au bout. Si bien que les thèmes sombres qu’il aborde, en lien avec le climat de l’époque, se retrouvent noyés sous puissante vague d’éclate musicale qui balaie tout sur son passage. « L’amusement est la clé de notre album implacablement sombre sur la mort ».
Mais sous ses airs de rock facile et déconnant, Sports team cache un véritable talent de composition. Qu’est-ce qui expliquerait sinon que l’on soit si trépignants à l’écoute de morceaux d’ores et déjà considérés comme des tubes ? Mention spéciale aux géniaux « the Drop » et « RU Entertainment ». Plus efficaces que ça n’existe certainement pas. Il suffit de les entendre en live, avec ce chanteur follement charismatique, qui nous rappelle la dégaine de celui de Geese, un jeune groupe de rock américain prometteur. Sur scène, les morceaux de ce deuxième album prennent encore une autre une dimension : l’urgence d’un rock qui a besoin de gronder dans l’éclate et la bonne humeur.
Pour le groupe, c’est une partie de leur identité à laquelle ils sont solidement attachés : pouvoir prouver que le rock est en mesure être amusant sans perdre de sa sincérité. The Gulp!en est la représentation parfaite, et surtout utile. Dans la même veine que d’autres groupes de l’ère actuelle – on pense notamment à Yard Act ou Wet Leg – dont la musique reflète quelque chose de plus léger que ce qu’on a l’habitude de voir dans le rock indé, sans perdre pour autant de sa rigueur, la musique de Sports team est faite pour les amoureux des riffs et des mélodies qui rendent heureux comme un gosse.
En plein milieu de cette magnifique période d’effervescence de concerts qui n’est pas prête de s’essouffler, c’est un groupe cultes de vieux dinosaures qui était de passage sur…
Les concerts de ce dernier quart de l’année 2022 nous appâtent progressivement. Septembre a commencé fort avec les australiens de Tropical Fuck Storm comme appât, et maintenant qu’on y est plongés, il continue de dévoiler l’ensemble de son jeu. Même s’il est difficile pour lui de se confronter à ses voisins encore en gestation octobre et novembre, pour le moins chauds bouillants vu les coups de pieds qu’ils assènent, septembre a ses ressources. L’une d’elle a été révélée mardi dernier au Trianon de Paris. Et pas n’importe laquelle, puisqu’il s’agit du chanteur américain Kurt Vile.
Il est le co-fondateur de The War on drugs, groupe qu’il a quitté en 2009 pour se lancer en solo. Six albums forment aujourd’hui sa méticuleuse et agile carrière, dont un enregistré en 2015 avec l’australienne désormais ultra reconnue Courtney Barnett. Cette dernière se produira d’ailleurs en concert début novembre prochain dans la même salle.
Le dernier album en date de Kurt Vile, (watch my moves), est sorti cette année même. Un nouvel opus pas meilleur que les autres, d’ailleurs toujours aussi à rallonge avec de longs morceaux (l’ensemble fait plus d’une heure), mais qui a la qualité de compléter fidèlement l’œuvre du musicien. On retrouve ce qu’on aime tant chez lui : d’abord sa petite voix familière, ensuite sa patte de composition, entre simplicité, tradition et originalité. Les deux agissent comme une pommade.
Une salle PARFAITEMENt adaptée
Venu donc présenter ce nouvel album avec son groupe The Violators, Kurt Vile donnait ce soir-là le dernier concert européen de sa tournée. La salle du Trianon, manifestement complète, était de convenance idéale de par sa taille moyenne, sa belle architecture et sa très bonne acoustique. Nous imaginions difficilement la musique de Kurt Vile, toute en classe et raffinement, sonner meilleure quelque part ailleurs.
UN DéBUT DE CONCERT onirique
Le début du concert est tout de suite prenant, après une entrée sur scène chaleureusement applaudie. On se demandait à quel point ce genre d’artiste parvenait à fédérer autour de leur musique. Nul doute désormais sur le fait que Kurt Vile est très respecté dans le milieu et compte de nombreux fans aguerris. « Palace of OKV Reverse », morceau de son dernier album, se charge d’introduire le set. Tout est déjà en place. Il y a dans cette chanson un sublime parfum onirique, grâce à un riff dont seul le chanteur a la recette. Comme en apesanteur, quelque chose d’à la fois lent, doux et soutenu, « Palace of OKV Reverse » déploie déjà l’immense talent de son interprète. Kurt Vile envoute par sa voix et sa manière d’être en symbiose avec ses sons aériens. L’humeur est paisible, et loin de tout ennui.
rytme et Pulsation
La section rythmique s’impose petit à petit, et donne une pulsation bienvenue. Le concert bat très rapidement son plein. Sur « Check Baby », issu de l’album précédent Bottle It In, l’ensemble donne un résultat captivant. C’est électrique, à la fois tendre et tendu. Si vous pensiez que la musique de Kurt Vile était peut-être trop molle pour être correctement reçue en live, alors vous vous méprenez. Sur scène, encore plus qu’en studio, cette musique à la souplesse manifeste est transportée par une belle dynamique. Les morceaux sont habités. La force de composition est certes un atout majeur. Celle d’interprétation les emmène encore ailleurs.
Ce seront principalement les morceaux des deux derniers albums en date qui seront entendus ce soir-là. De temps à autre, Kurt Vile s’équipe de sa guitare acoustique, et seul sur scène, il dénude ses compositions. Le son n’est pas lisse. On dirait presque une guitare électrique. Par-dessus ce son qui nous bouscule, sa voix se charge du reste. Les instants sont beaux, sincères. Kurt Vile est un très bon chanteur.
TRIO GAGNANT
Sur « Hunchback », un des grands morceaux électriques de sa période plus ancienne (il date de 2009 et figure sur l’album Childish Prodigy), la tension est à son comble. C’est brut, et toujours classe. Avec ses deux prédécesseurs « Wakin on a pretty day », « Pretty Pimpim », ils forment le trio gagnant du concert. Kurt Vile sait varier les ambiances avec brio, en faisant honneur à cette musique américaine à la fois baignée dans la tradition et modernisé au travers d’un style reconnaissable parmi des milliers. En rappel, deux morceaux du dernier album : la fameuse et géniale « Like Exploding Stone » et la un peu plus ennuyante « Cool Water ». Peut-être pas la meilleure note de fin mais rien qui puisse nous désenchanter de ce merveilleux concert auquel nous venons d’assister.
Lomepal revient aujourd’hui avec Mauvais Ordre, son troisième album attendu au tournant, annoncé début septembre. Suite à une tournée des théâtres antiques cet été, l’artiste français dévoile…
Sans être totalement remis de la première soirée, l’heure de la suite a déjà sonné. Le temps de poster notre premier report (à retrouver ici) et nous voilà déjà repartis. Un risque de pluie menace de rendre la soirée un peu plus difficile que la veille. Nous optons pour la carte déni. Finalement, pas une goutte ne tombera durant la soirée. Merci Bretagne adorée. En terme de programmation, ça n’est pas notre journée préféré, non pas que les artistes prévus ne réveillent aucune excitation en nous (bien au contraire) mais simplement du fait que rien ne peut rivaliser sur le papier avec les deux autres journées mastodontes (nous ne sommes pas prêts pour la soirée de samedi). Nous y allons tout de même avec grande joie. Porridge Radio, Baxter Dury, Kevin Morby, Snapped Ankles, ça ne se loupe pour aucun prétexte.
Beaucoup plus que la veille, cette soirée du vendredi sera fraiche. Pas de pluie mais du froid. Deal accepted. On a pensé aux vestes et aux sweats. Un festivalier prévoyant est un bon festivalier. Cette vague de froid sur le site nous a évidemment envie de nous réchauffer. Quoi de mieux pour cela qu’une foule sardines et une musique radiateur (et pas ascenseur) ? Voyons quels artistes ont le plus excellé à ce niveau. Du moins chaud vers le plus chaud, soirée du vendredi, c’est parti.
La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
CHALEUR : Un peu
HONEYGLAZE est le premier groupe à ouvrir la journée sur la scène des remparts. Ca n’est pas le job le plus facile, on en est conscient. Il y a encore peu de monde sur le site à 18h30. Si nous le plaçons à ce niveau, dans la team qui a le moins réchauffé, c’est qu’ils ont joué à une heure où le soleil était encore là. Comment réchauffer une foule qui a déjà chaud ? On les remercie pour cette attention, de ne pas nous avoir embrasés directement. Au-delà de l’heure de passage, HONEYGLAZE ne délivre pas la musique la plus chaleureuse qui soit. Ca n’est pas un reproche, puisque nous avons plutôt apprécié leur concert. Suite à un petit problème technique – une guitare dont le son ne sortait pas – de quoi faire bien monter la pression pour les artistes, le trio londonien a assuré une ouverture tout en douceur et en légèreté. Ils viennent de sortir leur tout premier album. Leur pop/rock rêveuse est ici déployée avec maitrise et sureté, bien qu’un peu trop dans la retenue. Les morceaux sont tout de même au rendez-vous, et permettent de ne jamais perdre le fil. Timide ouverture, mais ouverture réussie.
HONEYGLAZE / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
HONEYGLAZE / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
HONEYGLAZE / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Ca n’est pas la première fois que l’on parle de PORRIDGE RADIO ici. Suite à leur concert parisien à la Boule Noire cette année, nous avions fait un portrait de ce groupe qui ne fait que monter, suite à un deuxième album monstrueux en 2020, et un troisième album un peu en deçà mais toujours à la pointe sorti il y a quelques semaines. C’était là l’occasion de le présenter au public français. Les filles de Brighton jouaient à 20h10 sur la scène des remparts. Le monde est arrivé, les festivaliers se pressent pour les voir. Il n’y a pas foule immense, mais on sent tout de même que PORRIDGE RADIO suscite curiosité. Le concert a un peu de mal à démarrer, les morceaux choisis ne sont pas forcément les plus entrainants. Il faut dire que le dernier album détient moins de chansons puissantes comme le précédent, même si une évidence s’en dégage toujours. La voix de la chanteuse Dana Margolin ne semble pas porter assez, alors même qu’elle est toute l’identité du groupe. C’est très bien, mais ça ne décolle pas. Il faudra attendre une petite demi-heure pour que les choses s’intensifient. Elle est de plus en plus géniale. Son attitude captive les regards, entre le calme et la tempête. Les morceaux à boucle ultra répétitives, leur marque de fabrique, pointent le bout de leur nez vers la fin du show, et montrent à quel point l’incarnation est puissante : « Birthday Party », « Long »… Sur cette dernière, les cris du public redoublent, après un passage tranchant à la guitare électrique que Dana Margolin sait si bien faire hurler. C’est le cri d’une jeunesse qui a beaucoup à exprimer. Quand vient « Sweet », leur plus grand morceau, nous voilà pleinement conquis. La route est toute tracée. Pourquoi se retrouvent-elles dans la team des moins chauds alors ? Car malgré tout, leur musique dégage quelque chose de brut, de tourmenté, qui s’associe plus difficilement avec un sentiment de réconfort et de chaleur. Mais aussi parce qu’à cette heure-là, le froid n’est pas encore pleinement arrivé.
PORRIDGE RADIO / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
PORRIDGE RADIO / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
PORRIDGE RADIO / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
CHALEUR : BEAUCOUP
La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Bond dans le temps. Il est 1h20 et LES LIMINANAS s’apprêtent à clôturer la soirée. C’est un duo catalan qui fait beaucoup entendre parler d’eux sur la scène française depuis plusieurs années. Rock psychédélique aux nombreuses facettes, difficilement définissable. Il y a comme un mystère qui plane autour du groupe. A cette heure-là, beaucoup ont déjà quitté le Fort. L’heure de pointe est entre 21h et 00h. Il reste quand même du monde devant la scène du Fort. A cette heure-là, il fait aussi très froid, donc tâche encore plus difficile de nous réchauffer. Une installation vidéo est placée au fond de la scène. Elle projette des extraits de films, en rapport avec le dernier album du groupe « De Pelicula » en collaboration avec Laurent Garnier sorti en 2021.
Dès leur arrivée sur scène, à six (il n’y a pas Laurent Garnier), ils instaurent une certaine ambiance hypnotique. Le début est instrumental, et puissant. Tout de suite, nous sommes happés par ces guitares qui grondent. C’est envoûtant. Combinés aux images qui défilent derrière, la musique prend de l’ampleur. Ca fait son effet. Le son est puissant, on commence à la connaître cette scène qui sonne terriblement. Vient ensuite des morceaux chantés. Nous aimons moins. On perd la fibre hypnotique, et le concert tombe dans quelque chose de plus commun, un rock connu. Ca n’est pas déplaisant, mais ça n’arrivera pas à vaincre le froid qui terrasse le Fort. Le groupe jouera 1h15, jusqu’à 2h25.
THE LUMINANAS / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
THE LUMINANAS / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
THE LUMINANAS / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Juste avant eux, sur la scène des remparts, SNAPPED ANKLES a livré un concert de 40 minutes d’une forte intensité. On aime beaucoup ce qu’ils font en studio depuis leur premier album en 2017. Leur dernier en date nous a un peu moins convaincu dans le genre mais reste quand même un bon cru. Nous les attendions avec impatience sur le festival, eux chez qui le rythme, les sonorités électro et le grain de folie trouvent un parfait mélange. Sur scène, ils sont vêtus bizarrement, recouverts de matière végétale. Le genre de costume qui peut faire peur aux enfants mais qui, lorsqu’on est adultes, tombent légèrement dans le guignolesque. C’est l’image qu’ils renvoient, comme des gentils extraterrestres. Leur musique est en tout cas captivante et frénétique. Sur scène, elle gagne un aspect plus expérimentale. C’est à peine si l’on a reconnu les morceaux présents sur les albums, que l’on connait pourtant bien. S’en extirpe des rythmes mélodiques servant à créer une pièce musicale géante qui ne s’arrête jamais. Le public est présent, répond par la danse. Il y a beaucoup de jeunes. Les rythmes sont envoûtants, appuyés par une batterie percutante. Pari réussi pour un groupe qui proclame que le rythme est leur business. Ils nous ont convaincu sur ce point. Les sonorités électro, quant à elles, auraient gagnées à être encore plus claires, impactantes et directes. A force, tout est un peu sur le même plan. Dommage. On comprend pourquoi ça ne dure que 40 minutes. C’est suffisant. On regrette de ne pas avoir entendu « Johnny Guitar Calling Gosta Berling », leur chanson la plus déjantée. Le froid s’est dissipé avec la danse, mais SNAPPED ANKLES n’aura pas réussi à l’évacuer complètement. On enchaine.
PORRIDGE RADIO / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
PORRIDGE RADIO / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
PORRIDGE RADIO / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Sur la même scène, une heure plus tôt, nous avons pu assister au concert de DIIV. La nuage de chaleur créé par ce rock aux sonorités shoegaze nous a aidé à affronter le froid. Il y a foule pour le groupe. Ils jouent à l’heure la plus convoitée, à défaut d’être sur la grande scène, malgré leur 10 ans d’expérience. Ils sont attendus et acclamés. Capuche sur la tête, leur rock respirent l’adolescence. Leur musique sonne bien, et prend bientôt tout l’espace. Elle porte loin. Les guitares prennent de l’ampleur, jusqu’au final de haute volée. A leur départ, une masse reste devant la scène à les applaudir encore et encore. Ils faisaient parti des vedettes de la soirée. Mais le froid persiste encore, qui pourra donc nous réchauffer comme il se doit ?
DIIV / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
DIIV / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
DIIV / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
CHALEUR : PASSIONNÉMENT
Attention, nous passons tout à coup un cran au-dessus. Il est 21h pile sur la scène du Fort. Durant 1h10, elle s’apprête à accueillir un maitre dans son genre : KEVIN MORBY. Des roses sont placées sur la scène, ainsi qu’une grande banderole « This is a Photograph », le titre de son dernier album sorti cette année. C’est celui-ci qu’il va interpréter majoritairement. Vêtu d’un magnifique habit doré, il entre sur scène en compagnie de six compères. Nous voilà prévenus. Ils débutent avec la chanson éponyme du dernier album, que nous adorons particulièrement. Superbe entrée qui donne le ton : ça sera ample, beau, efficace, énergique. Et surtout, ça sonnera bien. Très très bien. La voix de Morby est d’une telle intensité qu’il ne pourrait faire que ça. A vrai dire non, puisque les arrangements derrière sont terriblement efficaces. Il serait bête de nous en priver. Le tout est d’une beauté fatale, toujours juste, toujours pointilleux, toujours grand. Les morceaux du dernier album défilent : le sublime « Bittersweet, TN », le rythmé « Rock Bottom », le puissant « A Random Act of Kindness ». Jamais planplan, le rock/folk de KEVIN MORBY sait viser en plein dans le mille, le tout avec classe et élégance. On sent une tension vive dans ces interprétations garnies de chaleur. On se sent d’un seul coup réchauffé, réconforté… Lorsqu’il assouplit un peu le rythme pour laisser place à la beauté de sa voix, Morby ne manque pas de nous faire sortir de notre songe en cours avec les morceaux suivants, sur lesquels l’irrésistible saxophone nous transperce de plein fouet. Ce qu’il joue va piocher un peu partout au niveau mélodique : on entend à la fois du Oasis, du Nirvana, du Velvet, du Bob Dylan, mais sans cesse adaptés à un style qui lui est propre. KEVIN MORBY est un passeur au grand talent. On entend dans sa musique toutes les admirations qui l’anime. Ses concerts sont d’une rare vitalité. Bravo à lui de nous avoir tant réchauffés, d’autant plus avec ce final resplendissant qui restera gravé : la longue progression de « Harlem River » se terminant dans un feu d’artifice d’électricité et de saxophorgasme.
KEVIN MORBY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
KEVIN MORBY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
KEVIN MORBY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
KEVIN MORBY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Bon, il faut dire que Kevin Morby a été aidé pour vaincre le froid par ses prédécesseurs de la scène du Fort : LOS BITCHOS, à 19h15. Paradoxalement, c’est après leur concert que le soleil a disparu et que le frais a commencé à arriver. Pourtant, leur musique transpire justement le soleil. Complètement instrumentale, elle fait appel à des guitares aux sonorités sud-américaines et à une forte base rythmique. Le charme fait vite effet. Elles sont quatre filles sur scène, plus un mec, et toutes communiquent une joie incarnée dans leur musique. Même s’il commence à faire froid, comment peut-on le sentir avec cette musique tout droit sortie des plages ? Taillée pour égayer les humeurs, elle n’est pourtant pas si simplette qu’elle peut le paraitre. Leur premier album sorti cette année est d’ailleurs produit par Alex Kapranos de Franz Ferdinand. La recette est bien trouvée, et sur des morceaux comme « The Link is About to Die », elle fonctionne parfaitement. Le morceau en live balaye tout sur son passage, tant la mélodie est bien trouvée. On avait eu la même sensation sur la version studio. Mais après lui, la recette s’essouffle un peu et atteint ses limites. Sur un album et un concert relativement court, c’est oui. Mais la suite ? Bon, tant que le froid ne nous atteint pas, c’est déjà ça.
LOS BITCHOS / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
LOS BITCHOS / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
LOS BITCHOS / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Passons au grand gagnant de la soirée du vendredi. Celui qui nous a le plus réchauffé. Et haut la main. Mesdames et messieurs, j’appelle sur la scène du Fort BAXTER DURY. Il est 23h10. L’heure des grands. L’heure de Ty Segall demain (que l’on a hâte !). L’heure de Fontaines hier (on rappelle à quel point c’était immense ?). Bon, Baxter. Sacré personnage que nous avions interviewé (à retrouver ici) il y a deux ans à l’occasion de la sortie de son dernier album « The Night Chancers ». Depuis une vingtaine d’années, le britannique, fils de Ian Dury, s’est peu à peu construit un personnage de dandy désinvolte et provocateur qui lui colle si bien à la peau. Hier fut une démonstration de force. BAXTER DURY occupe la scène comme personne d’autre. S’il peut énerver certains, force est de reconnaitre qu’il dégage un sentiment de confiance inégalé. Il se tortille avec classe, se déshabille (juste une veste) et se rhabille avec élégance, fait des gestes loufoques qui prennent toujours sens dans sa démarche. Il aime et déteste tout le monde. Mais nous devons absolument l’aimer selon lui. Ce jeu d’ego magnifiquement interprété repose avant tout sur une musique diablement efficace. Il y a une grandeur qui s’en dégage, comme si l’artiste, avec ses morceaux faussement simples, venait montrer qu’il ne suffit de pas grand-chose pour atteindre des sommets. Le son est superbe, comme toujours sur cette scène, mais encore plus cette fois-ci. Tout est carré, dans les règles de l’art. Le concert est émouvant, cela dû avant tout à la qualité des morceaux et au choix de ces derniers : de « It’s a pleasure » à « Slumloard » en passant par la sublime « Prince of Tears », BAXTER DURY trace un chemin rempli de beauté, malgré la froideur qu’il dégage. On sait o combien il apprécie convier des voix féminines sur ses morceaux. Une chanteuse, Madeleine Hart, l’accompagne donc bien évidemment. Avec elle, ils forment un duo parfait. Elle reste statique, mais obnubile par sa présence et la justesse de sa voix. Le contraste est saisissant, Baxter persévérant dans son chant parlé manière Gainsbourg pour lequel on craque tant. Le micro bien réglé, c’est d’autant plus percutant. La partie instrumentale derrière assure également. Sur une base rock, des sonorités électro se glissent. Et quand celles-ci prennent le dessus, ça finit en apothéose. Bravo Baxter. La chaleur est pleine. Tu as gagné. Nous t’adorons comme tu le voulais. Hâte de demain, pour la plus grosse journée du festival. Arriveront-ils à te détrôner ?
BAXTER DURY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
BAXTER DURY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
BAXTER DURY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
BAXTER DURY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
BAXTER DURY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
BAXTER DURY / La Route du Rock 2022 / Crédit : Théophile Le Maitre
Nous y voilà enfin. Où que ce soit, tout le monde l’a repéré. Depuis plusieurs semaines, ses affiches sont disposées un peu partout en France. Encore plus à…