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Alexandre Bertrand

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L’Étrange Festival 2017 continue jusqu’à dimanche 17 septembre avec la soirée de clôture et la remise des Grand Prix Nouveau Genre et Prix du Public. Après le visionnage de Mayhem, lors de l’ouverture du festival, l’équipe de Pop&Shot continue le visionnage de films présentés lors de cette édition 2017.

« Spit’n’Split » de Jérôme Vandewattyne

DR spitnsplit

Pendant deux ans, un réalisateur belge va suivre les tournées du groupe rock The Experimental Tropic Blues Band, dans des salles de concert de plus en plus miteuses. Dès les premières minutes, on sait que le groupe en question a fini par se séparer dans des conditions dramatiques. Dramatiques comment? C’est ( a priori) tout l’intérêt du long-métrage de Vandewattyne. Mockumentary. Documenteur. Ces faux documentaires comme on dit dans la langue de Molière mêlent fiction et réalité, parfois jusqu’à une réelle confusion ( cf Ruggero Deodato, le réalisateur de Cannibal Holocaust obligé de venir s’expliquer et d’apporter la preuve que les acteurs de son film ne sont pas réellement morts!). D’ailleurs une citation de Musset ( « Tout le réel pour moi n’est que fiction ») en ouverture vient enfoncer le clou. On vous présente un documentaire, mais hey hey c’est pour de faux. Sans faire de raccourcis belges à l’emporte pièce, C’est arrivé près de chez vous, il y a vingt ans maintenant, n’avait pas besoin d’autant pour impliquer son spectateur et le faire se poser des questions sur ce qu’il est entrain de regarder. Mais qu’est ce que le spectateur de « Spit’n’Split » en plein L’Étrange Festival est entrain de regarder au fait? L’errance d’un groupe de rock aux quatre coins de l’Europe dans une tournée fauchée ou la promiscuité et les échecs font monter peu à peu en pression chacun des membres et ou à un moment donné alcool et drogues ne suffisent plus… Pourquoi pas? Sauf que… Cette montée en pression, cette promiscuité, elle n’est jamais ressentie, des commentaires en voix off sur la situation (  » A un moment donné, tu ne supporte même plus ton pote qui se brosse les dents à coté de toi ») sont plus efficaces… Le personnage(?) de Jeremy Alonzi crève bien sur l’écran. Mais les mésententes au sein d’un groupe de rock ne peuvent elles être vues qu’à travers les brimades de l’un des membres contre l’autre? Est ce que cela ne pouvait pas être présenté de façon plus nuancée? Bref, la tension monte et finit par éclater au cours d’une scène de dérapage flirtant grandement du coté de Gaspard Noé. Sauf que n’est pas Gaspard Noé qui veut et les dernières minutes du documenteur ressemblent plus à un trip d’art et d’essai qu’autre chose. Interroger sur les notions de fiction et de réalité? Pourquoi pas mais pour dire quoi? Aucune idée… En résumé, un film sympathique dans son déroulé (par les facéties de Alonzi notamment) mais bien opaque et distancié dans sa conclusion. Un voyage dont on finit par sortir en cours de route.

« Firstborn » de Aik Karapetian

DR Pirmdzimtais

Alors que Francis et Katrina rentrent d’une soirée un peu arrosée, ils sont agressés par un motard qui dérobe le sac à main de la jeune femme. Francis retrouve par la suite le coupable et l’assassine en tentant de trouver une solution à cette affaire. Quelques jours plus tard, Katrina annonce sa grossesse inespérée, ce qui va peu à peu semer le trouble dans la famille… Peckinpah et Polanski sont convoqués pour parler de Firstborn. Peckinpah et Polanski ? Non ? Personne? Aucun des deux? Pas vraiment surprenant… Mais il ne faudrait pas être trop dur avec le film letton de Karapetian. Non, le doute n’est pas vraiment ressenti sur la nature du bébé de Katrina. Au pire, un personnage d’ami flic apparaît bien de façon trouble au début du film… Pour finir par pratiquement disparaître au fur et à mesure que le film balance dans le thriller, un comble! Exit Rosemary’s Baby donc. Les chiens de paille? Oui, le personnage de Francis est faible et entouré de personnages masculins bien plus forts que lui qui le renvoient à sa médiocrité et le font monter en pression. Mais le personnage a d’entrée de jeu un comportement agressif et se présente au final plus comme un être égoïste et frustré que comme quelqu’un dépassé par la situation. L’évolution vers une sorte de thriller est très bien faite néanmoins et le développement de l’histoire est vraiment intéressant. Quelques éléments symboliques ( la bête dans la foret, les scènes de théâtre japonais) pêchent par manque de sens. Formellement et dramaturgiquement intéressant, Firstborn ne convainc pas, la faute à un manque d’entrain et d’implication. Malgré la déception, c’est un 7 qui a été donné lors du vote des spectateurs à la fin de la séance.

« Cold Hell » de Stefan Ruzowitzky

DR

Le voilà le chouchou de ses deux soirées passées à L’Étrange Festival ! 
Özge, immigrée turque en Autriche, chauffeur de taxi et adepte de boxe thaïlandaise, assiste à l’assassinat de sa voisine. Le tueur, un fanatique religieux, l’a vue et va tout faire pour l’éliminer coûte que coûte. Mais serait-il tombé sur plus fort que lui ? Ruzowitzky sait y faire avec une caméra, depuis le premier Anatomie en 2000, c’était une certitude. Après une expérience malheureuse outre Atlantique (le passé innaperçu Cold Blood avec Eric Bana et Charlie Hunnam) et un film historique ( Les faussaires), Ruzowitzky revient au cinéma de genre avec un thriller à l’ancienne sur fond social. En effet, le personnage principal est une immigrée turque. Et la façon dont elle est traitée s’en ressent, à voir avec la facilité avec laquelle la police laisse tomber lors du signalement du meurtre de la voisine. Mais le personnage d’Özge est un personnage qui en impose, pour des raisons qui sont dévoilés plus tard dans le film (à tort d’ailleurs qu’elles soient aussi explicités), vit seule, ne fait confiance en personne et « en a gros ». La scène du combat de boxe démontre bien qu’il ne tient qu’à un fil que toute la violence contenue en elle ne demande qu’à exploser… L’introduction du film est d’ailleurs sublime. Il est vu en parallèle Özge qui conduit dans la ville jusqu’au moment ou elle se retrouve coincée dans une rue à sens unique par une voiture ne voulant pas bouger. Dans une chambre d’hôtel, une femme dévêtue regarde lascivement par une fenêtre, éclairée par des néons flashy que ne renierait pas Atomic Blonde. Énervée, Özge sort de la voiture et s’explique avec les passagers du véhicule de devant. A l’hôtel, un homme se rapproche doucement mais surement de la femme. Dans la rue, Özge, insultée car elle est une femme, en vient aux poings pour se faire entendre. Dans la chambre, la femme est projetée au sol et torturée. Montage parallèle de deux antagonistes qui ont pourtant le même rapport au monde…  Ce qui est particulièrement marquant avec ce personnage, c’est sa propension à ne faire aucun compromis. Loin de tomber dans une sorte de running gag, il y a un moment du film ou Özge doit quitter son domicile. Cherchant refuge, elle quitte coup pour coup le domicile familial, l’appart’ d’un amoureux transi, un foyer pour femmes en difficulté, dès qu’elle se sent en difficulté. Özge ne transige pas dans cette société ou elle est pointée du doigt, que ce soit par ses racines ou bien par son environnement. Cold Hell est un film parlant de violence, de violence dans les rapports, de violence contenue, de violence morale… Les scènes plus apaisantes et apaisées de Özge et sa petite cousine ayant fini par trouver un refuge inattendu fonctionnent parfaitement et il est facile de sourire et s’adoucir en même temps que la plupart des personnages. Le dernier quart d’heure n’en fonctionne que mieux quand la menace du tueur en série revient et que sa traque de l’héroïne reprend. Le combat final entre la taxi et le tueur fait mal et on voit les stigmates des coups et tortures portés par l’un et l’autre. Seul bémol, ne pas aller jusqu’au bout de la logique du chasseur finissant chassé et de voir une Özge laisser exploser toute sa vie de haine contenue contre un ennemi vomissant tout ce qu’elle est (une femme tout simplement). Le plan final n’en sera que plus touchant. Une franche réussite et un 9 donné pour le Prix du Public de L’Étrange Festival ! 

« The Villainess » de Jung Byung-gil

DR NEW Productions

Entraînée depuis l’enfance aux techniques de combat les plus violentes par une agence de renseignement après l’assassinat de son père, Sook-hee est une arme redoutable. Afin de gagner sa liberté, elle est engagée comme agent dormant. Mais un jour, elle va découvrir la vérité sur le meurtre de son père.
Rurik Sallé en présentation du film à L’Étrange Festival a dit de Jung Byung-gil qu’il avait envie de travailler à Hollywood. Et force est de constater que le monsieur se dépense sans compter pour montrer de quel bois il se chauffe! Toute la première partie du film est une longue successions de scènes d’action ou les coups, égorgements et autres flinguages pleuvent. Jouant sur plusieurs temporalités, le début est confus. Puis peu à peu, les éléments se recollent et l’histoire suit un déroulement plus classique. Hardcore Henry, Nikita, Kill Bill, Jung Byung-gil ratisse large. Sans vergogne pour montrer qu’il sait faire joujou avec son gros objectif, multipliant les plans à la « caméra impossible » ( grossomodo à la David Fincher époque Panic Room). Le résultat est un divertissement efficace mais qui à force de vouloir marquer risque de ne pas marquer grand chose. A force de trop vouloir en faire, on perd en efficacité… Et c’est finalement les scènes de milieu de film, avec l’héroïne tentant de vivre une vie normale qui sont les plus réussies. Un comble pour un film se voulant comme une carte de visite d’un cinéaste d’action! Mais un agréable moment quand même, comme on passe souvent à L’Étrange Festival !

Affiche film Okja
@Netflix

Loin de la polémique cannesque d’il y a quelques mois, Netflix a sorti au début de l’été Okja, le dernier film du Coréen de Bong Joon Ho. Au menu (hohoh), l’innocence de l’amitié, une critique couplée du militantisme et du capitalisme, un Jake Gyllenhall over the top et surtout un conte comme on en fait plus… Critique.

Souvenez vous… Quinzaine de Cannes 2017. Sélection officielle. Bong Joon Ho, l’un des meilleurs réals coréens de notre temps sort sa dernière bobine en date au Festival. Huées et volée de bois vert. Bon… Rien que de très normal après tout, c’est le jeu des festivals et surtout de Cannes, qui n’en est pas à sa première polémique ! Sauf que… La raison principale du rejet de Okja ? Le fait qu’il soit diffusé sur Netflix et non en salles… Oui, vous avez bien lu… Évidemment que la cinéphilie fait partie de l’ADN des membres de Pop&Shot, mais en 2017, tenir ce genre de discours, livrer ce genre de batailles ressemble plus à un combat d’arrière garde qu’à une contestation pleinement consciente de l’époque dans laquelle elle vit. Depuis les années 50, il est prédit la mort prochaine du cinéma. D’abord à cause de la télévision, puis du magnétoscope, puis du piratage et dernièrement par les plateformes VOD. Bref, depuis plus d’un demi siècle le Septième Art est à l’article de la mort, mais comptablement, il se porte au mieux, pour preuve, combien de films ont pu rejoindre le club des milliardaires, depuis le seul début de la décennie ? Bien évidemment, on pourrait toujours disserter des modes de production actuelles qui obstruent le développement de certains genres de cinémas, mais on ferait dangereusement du HS…

Extrait du film Okja 
Mija, une jeune fille déterminée Droits réservés : Netflix

Mija ( Ahn Seo-Hyeon), jeune orpheline vit avec son grand père au fin fond de la campagne coréenne avec son grand père et son meilleur ami… un cochon génétiquement modifié du nom d’Okja. En effet, l’introduction du film nous présente Lucy Mirando ( Tilda Swinton, qui flirte dangereusement vers le surjeu et la jumelité avec Cate Blanchett), grande patronne de multinationale annonçant un grand programme d’élevage de cochons génétiquement modifiés et expédiés aux quatres coins du monde afin de voir lequel donnera la meilleure viande. Dix ans plus tard, c’est le moment de désigner le vainqueur du concours…. Une sorte de Nicolas Hulot sous coke, Jake Gyllenhaal dans une prestation remarqué (voire remarquable ?on en reparle plus loin) désigne Okja comme vainqueur. Quelques dollars pour le grand père et des pleurs pour la petite fille plus tard, l’animal est envoyé aux États Unis. Mais Mija ne l’entend pas de cette oreille…

Beaucoup de choses ont été dites sur Okja. Le surjeu des « têtes d’affiches » hollywoodiennes. La présentation par Netflix d’un film sur la Croisette. Le message anticapitaliste (voire antiaméricain) et pro-vegan ou tout du moins écolo du long métrage de Bong Joon Ho. Sans être totalement faux, ces focus mettent totalement de coté le principal aspect du film, à savoir un conte noir comme on en voit au final assez peu. C’est un vrai parcours initiatique auquel est livré Mija, quittant son foyer douillet dans l’optique d’une quête, retrouver l’être aimé et le ramener à la maison, et rencontrant de nombreux interlocuteurs qui l’aideront ou la freineront. Avec le coté absolu que peuvent avoir les enfants, Mija traverse le métrage avec son idée fixe, retrouver Okja et les différents protagonistes qu’elle rencontrera ne seront que des accélérateurs/freins dans cette quête.

Extrait du film Okja 
Jake Gyllenhaal livre une prestation qui a beaucoup fait parler… A tort?
Droits réservés Netflix

S’il y a quelque chose de vrai dans ce film, c’est la relation amicale entre Mija et Okja. Ce n’est donc pas innocent que chaque interlocuteur que la petite fille rencontre est pétri de contradictions. Le grand père s’est bien occupé du cochon transgénique mais n’hésite pas une seconde quand on lui annonce la mirobolante récompense qu’il va recevoir. Lucy Mirando est bourrée de certitudes mais cherche par dessus tout à se défaire de l’ombre omniprésente de son défunt père. Wilcox (Gyllenhaal) est un biologiste réputé dont le passage à la télévision n’a pas été sans compromis et est désormais has been d’où le surjeu qu’il applique au quotidien auprès de tout le monde (cf la pathétique scène de speech de Mirando ou son personnage s’agglutine derrière la vitre pour juste pouvoir participer à la réunion). Jay ( Paul Dano, impeccable comme souvent) , le leader du groupuscule écologiste qui n’hésite pas à la première contrariété à laisser parler ses instincts plutôt que l’idéal dont il est censément le garant. Il est à noter que le groupe écologiste vient se poser en opposition avec le grand groupe industriel que représente Mirando. Son grand père l’incitait à délaisser Okja pour aller fréquenter les villageois d’à coté, son expérience du monde lui faisant voir le coté le plus sombre de chacun de ses interlocuteurs, Mija n’aspire qu’à une chose, retrouver Okja et passer son temps avec son meilleur ami cochon.

Le surjeu de Jake Gyllenhaal a été décrié. Certes, le non-encore oscarisé acteur américain exagère au niveau de son jeu mais au final, sa prestation, quasi cartoonesque est à considérer en opposition avec l’attitude du personnage de Mija. Le zoologiste américain has been VS la petite campagnarde pré adolescente coréenne. Évidemment, l’adulte n’est pas celui qu’on croit. Prisonnier d’un système critiqué sans nuance par le réalisateur Bong Joon Ho, l’ancien biologiste star n’arrive à y survivre qu’en surjouant et faisant un show perpétuel. Perdue dans un monde qu’elle ne comprend pas ( la seule personne parlant coréen qu’elle rencontre au cours de sa quête n’hésite pas à trahir sa parole, au sens propre et figuré), Mija communique peu, obnubilée par ses retrouvailles avec Okja. Son absolutisme la conduira à une transaction cynique avec une autre sœur Mirando (toujours incarnée par Swinton). La preuve que tout voyage entraîne un changement ? Peut être. Okja quoi qu’il arrive ne se remettra pas de la scène de saillie qui met mal à l’aise le spectateur. Faut-il y voir une dénonciation de la commercialisation de la viande animale ? Est ce une manière de mettre en horreur la notion de sexe ? L’innocence de Okja et celle de son spectateur en est marqué quoi qu’il en soit. L’adorable cochon a du mal à être (re)vu comme la bête gambadant dans la campagne l’air de rien tel qu’elle est présentée au début du film.

Extrait du film Okja 
Droits réservés : Netflix

La fin du film, se déroulant dans un centre d’élevage de cochons transgéniques, plus proche d’Auschwitz que de la Ferme des Mille Vaches, finit de mettre mal à l’aise le spectateur. Mija, tout au long du métrage aura traversé l’enfer. Le mal incarné par une incarnation du grand ponte capitaliste se donnant en spectacle ( Steve Jobs, Elon Musk montrent que cela n’est pas tant exagéré que ça). Le renoncement par une ancienne idole gigotant vaille que vaille pour continuer d’exister. Un groupuscule d’idéalistes semblant plus être là pour l’adrénaline et par effet de mode que par réelle conviction. Au final, la dernière scène faisant miroir avec la toute première permet de reprendre son souffle et d’apprécier la conclusion du métrage, après avoir vu le personnage de Mija et son ami Okja confrontés à l’éventail des pires cruautés. Moralité ? L’enfer c’est les autres et rien ne vaut la vie sans son cochon OGM et mieux vaut rester enfant ! Plus sérieusement, le dernier film de Bong Joon Ho présente un conte, en cela que comme tout les contes, il a plusieurs niveaux de lecture. Innocence infantile. Le capitalisme et ses méfaits. L’idéalisme politique et ses contradictions. Larges sont les thèmes à être brassés tout au long des 120 minutes du film et pourtant, ils sont finement présentés au cours d’une histoire simple mais jamais (bien au contraire) simpliste. Loin des polémiques stériles sur tel ou tel point, le film est à apprécier à sa juste valeur. Et en cette année 2017, sa valeur est clairement dans le haut du panier qui a été proposé.

 

Affiche festival Déferlantes

Deuxième journée de festival pour Les Déferlantes – Sud de France 2017 d’Argelès sur Mer. Au programme de la journée la plus rock de tout le festival, Ludwig von 88 et Rationale aux deux extrémités d’un show dont le paroxysme a été (comme prévu) la prestation de la légende pop rock Sting!  Si The Last Train, LP et Birdy, dans des styles différents, ont fait bien plus que de passer les plats pour la tete d’affiche britannique, les Australiens de Midnight Oil ont montré qu’ils n’avaient pas perdu de leur vigueur. Reportage.

Dimanche 9 juillet 2017, deuxième jour de la dixième édition des Déferlantes Sud de France.

La tete d’affiche du festival, le légendaire Sting a été choyé par les organisateurs. Tout au long de la journée, ce sont des artistes de qualité qui se sont succédés, offrant des conditions optimales pour le show de la star, prévu à 21h30…

D’une année à l’autre, le cadre sublimissime du domaine de Valmy, écrin du festival Les Déferlantes depuis son lancement, il y a maintenant dix ans de cela, reste le même, mais à chaque fois de subtiles nouveautés viennent l’enrichir. Ainsi, finie la scène Château, c’est dorénavant la scène Paul Mas ( du nom d’un grand domaine viticole local). Mais aussi, place à la scène El Bosqué, à la programmation résolument plus électro.

C’est dès 18h que les festivaliers sont invités à se rendre devant les deux scènes principales. Au menu, les Anglais de Rationale pour un son censément pop-rock. Mais bien plus que ça, brassant les différentes cultures de chacun des membres du groupe, Rationale affiche un ton plus proche du groove que du rock qui tache à la sauce british. Mais, finalement, l’ambiance est posée, les festivaliers prennent place en masse dans l’arène naturelle du domaine de Valmy. Un nom qui revient sur toutes les lèvres…

Sting bien sur, qui sera là dans moins de 4 heures, alors autant profiter de l’ambiance décontractée qu’insuffle sans mal le leader de Rationale, Tinashe Fazakerley.

Est-il encore besoin de les présenter? Nos chouchous chouchous de chez chouchous de The Last Train, qu’on ne quitte décidément plus ( les Solidays c’était il y a combien de temps déjà? A peine deux semaines,non?), prennent la suite. Toujours aussi assurés, toujours aussi endiablés et toujours aussi talentueux. La surprise n’en est que plus au rendez-vous quand Jean-Noel prend le micro et demande au  public comment ça va. Ce qui se fait à chaque concert prend ici une tournure particulière quand le sing leader du groupe parle avec une certaine émotion du concert à venir de Sting. L’humilité face au poids de la légende sans doute… De quoi mesurer la trajectoire stratosphérique du groupe sochalien depuis deux ans…

Il est 20h. Place ensuite à LP, interviewée quelques heures plus tôt. Souvenirs de l’été dernier, Lost on you est encore au bord de toutes les lèvres, mais sur l’intégralité du répertoire, qu’est ce que ça donne? Loin de n’être qu’une artiste à un ou deux singles, la chanteuse trentenaire américaine livre une prestation de haute volée. Toute en finesse et cachée derrière son abondante chevelure brune et ses grandes lunettes de soleil, c’est un peu le Bob Dylan de la période londonienne qui fait face au public des Déferlantes. Et quand LP sort son harmonica, la comparaison fait vraiment son chemin… Mais elle est bien plus que cela. Une véritable artiste qui commence à se faire un nom et à s’imposer sur la scène musicale contemporaine. La façon dont elle a embarqué avec elle la foule, qui ne s’est pas faite prier pour reprendre en chœur « Lost on you » n’est pas donnée à tous. Seulement aux plus grands ou à ceux en passe de le devenir…

Interview LP

Passer juste avant un grand artiste de renommée mondiale tel que Sting n’est pas forcément la place la plus simple dans une programmation de festival. Le public est là en masse mais généralement pas pour vous. Il s’impatiente d’une chose : que vous ayez fini pour que SON artiste prenne enfin place. Mais Birdy, du haut de ses 21 ans, a du talent à revendre et un univers bien à elle. C’est une vague de délicatesse qui s’abat sur Valmy ( pas de jeux de mots avec les Déferlantes, pas mal hein? C’était pas évident…). Skinny Love, Wings, People Help The People… Toutes les principales chansons de la jeune britannique sont au RDV. Après s’être déhanché sur le groove de Rationale, déchaîné sur le bon vieux rock de Last Train, régalé sur la folk de LP et adouci au son de Birdy, le public de Valmy est prêt à faire le meilleur des accueils pour la légende pop-rock Sting.

Affuté comme jamais, Sting apparaît en forme dès les premières notes de son premier morceau.

Le public attendait depuis des heures, il est instantanément conquis. Un véritable best of des plus grands succès de Sting et meme de l’époque de Police se déroule sous nos yeux pendant une heure et demie. Aucune pause dans ce set, il n’y a que des tubes, que le public, tel un seul et même fan, reprend en chœur de bout en bout. « Roxanne« , « Every breathe you take« , «  So lonely« , « Message in a bottle« … Ces hits qui n’ont pas pris une ride enflamment le public de Valmy alors que le soleil s’est couché depuis peu. A la fin de la performance de Sting, le public en redemande et obtiendra un rappel de la légende pop rock.

Sting
Crédits : Les Deferlantes Sud de France

A peine remis de ses émotions, ce sont les Midnight Oil qui débarquent. Toujours vigoureux et ne se ménageant pas sur scène, voici les rockeurs australiens qui débarquent et chantent leur succès. Le public reste encore conséquent, attendant probablement de s’enflammer avant d’aller se coucher sur l’immortel « Beds are brurning » (après tout demain c’est lundi et pas tout le monde est en vacances du coté d’Argelès sur Mer). Ce qui va être le cas lors du dernier morceau, le grand tube que tout le monde attend.

Un peu moins nombreux mais toujours aussi motivé, le public fait honneur aux déjantés de Ludwig Von 88 qui mettent une ambiance un peu folle et surtout punk. Lorsque leur set se termine, c’est un public trempé dans une ambiance pop rock et punk depuis la fin d’après midi qui va aller se coucher alors que le deuxième jour de festival des Déferlantes s’achève…

 

K-O-Fabrice-Gobert
K-O-Fabrice-Gobert

Antoine Leconte est un patron de télé influent et implacable. En véritable requin, il arpente les couloirs, l’œil mauvais pour continuer d’asseoir sa domination sur tout et tout le monde. Jusqu’au jour, ou il se retrouve à l’hôpital… A son réveil, son monde a changé… Critique de K.O, le nouveau de film de Fabrice Gobert ( Les revenants, Simon Werner a disparu).

Les premières minutes nous placent en plein milieu d’un combat de boxe. Bon, pour un film qui s’appelle K.O, rien d’anormal, mais comme on pouvait s’y attendre, tout peut être et n’importe quoi d’autre. Ainsi, dès les premières minutes, la présentation du personnage de manager-winner Antoine Leconte, brillamment interprété par Laurent Lafitte, laisse apparaitre un environnement qui ne demande qu’à se fissurer. Collaborateurs dédaignés, mariage gaché, multiples adultères, comportement suffisant…

L’introduction semble un peu longue, et c’est là l’art de Fabrice Gobert, rien n’est pourtant à négliger. Car, au moment, ou le spectateur va se sentir confortablement installé, le K.O arrive. Une surprise. Hébété, le spectateur adopte pour le coup le point de vue du personnage Laurent Lafitte en découvrant ce monde différent mais similaire. Solange, la femme bafouée et alcoolique ( Chiara Mastroianni à la panel de jeu impressionnante). Boris, le collègue-bras droit grande gueule ( Pio Marmai, dans un rôle ressemblant, au moins un moment, à celui du regretté Jocelyn Quivrin dans 99 francs). L’influente Ingrid ( Clotilde Hesme dont le charisme dévore littéralement la pellicule). L’ambitieuse Dina ( Zita Hanrot qui confirme tout son potentiel depuis Fatima). Tous sont encore présents dans l’univers d’Antoine Leconte mais d’une façon très différente…

k.o.série
k.o.série

K.O apparaît alors comme l’histoire d’un combat. Celui d’un homme, pas forcément plus sympathique dans cette deuxième version de lui même (cf ses liens distants avec sa fille adolescente), qui veut à tout prix retrouver sa vie d’avant. Mais cette vie là a t-elle jamais existé? Fantasme? Réalité? Complot? Cela serait spoiler que de rentrer sur ce terrain là, même si le film joue intelligemment avec le mystère, laissant le spectateur se demande quelle va être l’histoire qui va lui être raconté.

Simon Werner a disparu parlait, entre autres, des projections de différents personnages par rapport à un sujet donné (la disparition de Simon Werner donc). Ici, c’est Fabrice Gobert qui laisse le spectateur se projeter dans l’histoire et le laisse libre de donner sa propre interprétation à ce K.O et la façon dont le personnage principal s’en relève. Brassant des influences allant de La mort aux trousses à Fight Club (au cours d’une intrigue secondaire pas forcément heureuse), de Un jour sans fin à Kafka, Gobert réussi à ne pas se perdre et à livrer un long métrage solide.

K.O ne concourt peut être pas pour le titre de film de l’année mais il reste un thriller aux acquis certains et permet à tout un panel du cinéma français de briller ( Lafitte, Hesme en tète). Il permet aussi d’espérer que le film de genre à la française retrouve de la couleur (comme avec Virtual Revolution?) Enfin, il permet au spectateur de jouer au jeu des interprétations et théories et c’est toujours rafraîchissant, à l’heure ou les propos veulent encore et toujours être plus explicités (n’est ce pas Get Out?).