ST. VINCENT live @ Philharmonie de Paris – © Joachim BERTRAND / Philharmonie de Paris

Mardi 5 Juillet 2022, pour le quatrième soir du festival Days Off, St Vincent s’est produite sur la scène de la salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris. Entre jazz new-yorkais et funk délirant, la virtuose américaine a offert pendant près d’une heure et demie, un show d’une qualité exceptionnelle.

Il est 19h50 quand j’entre dans la salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris. La salle est vaste, blanche avec des formes géométriques qui n’ont pour seul effet que de nous faire tourner la tête et nous faire sentir tout petit. Elle se remplit peu à peu, comme un poumon se remplirait d’air, et chacun ressent ce petit vertige – sauf ceux qui étaient déjà venus- en y entrant. En plus, la clime est à fond et ne fait qu’amplifier cette sensation.

Cate le Bon, féale galloise

À 20h précise, Cate Le Bon monte sur scène coiffée d’une camaille de chevalier. Les plus férus d’Histoire crieraient à un hommage à Jeanne d’Arc mais je ne mange pas de ce pain-là. Après tout, c’était peut-être une référence à Isabel de Conches.

La chanteuse galloise instaure dès son entrée une atmosphère rétro, de sorcière, un peu psychédélique. Son style de chevaleresse des temps modernes et sa voix éthérée ne pouvaient que – sans mauvais jeu de mot- conquérir un public un poil trop sage si le son avait été mieux réglé. Peu bavarde, elle quitte la scène à 20h50.

une attente agitée

Les techniciens préparent désormais la scène pour St Vincent. Des nuages sont installés, un décor de ville ressemblant à New-York s’abaisse lentement en arrière plan.

À 21h08, la lumière s’éteint, une femme pas loin de moi hurle « Woooooooo ». La lumière se rallume, c’était juste un test et son pote siffle : « putain tu m’as pété le tympan… » avant de rajouter à l’intention d’un public majoritairement français : « sorry guys » (en phonétique approximative, cela donne « sauri gaïze »).

De l’autre côté, des commentaires plus cassants se font entendre : « bon il faut se l’avouer, son dernier album s’avère pas terrible. » En espérant qu’ils parlaient du dernier album photo confectionné par la grand-mère de l’un des deux bonhommes. Mais ça reste pas très gentil.

une entrée en scène burlesque

Puis, à 21h22. Daddy’s Home de Shep & The Limelites retentit dans la salle. Le groupe et les choristes se mettent en place. Quelques secondes plus tard, St Vincent, vêtue d’un imper et de hauts talons avance avec langueur vers le micro, s’arrête un instant devant et repart. C’était un prank, c’était pas elle en fait. La vraie St Vincent fait enfin son entrée peu après. Elle porte un blazer blanc cintré, un short assorti et des bottes qui semblent être en vinyle (très Courrèges).

Dès cette double entrée, St Vincent instaure directement le côté théâtral et burlesque qui suivra tout au long du concert, que l’on trouve d’ailleurs sur chacun de ses albums. Et si le spectacle est assis, elle réussit tout de même l’exploit, dès la troisième chanson, à avoir tout le parterre se lever et se précipiter vers la scène.

ST. VINCENT live @ Philharmonie de Paris – © Joachim BERTRAND / Philharmonie de Paris

Divine et théâtrale

St Vincent, de son vrai nom Annie Clarke, a cette qualité que peu d’artistes ont; d’allier le calcul à l’inattendu. Si le show paraît parfaitement millimétré, elle joue avec le public en faisant preuve d’une aisance et d’un amusement spontané. Notamment lorsque ceux venus se précipiter au premier rang la filme, voulant immortaliser ce moment de grâce, et que celle-ci prend quelques téléphones et capture elle-même l’expérience. Le moment est si hors-du-temps que le public se croirait presque plongé dans un diner à New York (je dis bien presque, parce que quand même, ne nous laissons pas berner aussi facilement).

ST. VINCENT live @ Philharmonie de Paris – © Joachim BERTRAND / Philharmonie de Paris

St Vincent a une musicalité et une voix exceptionnelles. Elle susurre autant qu’elle rugit (un peu à la Prince sur  Darling Nikki) et chaque fois qu’elle hurle des petits frissons parcourent les bras et le dos de chacun – à moins qu’il ne s’agisse de la clime. Entre deux solos de guitare, se place un petit solo de thérémine et c’est quand même très stylé.

Au bout d’1h30, le concert touche à sa fin. Le temps est passé à une vitesse… La setlist était remarquable : autant de chansons de son dernier album Daddy’s Home (The Melting Of The Sun, Pay Your Way In Pain…) que de ses précédents comme Masseduction, ou Marry Me. Le public ressort de cette salle où se tiennent généralement des concerts classiques en constatant une chose :  pour l’amour de la musique, à la Philharmonie, que ce soit de la funk ou de l’opéra, tous y trouvent leur place.

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