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We Hate You Please Die @ Le petit bain 2021
Photo : Louis Comar

Il aura fallu s’armer de patience pour retrouver les fous furieux de We Hate You Please Die en live. En juin, lors de leur interview, la question de revoir sur scène la quatuor originaire de Rouen se posait déjà.  Tout vient donc à point à qui sait attendre et en ce 2 décembre, c’est dans un petit Bain complet que les retrouvailles ont finalement lieu.

La foule est dense et connaisseuse et le lieu se transforme aisément en bar punk faisant oublier les températures glacées extérieures. C’est MSS FRNCE qui a la lourde tâche d’ouvrir la soirée. Pas de quartiers pour le groupe punk parisien qui balance ses sons énervés sans retenue. La sophistication n’est point de rigueur, seules les guitares déchaînés font échos à des riffs calibrés pour les grosses enceintes et le lâché prise. La musique du combo sent bon la bière, les pogos et la transpiration. D’ailleurs, il n’en faut pas plus pour que la foule se mette dans le jus, un jus au houblon et bien secoué. La fosse est chauffée, l’air électrique, il est temps de laisser place à la tornade We Hate You Please Die.

We Hate You please die à l’abordage du petit bain

Voilà donc le quatuor originaire de Rouen qui débarque en trombe sur scène sur le titre « Exhausted + ADHD » issu de sa dernière galette. Engagé, il n’hésite pas à inscrire sur leur caisse le message « More women on stage ». Une notion cohérente pour un groupe à la parité évidente, puisque composé de deux hommes et deux femmes et ce même si cette alliance des genres, s’avère être une pure coïncidence liée à une entente artistique. D’ailleurs en seulement quelques notes, cette dualité rappelle sa pertinence. La voix grave et précise de Raphaël Balzarise fait ainsi l’écho puissant des riffs chantés en guise de chœur par Chloé Barabé. C’est cette alliance entre voix torturée et hymnes riot girl qui font d’ailleurs la force immédiate de We Hate You Please Die. Ce qui se vaut sur album se vaut aussi en live. A cela près que la puissance des titres est alors décuplée. Les titres s’enchaînent « Barney », « Structure » mais aussi « Otterlove » sont de la partie.

Quelques jours avant que le gouvernement n’interdise de danser, rappelant que l’art et la vie en société peuvent aujourd’hui devenir à toute vitesse un crime, notre quatuor invite lui à l’union. Au fond de la salle un petit groupe aux tenues punks s’amuse à raconter ne pas aimer ce type de musique. Des éclats de rire et des mouvements saccadés viennent alors trancher avec cette phrase définitive. Aux premiers rangs, la tension monte d’un cran lorsque Raphaël invite la foule à se diviser en deux groupes. « D’un côté team Pécresse et de l’autre team Ciotti » s’amuse-t-il avant de rebondir « Non ok, team Edward et team Jacob alors ! ». Dans une ambiance bon enfant, la fosse se scinde en deux, sagement. Le leader invite aux pogos, et les pogos furent.

Avec précision, les rouennais vont chercher chaque membre de l’assistance et l’invite personnellement à prendre part à la grand messe qui est en train d’avoir lieu. Les instruments sont millimétrés, le groupe sait se faire sophistiqué, sublimer le rock et l’inviter à fusionner. Alors que le post punk a depuis quelques temps eu l’excellente idée de revenir sur le devant de la scène, nos compères jouent avec ses codes et lui offrent une énergie garage bien à eux.

La foule n’est pas la seule à pogoter et slamer avec ferveur. Là, au milieu de ce tourbillon humain bouillonnant, le leader se lance dans un slam épique, retenu par une foule qui profite de ce lâcher prise effervescent. Les guitares saturées et la batterie sauvage de « Coca Collapse », ce jeu de mot sublime, ne font qu’accentuer la beauté de l’instant. La chanteur ajoute à un débit hallucinant quelques parties au screamé léger. Au fond de la salle, une bière à la main, l’assistance danse volontiers en demandant encore et toujours plus.

Une cover punk s’invite à la partie alors que la joyeuse troupe reprend « Bad Girls » de M.I.A qui annonce déjà le début de la fin de ce moment si attendu. C’est sur les deux hymnes cultes du groupe qui sont aussi le nom de ses deux opus que se conclut la soirée. « Can’t wait to be fine » se déguste comme un dernier moment psyché rock avant de tout donné sur le maintenant classique « We Hate You Please Die ».  La troupe se laisse alors aller à ses notes, jouant avec les corps et les tordant comme des cordes de guitares. Raphaël vit ce dernier instant avec une ferveur communicative. La douceur de ses premières secondes montent en une intensité culminante, les instruments se font obsédants, les corps sautent, se roulent sur le sol, la tension est à son apogée, le rubicon a depuis longtemps été franchi. Alors que les échos de ces paroles puissantes pourtant sorties d’une bande-dessinées sont scandées, le public lui, les yeux rivés sur la scène n’a de cesse de penser « We Love you ». Pour ce qui est de la fin de ce titre, on ne s’était pas sentis si vivants depuis bien longtemps. Les larsens dans les oreilles, alors qu’il faut rejoindre le froid extérieur qui tranche avec violence avec le moment passé, il est bon de se rappeler qu’il faut protéger la musique live à tout prix. Elle est la clés d’une humanité qu’il ne faut jamais sacrifier sur l’autel de la peur.


cat power big thief Simon and Garfunkel Trois albums cultes
 

Le support numérique a radicalement changé les habitudes de consommation de musique. Fini l’attente d’un album pensé dans son intégralité. Bonjour le zapping, les morceaux écoutés jusqu’au refrain, l’attention perdue en moins de trois minutes et bien sûr les conditions douteuses de rémunérations pour les artistes. Pourtant, fort heureusement, à la montée des, convenons-en, bien pratiques plateformes de streaming, s’oppose un retour en puissance de l’objet vinyle. Outre son esthétisme, son très beau son, il permet de (re)découvrir dans sa totalité un album et de s’y immerger face après face. L’été ayant déjà laissé place à l’automne de cette étrange année 2021 et son timide retour à un Monde où concert est synonyme de contraintes pour ses organisateurs, une sélection de vinyle s’impose. Pour aller avec les couleurs de saison, les feuilles qui tombent et les coeurs lourds qui s’imposent à la fin de la trêve estivale, nostalgie, mélancolie et beauté seront au rendez-vous des trois oeuvres parfaites à (re)découvrir track by track ci-dessous.

Simon & Garfunkel « Bridge over Troubled Water »

Simon & Garfunkel - Bridge Over Troubled Water

Paru en 1970, cette pépite est le tout dernier album studio du duo indémodable Simon &  Garfunkel. En 1971,il remporte à juste titre cinq Grammy Awards dont celui du meilleur album. Il figure également à la 51ème place du classement des 500 plus grands albums de tous les temps établi par Rolling Stones. Si son pédigrée est si impressionnant c’est surtout parce que l’attention du duo a été portée sur la composition de chaque titre. A commencer par celui qui ouvre le bal et donne également son nom à l’album. C’est d’ailleurs Clive Davis, le patron de Columbia records qui choisit de placer ce morceau en ouverture de l’opus. Les temps ne changent pas tant que ça, puisque sa longueur (plus de 5 minutes de perfection) était déjà problématique à l’époque. Si l’on en croit le film « Presque Célèbre » de Cameron Crowe (qui avant sa carrière dans le cinéma était journaliste chez Rollin Stones), écouter Simon & Garfunkel en allumant une bougie permettrait de voir son avenir. Une très belle métaphore qui s’applique au ton folk rock de cet opus. Il faut dire que les titres emblématiques s’y enchaînent avec fluidité. A un premier morceau puissant succède « El Condor Pasa (If i could) », ses riffs aériens et sa structure aux nombreux accents envolés. Mélancolique oui mais pas toujours, la galette s’offre des temps joyeux et solaires (« Cecilia », le dansant  « Keep the Customar Satisfied », « Baby Driver », « Bye Bye Love »). L’apaisement est aussi de la partie alors que les sublimes voix des acolytes transportent leur auditeur au confins de la perfection quelque part entre un nuage planant des années 70 et une bienveillance iconique que l’on retrouve chez ces albums qui deviennent de facto vos meilleurs amis.

Big Thief  – « U.F.O.F »

Big Thief - UFOF

Trois notes à pas de velours et une voix envolée, voilà qui ouvre l’intime objet musical non identifié « U.F.O.F » chef d’oeuvre iconique du groupe américain Big Thief.  Cette prise de « Contact » plonge immédiatement l’auditeur dans un bain de bienveillance folk où tout n’est que beauté et volupté. La voix cristalline s’installe dans l’oreille, berce, virevolte. Il n’en faut pas plus pour tomber follement amoureux de la formation menée par la talentueuse Adrianne Lenker. Fondé à Brooklyn, le groupe sortait en 2016 son tout premier opus « Masterpiece ». Et si l’objet portait bien son titre, l’exigence y étant indubitablement au rendez-vous, ce troisième jet s’avère être en réalité le chef d’oeuvre ultime d’une formation qui y touche les étoiles.  Il faut attendre le deuxième titre pour découvrir le morceau « U.F.O.F » qui donne son nom à l’album. Ce single, le premier dévoilé en février 2019, allie la grâce d’une ritournelle poétique à un refrain si joliment travaillé qu’il promet de devenir un allié de force pour regarder la pluie tomber emballé dans un plaid. Chant des sirènes envoûtant qui appelle autant à l’aventure qu’à l’introspection, il précède l’immense et un brin plus entraînant « Cattails » qui fera également l’objet d’une sortie single en mai de la même année.  Sa folk aérienne y a la force des immense Moriarty, à moins que le timbre dream pop de sa chanteuse ne fasse mentir la comparaison. La légèreté et la douceur  font suite sur cette face A poétique où il est bon de se délecter de chaque note. Berceuse fabuleuse et compagnon d’aventure cosmique, il n’est pas étonnant de retrouver cet album parmi les nommés au titre de meilleur album de musique alternative au Grammy Awards 2020. La face B révèle aussi son lot de surprises à commencer par l’enivrant « Century », son refrain répétitif aux notes maîtrisées et sa beauté proche de celle de l’aurore. Il faudra tout écouter et tendre l’oreille sur « Terminal Paradise » avant de conclure sur « Magic dealer » qui embrume les yeux et les têtes comme un calumet fumé un soir de grisaille. Quand vous en aurez finit avec l’écoute, et sûrement répété sa lecture remettant inlassablement le bras sur le tout premier morceau de cette galette, il sera temps de se précipiter sur les sites de reventes de places.  Big Thief s’offre en effet une tournée française au mois de février 2021. 

Cat Power « Moon Pix »

cat power Moonshiner

Difficile de cataloguer l’iconoclaste Cat Power et ses compositions oscillant entre punk, folk et blues. Pourtant, si un mot devait effleurer la qualité de son univers, il faudrait mettre en avant son immense sensibilité. Et ce n’est pas « Moon Pix » paru en 1998 qui fera mentir l’adage. Ses sonorités profondes et mélancoliques y touchent à l’expérimentale et ce dès son exposition sur « American Flag ».  Repérée par Steve Shelley de Sonic Youth dans les années 90 alors qu’elle débarquait à New-York de son Atlanta natale, la musicienne a su s’imposer comme une figure culte, dont les qualités musicales ne peuvent être remises en doute.  De tous ces opus, « Moon Pix », le quatrième est l’un des plus encensés par la critique. Il faut dire que son prédécesseur, un brin plus grunge, lui avait déjà valu les félicitations du milieu estimant qu’elle y avait gagné en assurance. Cette fois-ci composé alors qu’elle vivait seule à la ferme et à la suite d’un état hypnagogique (état de sommeil conscient qui intervient au début de l’endormissement), il s’avère être un voyage hypnotisant, sensoriel et aussi léger qu’un murmure dans la nuit. Les titres s’y jouent avec douceur et s’y enchaînent avec aisance, quasi indissociables les uns des autres. Enregistré à Melbourne en 11 jours par la chanteuse, il est, si l’on en croit le magazine Rolling Stone, le meilleur enregistrée par la musicienne. Les notes aériennes de « Metal Heart » concluent la première face comme un secret partagé. Celui de l’écho d’une période musicale, d’une histoire aussi intime qu’universelle.  Il faudra pourtant attendre la face B pour  se plonger dans le titre « Cross Bones Style », premier single dévoilé de cette pépite qui touche à la perfection. Il pourrait être aisé en 2021, de penser un album comme une succession de singles et d’y imaginer passer aisément d’un registre à un autre. Ici, il n’en est point question tant le tout est construit comme une succession harmonieuse à l’atmosphère glaçante. « Moonshiner » se détache du lot, faisant la part belle à ses instruments sous forme de ritournelle planante et à la voix inimitable de Cat Power qui maîtrise autant ses envolées lyriques que ses chuchotements cassés. Difficile de ne pas se laisser porter, des papillons plein le ventre et des frissons parcourant  chaque millimètre de votre peau par cet objet entier que seul le format vinyle saura sublimer. Un must have pour habiller votre collection automne-hiver 2021 et prendre le temps de faire une pause au milieu de la vie qui reprend à toute allure.


Tous les ans, lorsque le mois de septembre pointe le bout de son nez, le moral descend. Malgré les folles promesses de l’automne, la reprise de la vie, les possibilités qu’apporte une nouvelle année, impossible de ne pas penser à la période estivale avec un point au coeur. Cette drôle d’année 2021 apporte pourtant, une fois n’est pas coutume, une rentrée bien particulière. Exit la nostalgie du soleil qui nous aura largement boudé cette année. A la place, il faudra compter sur un besoin furieux de revivre pleinement. Après des mois de fermeture pour de nombreuses salles de concerts, un timide retour de certaines d’entre elles au début de l’été, voilà que septembre est synonyme de réouverture pour la plupart d’entre elles. Une réouverture accueillie évidement avec une prudence extrême, transformant un moment de live en un fragile bijou de cristal  à tenir précieusement entre ses mains et à chérir.

Pam-Risourie_Popup-du-Label_2021
Photo : Louis Comar

La fin du mois d’août voyait rouvrir l’un des clubs chouchous de la capitale, le Pop Up du Label, son restaurant, sa salle underground à taille très humaine et sa terrasse. Si le lieu parisien avait pour habitude d’attirer les foules grâce à ses lives de qualité à bas prix et son atmosphère bouillonnante, le 1er septembre ne faisait pas exception à la règle. Bien au contraire, puisque la foule était venue s’entasser en masse dans et devant la fameuse salle. A l’extérieur, les tables prises d’assaut y étaient recouvertes de victuailles, bières, cocktails et autres tapas. Une baignoire  coupée en deux parties et ainsi devenue fauteuils venait parfaire un décors moderne face à une foule relativement jeune qui profitait de la soirée… assise ou non. Le temps avait enfin fait place à la clémence et c’est dans ce contexte bien particulier, d’une beauté festive enivrante, que pouvaient commencer à jouer les trois groupes  venus performer ce soir là face à un public bienveillant.

Du rock … sous toutes ses formes

Dans la petite salle obscure face au photomaton et au décors bétonnée, Sinaïve a la lourde tâche d’ouvrir le bal. Le quatuor strasbourgeois comme il se plait à le préciser en début de set, place un décors planant. Rock personnalisé s’il en est, le choix mélodique de la formation aime à jouer de ses instruments et ses riffs planant. Les intros travaillées se font longues et psychédéliques alors que des boucles de notes se répètent à l’infini. Le live du groupe se déguste comme un trip sous acide et pourrait avoir sa place en ouverture d’un festival. Un brin sombre, joliment contestataire, savamment aérienne, il se répète à l’infini avant que la voix grave et parfaitement posée de son chanteur à mèche noire ne vienne l’habiller. Originale, le groupe paritaire ajoute à ses instruments traditionnels des maracas. Le rythme est important pour nos compères qui prolongent leurs titres, les faisant passer par de nombreuses vagues et de nombreuses phases. L’ombre de The Smith plane sur le set et ce n’est pas le tee-shirt de la batteuse en hommage à Johnny Marr et son visage grave qui viendront contredire ce tableau. Le soin porté aux instruments est tel que l’ombre de Led Zepplin plane presque au dessus de la soirée. Bien plus garage que le groupe précédemment nommé, le combo ne lâche rien et redonne au rock son esprit libre et obscure.

Toutes les bonnes choses ont une fin, et il est temps de faire place à The Huile et son registre bien plus punk rock. Pour les mauvais élèves au fond de la salle qui n’auraient pas suivi, le ton décalé du quatuor ne laisse pas de doute quant à ses origines : l’évocation de la ville de Sens donne un indice supplémentaire. Vous ne l’avez toujours pas ? Pourtant la réponse est simple : le groupe compte parmi ses rangs un éminent membre des géniaux Johnny Mafia, la relève punk rock française. Avec l’énergie qu’on leur prête volontiers, nos musiciens se lancent dans un joyeux bordel organisé où les effluves de bière et de franches rigolades entre potes suintent derrière chaque note. Plus loquaces que leurs prédécesseurs, les copains n’hésitent pas à communiquer franchement avec leur audience. Ce qu’ils ont mangé et cette sauce « Il y avait un peu de soja je crois dedans, c’était délicieux » comme de leur manque de capacité à savoir quoi raconter « C’est d’ailleurs pour ça que je vous dis ça » sont tour à tour abordés. On rit volontiers au cours de ce four men show au bon goût de « Jackass ».  Pourtant l’heure n’est plus à l’humour quand les notes s’emballent. L’envie de pogoter pourrait bien se faire sentir alors que les refrains tranchant évoquent avec modernité un passé propre à la candeur des années 2000 autant qu’à la fougue des 70’s.  Le tout envoie franchement et fraîchement. Et alors que le temps passe une certitude se crée : sur scène, les musiciens auront toujours 20 ans et le public revivra cette insouciance encore et encore. Une cure de jouvance !

Pam Risourié conclut la soirée en une ritournelle

Il est 22 heures bien sonnées quand la tête d’affiche de la soirée, Pam Risourié fait son apparition scénique. Ceux qui travaillent actuellement à la sortie de leur premier album ont une longueur d’avance : la qualité indéniable de leurs morceaux. Voix aérienne, apaisante et maîtrisée se fait l’écho divin d’instruments rock aux tonalités rêvées. En version enregistrée, tout n’est que beauté chez Pam Risourié. Les airs sont lancinants, écrits et harmonieux. Sur scènes les titres s’enchaînent avec fluidité. Si la petite scène ne permet que des pas restreints, les hochements de têtes sont nombreux. Nos musiciens vivent pleinement leurs performance. Dehors, alors que la salle pleine à ras-bord n elle, n’en perd pas une note, le monde s’est arrêté. Seule persiste une performance millimétrée où chaque soupire a sa place et son importance. Les morceaux tapent fort dans les corps et dans les coeurs, entraînant un tourbillon aussi apaisant que positif. A pas de velours, le groupe crée son nid avec professionnalisme. Les looks travaillés de ses acolytes s’ajoutent à ce moment sensible et poétique comme une ritournelle. La musique masse les esprit sans oublier de chauffer une foule qui oscille en rythme.

La tristesse de ce Monde tient sûrement en ses finalités. On ne saurait retenir un moment indéfiniment même lorsqu’il est la promesse d’un automne heureux, d’un renouveau nécessaire. Il faut alors quitter la salle et respirer l’air parisien, certes moins chaud avec la nuit maintenant installée. Pour garder l’instant encore un peu contre soi, les éclats de rire se font entendre sous les arcades, il faudra se décaler doucement mais sûrement, jusqu’à quitter ce lieu à pas de velours et le sourire aux lèvres.


Grandma's Ashes - Daddy Issues
Photo : Angela Dufin

Avec leur premier EP « The Fates »  sorti en janvier 2021, les Grandma’s Ashes ont déjà de belles choses à proposer.  Pour continuer à emmener leur public dans leur univers à la fois stoner, goth et absurde, elles dévoilent le clip de « Radish Cure » le deuxième titre de l’EP à avoir droit à sa vidéo.

 

 

Ceux qui ont eu la bonne idée d’acheter le vinyle du groupe ont pu découvrir la recette magique de cette cure de radis glissée dans la pochette. Pour les autres il faudra se contenter de l’atmosphère si particulière de ce clip déroutant. Dès le début, le décors est planté : boule à facettes, corps allongé sur un canapé, ballon à la « Ça » de Stephen King et des radis un peu partout. Mais quelle est donc cette obsession du trio pour le radis ? L’intro du morceau se colle parfaitement à l’image. Basse, guitare et batterie semblent jouer chacune de leur côté des sons expérimentaux semblables à une sorte d’échauffement.

À l’instant où le corps allongé commence à se réveiller, la mélancolique voix d’Éva vient se poser sur la musique. Alors que l’homme reprend ses esprits, chaque ingrédient du morceau s’accorde enfin pour lancer pleinement « Radish Cure ». Dans ce titre, il est seulement mardi et pourtant la gueule de bois se fait déjà ressentir, le réveil est difficile mais le rythme du morceau, assez lent, s’adapte bien à ce mood. Dès qu’il se met debout, l’homme cherche à retrouver ses esprits, il explore l’environnement qui l’entoure, essaye de comprendre ce qu’il s’est passé. Le sol est jonché de radis et il les inspecte tel un enquêteur afin de résoudre la situation mystérieuse dans laquelle il se trouve.

C’est alors que tels des démons, les trois Grandma’s Ashes se mettent à lui scander/chanter au visage « Radish Cure is for the weak ». À partir de ce moment le morceau s’emballe, tout va beaucoup plus vite, et le clip n’est plus uniquement centré sur l’homme, mais aussi sur ses démons : les Grandma’s Ashes.

Le trio emmène alors l’homme et le spectateur dans une descente aux enfers guidée par la musique et l’image. Dans un calme déconcertant, la bande accompagne cet homme fuyant ses démons à un rythme effréné par des riffs percutants. Mais cette fuite semble veine et la situation à laquelle l’homme tente d’échapper s’avère éternelle, un peu comme les paroles de cette chanson qui résonnent encore dans les tête bien après que le morceau soit fini.

Avec ce titre clipé, les Grandma’s Ashes montrent beaucoup de choses, mais il ne faut pas se tromper. Ici, ça ne parle pas gueule de bois ou bien de remède de grand-mère, le groupe de rock stoner s’exprime plutôt sur l’addiction et la difficulté d’en sortir. Le tout est savamment orchestré dans ce titre très bien maitrisé musicalement. L’écoute de « Radish Cure » n’est pas de tout repos mais elle en vaut la chandelle.