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Julia Escudero

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Affiche américaine d’A couteaux tirés


Dans le cadre du Club 300 d’Allociné était projeté au Forum des Images, A couteaux tirés, le dernier film de Rian Johnson, le metteur en scène de Looper et des Derniers Jedi. Au programme, une enquête façon  » Agatha Christie » convoquant un casting hollywoodien mirifique ( Daniel Craig, Chris Evans, Jamie Lee Curtis…). Un film plus « sage » pour celui qui a défrayé la chronique il y a deux ans avec le controversé Episode VIII de la saga Star Wars? Critique ( sans spoiler).

A couteaux tirés : De quoi ça parle ?

La famille Thrombrey au grand complet.
A couteaux tirés

Célèbre auteur de polars, Harlan Thrombey ( Christopher Plummer) est retrouvé mort dans sa somptueuse propriété, le soir de ses 85 ans. L’esprit affûté et la mine débonnaire, le détective Benoit Blanc ( Daniel Craig) est alors engagé par un commanditaire anonyme afin d’élucider l’affaire. Mais entre la famille d’Harlan (comportant rien de moins que Jamie Lee Curtis, Don Johnson, Chris Evans, Michael Shannon, Toni Collette, Katherine Langford et Jaeden Martell) qui s’entre-déchire et son personnel qui lui reste dévoué, Blanc plonge dans les méandres d’une enquête mouvementée, mêlant mensonges et fausses pistes, où les rebondissements s’enchaînent à un rythme effréné jusqu’à la toute dernière minute.

A couteaux tirés : Est ce que c’est bien ?

Image extraite d’A couteaux tirés, de Rian Johnson

Après le tumulte né de la réception de « son » épisode de la saga Star Wars, on avait plus trop entendu parler de Rian Johnson. Le réalisateur américain qui avait gagné en visibilité avec le sympathique et rondement mené Looper en 2012 revient avec un film d’enquête sur un meurtre commis dans une maison bourgeoise. Faux semblants. Famille richissime se déchirant l’héritage familiale. Suspects multiples avec chacun de bons mobiles. Cadre luxueux. A couteaux tirés a tout d’un Cluedo de luxe. Un simple divertissement ? Un bonbon sucré pour faire passer la pilule amère (selon certains) des Derniers Jedi? Pas seulement…

Car, encore une fois, Rian Johnson prend un malin plaisir à jouer avec les attentes du spectateur. Sans spoiler quoi que ce soit, car comme l’a si bien dit Johnson dans sa présentation du film, « don’t tell your friends who done it, because it’s a whodunit« , le film a cette qualité rare qu’il ne ressemble pas à ce que la présentation laisse entendre. Ainsi, le personnage principal du film n’est-il pas Daniel Craig, le détective Benoit Blanc, ersatz d’Hercule Poirot dont nous suivrions l’enquête pas à pas pour découvrir qui est le meurtrier d’Harlan Thrombey. Le cœur du donut  de l’intrigue d’A couteaux tirés est dans le cheminement du personnage de Marta, incarné par Ana de Armas, qui confirme le potentiel aperçu dans Knock Knock, mais qui est, de prime abord la moins « connue » du casting pléthorique du film. Ainsi, même les personnages secondaires des plus jeunes membres de la famille Thrombey sont incarnés par Katherine Langford ( inoubliable Hannah Baker de 13 reasons why) et Jaeden Martell ( le Bill Denbrough enfant dans la nouvelle saga Ça ).

Ponctué de nombreux rebondissements, baladant le spectateur de statu quo en statu quo en le prenant constamment à contre-pied et usant savamment de l’humour ( on ne « sort » jamais de l’intrigue pour autant), A couteaux tirés est une franche réussite. En détournant les codes du « whodunit » pour mieux les sublimer, le film surprend agréablement par sa finesse et son aspect plaisant.  De plus, Rian Johnson, se faisant plaisir, réussit à glisser deux-trois piques à l’Amérique de 2019 clivée irrémédiablement entre Démocrates et Républicains pour mieux renvoyer toute cette famille richissime dos à dos concernant l’hypocrisie de leur rapport de classe envers l’extérieur. Enfin, une dernière petite flèche du Parthe glissée sur la vacuité de s’attacher autant à la notion d’héritage, comme un message adressée aux nombreux haters lui étant tombé (injustement) dessus après l’Episode VIII achève de nous convaincre d’avoir passé un excellent moment avec un thriller drôle, rythmé, plaisant et excellemment interprété. Un agréable moment proposé par Rian Johnson avec sa partie de Cluedo de luxe !

 

Affiche de l’exposition Vampires : De Dracula à Buffy à la Cinémathèque française

Du 9 octobre 2019 au 19 janvier 2020 se déroule l’exposition Vampires : De Dracula à Buffy à la Cinémathèque française. Dans le cadre du Club 300 d’Allociné, une présentation de cet événement transmedia était proposé. Cinéma, littérature, peinture et contre culture s’offrent à nous pour parler de l’un des mythes les plus anciens de l’Histoire. Présentation.

Existant depuis l’Antiquité, le mythe du vampire a commencé à s’enraciner dans le folklore populaire européen durant un Moyen Age connaissant son lot de guerres incessantes. La littérature ne va pas manquer de s’emparer du mythe vampirique et c’est avec la parution de Dracula de Bram Stoker en 1897 que la figure du vampire rentre définitivement dans l’inconscient collectif. Le cinéma, balbutiant Septième Art à la naissance contemporaine de la sortie du livre va s’emparer rapidement du sujet. Bela Lugosi et Christopher Lee vont se retrouver de façon indélébile associés à la figure du vampire. David Bowie, Tom Cruise ou bien encore Robert Pattinson prêteront leurs traits à ces créatures de la nuit de façon marquante. Mais le vampire ne va pas marquer que le cinéma de son empreinte, l’icone imprègne d’autres champs artistiques pour faire passer des messages parfois même politiques.

Vampires : De Dracula à Buffy : En quoi ça consiste ?

Nosferatu, de Murnau (1922)

L’exposition Vampires : De Dracula à Buffy se compose de 5 sections. La première,  » Vampires historiques » revient sur les origines moyenâgeuses du mythe et son explosion à l’ère victorienne. La deuxième,  » Vampires poétiques« , nous montre l’impact dans l’inconscient qu’a eu la figure du vampire avec l’apparition de la notion de « vamp » par exemple. La troisième section est celle des « vampires politiques« , ou est démontré à quel point la figure du non mort peut être un symbole de métaphore et de dénonciation. La quatrième section,  » Vampires érotiques » et enfin la dernière section «  Vampires pop » finissent de démontrer l’influence du vampire dans l’imaginaire contemporain à travers les différentes formes d’expressions artistiques.

L’exposition Vampires : De Dracula à Buffy se veut plurielle car, en plus de l’exposition à proprement parlé, plusieurs autres activités seront proposés jusqu’au 19 janvier prochain. Des activités Jeune Public pour que les plus jeunes puissent aussi s’initier à leur façon au mythe du vampire. Les Jeudis Jeunes, chaque premier jeudi du mois, ou débats et projection de film en fonction de thématiques données seront organisés. Il y aura aussi une Nuit Halloween le 31 octobre avec la projection de Hurlements, Une Nuit en Enfer, Land of the Dead et enfin un film surprise! Des conférences ainsi que la projection de pratiquement une cinquantaine de films en lien avec le mythe vampirique tout au long de l’exposition !

Vampires : De Dracula à Buffy : Est ce que c’est bien?

Nosferatu, version de Werner Herzog

Présentant la figure du vampire sous toutes ses formes, l’exposition Vampires : De Dracula à Buffy est vraiment complète et riche en influences, extraits de films, affiches et costumes. Une véritable mine d’informations et un ravissement pour les yeux. Faisant la part belle au travail de Werner Herzog et son équipe sur Nosferatu mais aussi à Bela Lugosi ( et le The Kiss de Wahrol), ne négligeant pas l’aspect érotique ou bien encore politique que peut avoir le vampire, l’exposition donne envie d’en apprendre encore plus sur Irma Vep, Carmilla ou bien encore Theda Bara. Enfin, ravissement à ne pas négliger le splendide travail d’Eiko Ishioka sur le Dracula de Coppola avec des croquis originaux et la présence des costumes de Gary Oldman et Winona Ryder ! Un événement à ne pas manquer

Retrouvez plus de détails sur l’exposition en cliquant juste ici !

Image extraite de The Lighthouse
Droits réservés : A24

Dans le cadre de la 25ème édition de l’Étrange Festival, au Forum des Images à Paris, était projeté le second film de Robert Eggers, The Lighthouse avec en tete d’affiche rien de moins que Willem Dafoe et Robert Pattinson. Au programme, une étrange variation sur la folie. Et une des plus grandes attentes du festival. Critique.

Trois ans après la sortie de son premier film The Witch, qui avait beaucoup fait parler de lui, le prometteur Robert Eggers fait de nouveau parler de lui avec la sortie de son second long métrage, The Lighthouse. Doté d’un solide casting, la nouvelle production de A24 ( dont on vous avait déjà dit grand bien) était très attendue à l’Étrange Festival et s’est même vue décerner un prix au dernier Festival du Film Américain de Deauville. Est ce que Robert Eggers a confirmé les attentes placés en lui, tel qu’Ari Aster a pu le faire cet été avec son second long métrage Midsommar ?

The Lighthouse : De quoi ça parle ?

Image extraite de The Lighthouse, de Robert Eggers
Droits réservés : A24

A la fin du XIXème siècle : sur une île déserte, au large de la côte nord-est des États-Unis, Tom Wake ( Willem Dafoe) et son nouveau collaborateur Ephraim Winslow ( Robert Pattinson) viennent prendre leur poste de gardiens de phare, pour quatre semaines. En théorie, ils doivent se relayer; mais Tom, expérimenté et autoritaire, tient à être le seul à passer les nuits en haut de la tour, condamnant le taciturne Ephraim à exécuter les basses tâches. S’installe alors un bras de fer toujours plus noir entre deux âmes perdues au bord de la folie, confrontées tant à leur solitude qu’aux démons du passé. D’autant qu’une fois les quatre semaines écoulées, l’arrivée d’une tempête les empêche de quitter l’île…

The Lighthouse : Est ce que c’est bien ?

Image extraite de The Lighthouse
Droits réservés : A24

A la sortie de The Witch en 2016 (en France), Robert Eggers avait bénéficié d’une hype importante, voire un peu démesuré. Si son premier film était formellement impressionnant par sa maîtrise, il n’était pas pour autant le chef d’oeuvre définitif qui était annoncé. Il faut dire que des chefs d’oeuvre définitifs censés bouleverser le cinéma de genre, il en est annoncé trois ou quatre par an, mais ceci est une autre histoire… Que vaut donc au final The Lighthouse? Il est souvent coutume de distinguer forme et fond. Dans le cas de The Lighthouse, c’est encore plus significatif.

Dans la forme tout d’abord. Aucune contestation possible, Eggers sait manier une caméra. Avec un format 4/3 auquel le spectateur contemporain n’est plus habitué, noir et blanc sublime au teint granuleux, The Lighthouse époustoufle par sa beauté plastique. Habilement éclairé, le filmage met clairement en valeur tant les deux comédiens que les décors, aussi bien intérieurs qu’extérieurs de cette île sur laquelle se retrouvent piégés les deux gardiens de phare. La gestion des plans et du montage de ceux ci impressionne par son infaillibilité. Mais si la forme est indéniablement maîtrisée, au service de quel fond opère cette leçon visuelle?

C’est là toute la délicatesse d’évaluer The Lighthouse. Car si la mise en scène d’Eggers illustre parfaitement certaines scènes du film, mises bout à bout on a bien du mal à comprendre ce qu’elles peuvent raconter. L’histoire qui se veut une variation sur la folie contaminant progressivement deux êtres que tout oppose devant cohabiter pendant une période donnée joue le trouble. Le hic étant qu’elle le joue trop pour son propre bien. A jouer sur la confusion de temporalité, de personnalité (tant de Tom qu’Ephraim) mais aussi d’intentionnalité, The Lighthouse finit par se perdre en chemin. Il est facile de comprendre l’intention d’Eggers à vouloir brouiller les pistes pour mettre en avant la thématique principale de la folie.

Mais à trop jouer sur la confusion, les ruptures de ton ou accumuler des scènes mystérieuses laissant place à l’interprétation, une fois le film terminé, on est pas vraiment surs de savoir ce à quoi on a pu assister. Il est indéniable que le film est magistralement mis en scène. Aussi indéniable est la performance commune de Willem Dafoe et Robert Pattinson, impressionnants tout les deux dans un jeu constant d’ascendance réciproque. Mais, il est frustrant de voir que The Lighthouse apparaît plus comme un exercice de style maîtrisé plutôt qu’une véritable dramaturgie aboutie, comme pouvait apporter la conclusion de The Witch. Un film un peu fou sur la folie, qu’attendre de plus d’une oeuvre projetée à l’Étrange Festival ?

Pour vous faire une idée sur The Lighthouse, en salles le 18 décembre 2019 :

Greener grass etrange festival

L’ Etrange Festival a posé ses valises au forum des images de Paris pour faire la part belle au cinéma de genre mais pas que. L’un de plus étranges films de cette édition 2019 n’est autre qu’une comédie complètement barrée « Greener Grass » de Jocelyn DeBoer et Dawn Luebbe. Le duo féminin adapte ainsi son court-métrage du même nom pour en faire l’une des comédies les plus décalées que l’on aie vu ces dernières années.

 

Greener Grass de quoi ça parle?

Jill et Lisa vivent dans un quartier de banlieue idyllique. Lorsque Jill, dans un geste altruiste, offre son nouveau-né à Lisa, la paranoïa la submerge, tandis que ses peurs et ses angoisses se dénouent rapidement.

 

Greener Grass: est-ce que c’est bien?

 

Quelques secondes suffisent au métrage pour mettre les spectateurs dans l’ambiance loufoque de cette banlieue américaine propre et lissée où chaque défaut d’une société ultra-normée est décuplé. Les deux réalisatrices prêtent ainsi leurs traits à leurs personnages principaux. Sur un filtre ultra-coloré et un grain année 80, nos deux housewives offrent un dialogue aussi absurde qu’un roman de Boris Vian. Nombreux sont ceux à se frotter à la comédie à s’y casser les dents: Greener Grass n’est pas de ceux-là, elle réussit où d’autres échouent à être réellement drôle et décalée, à s’offrir le luxe d’être un OVNI complet. Un prix reçu au festival de Sundance vient d’ailleurs prouver ce point.

Le film pousse tous ces propos à leur paroxysme. Qu’est-ce que la norme dans une banlieue américaine? Et bien c’est ce que les autres estiment être normal semble répondre les réalisatrices qui se jouent des apparences. On y suit Jill, qui après avoir donné sa petite fille perd doucement pieds. Sa descente aux enfers et à contre-pied de Lisa qui elle profite des défaites de sa voisine pour gravir les échelons et devenir la « housewife » la plus en vue du quartier.

Le film a été comparé à du David Lynch par différents médias lors de ses précédentes projections. Difficile d’aller à leur encontre. Cette oeuvre complexe n’épargne en effet rien au spectateur qui assiste au scènes les plus incroyables gérées pourtant par les protagonistes comme quelque chose d’absolument normal. D’un enfant qui se transforme en chien pour le plus grand plaisir de son père, au divorce parce que les copines pensent que ça peut être une bonne idée en passant par un transport uniquement en voiturettes de golf, un bébé ballon et un vomi socialement acceptable, le fantastique côtoie de près cette oeuvre aussi acide que pastelle.

La télévision nocive pour les enfants y est pointée du doigt tout comme la bêtise accablante de certains programmes proposés sur petits écrans, tout y est moqué. Et qu’importe toutes les bonnes intentions que l’on aura l’important étant d’être bien jugé par son voisinage, de mettre le bon nombre de couches dans les plats que l’on cuisine, de ne pas être humilié par ses enfants et d’avoir l’air européen.

A tout moment nos anti-héros gardent un sourire qui ne décolle jamais de leur visage et arborent un appareil dentaire. C’est le cas de tous les adultes qui ne se comportent pas mieux qu’une bande d’adolescents, qui cherchent à se parfaire et qui s’imitent sans cesse.  C’est d’ailleurs sur ce plan de sourire forcé et d’appareil dentaire que s’ouvre ce métrage à tiroirs dont chaque scène pourrait être un sketch savamment écrit.

Face à une histoire de cette acabit, il n’y a rien d’étonnant à retrouver au casting D’Arcy Carden, drôlissime Janet de The Good Place en maîtresse d’école baptisée Miss Human. Tout comme Janet, ce personnage ne perd jamais son sourire et semble proposer d’éduquer les enfants par des biais moins bienveillants qu’il ne le faudrait.

Greener Grass n’est également pas sans rappeler Black Mirror et son épisode « Chute Libre » où Lassie se voit dégringoler à toute vitesse les échelons sociales suite à de mauvaises notes sur son comportement. Dans sa trame narrative du moins puisque le film dénonce une société aussi absurde que ses scènes et non les dangers des nouvelles technologies.

Difficile de trop en dire sans risquer de spoiler les éléments clés de ce film profondément drôle, déroutant et à voir absolument.

Une sortie américaine est déjà prévue le 18 octobre, en France, comme toujours, la question d’une sortie en salles obscures reste encore un mystère.

 

L’Etrange Festival se clôturera le 15 septembre 2019, rendez-vous au Forum des Images.

Découvrez le trailer de Greener Grass