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Julia Escudero

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Archibald sortait le 24 avril un album bien particulier intitulé « Out of Sight ». Ce dernier avait en effet été composé au court d’une résidence artistique en plein milieu de l’Arctique au Groenland. Pour Roxane Terramorsi, chanteuse du groupe, c’est l’occasion de composer un opus unique, mettant féminité et compositions aussi froides que percutentes en avant. Celle qui est biologiste de formation excelle à transposer la force et la liberté de la nature dans ses compositions. Avec elle on aprle écologie, crise du Covid-19, résidence artistique, liberté et création. Rencontre.

Archibald« Out of Sight » a été composé à la suite d’une résidence d’artiste au milieu de l’Arctique, que peux-tu nous dire de cette expérience ?

Il s’agit d’un cadeau de la planète, un cadeau de la vie. Pouvoir circuler librement dans ce monde, cette partie du monde, qui nous est quasiment inconnue. Au-delà du cercle polaire, être vivant ne procure pas les même sensations: L’air dans ses poumons, la lumière, le sol enneigé, le froid sur sa peau, le rapport à la nourriture (le besoin réel de manger pour survivre au froid et pas simplement par plaisir ou habitude)… rien n’est identique. Plus que jamais, j’ai eu la sensation de voyager et de faire voyager mon corps et mon esprit à la découverte d’une partie de moi-même, à la découverte d’une partie du monde auquel j’appartiens et que je ne connaissais pourtant pas.

Comment toute cette aventure s’est-elle mise en place pour toi et pourquoi t’était-il important de la vivre ?

J’ai découvert la résidence via un post Facebook. J’ai postulé avec un dossier à l’appui. Je n’ai pas été sélectionnée en 2018, mais il ne faut jamais abandonner ses rêves ! J’ai postulé une seconde fois en améliorant mon projet et mon dossier. Mon projet et la ténacité de ma motivation ont payé auprès du jury et j’ai eu l’immense plaisir d’appartenir à la résidence d’hiver 2019. Quand j’ai vu le post la première fois sur Facebook, j’ai su que cela m’était destiné… je ne peux pas le décrire autrement. Je sentais un alignement profond entre mes désirs et la proposition du Manguier. Moi qui collectionne les livres sur les explorateurs polaires et les femmes aventurières ! Je salue au passage l’audace du capitaine et de son association d’oser mettre en place de telles choses. C’est un pari compliqué, bien plus qu’il n’y paraît, de tenter d’entreprendre une résidence artistique dans un désert de glace.

Le mot  liberté face à ces grands espaces revient régulièrement dans ton communiqué de presse. Penses-tu qu’il faille se rapprocher de la nature pour redonner son vrai sens à ce mot ?

Le vide autour de soi, l’absence d’urbanisation est souvent associée à la sensation de liberté. C’est vrai que le dépaysement, le dépouillement du paysage de ses atours anthropiques crée une sensation de plénitude. Voir l’horizon apporte beaucoup de réconfort à l’esprit. Mais à mon sens, c’est plutôt l’absence d’étiquette qui m’a donné accès à cette liberté. Je suis arrivée inconnue des personnes avec qui j’allais passer un mois en huis clos, inconnue des inuits que nous avons rencontrés, et même un peu inconnue à moi-même, puisque j’ai découvert des facettes de ma personnalité et de ma créativité qui ne s’étaient pas encore révélées. Arriver dans une nouvelle aventure avec un minimum d’a priori sur soi et les autres dans ses bagages, voilà pour moi la véritable liberté.

 

nous ne nous créons pas en pensant à la réception.

 

Peut-on être entièrement libre dans ses compositions, sans aucune contrainte qu’elle soit matérielle ou liée à l’importance de la réception de ses créations par l’autre ? L’as-tu été lors de la composition de cet opus ?

J’ai composé cet opus avec Nicolas Gardel, mon compagnon et co-leader d’Archibald. Oui, on peut être libre : avec un papier et un crayon, on écrit ce que l’on veut. Dans la mesure où l’on écrit pour un groupe en particulier, avec une direction artistique donnée, il y a un cadre. Pour autant, ce n’est pas parce qu’il y a un cadre que l’on n’est pas libre. Le cadre augmente même souvent notre créativité. En revanche, nous ne nous créons pas en pensant à la réception. C’est un des grands avantages de l’artiste auto-entrepreneur, modèle que nous avons choisi. Les seules contraintes que nous devons respecter sont celles que nous nous imposons, et nous les choisissons pour qu’elles soient en adéquation avec nos désirs et nos valeurs artistiques. Nous ne cherchons pas à répondre ou créer des besoins pré-établis de la part d’un auditoire, ce qui, à mon sens, ferait de la création un acte purement commercial. Nous sommes convaincus que si nous sommes honnêtes dans notre création, que nous sommes nous-même heureux de notre musique alors d’autres personnes peuvent l’être aussi. Nous travaillons le plus possible pour créer une oeuvre qualitative et pleine de sens ; ensuite nous la livrons au « monde ». La façon dont celui-ci le reçoit nous dépasse quelque peu. Mais quand ça plaît, cela nous réjouit bien entendu.

Quand on pense à l’Arctique aujourd’hui, on pense écologie, aimerais-tu  dire un mot sur ce sujet ?

Certainement. Je suis biologiste de formation et ces études ont marqué mon démarrage dans l’âge adulte. Je pense que les études que nous choisissons sont capitales, non pas pour ce qu’elles contiennent comme information mais pour ce qu’elles portent comme axe de réflexion et comme portée philosophique. Ces études, que j’avais choisies délibérément, m’ont encore plus appris à aimer la vie. S’en dégage une harmonie, un équilibre dynamique, des va-et-vient plutôt que l’individualisme, l’isolement, la séparation. Nous formons un tout, nécessairement, dont on ne peut se défaire. Si la Californie brûle, le couché du soleil est plus rouge en France… Nous sommes ensemble. Et l’Arctique est fondamental dans cet équilibre. Aujourd’hui, les résidences d’hiver en Arctique sur Le Manguier sont contraintes de cesser faute de glace. Je vous invite à lire le blog du Manguier : https://lemanguier.net/2020/10/02/fin-des-residences-dartistes-en-hiver-par-phil-le-marin/

Le manque de glace est catastrophique pour les raisons que vous connaissez déjà et s’inscrit dans un cercle vicieux. Mais sur place, cela signifie aussi que les populations d’hommes et d’animaux sont coincées. Pour vivre dans les pays polaires, on a besoin de la glace… pour marcher dessus ! Sans glace, pas de possibilité de se rendre en ville, à l’hôpital, pas de possibilité de chasser le gibier marin en s’approchant de la mer profonde. Les populations sont contraintes à un isolement terrible et les animaux sont privés de leur écosystème pour vivre. Vous pensez que l’on peut remplacer ça par des bateaux ? Non. Car si la banquise n’est pas formée solidement, la mer reste jonchée de plaques de glace à la dérive qui empêchent les petits bateaux des habitants de circuler et les phoques d’avoir un lit pour dormir. Quand la glace aura complètement fondu, les populations pourront peut-être se réinventer, mais en attendant, c’est catastrophique pour eux à court terme. Evidemment, à long terme, c’est catastrophique pour l’ensemble de la planète qui devra retrouver un équilibre dans lequel nous et d’autres espèces ne nous inscrirons sans doute pas. J’engage tout le monde à faire un effort minimum d’une façon ou d’une autre pour réduire son empreinte écologique. Tout compte. Voyons grand et commençons petit !

Aurora, Malina, Sedna, Lady Cairn, ce sont des femmes qui se racontent à travers tes morceaux, pourquoi ce choix ?

En réalité, ce n’est pas un choix, c’est un fait. Ca s’est fait ainsi et, cependant, ce n’est probablement pas un hasard. Pas un choix conscient, mais un choix naturel, celui de ma nature, ma nature de femme, d’aventurière. Lady Cairn est complètement liée à ma propre expérience de création par improvisation dans le paysage. Sedna est LA figure mythologique Inuit. Aurora et Malina sont venues spontanément compléter ce tableau de femmes.

Ma démarche s’inscrit dans une approche naturaliste de l’art, en passant par une phase d’observation, reliquat de mon passé de biologiste.

Le froid et la nature se font entendre dans tes compositions, quel a été ton cheminement pour que ces illustrations visuelles ressortent dans ta musique ?

Mes compositions, textes ou idées d’arrangement sont toujours directement issues de paysages, d’images réalistes ou non. Ma démarche s’inscrit dans une approche naturaliste de l’art, en passant par une phase d’observation, reliquat de mon passé de biologiste. Je suis aussi issue du spectacle vivant, où l’on donne à vivre dans le cadre fermé du théâtre, de la scène, de cette boîte noire, des espaces et des personnages qui n’y sont pas. On fait appel à l’imaginaire mais on lui donne chaire, organiquement par le corps, la voix, le son, la mise en scène…  C’est la fusion de ces deux facettes, théâtre et naturalisme, de ma personnalité qui rend peut-être ces sensations. Je suis d’ailleurs très contente de savoir que vous ressentez le froid et la nature dans ces titres.  Encore une fois, je n’ai pas cherché des éléments qui évoqueraient le froid pour en faire un tableau, une carte postale. J’ai créé sur la base de mes propres sensations. Savoir que cela est passé de vous à moi… c’est une véritable réussite, sur laquelle je n’ai, en fait, pas le contrôle.. ce qui la rend encore plus touchante. Merci de les avoir partagées avec moi.

Chants inuit et voix bulgares s’ajoutent à tes morceaux, comment as-tu travaillé ce choix ? As-tu fait des découvertes en travaillant avec ces cultures ?

J’ai toujours aimé le chant bulgare. Les voix bulgare sont si … pures. Pas douces ! Mais pures, ne pas confondre.  A l’inverse le chant de gorge, ou Katajak est rauque. Les deux font un bon mélange. Je n’ai pas eu le plaisir d’entendre de chant inuit sur place. J’ai donc fait appel à d’autres sonorités éthniques non françaises, pour invoquer un dépaysement sonore et faire ce travail de rapprochement entre deux cultures, même si ce n’était pas strictement polaire. J’aime la puissance et la pureté qui se dégage du chant bulgare, qui a la réflexion, est tout à fait à l’image des paysages polaires. D’autre part, inuit signifie «  être humain ». A ce titre, j’avais aussi envie d’englober le genre humain dans sa totalité et non pas dans l’esprit d’une carte postale uniquement polaire. J’entends que ce que j’ai vécu sur place, et ce que vivent les peuples circumpolaires, dépasse ces frontières.

Il y a beaucoup à faire artistiquement en l’absence de salle de spectacle

Difficile aujourd’hui de se détacher de la crise du CoronaVirus et de ses répercussions sur l’industrie musicale.  Comment vis-tu cette actualité en tant que musicienne ? 

Cette situation développe ma résilience, me donnant l’occasion de repenser mon approche du métier : entreprendre de nouveaux projets, probablement à plus petite échelle, plus locale, et élargir mon champ de compétences pour diversifier mes activités. En ce moment,  je réalise un clip pour une autre artiste et je n’aurais jamais imaginé faire cela il n’y a ne serait-ce qu’un an ! Il y a beaucoup à faire artistiquement en l’absence de salle de spectacle … et en absence d’industrie musicale. C’est à cela que je pense.


Le 1er octobre 2020 était un jour charnière pour l’Ile-de-France. Si le ministre de la santé ne renforçait pas des mesures très strictes déjà mises en place, il promettait un durcissement  dans les jours à venir.

Le Chorus des Hauts-de-Seine, lui avait déjà été annulé en avril, confinement oblige, sans pouvoir s’offrir une reprogrammation en 2020. Parmi ceux qui avaient parier sur un retour à la normal avec la rentrée, l’horrible douche froide était au goût du jour, ainsi la Jimi se voyait contrainte de tout annuler alors que le MaMA maintenait en croisant les doigts son édition. Le Chorus lui, avait choisi d’offrir malgré tout un concert gratuit à ses 6 finalistes. 6 groupes, 6 registres, 6 talents qui remporteraient exceptionnellement tous le prix Chorus et donc pour paraphraser le chanteur de We Hate You Please Die,  » de la thune, on devrait faire ça à chaque fois en ne choisisssant pas un vainqueur unique. »

L’hiver s’était déjà abattu sur la région depuis une semaine, passant du jour au lendemain de l’été aux pluies torrentielles. Heureusement, ce soir là, la douceur laissait présager la possibilité de s’approcher de la terrasse  durant les 15 minutes d’entracte entre deux concerts de 30 minutes. Etrangement vide, malgré un remplissage complet dans la mesure des normes sanitaires (comprendre toute petite jauge), la Seine Musicale se découvrait aux spectateurs. C’est l’auditorium qui accueillait l’évènement. La plus grande salle, réservée habituellement aux spectacles de musique classique, permettait ainsi un bon éloignement entre chaque convive et donc une véritable sécurité. C’est dans ce contexte bien particuliers que débutait le festival d’un soir.

Fils Cara

C’est à Fils Cara que revient la tâche d’ouvrir les festivités. Dans la salle, tout le monde se sépare d’un siège minimum, d’un rang parfois, le public est attentif, bienveillant, attristé de ne pas pouvoir danser et bouger et d’être contraint de simplement applaudir les artistes. Le chanteur solo est accompagné d’un clavier. On pourrait volontiers lui prêter les qualités d’un Eddie De Pretto dans sa faculté à alterner l’urbain et le phrasé à la chanson. Moderne et bienveillant, il est habillé d’une aura de lumière qui confère à son set une belle intimité. Comme tous ce soir-là, il n’hésite pas à remercier chaleureusement l’organisation  et le public, conscient de faire partie des rares artistes à même de s’offrir une date. La sincérité transparait dans son live, le soin pris à chaque morceaux, la voix apaisante. Il y a un grain de folie chez Fils Cara et une touche de sérieux, il y a de la beauté dans ses notes et une facilité à appréhender son univers, instinctif, dans l’air du temps et pourtant novateur. « Vous connaissez Proust ? Je l’ai toujours trouvez illisible » s’amuse le musicien, parlant d’un passage particuliers de l’oeuvre du célèbre auteur avant de conclur face à une foule illare « Le prochain morceau n’a rien à voir avec ça j’avais juste envie de vous en parler. » Sa place est sur les plus grandes scènes face à un public conquis. C’est toute la carrière qu’on lui promet. Trente minutes c’est vite passé, voilà déjà les lumières qui se rallument, 15 minutes plus tard, la fête reprend.

Global Network

Global Network prend le relais. Au programme : deux musiciens électro pop  l’un au synthé, l’autre au chant et aux consoles. Le set commence bien, d’autant que les compères profitent d’une sympathie naturelle et d’une voix comme l’on retrouve dans les meilleurs titres électros radiophoniques. Et puis un problème technique vient obscurcir le tableau. A ce point ? Du tout puisque finalement côté spectateur le manque d’une console ne se ressent pas à l’oreille. D’ailleurs lorsque les perfectionnistes tentent le tout pour le tout pour réparer le méfait, l’ambiance est à la rigolade tant les showmen assurent en continuant de parler et d’intéragir avec la foule. « C’est dommage vous ne verrez pas le set complet, mais on joue à Nior samedi, venez à Nior » s’amusent-ils  » Heureusement que tout le monde est récompensé cette année, sinon les autres groupes vous auriez eu un concurrent en moins. » poursuivent-ils. Un faux départ sur « Congratulations »  »  Autant tout mal faire » continue de faire rire une salle pourtant hyper réactive à la musique et qui finit par se dandiner franchement sur son siège à mesure que les titres défilent. La qualité est là, la capacité à gérer dans de mauvaises conditions aussi et le jeu de lumière parfait s’ajoutent au moment et donne à ce duo une belle note de profesionnalisme qui fait plaisir à voir et écouter.

We Hate You Please Die

Changement de registre et excellence sont mot d’ordre lorsque débarque sur scène la folle tornade de We Hate You Please Die. Quatuor mixte, deux filles, deux garçons, complètement rock, hallucinante et jusqu’au-boutiste. Les bêtes de scène sont déchaînées et modernisent même le  « screamé » en lui ajoutant des notes d’indé, de punk, de psyché et de radicalité. Pas évident du coup de ne pas avoir envie de pogoter pour le public, de sauter, se déchaîner, se laisser vivre. Le chanteur en a conscience lui qui vient de « Rouen où on porte le masque depuis des années. » Il confie même « C’est aussi ma première pandémie ». Le combo est habité par sa musique, la batteuse nerveuse et puissante rythme avec beauté le moment. Le chanteur, lui , en duo avec une bassiste qui chante pourrait évoquer de part cette scission de voix grave et aïgue un certain Grand Blanc. Sauf que les voix fémines revendicatrices évoquent les riot girl, les punk déchaînées, la puissance et la rage et se callent avec perfecion dans le story telling du morceau. Le chanteur, Raphaël s’offre une puissante palette de timbres et d’émotions, jettant à terre le pied de son micro, portant la musique avec son corps. Impossible de ne pas tomber fou amoureux de cette puissance, de cet appel à la liberté, de ce retour enfin à une scène rock qui l’est vraiment et qui l’assume. On finit lumières barquées sur le public, à défaut de pouvoir se toucher on peut se voir sur l’incroyable « We Hate you please die » en ne regrettant qu’une chose : de ne pas avoir eu une heure de set pour tout passer en revue surtout « Figure it out » le master piece du groupe dont on a pu s’empêcher d’acquérir le vinyle au stand de merch.

Nyoko Bokbae

Changement de plateau, changement de registre avec les fous furieux de Nyoko Bokbae, leur world électro et leur bonne humeur contagieuse. Les deux frontmen ont une énergie folle et des looks fascinants incluant des cheveux verts et une robe sur un pantalon pour l’un des chanteurs. Une très belle démonstration d’être simplement soi comme la musique sait en offrir, en accueillir et en cajoler. La chaleur remplace la pluie et le froid des prochains jours alors que les rythmes s’endiablent et que l’envie de danser s’intinsifie. Côté scène, la joie d’être présent est communicative. Une belle découverte à suivre de près.

Terrier

La soirée ne s’arrête pas là puisque c’est maintenant au tour de Terrier de présenter ses compositions chansons françaises, phrasées. Une certaine mélancolie se dégage par ailleurs de ses mélodies. Habillé d’un short de sport et d’un bob, le chanteur originaire de la Roche sur Yon  a tout du jeune prodige. Voix grave la dispute aux sons urbains, c’est pourtant une âme rock qui se détache de la partition et de l’instant.  » Merci aux organisateurs d’avoir mis ça en place malgré tout. » confie-t-il ému. Seul bémol, il est difficile de bien entendre ses paroles poétiques, un problème de son peut-être lié à des changements de plateaux rapides. Un dernier titre est dédié à la mère du chanteur « qui s’est récemment inscrite sur Facebook et pourra découvrir le moment en Facebook live » une dernière fois avant que Facebook aussi n’interdise la diffusion de musique en live sur son site.

Taxi Kebab

La fin de soirée est synonyme de mélange des genres puisque débarque l’électro world de Taxi Kebab. Le duo mélange musique électronique,  guitare électrique,  luth ou même  oud pour une transe ponctuée de paroles en arabe. L’ensemble transmet une énergie assez intense, cherche à nous emporter loin de nos sièges, qui en cette soirée est notre espace de vie. Chaque track emprunte un chemin différent, les sonorités changent avec l’utilisation d’intruments plus ou moins traditionneles du Maghreb et du Proche-Orient. Les paroles, déclamées sèchement, les gammes orientales donnent un ton très sombre au tout. Le temps s’arrête. On ne sait plus depuis quand on écoute le groupe. Le thème répétitif fait son effet et on rentre dans une certaine frénésie.

Les 30 minutes sont finies. Il faut rentrer. On ne sait pas quand on arrivera à refaire un concert et malgré l’heure tardive, le départ se fait d’un pas calme, pour rester le plus possible dans ce lieu qui nous a tant manqué.

Merci à Louis Comar pour ses photos. Vous pouvez le suivre et découvrir son travail sur Instragram ou son site 


FONTIAC

Ancien membre de Carbon Airways qu’il avait fondé avec sa sœur, Fontiac propose ses compositions rock et pleines de vitalité en solo. Bonne humeur, guitare rythmée et mélodies bien faites peuplent sa musique. Il faut dire que son premier projet, crée à seulement 14 ans, lui avait permis de faire le tour du Monde (Transmusicales, Eurockéennes, Printemps de Bourges, Coachella, Ultra Music Festival à Miami, Summer Sonic à Tokyo…) et donc de roder sa capacité à composer.

Pas étonnant du coup que Fontiac et qualité se marient si bien. Le musicien inclassable invite la pop et l’électro au grés de ses titres cosmiques ajoutant ça et là une note de rock. Son premier « Oxurya » sorti le 27 mars 2020 est une promenade dans l’espace qui crée de la musique à partir de sonorités raffinées.

« This is your face » : un titre engagé féministe

De retour avec le titre « This is your face », Fontiac a décidé de parler de l’injonction de se maquiller édictée aux femmes par les hommes. Il détaille : « Tu dois aller te maquiller – tu ne sors pas comme ça – tu me fais honte ′′ C’est ton visage, c’est une chanson sur toutes les fois où j’ai vu des hommes dénigrer leurs copines et les pousser à se maquiller sur le visage. Dans cette chanson, je vous invite, les filles, à vous sentir à l’aise avec toutes vos petites imperfections car c’est ce qui vous rend profondément unique. Je vous encourage à ne pas vous maquiller si le seul but est de cacher le manque d’estime de soi d’un homme. Merci à toutes les filles qui m’ont fait confiance pour parler de ce sujet important, je vous aime. »

En ces temps de féminisme alors qu’on débat des vêtements que les filles doivent ou ne doivent pas porter à l’école, il est bon de parler des nombreuses injonctions physiques que subissent les femmes. Il est encore plus important d’ailleurs que les hommes prennent le temps de réfléchir aux problématiques des femmes, de les comprendre, de s’interroger et de les traiter. Puisqu’une équité réelle doit venir d’un débat collectif. Et en ça on ne peut que saluer la démarche de Fontiac.

Quant à la problématique du maquillage ou de la tenue vestimentaire, ils n’ont à être dicté par personne. Certes, le petit-ami, l’ami ou le proche parent n’a pas à s’interposer dans le choix de se maquiller d’une fille et lui imposer. Il ne faut pas oublier de rappeler qu’on peut également choisir de se maquiller pour le plaisir, qu’on peut se faire belle pour se sentir bien, qu’on peut aimer jouer avec les couleurs et les palettes, que les hommes aussi ont le droit de se maquiller ( fut un temps ils le faisaient tout autant que les femmes), qu’on peut faire ce choix comme celui de sa tenue pour soi-même parce que c’est ainsi que l’on se sent bien et que se sentir bien ne rime pas toujours avec besoin de séduire. On a aussi le droit de faire ce choix pour séduire la personne que l’on a envie de séduire ou faire le choix de ne pas se maquiller, de ne pas s’épiler, sans que quoiqu’onques n’ait son mot à dire. Nos corps doivent nous appartenir. C’est fondamental. Soyez libres.

 

Découvrez le clip de « This is your face »

 

Fontiac this is your face

Du 2 au 13 septembre 2020 s’est tenue la 26ème édition de L’Étrange Festival au Forum des Images à Paris. Malgré la COVID et le climat anxiogène environnant, tout s’est déroulé à merveille pour que ce festival puisse se tenir dans des conditions irréprochables.

L’Étrange Festival 2020 : Une compétition éclectique

La compétition internationale, qui avait sacré l’an dernier l’excellent Vivarium , a débuté par le film d’ouverture Tomiris, une fresque épique kazakhe sur la reine Tomyris, libératrice de son peuple face à l’invincible Empire Perse. Un peplum avec en tête d’affiche une figure féminine forte prompte à être une source d’inspiration, il n’en fallait pas plus pour que le film récolte le Prix Nouveau Genre de cette 26ème édition de l’Étrange Festival.

Le très attendu Possessor de Brandon Cronenberg (lauréat dans la catégorie court métrage l’an dernier) aura tenu ses promesses. Un moment violent et charnier qui place l’identité au coeur de ses problématique. Le jeune Brandon marche sur les traces de son père et lui emprunte son goût pour la chaire et le raffinement horrifique. Retrouvez-en la critique complète ici.

Suscitant la curiosité dès les premières images présentés pour annoncer la programmation, le premier long métrage du réalisateur sud africain Ryan Kruger, Fried Barry, aura confirmé les premières impressions. Sorte d’OVNI autant généreux que foutraque, il n’aura pas laissé insensible les spectateurs, certains adhérant totalement à l’expérience, alors que d’autres ne se seront pas laissé prendre au jeu de cette histoire d’  » ET sous crack » déambulant dans les rues du Cap. On vous raconte tout ici.

The owners film

Beaucoup plus classiques de manière formelle, mais tout aussi plaisants, étaient The Owners, là aussi un premier long métrage, de Julius Berg (notre favori pendant une grande partie du festival) et aussi Sputnik, premier long d’Egor Abramenko. Si The Owners a fait l’objet d’un article dédié, Sputnik peut être qualifié de film réussi sur l’histoire d’un cosmonaute soviétique, dans les années 80, revenant d’une mission spatiale avec un passager bien particulier à son propre bord. Suspense, tensions, qualité de mise en scène indéniable, Sputnik est un film efficace proposant un spectacle maîtrisé. Et une superbe créature par dessus le marché !

A Dark, Dark Man, polar kazakh, aura pu décontenancer par son rythme contemplatif auquel se prête le superbe cadre dans lequel le film d’Adilkhan Yerzhanov. Avec une pointe d’onirisme rafraîchissante, le film dans ses dernières minutes prend un tour plus classique mais aussi plus universel. De quoi permettre à tout public de pleinement appréhender le cinéma de Yerzhanov et de s’offrir une touche de dépaysement.

Du dépaysement, Get The Hell Out, comédie horrifique taïwanaise à base de zombies mêlant critique parlementaire et karaoké, en aura offert ! Ne se prenant jamais au sérieux, le film de I-Fan Wang offre un joyeux bordel qui finit par communiquer sa bonne humeur au public.  Litres d’hémoglobine, gags, héroïne badass et mise en boite de politiciens véreux  se disputent le premier rôle de ce métrage qui n’est pas sans rappeler Mayhem, lui aussi diffusé à l’Etrange festival en 2017. Un divertissant rafraîchissement en somme.

En matière de divertissement, Destruction Finale, film catastrophe sud coréen se sera posé là aussi. Sorte d’Armageddon au Pays du Matin Calme, le film sait se faire divertissant avec sa bande de quasi pieds nickelés appelée à devoir sauver leur pays alors qu’ils n’y étaient pas préparés tout en ayant un petit fond politique, léger mais déplaisant. En effet, parmi ceux mettant des bâtons dans les roues des héros on retrouve… l’armée américaine! Rejoignant en cela d’autres films de genre se permettant de critiquer la présence yankee en Asie ( The Host ou bien encore Shin Godzilla, vu au PIFFF en 2017). De plus, l’objectif final pour sauver la Corée est de mettre une bombe atomique en plein coeur du Mont Paektu. Quand on sait que le surnom de la famille des dictateurs nord coréens est « la lignée du Mont Paektu », on se dit que c’est tout sauf innocent…

Random Acts of Violence. Droits réservés : Elevation Pictures

Random Acts of Violence ayant clairement déçu par rapport au reste de la compétition, passons plutôt à Relic, long métrage de Natalie Erika James à la poésie horrifique inoubliable. Alors que d’autres s’attellent à créer des Boogeymen effrayants, Relic, rappelle que la mort peut prendre le visage plus commun de la vieillesse et du temps qui passe. La réalisatrice  australienne dépeint avec son métrage la douleur des proches de ceux qui sont dépossédés de leurs personnalités lorsque l’âge les rattrape. A l’instar d’une certain « It follows », le film s’évertue a passer par la métaphore pour créer un monstre bien plus effrayant que ceux que l’on retrouve habituellement sur grands écrans. Fin, joliment écrit, Relic redonne ses lettres de noblesse au cinéma de genre rappelant que la plus grande des horreurs se cache dans le quotidien. Drame et détresse se mêlent alors qu’une scène particulièrement claustrophobe saura glacer le sang des amoureux de grands frissons. Le final grandiose allie la beauté au malaise, évoque les sentiments avec pudeur sans jamais sortir de son cadre horrifique. Un véritable coup de coeur, à ne surtout pas manquer et qui profitera d’une sortie aux cinémas le 7 octobre 2020.

Des choses à dire Fanny Lye Deliver’d en avait aussi avec cette histoire de mère au foyer dans l’Angleterre du XVIIème siècle voyant son environnement être bouleversé par l’arrivée d’un jeune couple en fuite bien loin de toutes les convenances auxquelles son quotidien morne avait pu l’habituer. Renvoyant dos à dos toute forme d’emprise spirituelle étroitement liée par diverses formes du patriarcat, on finit par assister au véritable portrait d’une femme, s’élevant par elle même au fur et à mesure des tragiques péripéties se produisant dans sa ferme. L’occasion pour elle d’opérer une véritable mue absolument grisante dans les derniers instants du film.

Plus banale et moins fascinant que les autres métrages en compétition, Spree, s’offre néanmoins un rythme entraînant et un casting des plus sympathiques ( avec en tête d’affiche Joe Kerry de Stranger Things).  Cette critique des réseaux sociaux qui suit Kurt tuant sans remords dans l’espoir de s’attirer des followers profite d’une belle forme de second degrés, d’humour et de quelques scènes de meurtres jouissives. Lui manque néanmoins une véritable montée en puissance pour tenir le spectateur de bout en bout sans tomber dans la redite ou la facilité. Quelle plaisir néanmoins de retrouver Micha Barton et David Arquette dans des rôles où le second degrés est maître mot.

Image extraite de Kajillionaire, Prix du Public de l’Étrange Festival . Credit : Matt Kennedy / Focus Features

Cette appréciation est évidemment à contrebalancer par rapport à l’accueil plus qu’enthousiaste reçue par Kajillionaire de Miranda July, une comédie mêlant arnaques, dynamiques relationnelles et émancipation. Le formidable accueil donné par le public est tel qu’il fallut qu’une seule projection pour désigner de façon nette que le film serait le lauréat du Prix du Public de L’Étrange Festival 2020.

L’Étrange Festival 2020 : Des pépites en veux tu en voilà !

La catégorie Mondovision permet, comme son nom l’indique, de découvrir des œuvres venant d’horizons bien loin des standards auxquels le public peut être habitué. Cette édition de L’Étrange Festival aura permis de découvrir notamment…

hunted film

Hunted

Survival engagé mettant aussi bien en scène une vision bienveillante de la nature que de la femme, toutes deux maltraitées par l’Homme. Si le métrage ne lésine pas sur les effets de mise en scène et sur son relationnel en première partie, il change complètement de registre dans son dernier acte. Un moment de cinéma atypique, bien ficelé sous forme de conte noir qu’on vous raconte ici.

Shakespeare’s Shitstorm

Le titre du film devrait à lui seul donner une idée du type de métrage ici diffusé. Le dernier film du barré Lloyd Kaufman tient toutes ses promesses et va même au delà. Au programme des seins, des excréments ( d’orques entre autre), beaucoup de sang et des blagues sur les pets. Le délirant métrage ne s’arrête pas là et se permet d’être la satire du monde contemporain alors que les social justice warriors en prennent pour leur grade à coup de blagues franchement déplacées et franchement drôles. C’est lourd, certes, mais c’est fait pour. Ce nanar assumé saura satisfaire un public déjà conquis à l’estomac bien accroché. Pas la peine néanmoins de chercher une diffusion en salles obscures, la bande-annonce vous aura prévenu, il ne sera diffusé que dans trois cinémas !

The trouble with being born avait déjà fait parlé de lui avant cette diffusion à l’Etrange Festival. Il avait notamment été au coeur d’une polémique l’accusant d’avoir un propos volontairement pédophile. Il est facile de nos jours d’ailleurs d’attaquer toute oeuvre qui pourrait déranger, le récent « Mignonnes » en étant un exemple criant de plus. Le film qui nous intéresse lui traite avec une certaine finesse de l’intelligence artificielle mais aussi et surtout de la solitude humaine qu’aucune machine ne saura réellement combler. La réalisatrice Sandra Wollner  dresse le portrait d’une petite machine aux traits humains, à l’identité bafouée et flouée qui ne fera que revivre les erreurs du passé qui lui ont été transmises. Délicat, humain, The trouble with being born pourra avoir des images dérangeantes mais ne manquera pas de questionner l’homme, ses envies, ses troubles et ses complexes.

Impetigore est un film d’horreur indonésien  très joliment exécuté. Sur fond de village perdu, de malédiction familiale, d’origine trouble et de sorcellerie, Joko Anwar tisse un long métrage doté d’images fortes et marquantes. Notamment, son plan final extrêmement efficace et glaçant…

L’Étrange Festival 2020 : les séances spéciales et autres confiseries

Faisant le buzz depuis sa présentation à Cannes l’an dernier, la dernière oeuvre de Gaspar Noé, le moyen métrage Lux Aeterna réunit Béatrice Dalle et charlotte Gainsbourg au court d’une oeuvre en roue livre où l’improvisation est de bon ton.  Un film à l’hystérie prononcée, aux couleurs violentes et aux femmes fortes violentées dont on vous fait la critique ici. 

Image extraite de Teddy, des frères Boukherma

Une autre oeuvre ayant fait parlé d’elle lors de sa présentation, que ce soit à Deauville, à l’Étrange ou à Venise ( dans la même semaine!) est le long métrage des frères Boukherma intitulé Teddy. Du nom de son personnage principal, un jeune homme déscolarisé précocement qui assiste aux exactions commises dans sa petite ville pyrénéenne par ce qui semble être bien plus qu’un loup… Aussi quand, il finit par être mordu, tout va finir évidemment par déraper. Quand P’tit Quinquin rencontre Hurlements au pays de Jean Lassalle, cela donne un mélange des genres savoureux au possible! Mention spéciale à l’épatant Anthony Bajon dans le rôle de Teddy mais globalement à l’ensemble du casting, Noémie Lvovsky en tête, donnant vie à une galerie de personnages sortant de l’ordinaire!

Parmi les œuvres proposées lors de la carte blanche de Marjane Satrapi, réalisatrice notamment d’un The Voices acclamé à l’Étrange Festival il y a quelques années, se trouvait Milla mis en scène par Shannon Murphy. Le moins étrange des films présentés à l’Étrange ne l’aura pas empêché de provoquer de nombreuses émotions dans la salle, les reniflements embués de larmes se faisant pleinement entendre à la fin de la séance. Pourtant, on pouvait redouter les gros sabots avec cette histoire d’une idylle entre une cancéreuse adolescentine et un junkie SDF la manipulant plus ou moins. Mais point de lourdeur pachydermique à la Love Story ici, Shannon Murphy réussissant à désamorcer tout les pièges dans lesquels son premier film aurait pu tomber pour livrer une oeuvre sensible et touchante. Profondément belle même dans ses deux dernières séquences. Une très belle réussite!

Parmi les courts métrages proposés cette année, si évidemment, il y a de tout au niveau qualitatif comme toujours, mention spéciale à Ik, Moordenaar du néerlandais Kim Kokosky Deforcheaux, glaçante variation sur un enfant violent qui rencontre un écolier similaire à lui qui évoque L’Autre de Robert Mulligan.

Enfin, cette 26ème édition de l’Étrange Festival s’est conclue par la diffusion du thriller d’espionnage sud-coréen L’Homme du Président de Min-Ho Woo. Rien à voir avec le nanar de Chuck Norris multi-rediffusé dans les années 90-2000 mais la narration des derniers jours de la présidence tyrannique du président Park en 1979. Bénéficiant d’un rythme enlevé et d’un suspense de tout les instants, L’Homme du Président aura su captiver le public de l’Étrange Festival et apporter une excellente conclusion pleine de retournements de situations pour cette édition s’étant déroulée dans un contexte plus que difficile…

L’ÉTRANGE Festival 2020 : PALMARÈS complet

Grand Prix Nouveau Genre : Tomiris , de Akan Satayev

Prix du Public : Kajillionaire, de Miranda July

Grand Prix Canal + du court métrage : Amandine, de Juan Carlos Mostaza

Prix du Public du court métrage : Nuage, de Joséphine Darcy Hopkins