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Julia Escudero

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courtney barnett Trianon 2022
©Kevin Gombert

Nous sommes le 9 novembre 2021. Les salles du quartier de Pigalle sont en effervescence alors que chacune d’entre elles accueille ce soir un artiste. Programmation variée donc qui se centre à y regarder de plus près sur le duo très proche Trianon / Elysée Montmartre. La seconde accueille ce soir la tornade Wet Leg, sensation rock made in Domino (le label d’Arctic Monkeys) dont le titre « Chaise Longue » en anglais puis en version française fait danser la planète rock indé depuis de nombreux mois. L’autre salle et celle qui nous intéresse ce soir donc, elle, voit jouer en son sein l’une des musiciennes les plus talentueuses de ces dernières années : l’incroyable australienne Courtney Barnett. La simple évocation de son nom est autant synonyme de qualités que de goûts pointus. Nous voilà donc côté finesse pour une soirée que l’on ne peut qu’espérer magistrale et un choix que l’on souhaite être le bon. Avons-nous choisi la bonne salle ? Verdict.

courtney barnett Trianon 2022
©Kevin Gombert

Prendre son temps. Son temps

C’est pour défendre son album le plus intime paru à ce jour « Things take time. Take time »(2021)  que la musicienne s’est déplacée dans nos vertes ( ou pas vraiment en ce qui concerne Paris) contrées. Un opus composé deux années durant avec Stella Mozgawa (Warpaint, Cate le Bon, Kurt Vile). Kurt Vile d’ailleurs emboitait le pas de Courtney Barnett avec qui il jouait en 2017 sur « Lotta Sea Lice » sur la même scène quelques semaines plus tôt. Deux grands de la musique, deux concerts, auxquels on pourra trouver la ressemblance d’un show où les instruments et le son priment au détriment certain d’un rock énervé. C’est sur « Rae Street » que la chanteuse entre en scène. Point de chichis au programme. Cachée derrière sa guitare, la musicienne délie doucement ses notes et se plonge dans le bain. Une timidité troublante émane de sa performance. Pas besoin d’attendre longtemps pour écouter ce qui est l’un des titres les plus représentatifs de l’univers de notre musicienne : « Sunfair Sundown ». A lui seul, il résume l’atmosphère doucement rock, profondément détachée, les riffs bien faites et l’entraînante lascivité d’une compositrice toujours percutante en studio. Mais aussi l’atmosphère du concert.

courtney barnett Trianon 2022
©Kevin Gombert

Dans la salle parisienne, il fait froid, il faut s’approcher des premiers rangs pour que les corps chauffent une salle dont le ton prend le temps à être donné. Les titres s’enchaînent sans réelles interactions avec le public. Seules les notes comptent : celles de « Nameless,Faceless », « Need a Little Time » ou encore « Turning Green ». La chanteuse nous invite à une ballade dans son répertoire. Un moment chill où toute la beauté des paysages se concentre sur l’interprétation précise de ses titres. En ça, l’affaire est forte. Le son est optimal, les accords rétros, le temps se prend. Loin de la cohue qui règne à l’extérieur dans le brouhaha de la grande ville, là où les voitures roulent à toute vitesse, où la nuit est autant l’occasion de travailler que d’enchaîner les verres, à quelques pas de bars toujours pleins, de lumières qu’on éteint jamais et de nuits blanches à lister des obligations, notre frontwoman propose une véritable pause. La salle est propice d’ailleurs à cette offre. Le Trianon et ses balcon est sublime, il est aisé d’y frissonner et d’être récéptive.f  à ce moment. Il a la grandeur de l’Australie, la pureté de ses décors verts que rien n’est venu ébranler et la modernité de ses villes.

Accélérer le temps

Néanmoins quand le temps se détend à se point, il a fort besoin de repartir bien plus vite ensuite. A toute allure parfois même. Et si notre musicienne cramponnée à se guitare ne compte pas bondir dans tous les sens, elle souhaite donner un second souffle, tracer sa routé et changer notre périple en seconde partie de set. Celui-ci se détache donc du reste de sa performance. Les morceaux se font plus appuyés et le foule qui jusque là avançait au pas accélère clairement ses mouvements. Malgré l’antithèse de la situation, ça pogote et un petit slam se dessine. « History Eraser », «  »Pedestrian at best », « Nobody really cares if you don’t go to party » se font entendre et Courtney Barnett propulse avec ses musiciens bien plus d’énergie qu’en entrée.

C’est d’ailleurs là que les choses commencent vraiment à prendre en matière. Notre timide hôtesse communique un peu plus avec son audience. Certes sans l’ensevelir sous des torrents de paroles.  Point trop n’en faut là où retenue est maître mot. Mais tout de même. La vitre est brisée et enfin elle s’approprie l’entièreté de la salle, place son univers. Moins froid, moins distant, le show devient plus touchant et marquant. Puisque sortie de l’interprétation sans faute d’un répertoire, ce qui fait un bon live se situe dans une boule d’énergie et de communication adressées à une communauté. La retenue, la timidité resteront les point noirs de la performance de notre chanteuse ce soir. Un rappel vient clôturer la soirée alors que l’on se dit au revoir sur « Before you gotta go ».

courtney barnett Trianon 2022
©Kevin Gombert

Dehors, le temps ne s’est pas arrêté. Le boulevard bourdonne et bouillonne. L’heure du bilan a sonné. Chacun.e raconte son concert dans chacune des salles qui vivent à plein temps. Aucun regret à avoir, notre pause aura été la bonne.


Chaque année qui dit festival de musique francophone dit débarquement des specimens canadiens. Un univers pluriel venu de l’autre côté de l’Atlantique pour défendre une autre vision de la musique francophone. La scène montréalaise particulièrement riche et prolifique fait partie de ces découvertes. Mais pas seulement, le pays qui défend la langue française au-delà de toute notion que l’on a chez nous, la chouchoute à travers ses mélodies et prouve comme le veulent aussi les Francos de Montréal qu’on peut tout chanter en français. A Paris, à l’occasion du MaMA festival, de nombreux artistes sont venus défendre d’autres façon de composer et de créer. Découvrez ceux qui nous ont touchés.

Bibi Club

Duo composé d’Adèle Trottier- Rivard et de Nicolas Basque, ex Plants ans Animals, nom très connu de la scène montréalaise, Bibi Club se produisait à la Machine du Moulin Rouge pour un public uniquement composé de professionnels. Le grand public aurait pourtant tout intérêt à les découvrir. Le 26 août le groupe sortait l’album « Le soleil et la mer », un opus affirmé électro-pop rock minimaliste. C’est pourtant avec une touche de pop aérienne et une pincée de folk que la formation séduit. Adèle y officie avec candeur et des paroles à la douceur enivrante. La mélancolie et là mais elle s’y fait fait douce comme une pointe de nostalgie rétro dans des titres savamment pop et joliment mis en place. Bande originale du temps qui passe ( un titre sur le dernier né s’appelle « Le Matin », un autre « La Nuit »), Bibi Club construit son set et ses titres comme un cocon où il fait bon se vautrer. Le soleil y est tamisé alors que les compositions sont des amis qui murmurent aux oreilles. Sur scène, le duo prend une touche plus indé en précisant ses sonorités. Sur album, la voix féminine touche alors que des titres comme « Parasite » ont un petit quelque chose proche de Belle & Sebastian. Des morceaux sobres mais efficace, un bol d’air marin dans lequel il est bon patauger. A mettre entre toutes les mains.

MaMA-Festival_Bibi-Club-Paris_2022
Bibi Club au MaMA 2022 – Crédit photo : Louis Comar

Choses Sauvages

Montréal toujours certes mais registre différent. Il y a un an, le groupe dévoilait son second album « Choses Sauvages II » un trip enivrant entre dance-punk et funk. En France, si ce type de courants parait abstrait, en pratique, la scène canadienne regorge de pépites qui font le pont entre ces registres et propose des tubes dansants et solaires. Côté studio, la formation clairement dansante offre une touche estivale et des musiques au ton groovy. Il faut attendre la scène pour mieux s’approprier le côté sauvage du groupe qui s’y livre corps et âme. Torse nu, jusqu’au-boutiste, il interpelle l’assemblée, va chercher chaque membre du public. La voix aiguë et la pop s’y distillent sous forme bien plus rock. Le show devient l’un des temps forts de cette édition du MaMA Festival. Synthétiseur et boite à rythmes s’y délient à la perfection. Un coup légers sur l’album, ils se font bien plus denses – à moins que ce ne soit danse – en live. A écouter un soir festif pour mieux les retrouver lors d’un prochain passage dans l’Hexagone.

Vanille

Pause douceur avec Vanille qui porte bien son nom. Comme le célèbre parfum, la musique de Rachel Leblanc est douce, sans artifices mais ne manque pas de saveurs. C’est au Phono Museum, le musique de l’histoire de la musique enregistrée qu’il était possible de la découvrir. Son univers onirique raconte la fin de l’adolescence, il regorge de cette candeur vive, de ces émotions à fleur de peau. Rien de mieux pour personnifier le tout que sa voix délicate. Au milieu de titres aux saveurs d’une autre époque, ce n’est pas pour rien que la chanteuse a repris « Les copains d’abord » de Brassens, Vanille ajoute des morceaux bien plus festifs. Une sorte de « Call Me By your Name » dans un Canada estivale et d’amourettes solaires mais si intenses. Entre le sol et le ciel, comme son titre, la chanteuse prend le public par la main et l’entraine dans son cocon sous forme de journal intime. Son premier opus « Soleil ’96« lui a valu un vrai intérêt au Canada où elle enchaîne les festivals et les couvertures de presse. A Paris, pour le MaMA c’est dans une ambiance tamisée que l’artiste invite à son périple. Un moment enivrant qui a sublimé la dernière soirée du festival.


 

MaMA-Festival_Oete-Paris_2022
Oete – MaMA 2022 – Crédit photo : Louis Comar

Il a bien grandi en un rien de temps le jeune prodige Oete. Un an plus tôt, nous le découvrions et tombions fous amoureux de son immense talent mais aussi de sa touchante candeur. Carcan brillant comme un diamant brut aux nombreuses facettes. Entre temps, le colibri a pris son envol, la pierre a été taillée : il publiait en octobre son premier opus « Armes et paillettes », faisait un passage remarqué aux Inouis du Printemps de Bourges et passait sans transition des déambulations dans Pigalle pour voir des concerts pendant le MaMA à une place de choix au coeur de la programmation pour mieux devenir l’une des coqueluches de l’évènement.

Alors qu’il annonçait une date aux Etoiles, c’est déjà au Backstage By The Mill que le chanteur avait choisi de briller. Un show hautement attendu, repéré et suivi. Un constat qui allait de soit côté public alors que la salle se faisait de plus en plus dense à mesure que les titres défilaient.

 

Montée en puissance et perte de l’innocence

Oete n’est plus le colibri fragile qui virevoltait de ses débuts. A la place, notre oiseau rare, s’est paré d’une cape à paillettes et surtout d’une aisance scénique remarquable. Le voilà d’ailleurs qui s’avance sur scène comme le maître des lieux. Sa voix inspirée se répand, l’envie de très bien faire se fait sentir. Le trac lui a quitté le nid. Le chanteur propose d’emblée de découvrir ses nouveaux titres « Ami à mort » en tête de liste. Mais aussi l’une de ses plus récentes sorties « Défense » que l’on peut d’ailleurs entendre maintenant dans la pub Carte Noire. Une synchro qui vient à prouver la montée en puissance du musicien. Un détour par « HPV », titre à fleur de peau, confidence à coeur ouvert des premières heures, ravive la flamme. Exit la reprise de Niagara, c’est maintenant au tour de Bernard Lavillier de se faire une seconde peau à travers la voix d’Oete. C’est « Idées Noires » qui a sa préférence à lui.  « Où es-tu ?  » Il y a de quoi avoir la tête qui tourne et perdre ses repères dans la salles parisienne. Sauf que dans les bras du musicien, personne ne veut s’enfouir. On vit de l’amour, du plaisir, de la folie… Dans son interprétation, il lui donne un corps plus jovial, moins sombre et crasseux. Un jet de paillettes sur un classique.

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Oete – MaMA 2022 – Crédit photo : Louis Comar

Notre star s’approprie la scène comme une évidence. Déchaîné et possédé, il joue moins de ses danses endiablées pour mieux se focaliser sur la musique, ses arrangements et sa voix. Cette dernière prend en puissance à mesure que le set avance, elle se stabilise, peut-être parce qu’Oete se focalise maintenant moins sur son envie de bien faire pour mieux appréhender l’instant. Lorsqu’il remercie en chanson ses idoles de Christophe à Daniel Darc, l’évidence qu’un jour il profitera d’une aura similaire se fait sentir. Aujourd’hui il porte au moins leurs âmes et garde en main le flambeau comme une promesse que la chanson française continue d’exister à travers les âges, qu’elle se fait plurielle et change de visages.

La tête libre

Le passé fait une nouvelle apparition dans le set. Cette fois, le chanteur nous invite à découvrir l’un des premiers morceaux qu’il a écrit alors qu’il était étudiant. Mais avant, il demande à la salle d’être la plus silencieuse possible. Le voilà donc en train de chanter sa « Liberté chérie » mais cette fois-ci en guitare / voix. Exit son final sur ce même titre à la Boule Noire, une bonne année plus tôt, le piano comme arme et les yeux embrumés d’un jeune premier encore bien proche du temps où elle avait été écrite. Entre les deux un océan, une determination sans faille et les armes qui sont maintenant couvertes de paillettes. Reste à conclure la soirée sur une confidence. Il a aussi arrêté de fumer et puis cette victoire il veut la partager avec son plus jeune fan. Un garçonnet de 10 ans qui le suit date après date. Ce soir, le bonhomme monte sur scène. On chante sur « La tête pleine », pleine d’espoir et de demain pour notre oiseau rare. Les yeux rivés sur un jeune enfant qui chante avec son idole et un homme qui en a fini avec l’enfance. Le MaMA Festival continuera lui à jeter ses paillettes au bout de cette nuit mais aussi demain.

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Oete – MaMA 2022 – Crédit photo : Louis Comar

Le 7 octobre 2022, l’excellence vertigineuse de Sorry est de retour avec un nouvel album « Anywhere but Here », le digne successeur de « 925 ». Avec son rock glacé et mélancolique, le groupe dévoile une galette hypnotisante, y signe la fin de son adolescence mais ne perd rien de sa sensibilité. Popnshot a rencontré deux de ses membres Asha Lorenz et Louis O’Bryen pour discuter de cette sortie dans les locaux parisien de son label Domino Records. Un moment autour d’un thé chaud pour parler compositions, boucles musicales, maturité, perfection, Skins, Euphoria et méthodes pour découvrir de nouveaux artistes.  Une rencontre  portée par la douceur d’un duo à la timidité et à la sincérité touchante sur lesquels il faudra compter pour faire briller l’avenir du rock made in UK.

SORRY par Théophile Le Maitre
SORRY par Théophile Le Maitre
Popnshot : Votre nouvel album, « Anywhere but here » sort ce 7 octobre. Comment le décririez-vous en quelques mots ?

Asha Lorenz: C’est mélancolique, il t’emmène en voyage. Il est aussi lourd.

Louis O’Bryen : On a écrit des morceaux  classiques 70’s mais avec des twist et des productions très modernes.

Pourquoi cette période 70’s vous inspire-t-elle autant ? Elle évoque quoi pour vous ?

Louis : Je pense qu’on a écouté beaucoup de morceaux qui datent de cette époque. Nous voulions qu’il y aie une cohérence entre les titres de l’album. Nous n’avions pas fini les morceaux avant d’aller en studio. On avait fait l’inverse sur le premier album, on avait les chansons et ensuite on a enregistré et créé de la cohérence entre elles. On a voulu travailler différemment cette fois.

Le premier album était un mixe de morceaux issus des cinq dernières années. Comment ça s’est passé sur celui-ci ?

Asha : On l’a fait un an et demi après avoir fini le dernier. Donc c’était bien plus compact.

Votre premier album était décrit comme quelque chose de jeune mais de beau, une sorte de cri adolescent. Celui-ci est déjà décrit comme celui de la maturité. C’est un terme souvent employé dans la presse, est-ce quelque chose qui vous parle ?

Asha : C’est une deuxième maturité. Il y avait déjà un pas vers elle sur le premier album. On a écrit le premier de nos 18 à 22 ans. On y parlait de nos problèmes. Aujourd’hui, on a toujours les mêmes mais on les voit avec plus de maturité.

Louis : On est toujours en train de grandir et notre musique représente toujours ça. Mais comme le dit Asha, c’est peut-être plus mature, ça nous représente peut-être mieux et c’est aussi plus honnête.

Après la sortie du premier album, vous avez sorti une mixtape des titres comme ils existaient dans leur première version en expliquant que les morceaux évoluent toujours et que vous vouliez dévoiler une photographie de leur premiers instants. Les nouveaux titres ont-ils également beaucoup évolué ?

Asha : On a les démos, on pourrait les sortir un jour. Mais comme ces chansons ont été écrites dans une courte période elles ont moins eu le temps d’évoluer. Elles ont un peu changé de forme. La progression était moins forte que la fois précédente.

Popnshot : Le premier album s’appelle « 925 » parce que l’argent obtient sa pureté à 9,25. Vous aimiez l’idée que ce soit presque parfait. Vous essayez de vous rapprocher de la perfection ?

Asha : Ce n’est pas encore l’album parfait. Si on arrive à faire un un jour, ce n’est pas celui-ci. Mais c’est une progression saine.

On a voulu en faire un générique d’introduction avant que les choses ne deviennent plus sombres.

La première chose qui frappe quand on écoute « Anywhere but here » c’est que le premier titre est très joyeux et lumineux mais qu’il tranche avec le reste de l’album qui est bien plus sombre et mélancolique. D’où vient cette rupture de ton ?

Louis : On a écrit ce titre bien après avoir enregistré le reste de l’album. On voulait écrire un titre plein de vie. On voulait un titre qui fasse battre les coeurs, différent du reste. Mais le morceau ne collait pas avec l’ambiance général donc on ne pouvait pas l’insérer ailleurs. On a voulu en faire un générique d’introduction avant que les choses ne deviennent plus sombres.

Sur le clip de « Key of the city » vous dépeignez les clichés de ce que les personnes font de leur intimité dans les grandes villes. Ce n’est pas la première fois que les grandes villes vous inspirent…

Asha : On a grandi à londres, on y a toujours été et on a les mêmes amis depuis le début de nos vies. C’est naturel pour nous, puisque c’est de là qu’on vient, d’avoir un oeil sur tout ce qui se passe. Les gens y font des choses très différentes tout le temps. Mais ce qui nous intéresse surtout c’est les gens et les relations qui se font dans les villes qui nous intéressent.

Mais on a aussi voulu rendre le clip humoristique en utilisant les clichés, notamment celui de l’argent. On a d’ailleurs créé des personnages qui sont très stéréotypés.

Vous avez d’ailleurs une histoire forte avec New-York, vous y avez joué juste avant la pandémie avant d’y retourner avec Sleaford Mods.

Louis : On a pu jouer à New-York mais ni à Los Angeles ni dans le sud ouest. Notre tournée a dû être écourtée.

Vous disiez que c’est la ville où toute les fins du Monde dans les films arrivent. Post-pandémie, il parait que la ville est devenue très post-apocalyptique, vous l’avez ressenti ?

Louis : New-York n’est pas une ville normale et pourtant tout semblait plutôt normal quand on y est retourné. La ville avait l’air d’avoir guéri.

C’est l’apprentissage de laisser tomber des choses, d’accepter de mettre un terme, une fin.

A la fin de l’album le titre « Again » marque les esprits. On peut le rejoindre de l’histoire de ta mère qui est doula de fin de vie Asha ?

Asha : Un peu mais pas tant que ça. Ça parle des petites morts qu’on a dans le vie. C’est l’apprentissage de laisser tomber des choses, d’accepter de mettre un terme, une fin. Ça va avec l’album puisque c’est aussi sa clôture. Le titre s’accroche à une note en particulier parce que c’est un son similaire à celui qu’on fait quand on est très heureux ou très triste ou qu’on perd quelque chose. Ça parle du besoin de changement mais le changement ne vient pas.

Vous y utilisez une boucle musicale. C’est un procédé assez fréquent chez Sorry. Comment cela appuie-t-il un propos ?

Asha : Ici ça va très bien avec les paroles. La boucle aide les paroles. On voulait montrer qu’on construit et que pour autant ça reste la même chose.

Vous les écrivez en premier ?

Asha : Ça dépend complètement du morceau. Parfois ce sont elles qui vont dicter la musique mais parfois c’est l’inverse. Ça dépend de si l’idée du morceau est à ses débuts ou si elle est très avancée.

Louis : L’un peut bouger l’autre. Les paroles construisent les instruments.

Sorry Anywhere but here
crédits Théophile Le Maitre
Comment s’est passé la conception du titre « Key of the city » qui parle des coeurs brisés. Les paroles sont-elles arrivées avant les instruments ?

Asha : on avait les riffs de la guitare et les paroles ont découlé de ça. Et le reste de la chanson est arrivé après la construction du premier couplet. Les deux viennent main dans la main quelque part quand l’idée a déjà eu le temps d’être développée dès le début.

Louis : C’est important pour nous que les samples et les notes électros soient un miroir des sentiments représentés dans le morceau.

« Screaming in the rain », c’est un clin d’oeil sombre à « Singing in the rain » ?

Asha : Un peu. On a joué sur les mots.

Louis : C’est sa version triste. (Rire)

On met une partie de nous de nos chansons et ça leur donne, je pense une certaine lumière.

D’ailleurs pourquoi cet attrait pour les compositions mélancoliques ?

Asha : C’est qui nous vient naturellement. C’est vraiment très difficile à expliquer mais ça vient de ce qu’on ressent. On ne le choisit pas.

Louis : C’est un sentiment naturel. Quelque chose autour duquel on gravite mais parfois on essaie d’écrire des chansons joyeuses. C’est bien plus difficile que d’écrire des chansons tristes. C’est peut-être juste compliqué pour nous en tout cas.

Asha : Le genre que l’on joue n’est pas propice aux chansons joyeuses. On essaie de faire des titres solaires pour contrebalancer la tristesse, trouver un équilibre.

Louis : On met une partie de nous de nos chansons et ça leur donne, je pense une certaine lumière.

Sorry crédits : Iris Luz –
Un journaliste de chez Magic avait comparé votre premier album au show télévisé « Skins ». La comparaison vous plait-elle ?

Louis : On adorait le show quand on avait 14 ans. Si on le regardait maintenant se serait un peu embarrassant. Avec ces adolescents rebelles qui grandissaient en Grande-Bretagne, à l’époque on les trouvait super cool. Mais à cet âge là, on est sensibles à ces choses là.

Vous pensez que les adolescents d’aujourd’hui seraient moins tenté d’aimer « Skins » ? Ils ont « Euphoria » mais l’ambiance y est différente.

Asha : Non je pense que les adolescents aiment toujours ce genre d’histoires. Les gens sont obsédés par « Euphoria ». C’est une autre façon d’être choquant qui y est utilisé.

Louis : Mais j’aime beaucoup le show. Je le trouve excellent. C’est très intense.

Qui dit album dit concerts. Une tournée arrive avec deux dates parisiennes notamment. Comment travaillez vous le passage du studio à la scène ? Faut-il repenser les titres ?

Asha : On va les retravailler, on veut que le show aie un flow différent. On commencera les répétitions avant la tournée mais on veut lui donner plus de profondeur et ne pas simplement jouer les morceaux.

Louis : On a un peu joué aux USA et au Royaume-Unis nos nouveaux titres, on y a pris beaucoup de plaisir. Les gens ont eu l’air de les apprécier.

J’aime prendre un album que je ne connais pas chez un disquaire.

Dernière question : Quelles seraient vos recommandations pour aider les gens à découvrir de nouveaux artistes ? Quelles méthodes utilisez-vous ?

Asha : J’aime prendre un album que je ne connais pas chez un disquaire. Et même s’il n’est pas si bon, tout album a toujours quelque chose à apporter. Et si tu t’impliques dans le travail de l’artiste, tu y trouveras toujours quelque chose et c’est satisfaisant. Donc impliquez vous à un artiste.

Louis : J’en trouve beaucoup dans des films et des séries.