Cabane

 

Cabane by Thomas Jean Henri
Cabane by Thomas Jean Henri

Musicien et photographe, Thomas Jean Henri aka Cabane, dévoilait son second album « Brulé » le 26 janvier. L’artiste belge y signe son retour après « Grande est la maison » qui avait reçu un très bel accueil du public comme de la presse. Pour ce nouvel opus le musicien a su bien s’entourer. On retrouve au casting les voix de Sam Genders (Tunng) et de la perle montante Kate Stables (This Is The Kit) dont l’ascension méritée se fait à toute vitesse. Mais on ne pouvait que s’y attendre en la voyant signée sur le label de l’excellence, j’ai nommé Beggars. Côté sonorités, il est peu dire que l’artiste aime les grands espaces, c’est d’ailleurs ce qui ressort de ces mélodies aériennes.  Certes, la folk y est pour beaucoup, elle sait surdimensionner la musique et donne cette approche naturelle au son tout en faisant rêver à l’évasion. Seulement, là où Cabane percute fort c’est lorsqu’il en fait un objet sonore hybride. Le voilà qui ajoute à son édifice de la pop orchestrale. Sans jamais tomber la grandiloquence, l’artiste bouscule et vire au grandiose. Il y a une véritable délicatesse à son œuvre qui touche naturellement à l’élégance. Le travail instrumental embrumé y est sophistiqué, la réflexion s’y ressent sans que l’inaccessible ne soit pris à partie. Si « In Parallel » introduit l’album c’est pour mieux apaiser les cœurs dès ses premiers notes à l’apesanteur assumée et la mise en place dosée. L’appétit est ouvert. Le voyage italien de notre hôte, « Italian Mysteries », « Rome » n’en est que plus riche.  Pas étonnant que parmi les artistes similaires soit cité Sufjan Stevens dont le « Mystery of Love » illustrait le périple italien amoureux pour  la BO de « Call Me by Your Name ».  Ces ressemblances dans le titre et le pays se retrouvent aussi sur la capacité à se ré-approprier les codes de l’un des plus beaux courants de ce que la musique a à offrir. Aussi celui le plus à fleur de peau. Photographe, nous vous le disions, Cabane offre un opus visuel qui saura stimuler l’imaginaire. Difficile de mieux commencer l’année et de mieux en illustrer l’hiver et ses frissons. Au demeurant « Tout Ira Bien » comme le promet le dernier titre et ses jolies répétitions en boucle. Un let motiv s’il en est.


Fontanarosa

 

FONTANAROSA 2023Crédit : Célia Sachet • Celia Seven Photography
FONTANAROSA Crédit : Célia Sachet • Celia Seven Photography

L’indie-rock a de beaux jours devant lui aussi bien en France  que du traditionnel côté UK.  Dans la famille des talentueux représentant du registre dans nos vertes contrées  je demande les lyonnais de Fontanarosa. Il signeront le 19 avril 2024 leur retour avec un second album : l’excellent ‘Take A Look At The Sea ». La magie opère d’ailleurs dès les premiers instants.  C’est avec un naturel élégant que Paul Verwaerde, le frontman, ouvre ce nouveau jet en faisant du « Door to Door » pour mieux convaincre les foules. Son écoute, d’emblée très accessible n’enlève rien à la précision symphonique qu’offrent ici nos musiciens. L’artiste né en Angleterre, a grandit en Espagne avant de vivre à Sao Paolo. Une multitude d’influences qu’il apporte dans sa musique et qu’il décrit volontiers comme son port d’attache. S’il est vrai que cette dernière peut être le point centrale d’une vie, celle de Fontanarosa invite à l’introspection. Le soin porté à la précision de chaque titre y est d’ailleurs particulièrement impressionnant. Que se soit sur les instruments, les arrangements, la voix ou la production, rien n’est laissé au hasard au cours de cette balade envoûtante et esthétique. Le successeur d' »Are You There? » sorti en 2022 a tout du classique instantané. On s’y engouffre comme dans un lieu connu, on s’y laisse porter, sans jamais basculer dans l’easy listenning pour autant. Certains titres se prennent comme des vagues. Les instruments y sont poussés jusqu’à des hauteurs vertigineuses, des tourbillons dans lesquels il est bon se perdre. « Endless Track » que l’on voudraient sans fin est d’ailleurs de ceux-là. Pour rappel, le premier né du groupe était avant tout la réconciliation entre Paul Verwaerde avec l’adolescent qu’il avait été. Cette fois-ci, en plein accord avec l’adulte qu’il est devenu, le voilà qui prend le large. Père de ses créations, il l’est aussi à la ville, de quoi chambouler, penser aux générations qui ont précédées et écrire avec le cœur. C’est d’ailleurs à son père qu’il pense en écrivant « Care », un hymne puissant aux guitares énervées et son juste dosage entre force naturelle et douceur des voix. Chez Fontarosa, la route est sombre, elle se fait parfois folk, parfois rock, parfois électrique. Les influences sentent le Royaume-Unis, ses pubs comme son tea time, son raffinement et son énergie. Le voyage n’en est que plus beau.


BADBADNOTGOOD

 

BADBADNOTGOOD by Sylvain Chaussee
BADBADNOTGOOD by Sylvain Chaussee

C’est le morceau dont nous avions besoin sans le savoir. Prenez la puissance jazz des originaires de Toronto, BadBadNotGood, additionnez la voix du vocaliste texan reggie, mélangez le tout et laissez vous surprendre. Voilà que les genres se croisent et se mixent en un titre solaire : Take What’s Given. Le résultat est aussi pluriel qu’impressionnant. On y croise de la funk, de la country, une voix envoûtante à la chaleur naturelle, de la précision, de l’amour des instruments et du travail bien fait. Enregistré au Valentine’s Studio de Los Angeles en 2023, la pépite dévoilée le 30 janvier 2024, a gardé de la cité américain ses hautes températures et ses accents angéliques pour ne pas dire célestes. Exit néanmoins la superficialité qu’on lui prête, ici les mélodies sont profondes et travaillées. Il faut dire que le groupe canadien multiplie depuis 2021 et la sortie de son opus, « Talk Memory », les collaborations heureuses. Turnstiles, Charlotte D Wilson, Daniel Caesar en font notamment partie. Pour ce qui est de sa genèse c’est en assistant à un programme de jazz au Collège Humber à Toronto que le trio s’est rencontré. C’est pourtant leur amour du Hip Hop qui a su unir nos talentueux musiciens. Biberonnés à MF DOOM, vouant un culte à ODD future, les voilà qui mettent à profit leur savoir-faire jazz, probablement l’une des écoles les plus exigeante en matière de musique, pour embellir leur registre préféré. C’est finalement Tyler, The Creator qui le permet de rencontrer le succès en partageant leur vidéo The Odd Future Sessions Part 1. Un beau cadeau que le Flower Boy a fait au monde, créateur d’effervescence c’est vrai, défricheur de talents, encore plus.

 


Mui Zyu

 

mui-zyu_wide
mui-zyu_wide

Entrez dans l’univers aérien d’Eva Liu plus connue sous le nom de Mui Zyu. L’artiste britannique originaire d’Hong Kong, distille un cocon musical unique fait de douceur et de partitions finement pensées. Au mois de mai, sur la pointe des pieds, la ballerine dévoilera avec subtilité un très joli nouvel album « Nothing or something to die for ». Pour le présenter la voilà qui dévoile le morceau Everything to Die for, une prouesse pleine de grâce à la mélodie savamment pensée. Certainement en raison de sa voix aérienne, Mui Zyu rappelle l’immense Björk. Peut-être aussi par sa capacité à torde les registres avec délicatesse et y glisser son univers hors cases. Ce dernier est aussi l’occasion de se reconnecter avec ses racines et donc d’offrir des mélodies aux croisement des mondes. Son nouveau né, le plus introspectif de tous est à fleur de peau. On y entre à pas de velours, pour mieux se laisser porter par une mélancolie exacerbée. La sensibilité y est maîtresse. Il promet une expérience entière, à la légèreté bien  faite pour le successeur de « Rotten Bun for an Eggless Century ». Dream Pop idéaliste pour un voyage aux confins de l’imaginaire, le Monde selon Mui Zyu a de quoi séduire et apaiser. Composé en collaboration avec Luciano Rossi, qui était déjà co-producteur de sa dernière galette, elle y expérimente plus que jamais. Échappée une semaine au Middle Farm Studios dans la région du Devon, elle en profite pour tester de nouveaux instruments. De l’électro pour mettre en avant la vie aseptisée aux passages instrumentaux pour évoquer les moments de doutes, s’aventurant parfois vers le psyché, la musique y a des nombreux visages. A explorer sans plus attendre.


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