Avec le brillant Kazuo Ishiguro aux commandes du scénario, le dernier film d’Oliver Hermanus, Living (ou Vivre en français) est une ode émouvante à ces petites choses qui font que la vie vaut d’être vécue. Sorti en salle le 28 décembre dernier, on y retrouve un Bill Nighy potentiellement au sommet du Bill Nighesque, aussi « stiff upper lip » que touchant.
De quoi ça parle ?
Vivre se déroule en 1953, dans un Londres qui doit se reconstruire après les séquelles de la Seconde Guerre Mondiale. Mr Williams (Bill Nighy que l’on connaît de Love Actually, About Time ou Pride) est un fonctionnaire de mairie émérite et un poil guindé. Un jour, il apprend qu’il ne lui reste que quelques mois à vivre. La nouvelle le bouleverse et après des décennies de rigidité, d’austérité et de ce flegme britannique que Bill Nighy incarne si brillamment, Mr Williams va réapprendre à faire quelque chose qu’il avait presque oublié : vivre.
Inspiré du film japonais Ikiru d’Akira Kurosawa (lui-même librement inspiré de La Mort d’Ivan Ilitch de Léon Tolstoï), Vivre possède à la fois toutes les qualités d’un conte moderne et de la critique humoristique de la société conservatrice anglaise de la moitié du 20ème siècle. En effet, le scénario de Kazuo Ishiguro (Never Let Me Go, The Remains Of The Day) incarne brillamment l’univers de son auteur, à la croisée de l’embellissement de la vie quotidienne et d’une nostalgie envahissante.
Est-ce que c’est bien ?
Avant d’être une ode à la vie, Vivre est également une lettre d’amour à la ville de Londres. En effet, dès les premières minutes du film, des images d’archive d’un Londres des années 50 apparaissent à l’écran. Ces scènes de vie d’un autre temps entraînent instantanément les spectateurs dans un univers plein de vie et nostalgique.Un contraste se forme cependant bien vite lorsque les employés de mairie, arborant tous plus ou moins maladroitement un chapeau melon, apparaissent à l’écran. Une moquerie gentillette de la société anglaise se fait sentir ici.
Ce n’est pas l’aspect le plus surprenant du film. S’il parle de la mort de son personnage principal, il n’est pas mélodramatique pour autant et aborde un sujet oh si délicat par son antagoniste direct : la vie. En effet, la mort, pourtant omniprésente dans le film, se retrouve sans cesse recouverte par l’optimisme vital et naissant du protagoniste. Les personnages qui l’entourent sont tout aussi touchants que lui et permettent ainsi, à plus ou moins grande échelle, à Mr. Williams de se révéler et de vivre pleinement. Sa relation avec la jeune Margaret (Aimee Lou Wood de Sex Education), qui aurait pu s’avérer romantique, n’est ni vulgaire, ni tendancieuse et souligne la renaissance d’un homme au seuil de la mort.
La bascule (que nous ne donnerons pas pour conserver l’effet de surprise) qui intervient prématurément au milieu du film a d’abord un effet déconcertant sur le spectateur. Mais, ce choix narratif permet ainsi de provoquer une effusion de souvenirs et de nostalgie qui donnent au film un rythme original et, en fait, logique.
Nommé aux Oscars pour la première fois à 73 ans, Bill Nighy offre une performance émouvante et d’une profonde justesse. Vivre est un bien joli conte à découvrir et à savourer.
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