
Voir un concert des groupes de Julian Casablancas c’est toujours prendre un risque. L’excellence studio de The Voidz et The Strokes la disputant à un rendu scénique en demie-teinte qui ira conquérir les plus grands fans pour mieux laisser de côté un public moins adepte et mois indulgent. C’est pourtant un pari qu’a choisi de relever le festival des Inrocks le temps de deux dates parisiennes les 4 et 5 mars au 104. Nous étions au premier des deux shows. Un moment acclamé par les fans et avouons le, une franche réussite. On vous raconte.
The Voidz & l’ivresse humaine

Voilà un moment que nous n’avions pas vu les Voidz dans la capitale française. Le très novateur groupe du génie Julian Casablancas s’était offert un Pitchfork en 2018. Un moment inoubliable par ses prouesses musicales, son univers hors case du hard rock au post punk en s’offrant des envolées électros. Mais rien n’est jamais trop beau pour le new-yorkais, compositeur émérite, adulé, adoré par un public en soif de réelles propositions musicales. Un moment aussi gravé dans les mémoires parce que Casablancas est de ces génies capricieux, qui ose tout, prend le live sans se prendre la tête. Il est ce premier de classe qui ne fait pas d’effort au contrôle et rate la moyenne, faute d’implication. Peu loquace le bonhomme s’était pourtant permis la dernière fois d’insulter le Pitchfork qui l’invitait, hop on ne se prive de rien ! Et, puis plus récemment il se faisait un passage à Paris à Rock en Seine avec les Strokes cette fois, face à un public majoritairement déçu. Le son qui ne fonctionnait pas, dirons-nous. Une gestion de scène qui en rebutait certain.es. Le rock n’est pas mort, mais son attitude désinvolte l’est certainement. Alors ce soir, en ce 4 mars, les attentes et craintes sont là. Le public est pourtant venu en masse au 104. Salle magnifique qui accueille finalement bien trop peu de concerts. Son immense hall permet à chacun.e de voir la scène où qu’il se place. Des transats sont installés en arrière salle et lorsque le concert débute sur « Blue Demon » qui fait également ses débuts en format live, certain.es choisissent d’y rester. Le reste de la foule se compacte, s’approchant au maximum.

Il faut plisser les yeux. Les jeux de lumières plongent les musiciens dans la pénombre. Ressortent des éclairs roses et bleus qui semblent dessiner le logo des Voidz. L’aspect rétro 80’s de la formation se dessine d’entrée, des choix de couleurs aux tenues, sans oublier le son. « QYURRYUS » succède rapidement. L’auto-tune prend le pas sur le voix du chanteur, métallique, franchement électro. Il dévore le rock pour mieux le faire ressortir. Les guitares résonnent follement. Casablancas est de bonne humeur. Ca se voit, mais ça s’entend aussi côté public. L’humeur est partagée, rendue au centuple. L’euphorie est telle qu’elle semble se faire ivresse, les têtes tournent, les corps s’activent, les yeux sont hypnotisés. Le meneur, lui, est particulièrement sobre ce soir. Rock’n’roll mais avec l’envie de bien faire. Au premier rang, quelques guerres de fans font rage pour conserver sa meilleure place au plus près du chanteur et de ses acolytes. Les fameux Voidz, réduction de Julian Casablancas & the Voidz, le nom d’origine de la formation. Le 104 donne un sacré écho à la performance, le son résonne contre ses murs et habille avec élégance l’échange musical de la soirée. L’allégresse humaine est à son sommet, et toutes les oreilles espèrent écouter « Human Sadness » tôt ou tard.
The Voidz, ces altesses humaines

La déception pourrait être au programme puisque d' »Human Sadness », titre phare d’une belle dizaine de minutes, il n’y aura point en live. La faute à un format long surement difficile à aborder. D’ailleurs ce sont ceux qui se prêtent le plus à l’exercice du concert qui sont interprétées. On découvre alors une légère dominante du dernier opus « Like all before you », prouesse sorti l’an dernier. « 7 Horses », « Overture », « Prophecy of the Dragon » pour n’en citer que quelques uns figurant parmi eux. « Tyranny », premier bébé fou du gang n’est pas en reste pour autant et vient défendre 4 de ses morceaux électro post punk, futuristes. Plus que moderne d’ailleurs, Casablancas et son équipe ont toujours eu un temps d’avance. Définissant le post punk avant qu’Idle et Fontaines D.C ne viennent lui ajouter ses couleurs. Le set est si plaisant qu’on se sent presque dans l’appartement des musiciens, confortablement installé.es dans leurs salons, qu’on imagine bordé de belles moulures au plafond et d’une décoration industrielle sortie de 2050. L’alliance monstrueuse de références passées à la classe assumée et d’une capacité à recréer tout, à tout repenser. Le public se délecte de « Johan Von Bronx » et du monstrueusement efficace « M.uatually A.ssured D.estruction ». Et quitte à vivre quelques instants dans le salon des Voidz on en profite pour faire la discussion. Voilà qui est assez rare avec le musicien ! Il lâche alors qu’Emmanuel Macron est fan de leur musique. Le nom est immédiatement hué. Si fort que le tacle envoyé à Donald Trump par la suite en devient à peine audible. Il faut dire qu’on en attendait pas moins d’un chanteur adepte de Bernie Sanders. Il avait même, pour l’anecdote, joué avec les Strokes pour le dernier meeting du politicien en 2020. Il doit être bien difficile être new-yorkais, démocrate et musicien par les temps qui courent aux USA. Non pas que cette présidence ne soit facile à vivre pour le reste du Monde. Ce soir au 104, où on essaie d’oublier un peu le monde pour mieux pogoter, notre meneur en profite pour remercier le public en français dans le texte. Si d’habitude la chose est commune elle l’est bien moins quand on parle des Voidz. Le public y réagit en masse tout comme il profite des moments les plus rock du set issus du très hard rock second album « Virtue ». « Permanent High School » ayant rejoint son comparse en début de set.

Dans les yeux des fans de la première heure de notre iconoclaste musicien, sa pâte sublime chaque titre et se vit comme une nouvelle découverte de son répertoire. A défaut du morceau le plus attendu de notre setlist le public pourra se délecter d’un rappel avec « Flexorcist » ( issu du dernier album) et d’un joli cadeau qu’est la possibilité de se procurer en vinyle l’introuvable premier album du groupe. En sortie de salle, le public euphorique s’interroge toujours « Mais en fait, c’était un bon concert ? ». Impossible d’en tirer une réponse exacte mais les coeurs qui battent forts, les sourires immenses, les fronts en sueur feront toujours répondre oui à l’unisson aux humais plein de tendresse pour le groupe que nous sommes. En tout cas, la « sadness », elle, est exclue !
Les Strokes clôturent Rock en Seine en inscrivant leur nom au mur de la honte.
Avant de se lancer dans un blâme rageur et déçu, excusons Rock en Seine qui…
The Strokes : leur nouvel album ‘The New Abnormal’ sort le 10 avril !
A l’occasion de la sortie de leur nouveau single et clip « At The Door », The…
Pitchfork Festival: The Voidz, Etienne Daho, du shopping, des karaokés et du bio! ( On y était)
Bien plus qu’un festival classique, le Pitchfork Festival qui nous vient de Chicago, est une…