A peine l’année 2019 avait-elle débuté que tomba l’heureuse nouvelle : Patti Smith de retour dans la capitale à la fin de l’été ! Ce n’est pas tous les jours que nos idoles (encore vivantes) viennent nous dire bonjour. Et autant dire que c’est le genre de bonjour qu’il est bête de manquer. Ni une ni deux, ma place était prise.
Huit mois me séparait du Jour J. Pour patienter, je n’avais plus qu’à écouter en boucle ses albums monstres, gravés à jamais dans l’histoire : Horses et Easter. Quel plaisir se fut. Radio Ethiopia, Wave ou encore Twelve, son album de reprise sorti plus récemment (mais il y a tout de même déjà plus de 10 ans !), sans être aussi puissants que les deux albums précédemment cités, n’ont pas pour autant été abandonnés à l’écoute. Il fallait être prêt pour le concert.
Puis, au retour des vacances, il était enfin temps. Les albums allaient prendre vie.
Un départ fort en émotion
Lundi 26 août. Le rendez-vous est à l’Olympia. Salle mythique parisienne pour une chanteuse encore plus mythique. Pas d’apéritif, le concert commence sans première partie. Cela aurait enlevé le côté divin de l’évènement. A 19h se forme déjà une foule devant la scène. Encore une heure et demi d’attente. Quand 20h30 sonne, Patti Smith arrive sur scène sous un tonnerre d’applaudissements. Quelques saluts de la main en signe de bonjour, et un grand sourire. Elle semble contente d’être ici. C’est une reine que le public vénère. S’il pouvait se mettre à genoux, il le ferait. Comme une statue, son aura continue de faire autant d’effet.
Elle fait signe à son groupe de démarrer et voilà que retentit déjà son hymne : People Have the Power. Les premières paroles me font comprendre que sa voix n’a pas perdu grand-chose : toujours aussi envoutante et combattive. Dieu merci, le micro est bien réglé ! Pas le droit à l’erreur avec des voix comme celle-ci. Voilà qui arrive le refrain, où tout le monde en profite pour porter son combat dans un moment d’euphorie. Le peuple a le pouvoir, et la foule nous le fait bien comprendre. Cet instant est tellement intense et honnête que je m’en trouve retourné. L’engouement que l’artiste a su créer en quelques secondes ne connait d’équivalent nulle part ailleurs. L’émotion est décuplée, et la joie de participer à cela me submerge. Je sens que je pourrais pleurer à tout moment, car il est très rare de se sentir aussi fort, presque invincible, dû à l’excitation qui nous entoure, au discours de la musique, et à la force abrupte d’une présence solide et convoitée. Un début de concert comme celui-ci forge les goûts et les attentes pour plus tard, autant qu’il répond de la plus belle des manières à une demande que le public se doit de faire à l’artiste lors de prestations live : donner du partage et de la conviction. People Have the Power a su révéler quelque chose enfoui profondément en moi, qui est le profond amour du rock, l’un des rares genres capables d’atteindre des sommets. Cette soirée, j’ai vécu quelque chose d’extraordinaire, et il m’est quasi impossible de retranscrire cette extase à l’écrit, sinon parler d’une impressionnante intensité, ce qui n’est pas suffisant pour qualifier la grandeur de ce que Patti nous a offert. Je ne m’embêterais donc pas à faire un compte rendu des chansons qu’elle a joué, car la puissance se dissimulait dans l’atmosphère ce soir-là, mais j’aimerais plutôt vous parler d’elle.
Le voyage fascinant d’une rockeuse engagée
Patti est venue, a joué, nous a envoutés, et ne nous a pas vaincus. Non, elle nous a emmenés quelque part ailleurs, sans jamais monter sur une marche plus haute que la nôtre. Son royaume n’a pas d’étage, même s’il est composé des meilleurs : Jimi Hendrix, Neil Young, Lou Reed, Bob Dylan, Sky (and the Family Stone)… Evidemment. Ce n’était pas une surprise, encore moins un étonnement. Elle porte le rock au plus profond d’elle. Elle est la porte d’entrée vers le splendide, et parvient à unir le public autant que son être scintille.
Elle rend hommage à ses amis, avec des chansons comme Are you experienced? ou After the Gold Rush, dans de sublimes versions que sa voix ne cesse de porter vers le haut. « Look at Mother Nature ». Neil Young lui permet de défendre ce qui lui tient le plus à cœur, à savoir Mère Nature. En tant que grande activiste, Patti Smith ne cesse de se battre pour protéger la planète de toutes les ordures qui la parsème (et autant dire qu’il y en a beaucoup), aussi bien matérielles qu’humaines. Car oui, elle nous le rappelle, ce n’est pas facile de se lever tous les jours avec un déchet à la présidence de son pays. Par maladresse probablement, et sûrement un peu d’ignorance, elle nous dit envier notre président qui lui, se soucierait apparemment de l’environnement. Autant dire que ce n’est pas vraiment le cas et qu’elle fait fausse route en avançant de pareilles choses, car moins pire ne veut pas dire meilleur, mais on lui excusera rapidement cette boulette qui, somme toute, ne change rien à son combat ni à sa personne, probablement mal ou trop peu informée sur le programme et les directives de notre gouvernement actuel et… on la comprend. Qui en a quelque chose à foutre de tous ces guignols en réalité ? Si les politiques pouvaient changer le monde, on le saurait déjà…
Le rock, lui, a le pouvoir de la portée symbolique. Il crée sa propre politique, et n’a nullement besoin de tous les hypocrites en costard pour prouver sa valeur et sa détermination. Le rock est un combat à lui seul, éloigné des mirages et des tromperies, prônant un monde ouvert, sans barrières, où tout découle du partage et du respect de l’environnement. Voilà les valeurs maîtresses. On construit le monde autour de cela. Point barre. Le rock est et ne peut-être que de gauche. Un groupe de droite ne fait pas du rock, il fait de la pisse… Patti Smith est une évidence pour cela. Patti Smith est grande. Patti Smith est un modèle. Ses concerts sont un moment de vie. Sa musique est une ode à la beauté et à la bienveillance.
Vive le rock. Vive Gloria. Vive la nature. Vive le peuple.