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Penelope Bonneau Rouis

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Midsommar – Ari Aster (2019)

Pour sa onzième édition, le Champs-Élysées Film Festival s’est montré particulièrement horrifique. Ari Aster, invité d’honneur et petit génie du cinéma d’horreur contemporain, est venu pour une Masterclass le samedi 25 juin dernier dans la Salle 1 du Balzac. Il explique son rapport à l’esthétisme excessif et marqué dans ses films qui prévaut souvent sur le réalisme et surtout, qu’il ne parvient pas à faire des films courts.

Pourquoi Hereditary, c’est bien?

Attention Spoilers- Hereditary est le premier long-métrage d’Ari Aster, sorti en 2018. Pour le décrire en quelques mots : à la suite de la mort de la grand-mère maternelle, une famille est frappée par de nombreuses tragédies (démoniaques pour la plupart). Si le pitch semble correspondre à un schéma de film d’horreur assez classique, le déroulé de celui-ci le place parmi les long-métrages les plus ambitieux de ces dernières années.

En effet, Hereditary, c’est plus qu’un film d’horreur où démons et sorcières se disputent le corps d’un ado, c’est avant tout un drame familial. Celle de la perte de la grand-mère un tantinet excentrique et plus tard de la fille de 13 ans, Charlie (Milly Shapiro). Contrairement à ce que l’on peut traditionnellement voir dans une grande partie du cinéma de genre, la mort n’y est pas associée au « fun » ou simples sensations fortes. Non, elle est froide et prend aux tripes. Comme la réalisation de l’immense Monsieur Aster qui arrive l’exploit de traiter quelques scènes grand guignolesques en dernière partie de pellicule de façon sobre et à faire frissonner. Comme « Conjuring » avant lieu, le film joue sur des codes connus pour mieux créer la surprise et l’effroi. A commencer par une scène particulièrement viscérale en milieu de métrage qui restera dans les esprits bien après son visionnage. Le poids de l’héritage familiale y est particulièrement exploité, comme la perte et ce qu’elle engendre. Aster y pose des plans longs et lents. Posant quelque part les bases de son futur Midsommar, qui lui aussi explorera le drame de la perte dans la famille.

 

Pourquoi Midsommar, c’est excellent?

Midsommar est le deuxième long (très long) métrage du réalisateur. Lundi 27 Juin dernier, le film a été projeté dans la grande salle du Balzac, là où la Masterclass avait eu lieu, deux jours avant. À 20h, Ari Aster monte sur scène pour présenter le film, qui est une « version longue » mais pas si longue que ça à son goût, puisqu’il aurait aimé en faire une de 4h. M’enfin, 2h50 c’est déjà bien.

Comme pour Hérédité, le début du film paraît au premier abord, suivre un schéma classique. Dani (incarnée magnifiquement par Florence Pugh) perd sa famille dans des conditions horribles. Son mec,  Christian (Jack Reynor)  veut la quitter mais ne sait pas trop comment s’y prendre, parce que vraiment, il se passe toujours un truc quoi. En plus, lui et ses potes (Will Poulter, William Jackson Harper) avaient prévu ce SUPER voyage en Suède, à Harga, la communauté de Pelle (Vilhelm Blomgren). Et dans la tête d’un mec, vous savez ce que l’on y dit du mythe de la Scandinave. Passons. Le spectateur calé en film d’horreur arbore son sourire le plus assuré en s’installant bien confortablement dans son fauteuil : ça va être une bonne séance.

Lors de l’arrivée en Suède des personnages, le contraste avec le début du film est frappant. Les couleurs vives sont saisissantes et donneraient presque envie à nous autres, citadins (même si on a quand même Paris Plage et le parc Monceau), de s’évader pour un petit week-end en pleine nature. Jusqu’à ce que les cérémonies commencent…

Car ce qui est frappant dans ce film, c’est qu’Ari Aster a réussi l’exploit de créer un film aussi visuellement et esthétiquement subjuguant en terme de couleurs en y apposant un sujet aussi sombre et glauque. S’il nous (citoyens francophones) arrive de dire que « ce qui se ressemble s’assemble », on a également tendance à dire que « les opposés s’attirent ». Et c’est exactement ce qu’il se passe dans ce film. Le fond épouse la forme de manière presque contradictoire, créant un chef-d’oeuvre du cinéma d’horreur psychologique.

C’est vrai ça, un film d’horreur garni d’aussi belles fleurs, d’aussi belles filles et d’aussi beaux garçons dans un pays où il ne fait presque jamais nuit en été, ça fait plus sourire que frémir. Et pourtant, voilà qu’on se retrouve avec des nausées (pour les plus sensibles), des frissons et les main serrées entre les cuisses en se pliant en deux de dégout. Il faut se l’avouer, c’est une prouesse.

Mais Midsommar, ce n’est pas qu’un film d’épouvante chamarré. C’est également une petite satire des moeurs américaines, d’un American Gaze tourné au ridicule.

Si Dani semble très rapidement charmée par les festivités (malgré un petit choc lors de la première cérémonie qui est justifié), Christian, Mark et Josh se montrent peu compréhensifs face à la culture de la secte. Bon, après ça reste une secte. Mais quand Christian et Josh veulent tous deux rédiger leur thèse sur les coutumes de Harga, la paire semble davantage se disputer sur l’exclusivité du sujet que sur la célébration de la culture en elle-même. Je répète que ça reste quand même une secte.

Et quand Josh, après ne pas avoir respecté le souhait des anciens de ne pas prendre de photos du livre sacré (déjà, ça promet) disparait mystérieusement, Christian n’hésite pas une seconde, lorsqu’interrogé, à se désolidariser de son pote, en assurant que vraiment, ils ne se connaissent qu’à peine. Le buzz et l’exclusivité avant tout, curiosité mal placée qui te courra à ta perte.

Uniquement Dani, esseulée et en deuil, trouvera un vrai sentiment d’appartenance au sein de cette communauté. Elle est le personnage le plus vulnérable, la plus susceptible de se faire alpaguer. C’est ce que Pelle doit voir en elle, quand il la regarde avec intensité en lui montrant la May Queen de l’année précédente,  alors qu’ils sont encore aux États-Unis. La beauté du décors fait échos à la souffrance d’une héroïne maltraitée qui en appartenant à un tout finit par devenir le décors.

Là encore, le poids du deuil est également présent. Une scène en particulier vient troubler les esprits. En début de pellicule, Dani en larmes cherche le réconfort dans les bras de Christian. En vain, aucune empathie ne vient profondément troubler le tableau. Son besoin de trouver une appartenance à un groupe, à perdre sa solitude vient pourtant trouver écho dans la communauté sectaire d’Harga alors qu’une nouvelle fois trahie esseulée, ses cris sont soutenus par ceux des femmes qui la composent.

Souvent mis en lumière lorsque le film est traité, la relation toxique dans laquelle s’est perdue Dani fait partie des points important à souligner. Elle est le catalyseur du récit, le fil rouge d’une héroïne qui ira se perdre dans une autre forme de toxicité. Midsommar est un récit aussi visuel que glaçant, aussi beau qu’intense, aussi puissant qu’à fleur de peau. Une œuvre à découvrir absolument en attendant son prochain métrage qu’il promet encore long et probablement puissant.


COMA
COMA – Bertrand Bonello

Le 24 Juin dernier, Bertrand Bonello a présenté son dernier film Coma en avant-première lors du Champs-Elysées Film Festival. Louise Labeck y joue le rôle d’une adolescente confinée perdue dans les méandres des rêves et de la réalité. Il sortira en salle le 16 novembre prochain.

Coma est un film autoproduit et, par conséquent, indépendant. C’est cette particularité qui offre au film toute la  liberté et l’originalité qui le définissent.

« Ne rentrez jamais dans le rêve des autres »

Bertrand Bonello utilise différentes techniques comme l’animation, des prises de vue réelles, du Stop-Motion et des images d’archiveCe film est dédié à sa fille,  Anna, de 18 ans. Comme le dit le réalisateur à la fin de la projection, il souhaitait entrer dans le cerveau de sa fille.  Le film débute et s’achève sur deux lettres saisissantes, où il s’adresse directement à celle-ci, lui offrant ce qu’il y a de plus beau, la liberté, la conscience du monde dans lequel elle vit et grandit. En s’adressant à sa fille, Bertrand Bonello s’adresse à toute une génération.

Coma parle d’une adolescente (Louise Labeck, « sa fille de cinéma » pour le citer) qui, pendant le confinement, ne sort pas de sa chambre et se perd dans sa tête et dans ses rêves, confondant ainsi ceux-ci avec la réalité. Ses errances chimériques sont rythmées par les vidéos d’une Youtubeuse, Patricia Coma (Julia Faure) qui s’adresse à sa communauté dont l’on ignore le véritable nombre. Celle-ci s’avère aussi seule et désemparée que l’adolescente qu’elle accompagne.

Un film ancré dans l’air du temps

Cet essai cinématographique mélange poésie, humour et des passages bien plus sombres, révélateurs de l’époque actuelle : l’écologie, le confinement, le terrorisme, la mort. Ce film est une ode à la jeunesse, une jeunesse terrassée en quelque sorte, par ces inquiétudes omniprésentes.

COMA – Bertrand Bonello

Chaque vagabondage de sa pensée offre une nouvelle dimension au film : sous les yeux de la jeune fille, ses Barbie se disputent et se déchirent, une forêt sombre et inquiétante (est-elle dantesque? Cartésienne? Biblique?) se déploie, des serial-killers se confient.

Il serait bien maladroit de ma part de ne pas dire un mot sur le casting prestigieux des voix. Louis Garrel, Laetitia Casta, Vincent Lacoste, Anaïs Demoustier et  Gaspard Ulliel – dont la voix résonne comme un écho fantomatique – jouent le rôle des Barbie et offrent au scénario une forme de comic-relief. 

Ainsi, ce film est un projet très personnel, déconcertant sur le principe, car il joue avec des supports hybrides et nous guide, avec des dispositifs assez simples, vers une complexité narrative très riche et inattendue. Comme le dit Bertrand Bonello, il est du devoir des cinéastes que de redonner le désir aux spectateurs de revenir au cinéma, voir des films en salle. Alors, à partir du 16 novembre prochain… vous savez quoi faire.


Luke Pritchard

Le 22 juillet 2022, après quatre ans d’absence, The Kooks reviendront avec un sixième album, 10 Tracks To Echo In The Dark. Si le titre évoque une certaine noirceur, l’album, lui, est lumineux et regorgeant de joie de vivre. Le groupe se produira à L’Olympia le 18 février 2023 et dans d’autres villes françaises comme Toulouse, Bordeaux et Lyon, un peu avant, en fin janvier 2023.  De passage à Paris il y a peu, Luke Pritchard a accordé une interview à Pop & Shot. Avec cette bonne humeur qui lui est propre, il aborde les inspirations derrière le nouvel album, son nouveau rôle de père, la littérature surréaliste, Berlin ou la dernière fois qu’il s’est senti vraiment « naïf » ! A découvrir en vidéo

Découvrez notre interview de luke Pritchard de The Kooks

Interview : Pénélope Bonneau Rouis et Julia Escudero / Vidéo : Théophile Le Maitre


champs elysées film festival 2022Cette année a lieu la onzième édition du Champs-Élysées Film Festival, qui se tiendra du 21 au 28 juin prochain. Le festival, dont la programmation complète sera dévoilée le 8 juin prochain sur le site officiel de l’évènement, semble être tout aussi exceptionnel que les années précédentes.

Comme son nom l’indique, le Champs-Élysées Film Festival se déroulera sur la plus belle avenue du monde. Les quelques cinémas restants de l’avenue accueilleront l’évènement pour célébrer le cinéma franco-américain comme à son habitude.

Les invités d’honneur sont prestigieux ; Dan Deacon, compositeur de musique de films. Et Ari Aster, l’excellent réalisateur et scénariste que vous connaissez sûrement pour Midsommar et Hereditary. 

Pour le moment, trois films ont déjà été annoncés :

  • Coma de Bertrand Bonello, avec Louise Labeque et Julie Faure et dans lequel le regretté Gaspard Ulliel prête sa voix, aux côtés de Laetitia Casta et Louis Garrel.
  • Les Années Super 8 par la géniale autrice Annie Ernaux, accompagnée de son fils David Ernaux-Briot à la réalisation, pour un film documentaire et autobiographique.
  • Ascension de Jessica Kingon, nommée d’ailleurs pour l’Oscar du meilleur documentaire 2022 et dont la bande-son est signée Dan Deacon.

Le film sélectionné pour la cérémonie d’ouverture est After Yang réalisé par Kogonada et avec Colin Farrell et Jodie Turner-Smith, sorti en 2021. Il a été présenté l’an passé au festival de Cannes dans la catégorie Un certain Regard. 

Mais ce qui rend cette édition du festival d’autant plus attrayante, c’est ce parfum de nouveauté qui l’entoure. Eh oui! Cette année, une sélection de six moyens-métrages hors-compétition sera présentée en avant-première:

  • Churchill, Polar Bear Town – Annabelle Amoros
  • Hideous – Yann Gonzalez
  • Lucienne dans un monde sans solitude – Geordy Couturiau
  • Maria Schneider, 1983 – Elisabeth Surin
  • Planète triste – Sébastien Betbeder
  • Sardines – Johanna Caraire

Qui dit Champs-Élysées Film Festival dit… musique ! Parmi les artistes présents, on y retrouvera Albin de la Simone, Adélaïde Chabannes de Balsac, anciennement chanteuse du trio parisien, Thérapie Taxi et tant d’autres !

Même si le programme complet n’a pas encore été mis en ligne à l’heure de la rédaction, ce qui a déjà été annoncé est tout à fait alléchant et ne donne envie que d’une chose : foncer prendre ses places.

Découvrez le teaser officiel