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Alexandre Bertrand

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couverture La Noirceur des étoiles Jessica Naide
La noirceur des étoiles – illustration de Fujika – Droits réservés.

Le 25 avril 2018 sortait sur Amazon, en format kindle et prochainement en bon vieux format papier, le premier tome de la tétralogie de SF « La Noirceur des étoiles » intitulé sobrement « Les yeux noirs ». A cette occasion, Pop&Shot a rencontré Jessica Naide l’auteure de l’ouvrage pour évoquer son parcours, ses influences et ce qu’implique de nos jours de s’auto-éditer. Interview.

Pop&Shot : Peux-tu nous pitcher la Noirceur des étoiles ?

Jessica Naide : La Noirceur des étoiles est une série de roman de space opera. Les Yeux noirs en est le premier tome.

Dans un univers en guerre divisé entre différentes Ethnies, nous suivons un capitaine de vaisseau, Iwata Kazuya, considéré comme un traître dans la plupart des galaxies, qui cherche à comprendre pourquoi dans un monde où la Nature n’est qu’une légende, celle-ci continue de lui apparaitre en rêve.

L’histoire commence lorsqu’au fin fond d’une galaxie, son existence bascule alors qu’il trouve un vaisseau abandonné. À l’intérieur de ce vaisseau, dans une salle immense où la représentation d’une jungle est peinte au plafond, il se heurte à un étrange jeune homme qu’il sauve d’une morte certaine. 

P&S : Est ce que tu peux nous en dire plus sur toi, ton parcours ?

JN : J’ai un parcours qu’on pourrait qualifier d’atypique, j’ai réalisé des études d’ingénieur puis de marketing avant de me retrouver en agence de communication à Tokyo au Japon, un pays qui m’a laissé de très fortes influences dans ma créativité. J’ai ensuite travaillé au sein du milieu digital sur Paris. J’ai commencé à écrire des nouvelles et des romans il y a environ huit ans. Aujourd’hui, lorsque je n’écris pas, j’essaie au maximum de voyager et de danser.

P&S : Quelles sont tes influences ?

JN : Mes influences sont très diverses. On peut citer en premier les séries de science-fiction et fantastiques tel que Farscape, Firefly, Buffy contre les vampires, Cowboys Bebop… Je dirais également tous les films de SF et fantasy des trente dernières années ! Par exemple, l’Histoire sans fin, Star Wars, Pacific Rim, Dune, Jurassic Park, Terminator…. J’aime les œuvres qui sont portées sur le mysticisme ou la politique comme Dune ou BattleStar Galactica ou celles vraiment badass comme le dernier Mad Max ou même John Wick.

Coté littérature, j’ai été une grande lectrice des romans Star Wars notamment la série des X-wings ainsi que de nombreux livres de fantasy comme l’Assassin Royal, l’Arcane des épées… Globalement, je me nourris beaucoup de l’imaginaire et de ses codes, mais on peut aussi voir l’influence de la romance sur mes récits, des histoires d’amour avec un grand A comme Outlander tout comme des soaps (dont je tairai le nom pour notre bien à tous) aux rebondissements dramatiques invraisemblables. Enfin, l’auteur qui m’inspire le plus est Laurent Gaudé où chacune de ses histoires se transforme en un récit épique, humain et toujours bouleversant.

extrait La Noirceur des étoiles Jessica Naide
Illustration de la noirceur des étoiles par Caroline CH avec le synopsis officiel. Droits réservés.

P&S : Comment prend-on la décision de s’auto éditer ? Est-ce que c’était ton souhait premier ou bien as-tu essayé d’autres voies auparavant ? Quelle vision as-tu de l’auto-édition ?

JN : La décision de s’autoéditer est unique à chaque auteur. Pour ma part, j’ai décidé de publier la Noirceur des étoiles en parallèle de ma recherche d’une maison d’édition. L’auto-édition est pour moi un moyen de faire exister mes romans en les proposant tels que je les ai écrits aux lecteurs. J’aime comparer ça comme une sorte de sortie indépendante d’EP littéraire ! L’auto-édition autorise les auteurs à sortir le nez de leurs écrans et montrer au monde ce qu’ils sont capables de faire. Il est très difficile de s’auto-éditer seul, alors les auteurs font appel à leurs amis, des bénévoles, parfois même des indépendants, cela crée une véritable émulsion autour de l’oeuvre qui est très motivante et appréciable. Si je souhaite à terme travailler avec une maison d’édition pour pouvoir être accompagnée et soutenue par des professionnels, l’autopublication est une super aventure, qui prend beaucoup de temps, mais qui est également extrêmement formatrice.

P&S : Est-ce que c’est ton premier texte que tu finis ou bien il y’a-t-il des inédits que tu as décidé de ne pas (encore?) publier ?

JN : Les Yeux noirs est le premier livre d’une série de quatre tomes déjà tous écrits et finalisés. Leurs sorties en auto-édition sont prévues pour les prochains mois. Je travaille également sur deux autres projets d’écriture, une romance pure et une autre série Science-fiction/Fantasy.

P&S : Comment édite-t-on un roman ? 

JN : Avec un éditeur ! 🙂 

Sinon, on demande à ses amis de lire et relire pour voir si le roman a du potentiel, ensuite on trouve des amis correcteurs (ceux qui cachent habituellement leur tendance de grammar-nazis ?) et ensuite on relit, on relit et on relit. Une fois que l’histoire est bouclée, cohérente et validée par soi-même et quelques lecteurs en qui ont a confiance, que le texte est nettoyé tant au niveau de l’écriture que de l’orthographe, la grammaire et la typologie… On relit… Et on recommence.

En parallèle, il faut gérer la partie juridique de la publication numérique, mais aussi celle, différente, de la version papier, trouver un illustrateur (talentueux) pour la couverture et suivre son élaboration. Il y a ensuite toutes les étapes assez longues de mise en page, en mise en forme que ce soit pour la version numérique que pour la version papier. Enfin, il y a la relecture finale et les ultimes tests sur les deux versions.

La Noirceur des étoiles : « J’aime me laisser surprendre par l’histoire, les personnages, les situations ! » 

P&S : Comment se passe la création d’un roman ? As-tu une méthode particulière d’écriture ?

JN : Je suis une jardinière, c’est-à-dire que je possède les grands axes dans la tête, mais je ne prépare pas de plans détaillés à l’avance. J’aime me laisser surprendre par l’histoire, les personnages, les situations ! Les jardiniers ont par conséquent un travail de remaniement plus important (il parait !). Pour écrire, je pars du décor et des personnages, j’élabore toujours les scènes capitales selon ce que mes personnages vont ressentir comme émotion pendant l’action. Les personnages sont la clé pour avancer. En parallèle, j’articule les scènes pour donner un tout cohérent que ce soit au niveau des sentiments que des enchaînements de situations et des rebondissements. Ma méthode particulière est de rester le plus possible dans la lune tout en observant les habitants de la Terre. 🙂

La Noirceur des Etoiles : « Ecrire sur un couple d’hommes me permet de dynamiter le sujet du genre »

P&S : Le couple principal est un couple gay. Est-ce un choix sciemment fait, en ces temps troublés, avec un message derrière ou bien était-ce tout simplement naturel pour toi ?

JN : Mettre en scène des personnages est toujours un choix et celui d’écrire sur un couple gay n’est donc pas un hasard. À chaque fois que l’on me pose cette question, je me surprends à donner une réponse différente sans que les autres ne soient pas moins vraies. Je vais donc essayer de donner une réponse exhaustive (mais qui ne le sera donc pas !).

Premièrement, écrire sur un couple d’hommes me permet, pour ma part, de faire paradoxalement dynamiter le sujet du genre. J’ai lu bon nombre de romans traitant de couples hétéro (surtout des romances) qui sont pour la plupart du temps soumis au stéréotype du genre, que ce soit des clichés gros comme un vaisseau spatial (Un mec riche, beau et un peu torturé et une nana sympa, pas trop moche, mais un peu bordélique) ou que l’on retrouve dans des contextes plus pernicieux : ainsi, même si Leia est l’une des princesses les plus badass de tous les temps, elle se fait tout de même embrasser contre son consentement avant de tomber amoureuse du mec cool. C’est peut-être chercher la petite bête, mais une fois que l’on est sensibilisé à ce genre de détails, on a du mal à s’en défaire. Attention, je ne dis pas que les romances gays échappent aux stéréotypes, loin de là, d’ailleurs, je m’en amuse dans les Yeux noirs. Mais simplement, je n’avais pas envie d’écrire sur un couple hétéro et me rendre compte à la fin que j’avais dépeint un couple ultra cliché. Pour éviter ça, je suis parti du principe d’essayer d’écrire sur un couple qui finalement pourrait presque être interchangé par un couple hétéro, gay ou lesbien sans que cela influe sur l’essence même du récit. C’est en ça qu’écrire sur un couple gay peut faire, encore une fois dans mon processus d’écriture, exploser la question du genre.

Ensuite, faire apparaitre un couple gay a aussi un coté militant à sa façon, c’est aussi une manière de vouloir une diversité dans les récits SF/imaginaire qui n’existent pas forcement beaucoup. (Même si je trouve que cela change depuis quelques mois). C’est le même choix que celui d’écrire sur des personnages typés asiatiques. Je voulais des héros forts, émancipés, charismatiques, qui soient un peu éloignés du héros américain moyen, grand, blond musclé et hétéro. (Même si j’aime beaucoup Steve Rogers et que mes héros sont irrémédiablement musclés !). 

couverture La Noirceur des étoiles Jessica Naide
Sotcha, l’un des personnages principaux de La noirceur des étoiles mis en image par l’artiste Fujika

P&S : Au fur et à mesure de la progression du récit, on voit apparaître, si ce n’est un message, tout un sous-texte écologique, avec, notamment, la Deuxième Ethnie qui exploite de gré ou de force au fur et à mesure les ressources de son entourage, c’est quelque chose d’important pour toi ?

JN : Oui, c’était un des messages premiers de l’histoire. Mais je voulais qu’effectivement le lecteur ne le découvre que petit à petit, un peu comme on est enfant, où tout parait normal jusqu’au moment où l’on découvre que sa propre existence à une influence majeure sur la planète, mais aussi que l’on fait partie d’un système un peu pipé à l’avance auquel on aura que peu de chances d’échapper de notre vivant.

Les personnages de la Noirceur des étoiles sont ainsi piégés dans leur système politique, économique, social et l’on voit que la plupart tentent d’évoluer autour de ce système que ce soit en l’utilisant ou en étant, au contraire, en marge de celui-ci, que ce soit par choix, par idéologie ou par contrainte.

La question de la Nature est à la fois centrale puisque c’est l’objet du récit, mais également diffuse. Un peu comme aujourd’hui, où la question du réchauffement climatique est primordiale, mais à laquelle on ne pense pas forcement en se levant chaque matin. Je voulais que cet enjeu soit comme un bruit de fond qui prend de plus en plus d’importance au fil du récit.

P&S : Qu’est-ce qui est venu en premier dans la genèse de la Noirceur des étoiles : écrire un space opera, une histoire d’amour ou faire une fable écologique ?

JN : Tu as tout compris, car cela a toujours été les trois à la fois ! L’aspect écologique a été, dès le départ, l’enjeu de l’histoire, son décor autant que son fil rouge et son dénouement. Le space opera s’est imposé un peu tard, juste après la question de l’histoire d’amour. La question écologique ne va pas sans l’histoire d’amour, car on découvre très vite que les deux personnages principaux sont liés, l’un comme l’autre, et de façon très différente, à la Nature.

De mon point de vue d’autrice, la Noirceur des étoiles est autant une histoire de couple qu’une histoire d’amour. Mon idée était : quand l’amour est là, que peut-il se passer ? Que peut-on décider d’en faire ?

Je voulais avant tout parler de l’amour comme force créatrice, m’intéresser à l’acceptation du lien pour finalement parvenir à l’acceptation de soi. L’idée est de partir de l’amour entre deux êtres pour le faire vivre au sein du couple, mais aussi au-delà. Le couple est ici le point de départ de l’histoire, le déclencheur de la quête principale, et l’épanouissement des personnages n’est ainsi donc pas limité à leur seule histoire d’amour.

P&S : Pour conclure, quel conseil donnerais tu à quelqu’un désirant se lancer dans l’écriture?

JN : Je ne sais pas, mais je suis preneuse !

Retrouvez le premier tome de La Noirceur des étoiles uniquement sur Amazon

Après avoir fait l’ouverture de la dernière Berlinale, « L’île aux chiens », le dernier film de Wes Anderson  sortira en France le 11 avril 2018. Grâce au Club 300 d’Allociné, Pop&Shot a pu le voir en avant première et vous dit tout ce qu’il a pu penser de ce film d’animation aux  influences nombreuses qui a valu à Anderson de remporter l’Ours d’Argent du Meilleur Réalisateur

-Attention! Quelques spoilers se sont glissés dans notre critique-

 

L’île aux chiens : Un récit richement paré

 

extrait de L’île aux chiens 2018
Droits réservés : 20th Century Fox Animation

 

Dans un Japon dystopique, le maire de Megasaki, l’autoritaire Kobayashi signe un décret bannissant tout les chiens sur « Trash Island« , une île ou s’accumulent tout les déchets. Le jeune Atari décide envers et contre tout de retrouver son chien, Spots. Quelques mois plus tard, il finit par atterrir sur Trash Island et se retrouve nez à nez avec une bande de chiens composée de Chef, Rex, Boss, Duke, King. Atari va t-il retrouver son fidèle ami Spots?

 

Pour illustrer cette histoire, Wes Anderson s’est fait plaisir et a convoqué un casting quatre étoiles : Bryan Cranston (Chef) , Ed Norton (Rex), Bill Muray (Boss),Jeff Goldblum ( Duke), Scarlett Johansson ( Nutmeg), Tilda Swinton (Oracle), Harvey Keitel… Vu en VOSTFR au Forum des Halles, la projection n’aura pas permis de pouvoir profiter du casting francophone, là aussi « de luxe » avec Romain Duris, Léa Seydoux, Vincent Lindon, Mathieu Amalric, Yvan Attal, Daniel Auteuil, Hippolyte Girardot, Isabelle Huppert

 

Pour l’illustration sonore de l’histoire de « L’Île aux chiens », le travail fabuleux du français Alexandre Desplat est à noter. D’autant plus qu’avec le succès (cf son deuxième Oscar remporté pour La forme de l’eau cette année) et la multiplication récente de ses sollicitations (plus d’une vingtaine de BO depuis 2015!), il a pu être facile d’oublier qu’il est l’un des meilleurs compositeurs actuels. En effet, son score qui mêle sonorités japonaises et saxophone plonge immédiatement le spectateur dans cet univers ou les influences sont multiples.

 

L’île aux chiens : Une quête initiatique 

 

extrait de L’île aux chiens 2018
Droits réservés : 20th Century Fox Animation

 

Nouveau film d’animation de Wes Anderson après «Fantastic Mister Fox», « L’île aux chiens » est avant tout le fruit de la collaboration de Roman Coppola, Jason Schwartzmann, Kunichi Nomura et d’Anderson. Ce travail à plusieurs mains (et cerveaux) se ressent tant les influences foisonnent et apparaissent sur l’écran, au fur et à mesure du développement du récit. La mise en scène de Wes Anderson est un bel exemple. L’hommage au cinéma japonais coule de source au vu du contexte mais Akira Kurosawa pourra être honoré de la façon dont il est célébré. L’aridité du décor de l’île poubelle, sorte de désert, les plans contemplatifs et la personnalité retorse de Chef donnent au film une touche de western spaghetti. Mais c’est un film avant tout Andersonien que cette « Île aux chiens », notamment dans certaines trouvailles visuelles comme les bulles de pensées lors des échanges entre Chef et Nutmeg.

 

Ca c’est pour la mise en scène mais l’histoire en elle même sait faire écho en l’inconscient du spectateur en lui parlant d’actualité. Fake news : le virus censément dangereux qui justifie l’expulsion des chiens est en fait sans danger. Montée du populisme : les scores aux élections du maire Kobayashi ne peuvent que faire sourire quand on pense qu’il n’y a pas longtemps on votait -démocratiquement bien sur- en Russie. Le fait que Trash Island soit dans le pays de Fukushima n’est évidemment pas anodin. Voir les chiens tenter un retour sur la terre ferme à bord d’embarcations de fortune rappelle des images qui font partie de notre quotidien depuis bien trop longtemps.

 

extrait de L’île aux chiens 2018
Oracle ( Tilda Swinton), la caution humoristique-réussie- du film
Droits réservés : 20th Century Fox

 

Nombreuses sont les thématiques qui sont abordées tout au long de « L’Île des chiens » mais une des forces du film de Wes Anderson est de jouer aussi avec les archétypes. En effet, tout le parcours de Chef, le chien cabochard et outsider qui finit par s’accomplir, une fois qu’il a trouvé son but dans la vie et régler son traumatisme est amené de façon assez mignonne pour ne pas faire tomber l’archétype dans le stéréotype. Ainsi, il trouvera sa place en guidant le jeune Atari jusqu’au bout de sa quête pour retrouver Spots, quête qui s’avérera initiatique pour Chef.

 

L’Île aux chiens : Est ce que c’est bien ?

 

extrait de L’île aux chiens 2018
Atari et ses nouveaux amis déterminés à retrouver Spots
Droits réservés : 20 th Century Fox

 

L’Île aux Chiens est un chouette film malgré une petite baisse de rythme dans le dernier tiers du récit avant une conclusion hautement sympathique. Wes Anderson réussit le tour de force de livrer pour son neuvième long métrage un conte magistral tant dans le fond que dans la forme, réussissant à rendre hommage à tout un pan de la culture japonaise tout en commentant l’actualité, le tout sous la forme d’un conte universel accessible autant pour les enfants que pour les adultes. Car si malheureusement, des éléments du récit peuvent faire écho en l’actualité (fake news, écologie) ou bien en l’histoire (une population déportée), il y a aussi l’universalité de ce conte qui redonne du baume au cœur. Et quoi de mieux qu’une histoire de quête initiatique avec son héro, ses oppositions entre le bien et le mal et son éternel optimisme?

 

2017 s’achève et comme chaque année c’est l’heure des bilans… Pop&Shot vous propose un Top Films 2017 avec les 5 films les plus marquants. Seulement un Top 5 ? On a un peu trichés, tant l’année a été riche en œuvres marquantes, vous allez voir… 

Top Films 2017 : 5 – War of the Planet of the Apes ( Matt Reeves)

DR Century Fox

La saga-nouvelle génération de la Planète des Singes aura définitivement été une des bonnes surprises de ces dernières années. En pleine mode des remakes des grands films hollywoodiens d’antan ( Ben Hur par exemple, rien que pour mettre un malaise), la planète des singes, dès son premier épisode aura mis en avant deux qualités principales : un respect du matériel d’origine (non renié contrairement à la version de Tim Burton au début du siècle) et une profonde tendresse, voire même « humanité ». Très rares sont les personnages de la trilogie à être manichéen (à part peut etre le personnage fanatique de Gary Oldman dans le 2, encore que…). Et voici donc cette Planète des singes : Suprématie surgir au beau milieu de l’été pour un résultat plus qu’à la hauteur. Convoquant à la fois les codes du western, du film de guerre et du péplum, on se dit qu’en d’autres temps et avec d’autres technologies, c’est Charlton Heston qui aurait pu jouer César, tant le personnage incarné avec brio par Andy Serkis ( à quand un Oscar pour un acteur en motion capture?) rappelle les personnages épiques des grands péplums d’antan comme Ben Hur, Les Dix Commandements, Spartacus ( oui c’est Kirk Douglas qui joue dedans et non Heston), etc… Le face à face avec le personnage de Woody Harrelson ( qui mine de rien se taille une riche collection de seconds rôles de luxe après ses apparitions dans les sagas Hunger Games et dans le futur film sur Han Solo) est riche et complexe. Un grand film « à l’ancienne » comme on en fait plus avec un indéniable savoir faire et une générosité rare.

 

Top Films 2017 : 4 – Split ( M. Night Shyamalan)

La claque du début d’année. On vous en parlait longuement à l’époque de son visionnage à Gérardmer. Avec le recul l’impression ne s’est pas émoussée et on peut légitimement pousser une gueulante en voyant que ni James Mc Avoy ni Anya Taylor-Joy, les deux crevant littéralement l’écran en incarnant leurs personnages de schizophrène serial killer avec une vingtaine de personnalités bouillonnantes et celle d’une « final girl » comme on en voit rarement. Un Shyamalan ressuscité, une interprétation de haute volée, un suspense haletant et un biscuit pour fan geek en post générique qui a fait rugir de plaisir toute la salle… Une belle surprise pour un très bon film.

 

Top Films 2017 : 3 – ça ( Andy Muschietti)

Casting des enfants de ça le film 2017

L’adaptation du roman de Stephen King semblait doublement impossible. D’une part, la structure du livre, faite d’aller-retours quasi constants entre deux époques, donnait toute sa richesse et sa complexité au récit. Mais elle risquait de perdre un spectateur lambda ( le cœur de cible d’un studio qui vise toujours à ce qu’une oeuvre soit la plus accessible au plus grand nombre). D’autre part, la mini série des années 90 avec l’interprétation cabotine de Tim Curry en Pennywise a acquis un statut culte (largement surestimé mais ceci est une autre histoire) et collait de près au roman. Muschietti (un des réalisateurs à suivre du moment) a tranché dans le vif : une oeuvre en deux parties, une dans le passé , une dans le présent (même si on devrait retrouver le Club des Ratés dans le deuxième épisode), la partie de l’enfance relocalisée dans les très hypes années 80. Et le résultat est plus qu’à la hauteur! On avait pas vu une bande d’enfants aussi convaincants depuis… Stand By Me? Les Goonies? La créature Pennywise a un excellent maquillage et est très bien interprétée par Bill Skarsgard. Une chouette adaptation, pas parfaite, mais qui aura eu le mérite de remettre sur le devant de la scène une forme de cinéma d’horreur/cinéma de genre grand public. Et ça ce n’est pas rien, quand on voit comment le genre peut être malmené actuellement…

 

Top Films 2017 – 2 ex aequo : A Sicilian Gost Story (Antonio Piazza, Fabio Grassadonia) / A Ghost Story ( David Lowery)

Image de A Sicilian Ghost Story

Ces deux pépites, découvertes au PIFFF de cette année, ont en commun une sensibilité à fleur de peau renversante et la thématique du deuil. Le deuil d’un amour, c’est (entre autre) l’une des thématiques de ces deux œuvres. Le processus de deuil d’un premier amour disparu dans des circonstances troubles dans A Sicilian Gost Story, superbe drame sur la fin de l’enfance avec une pointe de fantastique en arrière plan qui n’est pas sans faire penser The Reflecting Skin, le chef d’oeuvre de Philip Ridley ( Heartless). Le processus de deuil…d’un fantôme prenant des proportions et abordant des sentiers si riches et si complexes, ou l’on voyage à travers le temps, on parle philosophie et sens de la vie, sans jamais quitter l’emplacement de la maison du couple Casey Affleck/Rooney Mara, bercé par la sublime musique de Daniel Hart. Deux pépites qui ne seront pas forcément en haut de l’affiche mais qui méritent amplement que l’on vante toutes leurs qualités.

La bande annonce de A Ghost Story

 

Top Films 2017 – 1 – Baby Driver ( Edgar Wright)

baby-driver-affiche
baby-driver-affiche

Le gros coup de cœur de cette année. Grandement encensé au moment de sa sortie, le film d’Edgar Wright est un modèle de maîtrise technique et artistique. Avec le temps, il pourra rentrer dans l’histoire comme un des derniers films ou aura joué Kevin Spacey avant un bon bout de temps. Parvenant clairement à ses fins, Wright réussit le tour de force de mettre en scène le film de ses rêves, à savoir une histoire guidée par la musique. Et quelle bande son! Le film le plus enthousiasmant et dynamique de l’année. Et de loin!

Top Films 2017 : On aurait pu vous parler de…

Comme dans tout classement, il y a toujours des oublis, des envies de modifications, etc… Comme on ne peut pas être exhaustifs, les films suivants méritaient aussi d’être mentionnés dans cet article : Grave, un bon film de genre tricolore, ce qui est assez rare pour le noter. Okja, un bon film tant dans la forme que dans le fond ( écologique et politique). Shin Godzilla, un film de monstres qui vous en apprend énormément sur les ramifications gouvernementales japonaises, et dans lequel la France a un rôle déterminant (sisi!). Enfin, 2017 aura vu deux suites prometteuses et réussies à leurs manières bien différentes. Blade Runner 2049 et Star Wars VIII : The Last Jedi, qui feront l’objet de futures conversations de fan ont su réussir le double tour de force de s’inscrire dans des univers ayant marqués le paysage cinématographique contemporain et de proposer quelque chose d’original par rapport à leur matériel d’origine. On vous en parlera prochainement!

La bande annonce du très bon Grave

Bonne année 2018 !!!

Après plusieurs mois confinés dans un appartement suite à une infection dévastatrice, cinq survivants unis par la catastrophe décident de quitter leur refuge en quête d’ailleurs. Ils vont se confronter aux pires travers de l’humanité, loin de se douter qu’une menace encore plus grande les guette. La fin du monde, le début du leur… Un post-apo matiné zombie à la française, Pop&Shot ne pouvait qu’être sur le coup! Rencontre avec deux des créateurs de « Reset » dont l’épisode pilote est en ligne, Yohan Labrousse et Christelle Gras


affiche officielle de la série "Reset"2017
affiche de la série « Reset » 2017

Pop&Shot : Que pouvez vous nous dire sur les origines du projet « Reset »?

Yohan : En 2011, un ami commun nous a contactés en nous disant, et ça peut faire rigoler aujourd’hui, « il n’y a pas de web série sur les zombies », on s’est lancés, on a commencé à créer les personnages…

Christelle : Au début, on partait sur l’idée d’une web série, et au final, on a tellement écrit et développé et étoffé l’histoire que c’est devenu une série.

Y: C’est compliqué de différencier série, web série, série digitale… Avant, on arrivait à faire la différence, une web série était composée d’épisodes de 13-15 minutes. Maintenant, avec Netflix, Amazon, la frontière est plus floue.

C : Nos épisodes devaient faire 52 minutes.

P&S: Au niveau de l’écriture, vous en êtes ou ?

C : On a finalisés l’écriture du pilote de « Reset » et de l’épisode 2. On a pitchés tout les autres épisodes du reste de la saison 1 et on est allés jusqu’au début de la saison 2 qui est vraiment… Très intéressant.

P&S : Vous avez procédés via le crowdfunding pour financer le projet « Reset ». Est ce que vous pouvez nous en dire plus ? Sur la manière dont vous avez procédés, la manière dont vous avez pu communiquer à ce sujet ? Comment vous avez pu estimer le budget dont vous aviez besoin pour réaliser le projet ?

Y : Au début, on avait vraiment aucune idée de combien, il nous fallait ( rires). On est partis voir ulule et on voulait demander 20 000. Ils nous ont répondus : « Personne ne vous connaît et vous voulez 20 000 euros ?! Commencez par demander 5 000 ». Son raisonnement se tenait… Mais on l’a pas écouté : on a demandé 15 000 et on est arrivés à 25 000 !

C : Le crowdfunding c’est un travail à plein temps. Tout les jours, on communiquait, on inventait de nouvelles choses, on prenait des photos, tournait des vidéos, on faisait des interviews. Par exemple, on a fait une interview avec créateurs, réalisateur et je me suis dit qu’on ne pouvait pas faire ça sur un canapé devant une vidéothèque : on a donc fait l’interview sur les toits de Paris ! On a été beaucoup soutenu aussi. On a eu des articles dans la presse, beaucoup de blogs aussi, pas forcément spécialisés dans le cinéma de genre d’ailleurs. On a eu un article sur le blog d’Arte, qui parlait de différents projets de crowdfunding, dont le notre, par exemple. Je pense que c’est ça qui nous a vraiment permis de réussir. Les gens étaient aussi surpris et séduits par le fait de voir une série d’anticipation et post-apo française.

P&S : Le fait que ce soit justement une série de genre, en France, vous pensez que ça a freiné ou au contraire boosté le projet ? On était à Gérardmer cette année et on a pu croiser plusieurs personnes de la ville nous expliquant que l’affluence et même la couverture baissaient d’années en années…

Y: Oui mais avant Gérardmer, il y avait Avoriaz. Avoriaz, on ne peut pas dire que ce n’était pas couvert. Après qu’est ce qui fait qu’à une époque ça l’a été et maintenant moins…

C : Mais parce que je pense qu’il y a eu une époque glorieuse du genre. Et que c’est peut être moins le cas maintenant…

Y : Il y a eu des choix qui ont été fait aussi, en terme de subventions, privilégiant un certain type de films… Ce qui a amené une radicalisation des créateurs et ce qui a conduit à des projets plus choquants, plus gores, plus référencés que d’habitude. Ce manque là crée aussi quelque chose. Il crée une sorte de frustration qui incapacité beaucoup les réalisateurs, qui du coup font des films soit pour choquer leurs parents soit pour refaire le film qu’ils ont aimés avant. Il n’y a pas vraiment de volonté créatrice. Ils ont compris. Ils n’ont pas vraiment de budget derrière…

 


« Nous, on est partisans qu’il y ait du sens. Par exemple, dans le pilote, celle qui tue, la seule qui tue c’est la seule qui était incapable de tuer »


 

 

P&S : C’est pour ça que beaucoup comme Laugier, Aja, Bustillo et Maury partent à l’étranger pour monter leurs projets…

Y : Oui, parce que ce n’est pas que ce sont de mauvais réalisateurs. Mais à l’étranger, on saura reconnaître leurs compétences techniques. Et que là bas, on va plus regarder le contenant que le contenu.

C: Pour un Laugier, dont je suis une fan absolue, il y a les deux très clairement. Mais je vois ce que tu veux dire : cette frustration crée des choses beaucoup plus crues, bruts. J’aime bien le cinéma de genre français. J’ai beaucoup aimé A l’intérieur par exemple. Mais c’est vrai qu’on peut se demander : « Pourquoi aller aussi loin ? ». Le genre ce n’est pas que l’hémoglobine, l’ultra-violence… Sans en plus qu’il y ait forcément un message derrière. Nous, on est partisans qu’il y ait du sens. Par exemple, dans le pilote, celle qui tue, la seule qui tue c’est la seule qui était incapable de tuer. Ça prend du sens, car ça caractérise le personnage sur l’instant, ça le caractérise sur la durée. La violence prend du sens dans ce genre de cas de figure et c’est ce qu’on aime, ce qu’on préfère.

P&S : Comment vous avez fait pour créer vos personnages ? Ils ont une vraie importance, même dans la bande annonce.

Y: On s’est inspirés de nous, de notre entourage. Je crois que c’est bien de partir de soi, de pas trop s’éloigner des personnages qu’on décrit. C’est pour une question d’authenticité. Et puis, les acteurs aussi contribuent beaucoup à l’élaboration du personnage, ils le modifient, ils le modèlent en fonction de ce qu’ils apportent au personnage.

P&S : Comment s’est passé le casting des différents acteurs ?

Y: De manière très classique en fait. On a passé des affiches dans les écoles de théâtre, on fait des dossiers, on sélectionne et on on en voit quelques uns. Ceux qu’on garde, on les mélange pour voir si ça fonctionne bien entre eux. Et on voit ce qui marche le mieux.

: Tu as bien expliqué le processus. Concrètement, on avait aucun réseau, donc le point de départ ça a été de mettre des affiches dans les écoles de théâtre. On est passé par le site cineaste.org, qui est la seule source fiable pour ce genre de projets.

: C’est une newsletter, c’est gratuit et 99% du temps quand on demandait « ou est ce que vous avez entendu parler du projet ? », on nous répondait par cineaste.org. On a fait à pied toutes les écoles de théâtre de Paris. Ça sert à rien (rires).

P&S : Dès le début de « Reset », le décor fait très « banlieue », est ce que c’était un clin d’œil voulu à La Horde ?

Y : Pas vraiment, car ça s’est tourné à Paris même dans le 13ème, là ou je vivais à l’époque. La seule scène tournée en banlieue en fait, c’est à la fin, dans le parc. Les épisodes suivants se seraient passés dans des décors plus haussmanniens de Paris.

C : C’est le décorum, c’est le milieu qui nous a inspirés. Je pense que tu n’écris pas pareil selon que ton action se passe à Paris, dans la jungle ou bien à la campagne. On aurait pas fait la même chose si on avait écrit dans un milieu rural. C’est le lieu qui nous engage dans ce que l’on écrit. On a eu les décors que l’on voulait, ça a été dur, car quand on veut tourner du genre, il faut se battre mais on est très satisfait d’avoir réussi.

 


« Dans le contexte des attentats, on s’est aussi dit que c’était une bonne chose d’avoir un « Allah Akbar » dans le contexte dans lequel il devrait toujours être, c’est à dire un contexte de paix et non comme un cri de guerre. »


 

 

P&S : C’est aussi très intéressant que le pilote de « Reset » s’ouvre sur une prière. Pourquoi ce choix ?

C : ça s’est décidé au montage en fait… Dans le script, c’était la scène du banc qui devait ouvrir le pilote. La scène de la prière était à un tout autre endroit dans le script. Mais c’est la magie du montage en fait de pouvoir arriver à ce genre de résultat. Cette scène de la prière est tellement forte ! Après tant de visionnages, elle continue de me toucher, de m’émouvoir. La musique d’Alex Cortez, le jeu d’Eza, pas de dialogue, juste la prière… Tout de suite, ça réussit à te mettre dans l’ambiance « fin du monde ». Et dans le contexte des attentats, on s’est aussi dit que c’était une bonne chose d’avoir un « Allah Akbar » dans le contexte dans lequel il devrait toujours être, c’est à dire un contexte de paix et non comme un cri de guerre. On a trouvé le symbole vraiment fort et vraiment chouette.

P&S : Vous avez fait de nombreux festivals pour présenter « Reset », comme par exemple « Mauvais Genres », qu’est ce que ce type d’expériences peut vous apporter à votre avis ?

Y: C’est beaucoup de réseau et beaucoup de moments vraiment chouettes.

C : C’est aussi une très belle carte de visite. En France, on a pas eu de sélections, parce qu’on était que dans des festivals de cinéma, ou on a pu nous donner la chance de présenter le pilote. A Séries Mania, on était le seul projet du catalogue, à ne pas avoir de chaîne, à n’avoir que le pilote. A chaque fois, on nous a laissés notre chance. Pour les sélections à l’étranger, je pense que ça nous a bien aidés quand même. On a eu un festival à Atlanta sponsorisé par HBO ! HBO ! C’est toujours bon pour un dossier de voir qu’il a été présenté dans de nombreux festivals… On a eu de bons retours des chaînes… Même si ça ne correspond pas à leur ligne éditoriale actuellement… Mais  » Reset », c’était un premier projet, on sortait de nulle part, on a fait un pilote de trente minutes, on s’est formés sur énormément de choses. On a jamais reçu de mails génériques chaque fois qu’on a présenté notre projet. A chaque fois on nous a expliqués pourquoi ça ne pouvait pas se faire, mais aussi ce qui avait été apprécié dans le pilote. On peut être fiers de ça, c’est pas tout le temps que les chaînes prennent le temps de détailler et expliquer . On a eu une réponse de Eric Varmach, de Netflix aux États Unis : « I really appreciate the look ». Se dire que ce mec a pris de son temps pour voir notre pilote et pour nous répondre c’est quand même très gratifiant.

P&S : Est ce que vous avez d’autres projets ?

C : Il est encore tôt mais on peut vous dire que ça reste dans le genre, que ce sera de la SF. Avec une teinte sociale, car on aime inclure du social. Et que ce sera un récit choral

 

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Si vous voulez vous faire une idée sur ce qu’est le pilote de Reset, c’est juste ici: