En plein milieu de cette magnifique période d’effervescence de concerts qui n’est pas prête de s’essouffler, c’est un groupe cultes de vieux dinosaures qui était de passage sur la scène du trabendo à Paris. Sans surprises complète à craquer, la petite salle collée au Zénith a ce soir-là du 22 octobre vibré au rythme sacrément électrique d’un groupe qui, depuis 35 ans, n’a rien perdu de sa patte si particulière.
Un mur d’ampli Marshall est dressé devant nous sur scène. Serait-ce Justice qui a pris possession des lieux pour une apparition surprise ? Non, c’est bel et bien J. Mascis et sa bande de vieux rockeurs endurcis qui ont ramenés de quoi nous friser et blanchir les cheveux. A vrai dire, ces mecs là ont tout notre respect au vu de leur endurance : une quinzaine d’albums composés toujours dans la même veine depuis 1985, jusqu’au petit dernier sorti l’année dernière, Sweep it Into Space. Celui-ci encore ne démord pas avec ses lourdes guitares, ses riffs inépuisables, ses solos aériens et la voix si particulière de son leader, contrebalance parfaite à ce rock pressé et marque de fabrique du groupe dont la souplesse ne faiblit pas. Oui, Dinosaur JR est encore dans la course.
Ligne de départ
Les trois musiciens entrent sur scène humblement. J. Mascis tire un peu la tronche mais c’est ce qui a toujours fait son charme. A la basse, Lou Barlow fait en sorte de contrebalancer la nonchalance. Il est tout sourire, sautillant, bavard. Le set commence sur « the lung », un de leurs tout premiers morceaux. Ca n’y va pas de main morte. Après quelques ajustements sonores sur la guitare qui peine à prendre de l’ampleur, nous voilà partis pour une bastonnade en bonne et due forme, avec des sonorités côtoyant parfois le métal. Depuis 30 ans, la recette perdure. Le public présent ce soir-là est composé de fidèles de la première heure, et de plus jeunes venus goûter la puissance délivrée par les maitres rockeurs. On sent dans la salle un grand plaisir partagé d’avoir encore la chance de se shooter à ces morceaux si vivifiants, pour la plupart cultes, mélangés à d’autres plus récents qui ne font pas tâche mais qui, justement, apportent une continuité cohérente à l’identité du groupe. « I Ain’t » par exemple, morceau d’ouverture du dernier album en date, sonne déjà comme un tube de leur discographie. Joué en début de concert, il fait la liaison entre les années d’or et aujourd’hui. Dinosaur Jr poursuit sa route avec mérite, au sein d’une ère dans laquelle ils ne sont plus rois, mais pour laquelle ils refusent néanmoins d’abdiquer. Et à la différence des Pixies qui parviennent difficilement à accorder leur musique à l’époque, Dinosaur Jr ont préféré ne rien changer, pour continuer à faire vivre les années 90, lesquelles furent, on le sait, décisives pour le rock.
Ligne droite
Le live file droit. Quand c’est fini, y’en a encore. A chaque fin de morceau, une petite excitation nait en nous dans l’espoir que le suivant soit tout aussi jubilatoire. Au milieu, un enchainement d’or se dessine avec « the Wagon », « Start Choppin’ », et « Feel the Pain », tous trois issus d’albums mythiques du groupe. Sur la première, on se rappellera longtemps des « baby why don’t we » du refrain qui ont définitivement fait rentrer la foule en délire. Les pogos vont de plus belle. Plus tôt, le culte et génialissime « Out there » avait lancé les hostilités.
Plus le son grogne, plus J. Mascis reste statique. Il n’est pas blasé, mais simplement lui-même. Le rock, ça n’est pas forcément Mick Jagger se dandinant à 80 balais. On s’en tamponne du spectacle. Non, le rock, c’est aussi accepter la vieillesse. Et tant que celle-ci ne transparait pas dans la musique, c’est le principal. C’est ce qu’essaie de faire Dinosaur Jr : porter leur musique autant qu’elle ne les porte.
Le reste du concert sera globalement de la même intensité, sans véritables contrastes. Ce n’est de toute manière pas ce qu’on attend d’eux. 1h30 de guitares inarrêtables suffit à nous contenter pleinement. En rappel, le groupe demandera gentiment au public un morceau qu’ils veulent entendre. C’est « Watch the Corners », un morceau poignant des années 2010, qui repartira gagnant, tout comme le public, assurément conquis par cette belle prestation. Messieurs de Dinosaur Jr, vous portez définitivement bien votre nom.
Les concerts de ce dernier quart de l’année 2022 nous appâtent progressivement. Septembre a commencé fort avec les australiens de Tropical Fuck Storm comme appât, et maintenant qu’on…
Lomepal revient aujourd’hui avec Mauvais Ordre, son troisième album attendu au tournant, annoncé début septembre. Suite à une tournée des théâtres antiques cet été, l’artiste français dévoile enfin l’opus teasé il y a plusieurs mois par les singles « Tee » puis « Auburn ». A leurs écoutes et après un été passé en leurs compagnies récurrentes, notre petit doigt nous disait que quelque chose d’intéressant se tramait par là. Alors, Mauvais Ordre, bonne pioche ?
Si FLIP, le premier album officiel devenu mythique d’Antoine Valentinelli alias Lomepal, nous trotte encore dans les oreilles depuis sa sortie en 2017, c’est qu’il est placé très haut dans notre panthéon personnel. « Tu touches pas à FLIP, c’est un monument », disait d’ailleurs le rappeur dans Jeannine, son deuxième album. C’était sans savoir que ce dernier le propulsera encore beaucoup plus loin en terme de reconnaissance. Là où FLIP avait conquis un public relativement rap, Jeannine était parvenu à séduire un public bien plus large. Du Zénith à Bercy, pour résumer. Ça ne change néanmoins rien au fait que FLIP reste à nos yeux un monument beaucoup plus haut construit que Jeannine. Mais là n’est pas le débat. Qu’en est-il du petit nouveau ?
Soin de la production
Ce qu’il convient de dire en premier lieu est que Mauvais Ordre est plutôt fidèle à nos attentes. On sait quel virage a pris Lomepal depuis quelques années, et on a tout à fait accepté son besoin d’aller chercher ailleurs que dans le rap pur et dur, où pourtant, il avait fait ses preuves. Jeannine mêlait encore les deux aspects, Mauvais Ordre tape le poing sur le tabouret et nous dit clairement : c’est désormais ce chemin et pas un autre. Le chemin dont il est question, c’est celui de la chanson française, qu’on nomme aussi variété. C’est ici que Lomepal se sent le plus à l’aise et force est de constater que la recette fonctionne à merveille. Il a le timbre pour, la manière de chanter pour, le don de compos évidentes pour. En ce sens, Mauvais Ordre est d’ailleurs bien plus cohérent que son prédécesseur, qui avait peine à trouver pleinement sa voix, le cul entre deux chaises. On sent ici le tout moins superficiel, plus juste, plus fidèle. Cette sensation semble en grande partie soutenue par une grande maitrise sonore. Lomepal l’avait annoncé plus tôt dans l’année lors d’une interview : cet album donnera une grande importance à la façon dont il sonne. Pas de mensonges sur la marchandise, on sent directement une production affinée, précise, minimaliste. Basse batterie au cœur du projet. Cette clarté sonore est due à la bande de musiciens qui entoure le chanteur, avec comme d’habitude Pierrick Devin à la manœuvre.
Pas de doute, Mauvais Ordreveut sonner comme du miel. Mais comme il le dit dans l’album lui-même, le miel n’est pas le miel sans le vinaigre. Et Lomepal n’est pas Lomepal sans cette manière toujours aussi irrésistible et unique qu’il a de poser sa voix, de choisir ses mots, d’embrasser ses mélodies. Comme si ces nouveaux morceaux nous avait toujours habité, tant leur évidence nous titille sans cesse. C’est par exemple le cas de « Mauvais Ordre », « A peu près », « Hasarder », « Etna », « Prends ce que tu veux chez moi »… Son style est plus que jamais affirmé, impactant et direct. Cela nous rappelle ses fameuses versions acoustiques, sur FLIP Deluxe puis sur 3 Jours à Motorbass, qui allaient droit à l’essentiel. La voix y était au centre. Et cette épure est désormais le centre de sa voie. « Tee » nous avait agréablement surpris dans ce sens, tant il arrivait à mêler phrases fortes, mélodie entêtante et minimalisme musical. Construit en deux parties, le morceau reste encore un des meilleurs de ce nouveau projet. Il en va de même pour « Auburn », le morceau le plus rappé de l’album sur un refrain aux sonorités rock. Celui qui se démarque vraiment du reste par son originalité. A l’inverse, « Maladie Moderne », placé au milieu de l’album, fait apercevoir les limites du chemin emprunté par Lomepal : se reposer parfois sur quelque chose de trop simple et des effets de mélodies, mettant de côté une réelle prise de risque, autant au niveau de la production que des textes.
don de Faire sonner les mots
Côté texte, Lomepal sait pourtant toujours aussi bien faire sonner les mots. Il pourrait chanter uniquement en onomatopées qu’on en demanderait encore. PourMauvais Ordre, changement de direction : pas d’egotrip, pas de sa relation face au succès, mais un nouveau personnage, plus seulement habité par son propre « je » mais aussi par un autre qu’il nous raconte. C’est l’histoire d’un type, ni plus ni moins. Solitaire, qui n’a ni un pied dans les flammes, ni l’autre dans la glace, mais plutôt les deux dans la pénombre, et qui se sent à peu près solide, même si à part : « Plus j’essaie d’être moi-même plus le courant foire / J’ai peur de devenir l’image que je renvoie / Toujours bloqué dans la mauvaise zone » dit-il dans le titre éponyme. Le mauvais ordre en personne, qui ne sait pas bien où se situer, au point que sa ville (lumière) ne lui procure plus aucun effet et qu’il veuille aller planter quelques tomates et faire du son sans ordi. Somme toute un gars qui se croit différent mais qui ne l’est pas tant que ça, qui aime exposer ses propres failles pour arriver au constat universel : « je suis qu’un homme ». Jusqu’à cette dernière phrase de l’album, intimement personnelle, celle qui justement n’est pas « Pour de faux », mais qui résume tout le trajet pour arriver jusque-là : « je voudrais tout refaire en mieux. Mais si je fais rien qu’un choix contraire je pourrais plus la rencontrer, faut que je puisse la rencontrer ». Elle, c’est Souheila Yacoub. Une actrice suisse avec qui Lomepal est en couple depuis quelques temps. C’est elle dans le clip de « Trop Beau », mais surtout sur la pochette de l’album, en clin d’œil à la scène finale de the Truman Show. Dans un interlude de l’album, on entend Antoine Valentinelli faire référence à une autre scène du film où le personnage découpe des bouts de journaux pour créer la femme parfaite. Cette pochette prend alors tout son sens. Relégué au second plan, il laisse pour la première fois le cadre à autre que lui.
Mauvais Ordre est donc propre, parfaitement exécuté dans les règles de l’art, oui. La plupart des morceaux et des mélodies sont bien trouvées, oui. Le style Lomepal trouve là une très belle continuité logique, oui. Antoine Valentinelli est extrêmement doué dans ce qu’il fait et gère sa carrière d’une main de maitre, oui. Le succès sera au rendez-vous, très certainement. Mais Mauvais Ordreest-il pour autant un album mémorable ? Le monument FLIP n’a pas trop de souci à se faire de ce côté-là.
Meilleur festival du monde, jOUR 2. Sans être totalement remis de la première soirée, l’heure de la suite a déjà sonné. Le temps de poster notre premier report…
Nous y voilà enfin. Où que ce soit, tout le monde l’a repéré. Depuis plusieurs semaines, ses affiches sont disposées un peu partout en France. Encore plus à Paris et bien évidemment en Bretagne. Puisque c’est ici que ça se passe. Le festival malouin La Route du Rock, créé il y a un peu plus de 30 ans, était bien décidé à en mettre plein la vue. On les savait déjà exigeants niveau programmation. Cette année dépasse toutes les attentes. Nous avions beau descendre notre regard sur chaque ligne d’artistes de la programmation, une réaction en boucle de notre part se faisait entendre : « mais noooooooon ». Sans forcément convier les intouchables de la sphère rock comme Nick Cave ou Iggy Pop, le festival a comme d’habitude misé sur l’indé, l’éclectisme et la modernité, dans un bon équilibre entre big boss du game actuel (Fontaines DC, Ty Segall, Kevin Morby, Fat White Family, Baxter Dury…), artistes de taille moyenne (Black Country New Road, Beak >, Working Men’s Club…) et artistes émergents prêts à montrer de quel bois ils se chauffent (Geese, Honeyglaze, Yard Act, Porridge Radio, Ditz…). Réunis, ils forment la plus belle programmation de 2022 tout festival confondus. Vous venez avec nous ? On est jeudi et une très grosse soirée nous attend.
Cette première journée au Fort Saint Père, après l’apéro de la veille de KING HANNAH et ALDOUS HARDING à la Nouvelle Vague, une salle de concert de Saint-Malo, promettait directement de décrocher les étoiles. En terme de début fulgurant, même celui de Wet Leg n’atteint pas de tels sommets. Elles font d’ailleurs parties de la programmation du jour, nous y viendrons.
Le site du Fort Saint Père est comme toujours divisé en deux scènes : la scène du Fort et celle un peu plus petite des Remparts. Les deux se font face et les concerts s’enchaînent à cinq minutes d’intervalle, de quoi assister à l’ensemble sans manquer une note. Bon point.
Embarquez pour la route des remparts
Commençons avec la scène des remparts. Imaginez-vous être dans une 2CV et emprunter des petites routes de campagne. Le départ est paisible, vous profitez du paysage avec COLA. C’est eux qui ouvre le bal à 18h30. Le groupe est formé par deux ex-membres de Ought, groupe montréalais de post punk. Un troisième homme est à la batterie : Evan Cartwright de U.S Girls. Leur premier album est sorti cette année et fait entendre un rock léger et efficace. Pas de fioritures : des riffs de guitare simples, modestes et apaisés, qui n’avoisine jamais pour autant le niais. Non, leur rock est ferme et assuré, inspiré des Strokes. COLA reflète l’humilité, avec son chanteur qui n’en fait pas des caisses, tout en sachant tenir l’attention de son public. Pari réussi pour l’ouverture. La route continue.
Votre trajet est soudainement secoué par une insertion sur une grande route, où le traffic est plus dense. Il est 20h10 et GEESE fait son apparition sur la scène des remparts. New-York est leur ville. Sur scène, ils viennent braquer le festival à six. Ce sont nos chouchous. Leur premier album Projector fait partie de nos albums préférés de 2021, tant il parvient à faire intervenir avec brio un aspect pop au sein d’une musique purement rock. Les dix morceaux de Projector sont dix petits joyaux que l’on écoute en boucle. Les voir prendre vie devant nous nous faisait jubiler d’excitation. Et quel résultat ! GEESE est mené par un chanteur qui n’a pas encore les attributs et le charisme d’une rock star. Comme Grian Chatten à ses débuts, il est un peu maladroit, même si son sourire est bien plus marqué. Quand il ne chante pas, il bouge son corps assez peu naturellement. Mais c’est ce qui fait qu’on le fixe du regard. Il n’a que la vingtaine. Tous ont à peu près le même âge dans le groupe. Quand vient le morceau « Disco », alias le meilleur morceau de l’année passée, on se rappelle à quel point ils sont talentueux. En terme de composition, « Disco » est monstrueux. Celui-ci sonne comme une massue, jusqu’à faire tomber la cymbale du batteur en plein live. Dans sa version studio, il dure près de 7 minutes. Sur scène, relativement le même temps. Et au fur et à mesure que le morceau nous tape, on s’imagine déjà les voir dans quelques années sur la grande scène du Fort. En attendant, on profite de leur présence, et des nouveaux morceaux interprétés, en espérant qu’un nouvel album sorte très prochainement.
Le traffic sur la route se régularise. Vous avancez maintenant de manière fluide. C’est le moment où YARD ACT investit la scène des remparts. Il est 22h. Grande surprise du festival, le groupe britannique nous livre un des meilleurs shows de la soirée. Ils ont seulement un album à leur compteur mais sont déjà accueillis avec entrain. L’attitude barrée du chanteur réveille la foule : « ca va la Route du roooock » s’amuse t-il à dire avec son accent british. Leur pop/rock endiablée sonne terriblement bien, mieux qu’au Trabendo où nous les avions vus il y a quelques mois. Il faut dire que les morceaux sont au rendez-vous. En un album, YARD ACT est parvenu à définir une véritable identité sonore, de quoi assurer très belle performance de scène. Entre la force indéniable de leur single « The Overload » et la singularité assumée de morceaux comme « Rich » et « Land of the Blind », ils s’imposent déjà comme un des groupes importants de leur génération.
Minuit. La nuit est complètement tombée là où vous êtes. Vous arrivez bientôt à destination. Vous avez quitté la grande route pour reprendre des chemins sinueux qui n’apparaissent même pas sur votre GPS. C’est l’heure pour CHARLOTTE ADIGÉRY ET BOLIS PUPUL d’entrer sur la scène. Nuit illuminée par une musique puissante, à la fois techno, électro et pop. Les deux belges qui ont sorti un album cette année savent tenir le public en haleine. Leur jeu de scène est affiné, les interactions nombreuses. C’est une belle clôture pour la scène des remparts qui coupe ses amplis pour aujourd’hui. Vous êtes arrivés à destination. Mais la route n’est pas fini. Vous changez simplement de véhicule pour pouvoir emprunter l’autoroute.
Embarquez pour l’autoroute du fort
Oh. Etrangement, le jour est revenu. Comme un bond dans le temps, il semble maintenant être de nouveau 19h20. Vous ne vous souciez pas de cet effet temporel, il faut continuer de rouler.
L’insertion sur l’autoroute est douce, aucune voiture ne bloque le passage. BLACK COUNTRY, NEW ROAD ouvre la scène du Fort. Depuis quelques mois, juste après la sortie de leur excellent deuxième album, ils sont un peu orphelins, comme perdus. Le chanteur les a quittés pour épargner sa santé mentale. Comment continuer ? Faire comme si de rien n’était. Ne rien changer. Sauf que tout change malheureusement. Aucun ancien morceau n’est interprété. Seulement des nouvelles pièces, toujours plus lyriques et orchestrales. Soit. Au niveau du chant, celui-ci est partagé en trois, avec une insistance sur les voix féminines. On est quand même très loin du charisme vocal de l’ex-chanteur. La tension redescend fortement, lui qui maintenait en haleine chacun des morceaux. Jouer seulement de la nouveauté est un risque puisque l’on perd la sensation de retrouver des êtres chers. En deux albums, le groupe était tout de même parvenu à fabriquer de sublimes tableaux musicaux. Compétitifs sur le premier, plus raffinés sur le second. Mais voilà qu’en continuant sous ce nom, même si l’esprit sonore perdure, on trahit quelque peu son public. A six sur scène, ils ont des airs de premiers de la classe qui jouent pour le bal de promo. Tout est un peu trop propre, finement exécuté. Les morceaux ont du mal à retenir notre attention comme ils le devraient. BLACK COUNTRY NEW ROAD n’est plus vraiment. Nous resterons quand même intrigués par le prochain album studio, qui pourrait quand même nous surprendre.
Près de 45 minutes que vous roulez, il fait encore jour. La limitation est de 110. Eh oui, vous êtes en Bretagne. Le trafic est fluide. Vous vous sentez apaisé, libre, comme allongé sur une chaise longue. Gare tout de même à ne pas se sentir partir vers quelques songes lyriques. Pas de panique, WET LEG est là pour vous réveiller. Une heure leur est consacrée sur la scène du Fort, alors même qu’elles n’ont qu’un seul album. C’est dire leur ascension fulgurante. En un titre devenu déjà mythique, « Chaise Longue », les deux britanniques ont réalisé un coup de maitresses : s’imposer comme un groupe très convoité des festivals d’été. La foule se compresse, c’est le premier concert qui rameute beaucoup de monde. Elles commencent par « Being in Love », le premier morceau de l’album. Elles joueront ce dernier en entier, ni plus ni moins. Il est drôle de remarquer à quel point chaque chanson est à elle seule un petit tube pop rock. Le point culminant arrive évidemment à la toute fin, où « Chaise Longue » retentit comme l’évidence absolue. Tout le monde la connait. Simplement dommage qu’elles ne l’étirent pas, surtout que le concert n’aura finalement duré que 45 minutes au lieu d’une heure. C’est le type de morceau avec lequel on peut jouer sur l’engouement, faire des pauses, reprendre… Non, la version est, avec regret, un peu trop conforme à l’album. Sur le visage et l’attitude des deux musiciennes, on remarque la chaleur et la satisfaction de jouer ici. Leur cohésion est belle à voir. Niveau sonore, ça reste néanmoins un peu sage, sans envolées. Il leur faut probablement un peu de temps encore, de quoi rattraper certaines étapes que l’engouement autour de leur single leur a permis de griller. Mais en un sens, c’est aussi c’est ce qui est magique, voir la propulsion soudaine d’un groupe qui a peut-être encore un peu de mal à être pleinement à la hauteur de leur succès, mais qui, au-delà de ça, profite pleinement de leur talent à délivrer des tubes de l’été qui mettent plus ou moins tout le monde d’accord. Leur concert est disponible en replay sur Arte Concert.
La nuit est pleinement retombée. Des voitures surgissent de nulle part sur l’autoroute. Elles semblent accélérer, comme si la limitation était soudainement passée à 150. Fort bien. Vous suivez le mouvement. Malgré la densité, aucune perturbations. Tout le monde file. Il est 22h55 quand le groupe le plus côté de la sphère rock indé fait son apparition sur la scène du Fort. Il y a 3 ans, ils jouaient au même endroit, mais bien plus tôt, à 19h. A l’époque, ils n’avaient qu’un album. On les découvrait tout juste. Depuis quelques mois, ils en comptent trois. Leur nouveau s’appelle « Skinty Fia » et grâce à celui-ci, ils sont déjà entrés au Panthéon du rock moderne. On le sent dans l’air, que FONTAINES D.C. est le groupe le plus attendu de la soirée. La foule est compacte, quitte Yard Act avant la fin pour venir se placer. Les corps se serrent. C’est l’heure convoitée, celle de Baxter Dury demain et de Ty Segall samedi. Trop tôt pour que la foule commence à partir et trop tard pour qu’elle ne soit pas déjà échauffée. FONTAINES a intérêt à foutre le feu. C’est ce que tout le monde se dit secrètement. Et ça ne manque pas. Leur concert est sans nul doute le point culminant et le meilleur de la soirée. Leur aura est telle qu’ils dégagent quelque chose de grand et de mystique dès leur entrée sur scène. Ils débutent avec le premier morceau du dernier album, longue tirade musicale aux airs religieux, qui monte, monte, monte jusqu’à n’en plus finir. On le sent tout de suite, que le son est monstrueux, bien meilleur qu’à l’Olympia de Paris quelques mois auparavant. Grian Chatten, le chanteur, est de plus en plus hypnotique et à l’aise dans son rôle de leader désinvolte. Il captive. Il a certainement gagné en présence, lui qui ne bougeait pas d’un fil il y a 3 ans, même si nous étions déjà tombés amoureux de son attitude à l’époque. C’est aujourd’hui une vraie rock star, sûr de lui et conscient de ce qu’il renvoie. Comme s’il affrontait constamment son micro en duel, qu’il n’hésite jamais à malmener, Grian Chatten fait preuve d’un charisme irréfutable. A côté de lui, les membres du groupe sont relativement stoïques. Leurs instruments suffisent, puisque la guitare sonne terriblement, comme du fil de fer. Les riffs affutés surgissent avec fermeté, comme celui de « Big Shot », ou de « Sha Sha Sha ». Le concert est un best-of de leur carrière. En 1h15, ils ont à peu près tout joué. Que des morceaux mastodontes : ils attaquent notamment très vite avec « Hurricane Laughter » placé en troisième. Puis s’ensuit un déferlement : « Televised Mind », « I Don’t Belong », « Nabokov », « Too Real », « A Hero’s Death », « Jackie Down the Line »… Mais combien de chansons cultes ont-ils donc ? La fin nous achève définitivement avec l’enchainement magique de « Boys in the Better Land » et « I Love You ». Oui, Fontaines DC est devenu immense. Face à eux, force est de reconnaitre leur grandeur. Au fond de tous les festivaliers présents sur le site, l’envie d’être Grian Chatten a, à un moment, ne serait-ce qu’une seconde, trouvé naissance.
Comment continuer à rouler à cette vitesse encore ? Vous reste-t-il assez de carburant ? L’autoroute semble interminable, vous semblez l’avoir traversé de long en large. Pourtant, il vous reste un bout de chemin à parcourir. La masse de voiture a faibli. La vitesse descend à 130. Mais vous êtes encore dans la course, à vous enfoncer dans un noir toujours plus lointain. Il est 1h du matin, et pour vous donner toujours plus de pêche, voilà que WORKING MEN’S CLUB entre sur la scène du Fort. C’est surtout le projet d’un gars, Sydney Minsky-Sargeant, jeune, aux traits quelque peu similaires à ceux de Grian Chatten. Il est accompagné par des musiciens mais c’est sur lui que l’attention se fige. Son air nonchalant prend beaucoup de place. Il bouge comme un insecte. La musique jaillit à un niveau sonore inégalé durant la soirée, avec des sonorités électro/rave bien grasses à l’ampleur méritée. C’est fort, et bon, même très bon. Mieux qu’en studio. Plus charnel, plus direct, plus carré. Un nouvel album vient de paraitre le mois dernier. Il gagne là toute son intensité. Il y a quelque chose de frénétique, d’hypnotisant dans cette performance. On se retrouve vite happés par l’intensité. Quand il prend sa guitare, c’est le clou du spectacle, comme un décollage dans l’espace. Elle ne sonne pas comme une guitare, il la déforme pour coller à sa musique toujours située entre le kitch et l’esprit rock.
Votre voiture finit par perdre le contrôle. L’autoroute du rock était finalement trop dangereuse. Pas de panique néanmoins, vous êtes sain et saufs et serez encore là demain pour une deuxième journée au Fort de Saint Père, qui, sur le papier, ne promet pas d’être meilleure que la première mais qui, si les astres s’alignent bien (déjà mal parti avec la pluie), a de quoi nous réserver son lot de surprises.
Après une course effrénée d’une semaine dans les cinémas de la plus belle avenue du monde, il était temps pour le Champs Elysée Festival d’achever son édition 2022.…
Le week-end du 23/24 avril dernier se tenait un peu dans toute la France et ailleurs le Disquaire Day ! L’occasion pour les disquaires indépendants de proposer à leur clientèle tout un tas de vinyles inédits sortis spécialement pour l’évènement. De quoi offrir à ces boutiques indépendantes dont nous avons tant besoin une scène sous projecteurs, grâce à nombreuses exclusivités leur étant réservées durant un week-end.
A Montmartre, au point culminant de notre cœur, dans la nouvelle boutique associée à notre média Pop & Shot : The Mixtape, située au 32 rue des Trois Frères, y a logé durant ce week-end l’effervescence musicale. Pour rendre honneur au large choix de vinyles inédits à disposition, entre le sublime album de SON OF que l’on attendait depuis 7 ans, l’étonnant mais implacable EP de Metronomy sorti l’année dernière et le best-of double vinyle d’une Patti Smith toujours plus importante pour l’histoire, The Mixtape a fait appel au duo musical HUNKYZ, deux bons potes d’enfance (Léonard Pottier et Théophile Le Maitre) chargés d’animer les 15 heures de week-end.
Baignés dans la musique comme Obélix dans la marmite, HUNKYZ ont divisé leur immense set comme plusieurs petites sélections d’une heure chacune, toutes faites de morceaux piochés çà et là dans ce qui les anime depuis le début de leur amitié jusqu’à aujourd’hui. Pas de catégories spécifiques qui puissent renseigner sur ce qui allait être joué, mais des thèmes parfois loufoques et abstraits, pour mieux brouiller les pistes et se contraindre dans l’amusement.
PLAYLIST EN BOUCLE
Pop & Shot vous dévoile une partie de ces playlists crées pour l’occasion.
La seconde est la playlist EN BOUCLE. Le principe est simple : tous les morceaux fonctionnent sur une boucle répétitive, de quoi vous assommer un bon coup !
Bonne écoute ! Et à bientôt à la boutique The Mixtape (métro Abesses), venez nous rencontrer et farfouiller parmi notre sélection de vinyles ainsi que tout un tas de produits dérivés autour de l’univers musical. Venez également découvrir en ce moment à la boutique l’exposition de notre photographeLouis Comar.
Il est de ces lundis que l’on arrive à surpasser uniquement dans l’attente d’un concert désiré le soir même. C’est encore plus vrai quand le lundi en question…
Le week-end du 23/24 avril dernier se tenait un peu partout en France et ailleurs le Disquaire Day ! L’occasion pour les disquaires indépendants de proposer à leur…