Vous êtes dans le métro parisien, votre journée à été longue, vous rentrez du travail. Vous esquivez la poussette, le couple qui ne se lâche pas la main, le métro annulé, le joueur d’accordéon, le touriste qui ne sais pas où il va et occupe la totalité du quai. Un brouhaha empli les couloirs, les odeurs qui s’en dégagent sont plus que moyennes, vous allez devoir vous entasser dans une rame sans possibilité de mouvements et pourtant… Au milieu de ce fouillis quotidien, vous découvrez un artiste entier. A travers un musicien, placé dans les couloirs de votre trajet. Et au lieu de simplement aller d’un point A à un point B, vous voilà sortis de la routine le temps d’un morceau. Voilà votre oreille attirée, votre attention happée, parce que le beau peut prendre sa place n’importe où. Encore plus facilement là où l’affaire semblait impossible.
C’est le défi qu’avait relevé haut la main le musicien folk Hugo Barriol, meilleur musicien de la RATP si l’on en croit sa réputation, qui avait su convaincre le public le plus inattentif de lui tendre l’oreille. Ce 24 janvier 2019, à la Maroquinerie de Paris, le musicien doit pourtant relever un nouveau défit et de taille. Convaincre un public déjà acquis à sa cause de ses capacités de showman. Les premier flocons de neige ont montré le bout de leur nez cette semaine et dehors il a pleut encore à grosses gouttes. Pas de quoi décourager les fumeurs amassés dans la cour de la jolie salle parisienne. Lorsque résonnent les premières notes, la salle s’emplit encore de ces quelques retardataires. Hugo Barriol n’est pas venu seul: un clavier qui joue également du saxophone, un bassiste et un batteur sont là pour aider l’homme de la soirée.
Dès les premières titres, un silence religieux s’empare de la petite salle. Tous les yeux sont rivés vers la scène, personne n’ose respirer trop fort tant le prodige à la guitare distille ses titres à la perfection. Les notes folk s’allient à merveille à sa voix grave. Chaque titre à une force extraordinaire, le tout s’additionne pour créer un cocon harmonieux dans lequel on souhaiterait rester à jamais.
Proche de son public, le chanteur joue d’une timidité légère et dans franche sympathie pour convaincre. « On est venu présenter mon premier album « Yellow » », « Un deuxième est en préparation! » lance un membre de l’assistance. Hugo Barriol à beau en être à ses premiers pas scénique, il a déjà une troupe d’adepte qui suit ses actualités et ses composition. Ses disciples relativement jeunes ont en moyenne entre 20 et 35 ans. Pourtant parmi eux, un homme plus mûre en costume cravate se démarque dans la fosse. Il chante en chœur avec l’artiste sur chaque titre, chaque composition.
Le chanteur enchaîne ses morceaux alors que les minutes passent à toute vitesse. Aucun single n’est oublié et « Million years », « Always » comme « On the road » ne manquant pas à l’appel face à un public qui les chante volontiers. Le musicien promet un titre plus joyeux, qui devrait dénoter avec la setlist. Point trop n’en faut, loin du moment clairement dansant, il se démarque par une énergie plus vive. On repart pourtant rapidement vers des contrées plus douces-amères. La musique masse les esprits et à l’exception d’un petit groupe récalcitrant qui tient à parler fort et faire des selfies, les convives se laissent docilement bercer par les notes, ne lâchant pas la scène des yeux, oubliant Paris, le froid et les problèmes mondiaux pour se focaliser sur les notes profondes qui leur sont proposées. Rarement dans un concert, l’attention a été autant accordée à un artiste sans débordements, rires et inattention. Les remerciements du musicien sont chaleureux, pour sa maison de disque, son équipe, son tourneur, les membres de sa famille présents dans la salle mais aussi pour le public venu l’applaudir.
Déjà le temps des aurevoirs. Ils sont pourtant de courte durée: « Il parait qu’il faut que je quitte la scène pour mieux revenir ». A son retour le chanteur s’amuse « Qui a inventé ça? Johnny? On ne pourra pas lui demander pourquoi. » Il ne reste que trois morceaux et l’album « Yellow » a déjà été interprété, la qualité est pourtant au rendez-vous. La communion finale se fait avec une foule qui chante en chœur. Et sur un pari relevé haut la main par Hugo Barriol qui signe un live inoubliable, une rupture avec cet hiver qui comme chaque année ne semble pas vouloir laisser place aux beaux jours. En attendant son prochain live et le succès auquel il est promis, il ne reste plus qu’à écouter en boucle « Yellow » disponible depuis le 22 février.
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C’était annoncé depuis un moment, Netflix avait racheté les droits de la série « You », petit bijoux avec Penn Badgleyque l’on connait pour avoir interprété Dan dans la série Gossip Girl. Un tel nom à l’affiche pouvait promettre un nouveau show pour midinette éprises d’histoires d’amour complexes et de mélodrames tirés par les cheveux. Il n’en est rien tant « You » est un objet à part dans l’univers du petit écran. Une romance dérangeante portée par un héro stalker et son obsession pour son héroïne, Beck interprétée par Elisabeth Lail.
You la non romance plus romantique que ce qu’on nous sert habituellement
A en juger par la bande-annonce, à se laisser conseiller par les ouï-dire actuels « You », pourrait bien être une nouvelle série banale qui joue le jeu du suspens et du mychtère parce qu’il parait que c’est tendance. Est-ce cliché ? La partie concernant la psychopathie de Joe (Penn Badgley) ne serait-elle qu’une douille? Un peu comme les choix multiple dans le dernier épisode de Black Mirror ? Point du tout! « You » obsède dès ses premières minutes. Pourquoi donc? Parce que la série arrive à faire aimer son personnage principal, son stalker et à justifier ses actions injustifiables. Dès les premiers instants, Joe, propriétaire d’une petite librairie new-yorkaise tombe sous le charme de Guenevere Beck, jolie blonde au sourire ravageur et à l’esprit bien fait. Si le cinéma s’est souvent employé à nous faire aimer son héroïne, la voir dans le regard de Joe et ce grâce à un narrateur en voix off, accentue ce fait. A ses yeux, l’imparfaite Beck devient parfaite, ses doutes, ses peurs, ne sont que des éléments positifs: Joe pourra la rassurer, il saura prendre soin d’elle. Chacune des pensées de notre anti-héro son adressés à sa belle, il lui décrit ses sentiments, explique et justifie ses actions même les moins justifiables. Il la stalke et peut-être que dans un monde où il est de bon ton de fouiller les Facebook et Instagram de tout le monde, sa démarche parait moins lourde, moins étrange qu’elle ne devrait l’être. Peut-être aussi que si Joe est un sociopathe bien écrit, Dan son personnage de Gossip Girl, qui a quand même crée un site pour espionner Serena n’en était pas moins un.
2019 et les années qui la précède ne sont pas des années romantiques. Exit les belles love stories pleines de miel sur nos petits écrans, pour vendre une histoire d’amour il faut qu’elle soit sur fond d’intrigues plus globales. Si la recherche du fan qui shipera le couple élu doit bien traverser la tête de nos chers scénaristes, c’est bien ceux de « You »qui s’en sortent le mieux. A tel point qu’ils créent le couple idéal, le petit ami idéal. Même en observant les dérives du petit-ami stalker, dérangé, violent, meurtrier, le spectateur se retrouve régulièrement à mettre de côté les scènes qu’il vient d’observer pour mieux se focaliser sur les attentions de l’homme amoureux et de sa dulcinée. A tel point que Penn Badgley lui-même a dû prendre les devant et rappeler via Twitter aux fans de la série que Joe n’est pas le petit-ami idéal du tout, non bien au contraire. Difficile pourtant de ne pas fondre devant le everythingship et le gâteau scrabble. C’est un tour de force incroyable que nous offre « You ». L’envie que celui qui devrait être « le méchant » de la série s’en sorte, et ce malgré toutes ces mauvaises actions.
Le jeu de miroir avec son jeune voisin, Paco n’est sûrement pas étranger au phénomène. Même s’il est facile d’occulter les mauvaises actions de Joe en raison de toute l’attention qu’il porte à Beck, sa faculté à prendre soin du garçon qui habite au dessus lui apporte une touche d’humanité en plus. Puisque le personnage de Penn Badgley se révèle être une figure paternelle bienveillante et au petit soin pour celui dont la mère alcoolique et droguée est en plus battue par son compagnon. Outre cet aspect bienveillant du personnage, Paco met en lumière le passé de Joe. Lui aussi a souffert, lui aussi a été abandonné. Tous ces faits constituent des circonstances atténuantes pour notre anti-héro. Le public alors, prompt à pardonner ses excès éprouve alors une compassion sans fin pour lui. Paco dérive et se noie dans la perdition de sa mère. Joe a vécu la même chose. Le public ressent la douleur et la couleur de Paco puisqu’elle nous est montrée à l’écran et imagine volontiers accorder la même dose d’empathie à un personnage devenu adulte mais n’ayant pas appris la frontière entre le bien et le mal. Il n’est ni Barbe Bleue, ni le grand méchant loup et si la capacité à commettre le pire n’est pas innée, alors il est sauvable.
A l’air post « Me too », You reste-t-elle pertinente?
L’année précédente a été moteur d’un énorme travail sur le féminisme. A travers lui, on a enfin pris le temps d’expliquer qu’une femme n’est pas une petite chose fragile qu’il faut sauver et qu’un couple pertinent s’appuie sur un consentement mutuel. Que dit alors un show qui fait l’apologie d’un personnage qui décide que cette relation doit exister et qui contrôle les faits et gestes de sa compagne? Probablement qu’il pourrait être le méchant ultime de l’année 2019. Un savant manipulateur qui sous couvert de vouloir le bien de l’objet de son affection se permet de prendre les décisions pour elle. La fiction pourtant ne peut et ne doit pas avoir dans tous les cas un rôle d’éducation, même en se situant dans son époque, même en prenant en compte son contexte social, une fiction reste une fiction, elle a pour but de divertir. « American Psycho » n’a jamais dit qu’il serait bon de massacrer ses collègues à la hache en son temps, « Grave » ne fait l’apologie du cannibalisme pas plus que « Le Silence des agneaux ».
Apprendre à aimer le personnage dérangé et qui agit mal ne doit pas pousser à cautionner toutes ses actions. Et bien au contraire, la romance de « You » peut être un révélateur, un miroir de ce qu’est une relation malsaine. Elle peut pousser à s’interroger sur les dérives de la jalousie, du besoin de possession et de l’impression de faire pour l’autre ce que l’on fait en réalité pour soit.
Beck, un personnage fort bien écrit
Si la toile entière semble être tombée sous le charme de Joe, Beck elle déplait. Apparemment mieux vaut être un sociopathe romantique aux « bonnes intentions », qu’une artiste perdue. Et pourtant, la jeune-femme est un personnage complexe et fort bien écrit. Loin de la jeune-fille parfaite, Beck traîne son lot d’incertitudes et de doutes. Elle se cherche en tant qu’artiste et qu’écrivaine, doutant de ses compétences, de ses facultés à créer, rebroussant chemin, ne sachant s’accorder le droit à être heureuse. Comme beaucoup, elle se cherche à travers les autres pour exister. Attachante, entière et réfléchie, elle s’inscrit comme un personnage réel en quête d’elle-même et d’une réussite qui lui permettrait de s’affirmer.
A noter, que, comme son petit-ami dérangé, elle joue aussi à la stalkeuse amateure lorsqu’elle même cherche à en apprendre plus sur certains éléments de la vie de Joe. Miroir, mon beau miroir, dis moi qui ne s’amuse pas à espionner l’être aimé?
Une saison 2 prévue et probablement casse-gueule
Une deuxième saison de « You » est déjà programmée sur Netflix, son tournage et sa date de diffusion n’ont pas encore été révélé.
Pourtant quelques informations ont déjà fuitées sur son contenu. Candace et Joe seront bien sûr de la partie alors que Peach ( Shay Mitchell) et Beck pourraient bien revenir sous forme de flash back. Paco (Luca Padovan), le jeune voisin du tueur et le Docteur Nicky ( John Stamos- aussi connu pour avoir campé les traits du très cool oncle Jessy dans « La fête à la maison ») devraient aussi être de retour.
Si l’on se base sur le second roman de Caroline Kepnes, l’auteure du livre qui a inspiré la série, cette seconde partie devrait se dérouler à Los Angeles, ville que Joe déteste. Le protagoniste a en effet été contraint de quitter New York pour tenter de retrouver une vie normale, sauf que ses tendances obsessionnelles le rattrape.
SPOILERS ALERT: s’il est difficile et peu déontologique de juger d’un objet qui n’est pas encore sorti, la suite de « You » crée néanmoins de belles frayeurs me concernant. L’absence de Beck, du couple qu’on prenait plaisir à suivre et le risque d’une répétition ( nouvelle obsession sur Candace ou sur une autre femme) risquent de peser lourd dans la balance. A l’instar d’un « 13 reasons why » qui a perdu de sa superbe au court de sa saison 2, ou dans « Prison Break » qui est complètement parti en sucette lors de sa saison 3, « You » va devoir marcher sur des œufs pour éviter de sentir le concept étiré pour raisons financières. La présence d’une suite pensée par l’auteure tend quand même à rassurer sur cette suite, à condition que les scénaristes sachent s’arrêter à temps. Réponse d’ici quelques mois….
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Mercredi 9 janvier 2019 est sorti en salles le deuxième opus de la saga « Creed« , spin-off des célébrissimes « Rocky« . Porté par Michael B. Jordan et Sylvester Stallone, ce dernier en profitant pour faire ses adieux au personnage/alter ego qui l’aura fait connaitre, et auréolé de bons retours outre Atlantique, le film de Steven Caple Jr vient nous raconter les nouvelles aventures d’Adonis Creed et de son célèbre mentor Rocky Balboa. Pour quel résultat ? Critique.
Creed 2 : A l’origine… (Là ou le bas blesse)
En 2015, le jeune cinéaste Ryan Coogler (porté aux nues depuis grâce au succès de Black Panther), réalisait Creed : L’héritage de Rocky Balboa, vendu sous l’angle du très à la mode concept du requelet prolongeant ainsi une saga entamée avec le magnifique premier opus qui s’était pourtant vue offrir une conclusion aussi touchante que réussie avec Rocky Balboa en 2005. Mais qu’est ce qu’un requelme direz vous? C’est un terme hybride désignant une sorte de mélange entre le principe du remake et celui de la sequel. Ce nouveau concept, très à la mode au cours de notre décennie a donné dernièrement naissance par exemple aux Jurassic World, à la dernière trilogie Star Wars, aux Animaux Fantastiques, Halloweenou bien encore au prochain Men In Black International.
Surfant sur la vague de nostalgie actuelle, tout en essayant d’apporter un souffle nouveau pour séduire les jeunes consommateurs un public plus jeune, la plupart des requels ont tendance à se perdre dans le fan service le plus stérile. Ainsi, le Retour de la Force et le premier Jurassic World apparaissaient comme des quasi copies carbones lorgnant de façon très gênantes sur leurs illustres prédécesseurs. De même, si le premier Les Animaux Fantastiques avait pour lui une certaine fraîcheur dans sa manière d’appréhender l’univers potterien, sa suite, Les Crimes de Grindelwald, sortie récemment, est tombé tout entier dans le travers du biscuit pour fans (beaucoup trop de Dumbledore et de Poudlard pour être honnête).
Creed, premier du nom, n’échappait pas à la règle. Sorte de « Retour de la Force » de la saga Rocky, Ryan Coogler prenait le même parti pris de J.J Abrams, incapable de transcender son matériel de travail et préférant miser sur la fibre nostalgique du spectateur en singeant l’oeuvre originelle plutôt que de tenter une réelle prise de risque. De même, le personnage d’Adonis Creed, voulu comme le Rocky Balboades années 2010 ne parvenait pas vraiment à exister. En effet, son postulat de base, à savoir fils bâtard de Creed plaquant une existence dorée pour se faire cogner comme son boxeur de père étant à mille lieux, à tout point de vue, du loubard italo-américain de Philadelphie parvenant aux sommets à force d’abnégation et de volonté. Néanmoins, se collant dans le sillon du chef d’oeuvre qu’est le premier Rocky, sans originalité mais jouant du concept de passage de flambeau, Creedpremier du nom ( titré, comme un symbole, en France « L’héritage de Rocky Balboa« ) avait obtenu un certain succès tant commercial que critique. Assez pour justifier une suite…
Creed 2 : De quoi ça parle ?
Quelques années après les événements du premier film, Adonis Creed ( Michael B. Jordan : Black Panther, Chronicle) finit par devenir champion du monde des poids lourds, toujours sous le patronage bienveillant d’un Rocky Balboa ( Sylvester Stallone), remis de son cancer. C’est alors que venu d’Europe de l’Est, un boxeur au physique imposant (Florian Munteanu) du nom de Viktor Dragole défie. Un nom lourd de sens tant pour Balboaque pour Creed…
En effet, trente ans auparavant, Apollo Creed est mort sur le ring suite à un combat face à Ivan Drago ( Dolph Lundgren, le seul vrai Punisher, Universal Soldier ou bien encore The Expendables). Pour venger la mort de son meilleur ami et ancien adversaire, Rocky Balboa est alors venu défier le boxeur soviétique jusqu’à Moscou en pleine Guerre Froide. Combat qui aura marqué Rocky à plus d’un titre, puisque souffrant de lésions cérébrales, il est déclaré inapte pour la boxe et finira ruiné.
Après un premier opus parlant de passage de flambeau entre deux générations de boxeurs ( et d’acteurs), le début idéal de Creed 2 aurait du être un plan sur la pierre tombale de Rocky. Le premier Creedlui collant un cancer (après les liaisons cérébrales du 5, dont on a jamais plus entendu parler dans le reste de la saga, ça commence à faire beaucoup), cela aurait pu être une évolution logique et une bonne transition pour passer à une nouvelle histoire, celle d’Adonis Creed. Sauf que… La nostalgie est à la mode en ce moment et les producteurs ont décidé d’y aller à fond en liant ce Creed 2 au Rocky 4.
Comme dit précédemment, ce quatrième opus voyait la mort d’Apollo Creed et le combat Rocky/Drago. Au lieu d’aller de l’avant, la saga Creed regarde donc encore une fois en direction d’un passé censément glorieux. Sauf que copier , s’inspirer fortement, d’un classique comme le premier Rockypeut s’entendre ( au delà de la vacuité de la démarche), quand on commence à vouloir lorgner vers le plaisir coupable qu’est Rocky 4, cela peut être plus problématique…
En effet, imprégné des années Reagan jusqu’au bout des ongles, cet opus est une succession de séquences servant d’illustration visuelle à des tubes du moment sous fond d’affrontement USA/URSS d’une finesse quelque peu pachydermique. Guerre Froide, ambiance MTV, brushing impeccable de Stallone et signes extérieurs de richesse ( cf la scène de la Lamborghini qui aura inspiré probablement le gag de la Safrane dans la Cité de la Peur). So 80’s… Mais un plaisir coupable de vidéoclub peut-il donner lieu à des prolongations qui en vaillent la peine, passé l’effet Madeleine de Proust?
Creed 2 : Est ce que c’est bien ?
Cette partie contient des spoilers du premier quart d’heure du film.
Creed/Drago. Dès le début, le ton est posé, les trajectoires des deux fils de étant mêlés. En introduction, Viktor Drago émergeant de la banquette d’un appartement miteux de Kiev (parce qu’en Europe de l’Est tout est miteux c’est bien connu), surveillé de près par son entraîneur de père, pour aller livrer un combat qu’il va gagner sans mal. Titre : Creed II. Enchaînement cette fois sur Creed se préparant à livrer combat pour la couronne mondiale. Intervention du vieux mentor Rocky Balboa pour le motiver à base de deux ou trois phrases de grand sage. Combat gagné sans mal. Adonis Creed est parvenu à être champion du monde des poids lourds. Consécration du jeune héros qu’on laissait battu de peu à la fin du premier opus. Dix minutes de métrage seulement se sont écoulés et pourtant, c’est comme si tout le reste du film était déjà résumé.
Commencer le film en présentant Viktor Drago , nouvel Némésis de nos deux héros trente ans après les ravages causés par son père, est en soi une bonne idée. La menace est là, présente, à mille lieux pour le moment du quotidien de nos héros et ils n’en savent rien. Aux deux bouts du globe, deux fils se battent pour la mémoire de leurs pères. Si elle peut faire tiquer de prime abord, l’idée de faire de faire de Creed 2 une sorte de Rocky 4 : Trente après, croiser de nouveau un Creed, un Drago et un Balboa, avait largement de quoi faire au niveau symbolique et dramaturgie quasi shakespearien.
Pourtant dès le début, il n’en est rien et l’impression de danger ou tout du moins de puissance que devrait dégager Viktor Drago est totalement annihilé par une mise en scène du combat sur-découpée rendant peu lisible l’action qui se déroule. De cet incipit, ne subsiste donc l’information que Drago est le nouveau méchant du film et… c’est tout! En même temps, vu qu’il est russe on aurait du se douter aussi… De son coté, aux Etats Unis, Adonis Creed se prépare à combattre pour le titre des poids lourds. La tension est à son comble dans le vestiaire. Enfin… Adonis exhibe ses abdos, sa copine lui demande en langage des signes s’il a bien fait caca et l’apparition de Rocky est iconisé à mort en terme de mise en scène avec un jeu de miroir et un début de speech, du niveau des mantras qu’on trouve sur le mur Facebook d’un préado, lancé depuis la pénombre. La tension est à son comble on vous dit.
Vu qu’on est à dix minutes-un quart d’heure de métrage et que la promo entière du film a été faite sur le duel Creed/Drago, l’issue du combat laisse chancelant le spectateur qui voit donc Adonis Creed remporter son combat. Sans avoir vraiment pu vibrer pour lui, le cadrage et le montage de ce dernier étant du même niveau que celui du fils Drago quelques minutes auparavant. Pas possible de rejeter la faute sur le réal’ de seconde équipe ou d’un éventuel accroc sans conséquence. Houston, ou plutôt Philadelphie, on a un problème.
Car dès lors, le réalisateur Steven Caple Jr va s’échiner à ne pas insuffler un zeste d’émotion, de tension ou de quoi que ce soit de sensitif durant les différentes scènes clés de ce début de métrage. Retrouvailles Rocky Balboa/Ivan Drago dans une configuration qui aurait du être un mini Heatet qui est expédié comme on abrégerait la visite d’un vieux relou. Adonis Creed passe son temps à dire qu’il ne fait pas ce combat pour Apollo. Rocky expédie la conversation avec Adonis quand il veut le mettre en garde de ne pas combattre le fils Drago avec une émotion dans la voix, en parlant de celui qui a tué son meilleur ami et qui a ruiné sa vie, proche de celle d’un neurasthénique. Adonis révèle à sa mère adoptive, femme d’Apollo et donc veuve Creed depuis Rocky 4, qu’il va combattre un Drago et a tout juste droit à une remontrance plus proche du « ben fais comme tu veux » plutôt que de la colère froide et de la douleur que devrait ressentir celle qui a perdu l’homme de sa vie sur le ring et qui aura tout fait pour que son enfant adoptif ne monte jamais sur un ring.
Peu d’émotions, pas de tension ou de montée dramatique. A un point tel, qu’on finit par se demander ce que le film veut raconter. Entre une demande en mariage maladroite qui aurait du être touchante et qui finit par une mise en scène aux fraises par être gênante et une tentative de reprise de contact de la part de Rocky avec son fils expédié. Nombreux sont les exemples de scènes qui s’accumulent, ne menant à pas grand chose et semblant être là que pour jouer les passages obligés d’un film qui n’a pas grand chose à dire…
Ou plutôt qui pense qu’il n’a pas grand chose à dire, tant la donne change au milieu du métrage. En effet, quand naissent les doutes d’Adonis et de Bianca( Tessa Thompson, impeccable de bout en bout), que deux événements, l’un sportif et l’autre plus intime, viennent ébranler jusque dans leur vie de couple, le film de Steven Caple Jrarrête les approximations et se met enfin à raconter une histoire avec une certaine conviction. La partie du rebond, tout en sensibilité, arrive enfin à faire passer de l’émotion. Un sursaut bienvenu alors que se profile l’entrainement du fils Creed puis le combat final contre le fils Drago.
Meme si le combat n’est pas en soi à la hauteur, un passage chanté et un martèlement de poings sur le ring avec la frénésie d’un hyperactif de 5 ans 1/2 n’aidant pas vraiment à se plonger entièrement dans la tension de ce qui devrait être un climax final. Mais c’est encore une fois par l’émotion ( comme depuis les tout premiers Rocky?) que viendra malgré tout le salut du film, la toute dernière scène de l’un des personnages les plus marquants du cinéma du dernier demi siècle finissant par enlever une petite larme…
Creed 2 : K.O technique ou T’as rien dans le ventre ?
Le problème de Creed 2 vient-il donc uniquement de la mise en scène et de la direction d’acteurs de Steven Caple Jr? Non mais elle n’aide vraiment pas, il est vrai. Comme il a déjà été dit, la plupart des scènes qui auraient du marquer le début du film et faire monter la tension avec le retour de Drago dans la vie des Creedet de Balboa est au mieux expédié, au pire raté, comme autant de boulets que Caple Jret sa star Michael B. Jordan voudraient se débarrasser.
Pourtant des bonnes idées ou surprises, le film n’en manque pas. Le fameux « passage du rebond », sorte de parenthèse d’un quart d’heure-vingt minutes annonçant le derniers tiers du film, qui a déjà été évoque. Ivan Drago, incarné par l’inusable Dolph Lundgren et dont le personnage acquiert en quelques scènes une profondeur insoupçonnable par rapport à ce qu’il incarnait dans Rocky 4. La bonne surprise du film alors que son retour pouvait faire peur. Des échos- assez fins- de la mort d’Apollo Creed sur le ring se retrouvent à deux moments. Tout d’abord, quand son fils Adonis est en difficulté face au fils Drago et qu’il refuse, comme son père, qu’on jette l’éponge. Enfin, quand Ivan Drago hésite à jeter l’éponge pour protéger son fils en difficulté sur le ring, effet miroir de Rocky qui, hésita, en son temps lui aussi pour protéger Apollo…
Mais malheureusement, chaque bon moment est contrebalancé par quelque chose de plus négatif, comme si Caple Jr n’avait pas bien compris ce qu’il racontait. Au retour agréable, car travaillé, d’un Ivan Drago, la mode du fan service nous met dans les pattes une Brigitte Nielsen de retour dans le rôle de Ludmila Drago, là juste pour faire une apparition clin d’œil d’une finesse J.J Abrams-ienne. Ou bien encore le combat final dont la dramaturgie entamée par la mise en scène est sublimée par les notes du thème du tout premier Rockyet donnant un regain d’émotion….pour voir le combat se terminer une poignée de secondes plus tard….
Au final, Creed 2 s’avère donc être une belle déception. Suite d’une saga dont la justification et la raison d’être pouvaient déjà interroger sur sa sincérité, elle n’aura jamais réussi à se transcender, ne sachant vraiment jamais ni d’ou elle venait ni ou elle allait. La façon dont un Rocky Balboa aura été mis en avant dans le premier Creed(au point d’en faire une sorte de Rocky 7) pour finalement le laisser de coté une grande partie du métrage et voir la relation s’achever par un bref hochement de tète et un au revoir méta-lourdingue. La façon dont Adonis aura passé son temps à dire qu’il ne combattait pas pour son père. Passé donc deux films ou on aura oscillé entre le trop et le trop peu, la saga Creed, porté dorénavant par les seules épaules de Michael B. Jordan, sera obligé d’aller de l’avant si un troisième volet devait voir le jour.
En effet, après avoir fait son Rocky 1 ( et un peu 5) avec le premier Creedet revisité Rocky 4( et un peu 3), il ne reste plus rien de la saga originelle dont on puisse s’inspirer. Alors qu’aucune note de Bill Conti ne se fait entendre tout au long du générique de fin de ce Creed 2, n’est ce pas là le symbole qu’une page s’est définitivement tournée? Tout au long des deux films qui lui sont consacré, Adonis Creed est un personnage qui n’aura jamais existé qu’en réaction, que ce soit à son père Apollo ( et son héritage), à Rocky (et son mentorat pesant), à sa femme Bianca (et ses problèmes de santé) ou bien au poids du nom qu’il s’est battu pour mériter de porter. Alors à quoi ressemblera un futur film Creed ? Gageons que l’on n’attendra pas très longtemps pour le savoir, l’étoile montante d’Hollywood, Michael B.Jordan, n’allant probablement pas se priver du rutilant « véhicule à star » sur lequel il vient de mettre la main avec la franchise Creed…
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