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CMAT - Euro-Country (2025)
CMAT – Euro-Country (2025)

On l’attendait ce troisième album. CMAT revient enfin avec Euro-Country, un projet à la hauteur des précédents, si ce n’est supérieur. Deux ans après l’excellent Crazymad For Me, CMAT déclare ici son amour à son pays natal, l’Irlande. Plus irish que jamais, plus européenne aussi, elle signe un album-hommage à une célébration de l’Irlande sur la scène musicale mondiale : Éirinn go Brách!

tiocfaidh ár la : Le SaCRE DE CMAT 

Aujourd’hui, l’Irlande s’impose de plus en plus sur la scène musicale internationale. Il n’y a qu’à voir la dernière journée de Rock en Seine 2025 où l’Île Verte était à l’honneur. Il ne s’agit pas tant d’une multiplication d’artistes que d’un changement de regard : on leur accorde davantage de place, plus d’attention, plus d’intérêt. La langue irlandaise se réhabilite peu à peu. Selon une étude, les jeunes irlandais souhaitent de plus en plus apprendre (ou réapprendre) la véritable langue de leur pays; on parle du « Kneecap effect« . Avec son rap militant et abrasif, le trio a permis à toute une génération de redécouvrir leur culture sous un nouvel angle, plus moderne. Dans le monde, une langue indigène meurt tous les quarante jours et l’irlandais est probablement la première à connaître une telle recrudescence.

Car l’Irlande ne vient pas les mains vides : elle porte en son sein, un passé complexe, violent, traumatisant. Ce poids, il s’entend dans le cri de ses artistes et de sa jeunesse. Cette force s’est traduite dans l’art et c’est à ça que rend hommage CMAT dans Euro-Country : Un album riche, autant visuellement que symboliquement. Bravo à elle, comme d’habitude.

Lord, LEt that CMAT SUCCEED

C’est donc sans surprise que l’album s’ouvre sur une introduction en irlandais : « Billy Byrne From Ballybrack, The Leader Of The Pigeon Convoy ». L’hommage se prolonge aussitôt sur le morceau suivant, qui donne son titre au disque. Avec cet album, on l’a déjà dit, CMAT déclare à la fois son amour et son ironie mordante pour son pays : celui que les étrangers idéalisent à travers les réseaux sociaux, mais qui peut se révéler aussi gris et morose que n’importe quel autre un jour de pluie : « But then I think of the New York skyline, The West Cork of the Yankee eyeline… »

Sur « Euro-Country », le titre éponyme, CMAT observe son pays à travers le prisme d’une génération post-Celtic Tiger, après la crise économique des années 2000. Elle se reconnaît dans ce paysage abîmé, déconnectée de sa propre identité, mais cherchant à se réapproprier son histoire : « I never understood what this way of living could do to me // All the mooching ’round shops, and the lack of idеntity ». 

CMAT CMATING : Rires et larmes en équilibre

La force de CMAT réside dans son art du contraste. Elle a cette facilité déconcertante à allier pop culture avec le sentiment humain, parfois, le plus déchirant. Elle parle des blessures les plus profondes :  la dépendance affective, la dépression, le sentiment d’aliénation. Pourtant tout est toujours dit dans la bonne humeur, le rire dans la voix, le ton tongue-in-cheek. Et c’est toujours contagieux et colore même les confidences les plus douloureuses. CMAT sait nous faire pleurer et danser en même temps et ça se finit toujours sur un bon cri ou un bon rire. Et ce n’est pas donné à tout le monde : l’humour à l’écrit est sans doute l’une des formes les plus complexes à traduire. Pourtant, CMAT réussit l’exploit : elle nous regarde droit dans les yeux et balance ses vérités.

Dans Janis Joplining, elle se confie sur ses pulsions autodestructrices nées d’une attirance pour un homme marié. Ailleurs, elle s’autoproclame « the people’s mess, the Dunboyne Diana », figure tragique et grotesque à la fois. Ce mélange d’autofiction et de commentaire social fait toute la singularité de son écriture : en parlant d’elle-même avouant ses insécurités et ses doutes, CMAT finit toujours par nous parler à nous.

Mention spéciale pour le morceau « Take a Sexy Picture of Me » dans lequel CMAT pose un regard acerbe sur la vision masculine imposée au corps des femmes :

COUNTRY GIRL, I LOVE YOu

CMAT n’a pas peur, elle détourne les codes de la country américaine pour mieux les réancrer en Irlande, dans son quotidien de Dunboyne, banlieue de Dublin où « rien ne se passe ». Elle n’imite plus l’Amérique, elle invente sa propre mythologie. Elle offre une nouvelle image à ce genre aux valeurs parfois un peu… conservatrices. Elle ne signe pas seulement un disque personnel : elle propose un manifeste artistique. Le titre en dit long. Elle prend un genre codifié, ultra-américain, et le ramène en Europe, dans une Irlande à la fois héritière de ses blessures et actrice de sa renaissance. En tant que femme, irlandaise et bisexuelle, elle devient une figure moderne, nécessaire et profondément féministe.

Avec ce nouvel album, CMAT boucle un cycle et en démarre un nouveau. Elle qui rêvait de Nashville et de l’Amérique, « cowboy à la sauce irlandaise », revient à Dunboyne et revendique son identité : imparfaite, drôle, dramatique, excessive. Elle ne cherche plus à singer les idoles d’Outre-Atlantique ; elle invente sa propre légende, à la fois banlieusarde et universelle. Et dans ce grand écart, entre rire et tragédie, elle parvient à incarner quelque chose d’unique : une pop irlandaise, européenne, capable de résonner au-delà de ses frontières. Et nous, on a juste à profiter du voyage.


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Frank Carter and The Rattlesnakes - @Pénélope Bonneau Rouis
Frank Carter and The Rattlesnakes – @Pénélope Bonneau Rouis

Elle est très rock cette seconde journée du festival Rock en Seine ! Et elle est aussi la première de cette édition 2024 à utiliser toutes ses scènes. Il est enfin temps de déambuler, courant de part et d’autre du parc de Saint-Cloud pour profiter d’un maximum de performances et travailler son cardio sans s’en rendre compte. Au programme une certaine vision du rock, une sélection d’artistes cohérente et deux coups de coeur scéniques : la tornade The Last Dinner Party, jeunes premières aux longues robes et aux riffs bien sentis et Frank Carter & the Rattlesnakes, boule d’énergie scénique et maître des foules s’il en est. On vous raconte.

THe Last Dinner Party : une invitation apres le lunch

Elles nous avaient déjà émerveillé.es lors de leur concert à La Maroquinerie en février dernier, The Last Dinner Party est de retour dans la capitale, cette fois-ci dans un cadre encore plus grandiose. En ce deuxième jour de festival, c’est le quintet de rock baroque qui a l’honneur d’ouvrir le bal, et elles ont sorti leurs plus belles robes pour l’occasion ! La robe rose poudrée à volants d’Abigail Morris fait tourner les têtes et pas que! Dans la foule, le public se trémousse, danse et laisse éclater dans l’air un parfum musqué de Feminine Urge ! En 50 minutes de concert, le groupe a enchaîné ses morceaux phares, de « Sinner » à « Caesar On a TV Screen », en passant par « Mirror » ! Un nouveau morceau fait même son apparition, « Second Best », qu’il nous tarde d’entendre en version studio, niché entre de nouveaux morceaux, au sein d’un deuxième album, qui surpassera sans aucun doute le premier. Oui, c’est possible. Deux moments phares lors de ce concert, le premier étant la reprise électrique de « Call Me » de Blondie où un public de plus en plus curieux se masse devant la Grande Scène. Le point culminant arrivera évidemment avec « Nothing Matters », chanté en dernier avec cette énergie théâtrale, magique, excessive, toujours aussi intacte. De quoi nous réveiller pour le reste des festivités. La semaine risque d’être intense.

Kasabian : la reconquête ?

Kasabian rentre maintenant sur scène. Depuis quatre ans maintenant, le groupe officie sans Tom Meighan (ex-chanteur) après avoir fait le choix juste et courageux de l’exclure après des plaintes pour agression adressées par son ex-femme puis confirmées par la justice. Ainsi, il y a presque dix ans, Kasabian était en tête d’affiche du festival francilien, ils jouent aujourd’hui à dix-huit heures sur la Mainstage. Et malgré un vrai plaisir à retrouver le groupe en live ainsi que ses tubes britrock, il se fait sentir que la bande désormais menée par Sergio Pizzorno, a tout à refaire, un public entier à reconquérir. Les classiques défilent dans un premier temps, sans grand engouement, avant de laisser de la place aux deux nouveaux albums d’une qualité bien faible. Progressivement, le public composé à moitié de fans de Måneskin se dévergonde et répond aux très (très) nombreux appels du groupe à sauter et danser. Mais les anglais sont heureux d’être sur scène et leur énergie est communicative, l’audience est réceptive. La fin du set avec les célèbres « Vlad the Impaler » et « Fire » concluent fièrement un bon concert marqué par une impression de voir un Kasabian ayant encore un peu besoin de ré-affirmer sa nouvelle composition. C’est avec grand plaisir que nous les reverrons en salle.

Frank Carter & The Rattlesnakes : man of the day

C’en est fini pour l’Angleterre sur la Mainstage, direction la Cascade pour l’accueillir maintenant. Car c’est au tour de Frank Carter et de ses Rattlesnakes d’électriser le festival. Sept ans et trois albums après leur dernier passage à Rock en Seine, le groupe de punk rock n’a cessé de voir sa fanbase grandir et de produire des concerts d’anthologie dans la capitale. Autant dire que la foule était au rendez- vous pour se prendre cette tornade en plein visage. Complicité naturelle avec l’audience, pogos, crowdsurfing, foule en délire et bienveillance (rien que ça !) ont mélangé l’artiste et ses fans lors du concert le plus marquant de ce jeudi. Il faut dire que Frank Carter sait captiver le public. Qu’il lui soit ou non conquis, le frontman ne laisse jamais personne sur la touche et va chercher jusqu’au plus récalcitrant pour le forcer à décroiser ses bras et ses joindre aux pogos. Sur neuf titres interprétés, quatre sont réservés au dernier album « Dark Rainbow » mais les succès du groupe trouvent toute leur place dans le set. « Man of the hour » sera l’un des temps forts de la prestation (ici son refrain nous fait fort penser à un autre morceau et on vous offre des bonbons et notre reconnaissance éternelle si vous nous dites à qui – les temps sont dures pour de meilleurs cadeaux). Un t-shirt Bob L’Eponge offert par un fan sera l’occasion d’un début de morceau en fou rire pour le chanteur. La preuve s’il en est de sa proximité au public mais aussi d’une sympathie naturelle qui pousse à se laisser porter, les yeux grands ouverts, dans toutes propositions scéniques.  Depuis les premiers disques, une vraie communauté s’est forgée autour de l’artiste et celle-ci va sans aucun doute continuer de s’accroître au vu de l’aisance avec laquelle le groupe a encore réussi à conquérir les cœurs aujourd’hui. Une vraie communion s’est ressentie autour de sa performance, un grand moment de ce festival.

de l’ère jurassique aux temps modernes

Il est toujours plaisant de retrouver des constantes. Non que les surprises ne puissent être plaisantes mais certains lives, ses trucs et astuces répétés méthodiquement année par année sont tout autant appréciables. Peut-être qu’ils confèrent à l’idée de toujours être chez soit, qu’importe où l’on se trouve. Et c’est ce que l’on ressent à chaque show de The Hives. Les suédois balancent depuis 1993 déjà, leur vision d’un punk garage made in Suède qui a toujours chercher à se mettre à contre sens de ce qu’est la planète punk. Si c’est pour emmerder ces derniers que nos compères menés par Howlin’ Pelle Amqvist ont choisi de prendre un uniforme noir et blanc, ils l’ont depuis garder. Qu’est ce qui pourrait être moins punk que le costume se demanderaient-ils ? Et en même temps qu’est ce qui pourrait l’être plus ? Sur scène, les voilà donc vêtus de leurs fameuses rayures alors que les sauts sont en nombre dès les premières minutes d’un live si énergique qu’il pousse le chanteur à se jeter immédiatement dans son public. Les classiques on les connait. « Tik tik Boom » vient d’ailleurs clôturer le set comme le veut la coutume et « Come on! » ne manque pas de le précéder. « Walk Idiot Walk » (Tyrannosaurus Hives) se glisse parfaitement dans la set list de nos dinosaures bien aimés. Un titre d’album qui n’est pas sans rappeler pour les experts que j’espère que vous êtes un épisode de « South Park » mais ne nous égarons pas, sans quoi on finirait par se demander quel Hives serait Randy Marsh. Des interactions bien souvent en français viennent ponctuer le live, incitation évidente à demander au public de se donner plus possible. Il y a pourtant eu de la nouveauté chez The Hives. Un nouvel album, plus de 10 après son prédécesseur : « The Death of Randy Fitzsimmons ». Une vraie réussite pour un groupe que l’on espérait encore capable du meilleur. L’opus qui ne connait aucun temps faible et avait su se placer au coeur des attentes, sans se perdre mais sans répéter un gimmick en boucle à l’origine du succès. Il avait été, au contraire, une petite bulle de fraicheur lorsqu’il était sorti l’année dernière, bien fait et jamais prétentieux. Sur scène il ne manquera pas au programme « Bogus Operanti » ouvrant le bal pour le prouver et « Rigor Mortis Radio » ajoutant sa dose de piquant. Ces dinosaures ne sont pas prêts de disparaitre !

Changement d’époque lorsque l’on retrouve Gossip, dont la modernité elle n’a cessé de faire parler et ce, depuis ses débuts en 1999. Le groupe vit depuis ses ères entrecoupées de longues périodes de pauses plus ou moins longues. Reste que sa sulfureuse chanteuse, l’incroyable Beth Ditto est toujours restée dans les parages. Féministe bien avant que toutes les scènes se revendiquent du mouvement, inspirée par les riot grrrl, la musicienne a toujours su défendre ses positions, choquant avant que finalement son propos ne soit enfin entendu comme il le fallait. Sur la scène Cascade, le groupe choisit de toujours se placer du côté des justes causes. Il sera donc celui qui fera entièrement signer son concert pour que les personnes sourdes puissent elles aussi profiter du moment. Un geste remarquable dans les propositions d’inclusivité actuelles. Côté scène, ce qui était vrai hier l’est toujours aujourd’hui. La voix de Beth Ditto marque les esprits. Si certains des titres semblent, à la longue d’un set, répétitifs, les temps forts eux dénotent. « Standing in the way of control » prend par exemple les traits d’un mash up et convoque Nirvana à ajouter son esprit rebelle à l’instant. « Heavy Cross » très attendu fait mouche et une clôture sur « L’Homme à la moto » d’Edith Piaf a cappella dans le public vient parfaire l’instant. On souhaite cette nouvelle ère de Gossip longue et prospère, la rumeur sur leur talent est elle avérée de longue date.

Alors que tous les yeux étaient tournés vers la Grande Scène et donc la performance de Maneskin, tête d’affiche de la soirée et fortement adulés depuis leur Eurovision, comme quoi tout peut arriver dans ce bas monde, il aurait été dommage de ne pas se faire un saut sur la scène du Bosquet. C’était l’occasion de rentrer en plein dans les temps modernes. Les incroyables Psychotic Monks y officiaient un concert pointu, preuve de leur amour profond pour la musique. Un concert vous dites ? Plutôt une performance, une véritable expérience. Brut, exalté, très indé et donc forcément sublime, le moment confére en une plongée  revigorante pour les connaisseurs. euses aux anges de se voir proposer quelque chose de novateur. Depuis leurs débuts en 2017 et le remarquable « Silence Slowly And Madly Shines « , le groupe n’a eu de cesse d’innover, proposant même aujourd’hui des ateliers pour apprendre à sortir des cases musicales établies et aller chercher des instruments de part le monde entier. Avec pour décors le drapeau palestinien et le drapeau transgenres, le groupe rappelle ses positions et défend perpétuellement ses valeurs. Humaines et musicales, l’un et l’autre étant bien souvent et à juste titre liés. C’est donc la tête pleine qu’il faudra quitter Saint-Cloud pour la journée, des riffs psychés y tourbillonnant dans l’attente  d’une toute nouvelle ère demain aux sonorités bien différente.

Article écrit à 3 mains par : Pénélope Bonneau Rouis, Adrien Comar et Julia Escudero


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Samedi 26 août, troisième jour de Rock en Seine 2023 toute en nuance durant lequel la délicatesse d’une Ethel Cain ou bien encore d’un Tamino se seront disputés aux gros sons envoyés par L’Impératrice, Coach Party ou bien encore The Chemical Brothers.

Ce troisième jour de Rock en Seine devait être brulant, fantômes victoriens, sorcières, cheveux de feu et peau diaphane, canines ensanglantées. Oui, ce troisième jour de Rock en Seine avant même de commencer, laissait un goût amer dans la bouche de certains et certaines. En effet, la divine formation anglaise, Florence + The Machine a dû annuler sa venue à la suite de soucis de santé. On souhaite à Florence un prompt rétablissement. Les plus téméraires avaient tout de même revêtu leurs tenues de Sabbat. Robes longues, dentelles, couronnes de fleurs et la mine peut-être un peu moins rayonnante qu’à l’accoutumée. La Reine-mère aurait pu être fière. Partout où elle passe (ou pas, en l’occurrence), elle y sème son lot de paillettes et d’admiration.

Le culte Ethel Cain

Ethel Cain - Rock en Seine 2023 - crédit : Pénélope Bonneau Rouis
Ethel Cain – Rock en Seine 2023 – crédit : Pénélope Bonneau Rouis

À 15h20, une jeune prêtresse qui installe encore son culte monte sur scène. Ethel Cain. Si son nom ne vous dit rien, rendez vous dans vos églises virtuelles les plus proches (Spotify, Deezer, Apple Music, etc…) et écoutez donc son homélie. Entre hérédité et cannibalisme, Ethel Cain nous entraine dans son univers moite et sombre du Sud des États-Unis. Dès son arrivée sur son scène, ses fidèles hurlent à s’en arracher la gorge, les poumons prêts à éclater (si toutefois c’est possible). « MEEMAW! » -Mamie en États-uniens du Sud- résonne dans le parc de Saint-Cloud. La désignée sourit tout au long de sa performance, ça en est presque déroutant lorsque l’on sait de quoi elle parle… Preacher’s Daughter, son premier album est une véritable prouesse musicale dont on vous parle ici. Après 40 minutes bien trop courtes où elle chante ses morceaux phares (« House in Nebraska », « American Teenager », notamment), Ethel Cain d’un sourire gracieux disparaît de la scène. L’assistance peine à se décrocher de la scène, espérant peut-être apercevoir à nouveau leur idole une dernière fois.

Mélange des genres

L’un des aspects les plus positifs quand on est en festival, c’est d’avoir l’opportunité de se laisser porter vers des territoires vers lesquels on ne serait pas forcément allés d’ordinaire. C’est ce qui s’est passé sur la Grande Scène avec Altın Gün. Même si le public était en nombre, malgré le fait d’être en plein après midi, beaucoup de spectateurs avaient du mal à bien prononcer le nom du groupe et semblaient dubitatifs quand, se renseignant, ils lisaient « rock anatolien ». Pourtant, trêve de préjugés, assez rapidement, le mélange d’électro, de compostion 60’s/ 70’s et de musique traditionnelle en provenance d’Asie Mineure aura totalement fait mouche et conquis le public. Sur un rythme enlevé, particulièrement dansant et donc totalement approprié à une fin d’après midi d’un samedi voué à être festif, Altın Gün aura été une très bonne découverte.

L'Impératrice - Rock en Seine crédit Pénélope Bonnneau Rouis
L’Impératrice – Rock en Seine crédit Pénélope Bonnneau Rouis

Des découvertes mais aussi des classiques. Voilà déjà un an, de leur propre aveux que nous n’avions pas vu L’Impératrice à Paris. Cocktail à paillette sucré, pop langoureuse aux instants disco, la recette venait évidemment à manquer à nos grises régions qui de fait manquaient de chaleur tropicale. C’est donc sur la grande scène que le groupe mené par Flore Benguigui, mais attention tout de même à bien garder en tête que L’Impératrice est un groupe à part entière où chaque membre à son importance,  vient saluer son public. Toujours solaire, le groupe balance ces plus gros succès, qui sont à ce jour nombreux de Peur des filles à Agitations Tropicales. Toujours bavard le groupe enjoint le public à danser de la façon « La plus bizarre qui soit ».  » Proposez moi un mouvement à faire avec les mains! » demande Flore, coeur lumineux sur la poitrine avant de lancer le public à se laisser entièrement aller. Voilà une bonne représentation de ce qu’est L’Impératrice, un espace de liberté où la bienveillance colle à des mélodies lumineuses.

Fascination Tamino

À 18h30, le petit chouchou de la rédaction -après tout, ne mérite-t-il pas ce sobriquet?- se hisse sur les hauteurs de la scène Cascade. Du haut de son 1m90, Tamino contemple la foule avec son flegme habituel, le sourcil grave et l’oeil noir. Il semble un peu intimidé pendant quelques secondes et il se ressaisit. Les premières notes de « The Longing » démarrent et le public qui n’avait encore pas fini de hurler, redouble d’effort. Les morceaux s’enchainent avec fluidité et beauté. Tamino prend peu à peu ses aises et se déploie. Possédé par la musique, il embrase presque la scène qui prend des nuances de rouge, puis d’orange. Belle surprise que de voir un artiste gagner en assurance au fil des concerts. Autre surprise du set, deux nouveaux morceaux, que Tamino joue, confiant de son talent, sans vraiment les présenter. Les vrais disciples le suivront, il le sait. Rock en Seine est bien pieux ce soir. La fascination qu’il crée est sans borne, la foule est silencieuse, subjuguée par ce Louis Garrel belge, qui chante, et qui joue pas dans des films et qui ressemble pas tant que ça à Louis Garrel finalement. Après un set époustouflant par sa grâce et sa justesse, Tamino chante son morceau chéri, « Habibi ». La foule l’applaudira longtemps, comme une seule âme, partageant le même amour pour ce jeune artiste qui ne cesse de nous éblouir.

Get the party started !

En début de soirée, alors que le soleil commençait à lentement décliner, la scène de Firestone s’est enflammée grâce à Coach Party. L’énergie donnée par le groupe mixte anglais aura fait se remuer un public bien plus garni qu’à l’accoutumée au son d’un bon vieux rock en provenance de l’île de Wight. Le rock riot girl d’une formation survoltée fait instantanément mouche alors que chaque titre set bon l’essence d’un rock écrit avec précision. Pas besoin de miser sur l’originalité quand on sait penser les morceaux et que chaque note frappe juste. D’autant plus qu’il est bin de mettre en avant dans ce registre qui confère au punk une énergie féminine. Sorte de release party ne disant pas son nom (leur album sort en septembre ), Coach Party aura assurément conquis son public et gagné de nombreux fans avec leur performance d’hier. Ils pourront les redécouvrir en concert à Paris au mois de novembre, avis aux adeptes de rock !

La fin de la soirée se dessine sous le signe de l’électro. Entre noirceur, jeux d’écrans aussi malaisants qu’enivrants et gros riffs qui dépotent, The Chemical Brothers transforment le parc de Saint-Cloud en une discothèque à ciel ouvert réservé au fêtards les plus pointus. Ils pourront finir de danser sur les beats endiablés de Charlotte de Witte.

La journée du samedi aura été intense et plurielle et préparera à embrasser à pleine bouche la dernière journée de festivités et les très attendus The Strokes.

Texte : Pénélope Bonneau Rouis, Alexandre Bertrand, Julia Escudero

Photos : Pénélope Bonneau Rouis


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Crédit photo : Louis Comar

Nouvelle journée sous le soleil de Rock en Seine ce samedi 27 août.  Sans les palmiers certes, mais le Parc de Saint-Cloud profite aussi de ses arbres et de son lot de coins paradisiaques. Cette fois-ci, c’est la scène française qui est particulièrement mise à l’honneur avec un bon nombre de ses représentants à l’affiche. Moins rock que les autres jours, ce samedi profite d’une belle vague allant du dansant au carrément électro. Non contents de faire faire des kilomètres aux festivaliers qui courent d’une scène à l’autre chaque jour, il faudra se déhancher franchement pour profiter pleinement du programme.

Mais où va le monde ?

Il va sur la Grande Scène et pas sur la planche (ni dans le sable) pour accueillir La Femme et ce dès 18 heures 30. La joyeuse troupe fondée par Marlon Magnée et Sascha Got la joue comme à chaque performance sur un show complètement déluré pour séduire. Profitant d’un meilleur son que la dernière fois que nous avions pu les voir aux Francos Montréal, les acolytes sont venus en masse, déjà pour officialiser la sortie de leur nouvel album « Teatro Lucido » dont le premier extrait « Sacatela » est déjà en écoute. La Femme aime à surprendre comme le montrait son dernier né, l’indomptable « Paradigme » et ses titres allant du western au rock français façon Dutronc en passant par de la pop tropicale. Sur scène, l’immense variété d’un répertoire qui ne se refuse absolument rien en terme de créativité, en cause le besoin de s’assurer une véritable indépendance musicale, même si vous dira Marlon, la chose n’existe pas vraiment, parait pourtant bien cohérente. il faut quelques minutes à la troupe pour se chauffer et chauffer la foule. Interprétant d’abord des extraits de « Paradigme » pour vite mettre tout le monde d’accord sur le classique « Elle ne t’aime pas ». Les copains saluent tout le monde, même Robert Gil, photographe musical qui vous avez certainement déjà vu shooter en live. La sauce prend et gonfle, à la fin du set, Rock en Seine est un dancefloor géant.

Il faut quand même dire que le groupe avait été aidé par Lewis Ofman, le prodige de l’électro français qui avait posé ses valises et surtout son décors sur l’indétronable scène de la Cascade à 17 heures 30. Aussi élégant que les marques pour lesquelles il a travaillé d’APC à Colette en passant par Gucci, la musicien sait varier les plaisir avec une précision millimétrée. Entre funk, house et pop, le touche à tout convainc un par terre en effusion qui commence à siroter une bière mais aurait tout autant apprécier un set plus nocturne avec un cocktail et une paille (en carton) pour se laisser enivrer jusqu’au bout de la nuit.

Lewis Ofman – Crédit photo : Louis Comar

Le before de l’after

Parmi les moments les plus attendus de la journée, se glisse la performance de Jamie XX. Le set du membres des iconiques XX se déroule sur le Grande Scène dès 20 heures 30. Si le groupe de rock londonien fait office de légende dans le milieu et que leurs sonorités minimalistes sont aujourd’hui d’incontournables classiques, le musicien se détache de sa formation en solo. C’est un set purement électro entre le DJ set et le remix qu’il propose. Communiquant une énergie festive, il fait danser une assistance qui célèbre la fin de l’été. Certes, ça manque un peu de grandes interprétations et de spectaculaire mais l’instant est plaisant et le Parc de Saint-Cloud, hyper réactif se laisse convaincre par l’esprit festif qui lui est proposé en guise de before de la tête d’affiche, Tame Impala, très attendue ce jour-là.

Jamie XX – Crédit photo : Louis Comar

Pour mieux la découvrir, il faut néanmoins patienter encore un peu. Pour se faire, le rendez-vous est donné par The Blaze sur la scène de la Cascade. La foule y est très dense. La nuit est tombée sur la ville du 92. Les arbres en bordure donnet au tout un aspect mystique que les  deux compères francophones savent maximiser. Avec eux, il est facile de se laisser entraîner et de suivre les courant. les écrans géants se dévoilent en nuances de bleus. La couleur de la mélancolie appelle à la trans. Tout indique qu’il est possible de se laisser porter, que le moment sera partagé mais qu’il saura garder ses secrets. The Blaze et ses sons aériens méritent leur place de très beau nom de la scène française tant leur précision percute et enivre.

Après Nick Cave la veille, c’est maintenant à Tame Impala de prendre d’assaut la Grande Scène. Passer après le géant n’est malheureusement pas chose aisée. Il faut dire que l’immense musicien et ses Bad Seeds ont placé la barre si haut en terme de leçon de live qu’il parait impossible de se glisser à ses côtés. En la matière Tame Impala a en plus la réputation d’être certes excellent sur album mais bien moins à l’aise en ce qui concerne le live. Leur précédent passage à Rock en Seine avait d’ailleurs laissé un souvenir un peu flou d’un concert certes plaisant mais sans l’étoffe de la grandeur. Cette fois, pour palier à ça, la bande originaire d’Australie est venue les valises pleines. Déjà pleines d’une très belle humeur, n’ayant de cesse de rappeler leur plaisir à revenir dans vertes contrées et s’adressant régulièrement à la foule.

Tame Impala – Crédit photo : Louis Comar

Le set s’ouvre en douceur sur « One more year » mais ne fait que gagner en intensité, le son est propre, la voix calée, l’interprétation joliment orchestrée.  Pour l’appuyer, les grosses machines sont de la partie, un jeu de lumières déjà mais surtout un cercle géant placé au dessus des musiciens qui rapidement s’intensifie en des effets de lumières chromatiques rappelant celles de l’arc-en-ciel. « Breathe Deeper » ou encore « Elephant » se joignent à une fête rapidement recouverte de confettis multicolores. La voix aérienne colle aux couleurs pastels d’un moment franchement estival. Le tout se conclut sur  le très attendu « The Less I know the better » et « New Person, same old mistakes ».  Un moment suspendu dont les lumières marqueront les rétines mais n’atteindra malheureusement jamais les sommets de la veille. Restera une dernière journée à vivre avant de retrouver le quotidien bien trop calme une fois la période des festivals achevée. Alors que faire pour en profiter comme il le faut ? Rock en Seine y répond deux journée d’affilée par la même proposition : »Alors on danse » ?


 

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