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Tous les ans, lorsque le mois de septembre pointe le bout de son nez, le moral descend. Malgré les folles promesses de l’automne, la reprise de la vie, les possibilités qu’apporte une nouvelle année, impossible de ne pas penser à la période estivale avec un point au coeur. Cette drôle d’année 2021 apporte pourtant, une fois n’est pas coutume, une rentrée bien particulière. Exit la nostalgie du soleil qui nous aura largement boudé cette année. A la place, il faudra compter sur un besoin furieux de revivre pleinement. Après des mois de fermeture pour de nombreuses salles de concerts, un timide retour de certaines d’entre elles au début de l’été, voilà que septembre est synonyme de réouverture pour la plupart d’entre elles. Une réouverture accueillie évidement avec une prudence extrême, transformant un moment de live en un fragile bijou de cristal  à tenir précieusement entre ses mains et à chérir.

Pam-Risourie_Popup-du-Label_2021
Photo : Louis Comar

La fin du mois d’août voyait rouvrir l’un des clubs chouchous de la capitale, le Pop Up du Label, son restaurant, sa salle underground à taille très humaine et sa terrasse. Si le lieu parisien avait pour habitude d’attirer les foules grâce à ses lives de qualité à bas prix et son atmosphère bouillonnante, le 1er septembre ne faisait pas exception à la règle. Bien au contraire, puisque la foule était venue s’entasser en masse dans et devant la fameuse salle. A l’extérieur, les tables prises d’assaut y étaient recouvertes de victuailles, bières, cocktails et autres tapas. Une baignoire  coupée en deux parties et ainsi devenue fauteuils venait parfaire un décors moderne face à une foule relativement jeune qui profitait de la soirée… assise ou non. Le temps avait enfin fait place à la clémence et c’est dans ce contexte bien particulier, d’une beauté festive enivrante, que pouvaient commencer à jouer les trois groupes  venus performer ce soir là face à un public bienveillant.

Du rock … sous toutes ses formes

Dans la petite salle obscure face au photomaton et au décors bétonnée, Sinaïve a la lourde tâche d’ouvrir le bal. Le quatuor strasbourgeois comme il se plait à le préciser en début de set, place un décors planant. Rock personnalisé s’il en est, le choix mélodique de la formation aime à jouer de ses instruments et ses riffs planant. Les intros travaillées se font longues et psychédéliques alors que des boucles de notes se répètent à l’infini. Le live du groupe se déguste comme un trip sous acide et pourrait avoir sa place en ouverture d’un festival. Un brin sombre, joliment contestataire, savamment aérienne, il se répète à l’infini avant que la voix grave et parfaitement posée de son chanteur à mèche noire ne vienne l’habiller. Originale, le groupe paritaire ajoute à ses instruments traditionnels des maracas. Le rythme est important pour nos compères qui prolongent leurs titres, les faisant passer par de nombreuses vagues et de nombreuses phases. L’ombre de The Smith plane sur le set et ce n’est pas le tee-shirt de la batteuse en hommage à Johnny Marr et son visage grave qui viendront contredire ce tableau. Le soin porté aux instruments est tel que l’ombre de Led Zepplin plane presque au dessus de la soirée. Bien plus garage que le groupe précédemment nommé, le combo ne lâche rien et redonne au rock son esprit libre et obscure.

Toutes les bonnes choses ont une fin, et il est temps de faire place à The Huile et son registre bien plus punk rock. Pour les mauvais élèves au fond de la salle qui n’auraient pas suivi, le ton décalé du quatuor ne laisse pas de doute quant à ses origines : l’évocation de la ville de Sens donne un indice supplémentaire. Vous ne l’avez toujours pas ? Pourtant la réponse est simple : le groupe compte parmi ses rangs un éminent membre des géniaux Johnny Mafia, la relève punk rock française. Avec l’énergie qu’on leur prête volontiers, nos musiciens se lancent dans un joyeux bordel organisé où les effluves de bière et de franches rigolades entre potes suintent derrière chaque note. Plus loquaces que leurs prédécesseurs, les copains n’hésitent pas à communiquer franchement avec leur audience. Ce qu’ils ont mangé et cette sauce « Il y avait un peu de soja je crois dedans, c’était délicieux » comme de leur manque de capacité à savoir quoi raconter « C’est d’ailleurs pour ça que je vous dis ça » sont tour à tour abordés. On rit volontiers au cours de ce four men show au bon goût de « Jackass ».  Pourtant l’heure n’est plus à l’humour quand les notes s’emballent. L’envie de pogoter pourrait bien se faire sentir alors que les refrains tranchant évoquent avec modernité un passé propre à la candeur des années 2000 autant qu’à la fougue des 70’s.  Le tout envoie franchement et fraîchement. Et alors que le temps passe une certitude se crée : sur scène, les musiciens auront toujours 20 ans et le public revivra cette insouciance encore et encore. Une cure de jouvance !

Pam Risourié conclut la soirée en une ritournelle

Il est 22 heures bien sonnées quand la tête d’affiche de la soirée, Pam Risourié fait son apparition scénique. Ceux qui travaillent actuellement à la sortie de leur premier album ont une longueur d’avance : la qualité indéniable de leurs morceaux. Voix aérienne, apaisante et maîtrisée se fait l’écho divin d’instruments rock aux tonalités rêvées. En version enregistrée, tout n’est que beauté chez Pam Risourié. Les airs sont lancinants, écrits et harmonieux. Sur scènes les titres s’enchaînent avec fluidité. Si la petite scène ne permet que des pas restreints, les hochements de têtes sont nombreux. Nos musiciens vivent pleinement leurs performance. Dehors, alors que la salle pleine à ras-bord n elle, n’en perd pas une note, le monde s’est arrêté. Seule persiste une performance millimétrée où chaque soupire a sa place et son importance. Les morceaux tapent fort dans les corps et dans les coeurs, entraînant un tourbillon aussi apaisant que positif. A pas de velours, le groupe crée son nid avec professionnalisme. Les looks travaillés de ses acolytes s’ajoutent à ce moment sensible et poétique comme une ritournelle. La musique masse les esprit sans oublier de chauffer une foule qui oscille en rythme.

La tristesse de ce Monde tient sûrement en ses finalités. On ne saurait retenir un moment indéfiniment même lorsqu’il est la promesse d’un automne heureux, d’un renouveau nécessaire. Il faut alors quitter la salle et respirer l’air parisien, certes moins chaud avec la nuit maintenant installée. Pour garder l’instant encore un peu contre soi, les éclats de rire se font entendre sous les arcades, il faudra se décaler doucement mais sûrement, jusqu’à quitter ce lieu à pas de velours et le sourire aux lèvres.


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