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fear of the black planet

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Album après album #4. Quoi de mieux en cette période si particulière que de dédier son temps libre à la découverte ? Certainement l’une des choses les plus stimulantes de notre existence. Chercher… Découvrir… Ne pas s’accommoder à quelconque confort, mais toujours se trouver dans un état d’esprit d’ouverture au monde, d’élargissement culturel, afin de faire jaillir un sentiment de satisfaction donnant l’impression de nous construire en même temps que notre cercle s’élargit. Voilà ce dont nous avons tous besoin, même sans nous en rendre forcément compte. Et quel moment plus adapté que celui que nous vivons en ce moment, confinés, à l’heure où absolument tout est disponible en ligne depuis chez soi !

Pour le quatrième volet de notre série consacrée à la (re)découverte d’albums géniaux, entre évidence et confidentialité, nous avons choisi de mettre le rap à l’honneur, avec un album légendaire ayant propulsé le genre au sommet de la gloire. Dans un autre registre, le second album dont nous allons vous parler n’en est pas moins excellent, une œuvre concise et éclatante, sorte d’apogée du genre dans lequel elle s’inscrit.

 

Album n°1 : FEAR OF THE BLACK PLANET (PUBLIC ENEMY)

Plus porté vers l’évidence que la confidentialité, connaissez-vous réellement le chef-d’œuvre ultime de Public Enemy, le groupe de hip-hop le plus influent des années 90 ? Ravageur et engagé, Fear of the Black Planet, littéralement « Peur de la planète noire », est un monument du rap, ayant contribué à la reconnaissance de ce dernier en tant que genre légitime et digne d’intérêt. Ils n’étaient pas les seuls à l’époque, épaulé par le brillant duo EPMD ou encore le groupe NWA, mais Public Enemy avait la qualité d’être les plus incisifs dans le domaine, et probablement aussi les plus doués. Fear of the Black Planet intervient en 1990 suite à deux albums à l’écho déjà important. Mais le groupe tient ici ce qui sera leur œuvre la plus écoutée, reconnue, adoubée…

L’album réunit toute la hargne artistique et politique du groupe à travers 20 morceaux survitaminés, dont certains deviendront rapidement cultes (« Power to the People », « Fight the Power », « Fear of the Black Planet »…), hymnes à la population afro-américaine et armes aiguisées contre le racisme institutionnel et la suprématie blanche. C’est un album profond et complexe, en faveur de l’ « empowerment » de la communauté noire, c’est-à-dire l’obtention de pouvoirs plus conséquents afin de peser et d’agir sur les conditions sociales, politiques, économiques du pays. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le film de Spike Lee, Do the right thing , bijou cinématographique sur l’affirmation de la culture noire américaine réalisé en 1989, s’ouvre sur la chanson « Fight the Power », dans une scène de danse devenue culte tant elle transpire la rage et la révolte, sentiments que le corps de la danseuse s’acharne à faire vivre.

Public Enemy va ainsi droit au but en devenant de fidèles représentants de la culture noire américaine : Fear of the black planet n’admet aucune respiration, aucune sortie de route, c’est un rouleau compresseur à l’armature blindée. Parsemé de samples que le groupe parvient à s’approprier subtilement et intelligemment, action vertueuse plus répandue à l’époque, preuve d’une immense culture musicale, l’album fait de cette manière intervenir les artistes qui les ont influencés et qu’ils admirent, tous issus de la culture noire, principalement américaine : Georges Clinton, James Brown, Sky and the famly stone, Lyn Collins…

L’illustration de sa pochette, culte, annonce déjà le meilleur : une planète noire sous la forme d’un viseur de sniper s’approche dangereusement de la Terre, bien prête à faire valoir sa légitime présence, peut-être non sans violence mais avec une conviction certaine, conviction appuyée par un passé douloureux et une condition présente encore bien trop injuste et inégalitaire. Dessous cette illustration trône le titre de l’album, à la manière d’un générique de Star Wars, à la seule différence que la guerre est ici bien réelle. Un combat hargneux en faveur d’une reconnaissance, d’une considération, poussé par un légitime désir d’affirmation . Le hip-hop serait-il enfin l’émancipateur ultime de la culture noire américaine pour l’époque, et Fear of the Black Planet, son arme la plus aiguisée ? Force est de reconnaitre l’impact de Public Enemy dans cette lutte plus que primordiale, laquelle a aujourd’hui fait ses preuves en faisant du rap la musique la plus écoutée, même si le racisme institutionnel n’en a pas fini d’exister.

 

N°2 : HELLO! (STATUS QUO)

Le deuxième album de cette semaine, dans un tout autre registre que le premier, et sorti presque 20 ans plus tôt, est un classique absolu du rock, et surement l’une des œuvres les plus emblématiques de ce nous appellerons ici le rock jouissif. Qu’est-ce que le rock jouissif ? C’est un rock concis et spectaculaire, d’une évidence immédiate, simple et pourtant terriblement efficace, qui, dès lors que vous l’entendez, anime votre corps entier de mouvements incontrôlables, comme si vous étiez en train de fusionner avec la musique. Status Quo produit ce type de musique, ACDC également dans un autre genre. L’émotion qu’elle procure est proche de la frénésie. Les morceaux sont faits pour. Appelé boogie rock dans le cas de Status Quo, cette musique éveille en nous une chaleur, une jubilation, une danse effrénée, une sorte de jouissance en symbiose avec le corps et l’esprit. Rien ne semble plus immédiat.

L’album Hello!, qui intervient au début de leur carrière, après un Piledriver l’année précédente posant les bases de ce que sera leur identité, est généralement celui que l’on désigne comme leur projet le plus abouti et exemplaire dans le genre (même si Quo, leur album suivant, sera tout aussi incroyable). Hello! fait éclat des meilleurs riffs et solos qu’un groupe de boogie rock puisse offrir. Ça ne s’arrête jamais, ça groove de partout, c’est rentre-dedans, répétitif et pourtant pas une seule seconde ennuyant. C’est une œuvre exemplaire du genre, comme un modèle indépassable dont tout le monde se servirait pour comprendre comment construire des morceaux efficaces, comment faire monter l’intensité, comment user de la répétition intelligemment, quand faire intervenir les solos, à quel moment baisser la pression pour mieux la faire remonter, quand modifier légèrement la mélodie en l’alourdissant ou au contraire en l’allégeant…

« Roll Over Down », « Reason for Living », « Caroline » nous prennent aux tripes, nous rendent maboules, nous font découvrir le monde de l’orgasme imminent. C’est une réelle démonstration de force très impressionnante. Sans oublier la clôture magistrale, « Forty Five Hundred Times », qui ne s’éloigne pas de la droiture et du conformisme de l’ensemble malgré son temps record (pour une chanson de Status Quo), dix minutes, pendant lesquelles rien n’est laissé au hasard. C’est toujours aussi carré, et ici encore plus impressionnant au vu de la construction du morceau qui s’étend sans plus finir dans une coordination des plus maitrisées. Tout arrive au moment adéquat, débutant tranquillement pour finir dans une orgie musicale inatteignable. Ainsi, le groupe concise la longueur, joue avec le temps, et excelle aussi bien dans les formats courts que dans les formats longs. Finalement, leur musique est une déclaration d’amour au rock, brute et saillante, qui laissera une trace indélébile dans le monde de la guitare.

A la semaine prochaine pour une nouvelle sélection d’albums !

By Léonard Pottier

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