Bob Dylan , l’un des hommes les plus influents de la musique actuelle. Souvent repris, mainte fois imité, pour ce qui est de l’égaler c’est encore autre chose. Parmi tous les wannabe Dylan du Monde, rares sont celles et ceux à avoir su faire vivre l’immense aura du maître au répertoire infini. Et puis, finalement, comme lorsqu’il s’agissait de prendre ses traits, c’est une femme qui se réussi le mieux à l’exercice. Dans le film » I was There », six acteurs.trices interprétaient le rôle du chanteur à travers les époques, sublimant ses traits de personnalité : de poète à hors-la-loi. A l’unanimité, la seule femme à s’y essayer, Cate Blanchette, était celle qui incarnait le mieux l’inclassable icône et roi indétrônable de la folk.
Le film sortait en 2007, et pour retrouver un aussi bel hommage au maître il faudrait attendre 2023 et une autre Cat sans E cette fois. Cat Power dévoilait au mois de novembre dernier l’album Cat Power Sings Dylan : The 1966Royal Albert Hall Concert. Celle qui est aussi connue sous le nom de Chan Marshall tient très vite à préciser le contexte de son projet : « Plus que l’œuvre de tout autre auteur-compositeur, les chansons de Dylan m’ont parlé et m’ont inspiré dès lors que j’ai commencé à les écouter à l’âge de cinq ans« . C’est ce qu’elle indique dès le dossier de presse de l’album et ce qui fait tout à fait sens. Lorsque l’on connait la discographie de Cat Power, l’âme de Dylan y plane toujours et le lien de parent spirituel semble évident. Bien que Cat Power, plus aérienne, souvent plus sombre, joue ses mélodies sur les pointes des pieds cachant son génie derrière une sincérité à fleur de peau et une timidité évidente, elle emprunte à Dylan sa capacité à émouvoir, son éminente pureté folk, la beauté de son paysage musical. Alors, pour lui rendre un vibrant hommage notre musicienne a choisi de reprendre sur un album live son fameux concert au Royal Albert Hall de 1966. Royal Albert Hall vous dites ? Oui et non, si ce temps culte de la musique porte ce nom c’est en réalité à cause d’un bootleg mal étiqueté qui a fait croire à tord à tout le monde que le concert se déroulait dans cette salle au lieu du Manchester Free Tradehall où le concert a en réalité eu lieu. Mais pourquoi ce concert a-t-il une telle aura ?
De l’album au live, une reprise minutieuse
En 1966, chaque chose doit rester à sa place. Bob Dylan, adoré des fans de folk, est alors en tournée entre l’Europe et l’Australie. Il joue et sillonne les routes avec le groupe The Hawk, plus tard connu sous le nom de The Band. Au milieu de son set Dylan, comme il en a l’habitude sur cette tournée, change de registre passant à l’électrique avec l’aide de The Hawk. Voilà les tonalités folk qui se font rock. Dans l’assistance, un puriste se sent trahi. C’est seulement de la folk qu’il souhaite écouter. Il crie donc : « Judas! » outré et pensant parler au nom de tous.tes. Dylan lui répond comme seul lui sait le faire : « Je te crois pas, tu es un menteur » puis d’ajouter en direction du groupe « Jouez ça putain de fort » avant de lancer « Like a Rolling Stone ».
Dans une optique de coller à l’histoire d’origine, Cat Power, qui se produisait aux Folies Bergère de Paris les 15 et 16 juillet (suite à un report) a pris le partie de diviser sa performance en deux actes qui se succèdent spontanément. Le premier, particulièrement calme permet à la chanteuse d’entrer dans sa performance. Comme toujours, avec Cat Power, la rencontre avec le public se fait sur la pointe des pieds. Intimidée, perchée sur de hauts talons, tapie comme toujours dans l’ombre, elle s’essaie à une performance basée sur la voix. Quelques mouvements ponctuent le moment, toujours avec les bras. Des mains qui se lèvent comme lorsque, focalisé sur son timbre, on en vient à se demander, quoi faire de nos dix doigts qui cohabitent si mal avec nous. Le temps est suspendu. Du bout des lèvres, si doux qu’il semble impensable pour le public de respirer trop fort. Le bruyant Dylan trouve ici une nouvelle âme, presque issue d’un rêve. D’un coup et sans prévenir, le set devient électrique, des musiciens s’ajoutent à la formation. Cat Power est maintenant pieds nus, plus assurée et le concert prend une toute autre âme. Pas au point non plus de pogoter en toute liberté, mais l’atmosphère change considérablement face à un public, loin de celui de 1966 qui ne se sent pas trahi, mais au contraire, apprécie particulièrement ce jeu en deux teintes jusqu’à son dernier acte sur « Like a Rolling Stone ».
Singin’ on Heaven’s door
C’est cette fois-ci et sans détour, au Royal Albert Hall que Cat Power enregistre son album. Nous sommes le 5 novembre 2022 mais nous pourrions bien être n’importe quel autre jour, n’importe quelle autre année.
La musique de Dylan est, on le sait, intemporelle. Son interprétation entre douceur et son ton espiègles, parfois goguenard, en ont fait l’un des plus grands musiciens de la scène actuelle, un mythe, indétrônable.
Cat Power, ça se sent immédiatement, aime profondément l’œuvre de Dylan. Mais elle sait aussi la comprendre, la respecter. Elle signe titre après titre la meilleure cover faite à l’artiste, voir même la meilleure cover jamais réalisée. Et le chose se vérifie en deux points : le premier est la capacité à s’approprier une œuvre en en tirant l’essence même pour la faire vivre sans jamais la trahir. Le second tient au fait de re-créer une œuvre sans se contenter de la copier mais en lui apportant des nuances. Voilà un exercice complexe auquel se prête volontiers Cat Power, tantôt lune, tantôt soleil comme elle sait l’être dans les titres de ses albums et dans ses compositions. La folk s’y habille de jour et de nuit, de Dylan et de Power en une complémentarité redoutable.
Pour aller plus loin on vous raconte l’histoire du titre culte « Like a Rolling Stone » de Bob Dylan, juste ici.
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