A quelques jours de sa sortie le mercredi 24 avril 2019, le premier film d’Audrey Diwan était présenté dans le cadre du Club 300 d’Allociné au Forum des Images. » Mais vous êtes fous » porté par les talentueux Pio Marmai et Céline Sallette nous parle de la délicate problématique de l’addiction et de comment elle peut impacter un couple. Critique.
En début d’année, le fléau de l’addiction était évoqué dans le touchant et délicat « My Beautiful Boy« à travers le regard d’un père tentant d’empêcher son fils de sombrer face à ses démons. Le film d’Audrey Diwan, Mais vous êtes fous, aborde cette thématique en restant à hauteur du couple formé par Pio Marmai et Céline Sallette. Car si la drogue fait office d’élément déclencheur c’est bien de la tourmente d’un couple dont il s’agit dans Mais vous êtes fous.
Mais vous êtes fous : De quoi ça parle?
Roman aime Camille, autant qu’il aime ses deux filles. Mais il cache à tous un grave problème d’addiction, qui pourrait mettre en péril ce qu’il a de plus cher. L’amour a-t-il une chance quand la confiance est rompue?
Inspiré d’une histoire vraie, « Mais vous êtes fous » pose rapidement le cadre de son histoire. Roman est un père de famille charismatique aimant et aimé de sa femme et de ses deux filles. La scène de la boite de nuit en début de métrage, qui sert à justifier le titre du film, est là aussi pour démontrer que le personnage de Pio Marmai a le sens de la fête. Un peu trop… Et pourtant, jamais au cours du film, il ne sera montré Roman entrain de se droguer.
Pas de scène de déchéance à la « Requiem for a Dream », pas de scène de shot à la « My Beautiful Boy » tout au long de « Mais vous êtes fous ». Là n’est pas le propos du métrage d’Audrey Diwan. Non, il s’agit pour elle de parler d’un couple et des tourmentes nées de la tragique découverte de l’addiction de Roman. Car, comme l’a déclaré la réalisatrice après la présentation du film : « La drogue agit comme une maîtresse ». « Mais vous êtes fous » va donc prendre rapidement la forme d’une histoire d’amour qui se (re)bâtit après une sinistre révélation.
Mais vous êtes fous : Est ce que c’est bien?
Ce qu’il y a de particulièrement impressionnant dans Mais vous êtes fous, c’est la facilité avec laquelle la réalisatrice Audrey Diwan parvient à nous faire ressentir l’incrédulité de Camille face aux conséquences des actes de Roman. Sans spoiler, c’est le monde entier de cette dernière, cette famille harmonieuse lui servant de cocon et d’échappatoire à un travail l’épuisant, qui s’écroule en quelques minutes. Son mari n’est pas celui qu’il semblait être, sa famille est mise à mal et un engrenage judiciaire, implacable, prend pratiquement le contrôle de sa vie sans qu’elle réalise pleinement ce qui est entrain de lui arriver. L’excellente performance de Céline Sallette, il est vrai, aide beaucoup le spectateur à s’attacher au personnage de Camille et à pleinement comprendre ce qu’elle ressent. Aussi après avoir vu le cadre sans histoire et la chute, on ne peut, comme elle, qu’espérer que les choses s’arrangeront entre elle et Roman. Sauf que tout n’est pas si simple…
Touchée par l’histoire vraie confiée par une de ses proches, Audrey Diwan a pleinement investi son premier long métrage, tout en sensibilité et spontanéité. Aucune dramaturgie excessive. Ainsi, il n’y a pas de grande révélation expliquant pourquoi Roman se drogue. Aucune excuse ne lui est trouvé, comme explique le personnage « Je suis tombé dedans et je dois en sortir ». C’est comme ça. La confiance a été brisée et chacun doit se reconstruire. Audrey Diwan aime beaucoup le pouvoir du hors champ et le manie excellemment. Ainsi, au lieu d’un happy end rassurant ou d’une leçon de morale édifiante, le film se conclue par une sorte de trois points de suspension, laissant le spectateur s’interroger et réfléchir sur son rapport à la confiance en l’autre et à l’amour de façon intelligente et élégante. Une belle réussite pour le premier film d’Audrey Diwan et son excellent duo d’acteurs Pio Marmai et Céline Sallette.