The Offspring : the former kids are alright

The Offspring @ Rock en Seine 2024 - crédit : Louis Comar
The Offspring @ Rock en Seine 2024 – crédit : Louis Comar

Il est un lieu où l’on a toujours 15 ans, inlassablement, et ce même année après année. Cet espace de parfaite régression se situe sûrement dans la musique que l’on écoutait à cet âge là. Pourtant, il parait d’autant plus vrai pour tous les groupes qui ont fait la grande époque du post punk. En la matière The Offspring était déjà l’un des darons de cette grande famille aux cheveux colorés et aux riffs saturés. Et comme pour les aînés que l’on regarde toujours avec respect, leur présence semble inévitable et indiscutable. Plus bière de Proust que madeleine, la formation se présentait pour la 4ème fois de ses propres dire sur la scène de Rock en Seine. « Tu y crois Dexter ? » lui lance d’ailleurs amusé son acolyte à la guitare, Noodles, pour les intimes. Puisque avant il était de bon ton de se donner des noms de scène au sein d’un groupe. On pourra prendre tout le recul de l’âge, celui que confère des centaines de lives vus, rien n’y fait, le charme opère toujours. Chaque apparition du groupe sur scène fait toujours mouche, faisant de nous des pantins prêts à reproduire tous les gimmicks adorées du rock show idéalisé. Les premières minutes de « Come out and play », introduction parfaite suffisent à faire bondir et rebondir. La foule ne s’y trompe pas alors qu’elle se lance immédiatement dans un mélange entre pogo et danse à la sauce punk, têtes qui se balancent dans tous les sens. Evidemment, le groupe connait son public de festival, venu se mettre les très gros tubes d’ « Americana » et consorts dans les oreilles.  Et c’est bien un rouleau compresseur de gros singles qui nous attend. « Want you bad » qui figurait sur le BO d' »American Pie 2″ est joué en troisième position. Et quel joie de chanter à nouveau dessus, comme de citer le titre de ce film d’un autre temps aussi culte que complètement obsolète. Dexter et Noodles sont particulièrement causant, échangeant l’un avec l’autre en des phrases à l’intonation de showmen, G.O d’un soir. Les voilà qui entament bien rapidement des « Hey ho let’s go » empruntés aux Ramones pour « Blitzkrie bop ». « On a affaire à un public qui aime les gros mots ici ! » s’amuse à clamer Noodles. Et chaque mot permet de l’assistance de se lancer dans des « hooo » de plaisir distincts. Les confettis sont balancés dans la foulée alors qu’une pluie de titre s’apprête à se succéder. « Bad Habit », « Why don’t you et a job ? », « Pretty fly (for a white guy) » et même « The kids aren’t alright », tous nos vieux amis sont là. Et qu’il est bon de chanter avec eux. Quittant nos corps pour entrer dans une transe collective, un monde sans âge où les 4 jours de festival écoulés ne font plus mal aux jambes. Le set s’achève sur « Self Esteem » issu de « Smash » sorti en 1994. Et rien que l’évocation de ce nom confère en une prise de liberté totale, le souvenir de tous les possibles et la rebélion qui colle à l’espoir de la jeunesse. Quelques derniers sauts dans les airs et il faudra revenir au présent. Il n’est pas si mal finalement, on est encore en plein festival et puis au moins on a l’âge légal de se payer une bière !

LOVERMAn : DARLING Boy

Loverman - @Pénélope Bonneau Rouis
Loverman – @Pénélope Bonneau Rouis

À 17h30, une petite foule se presse devant la scène Firestone. Certains semblent avertis de la tornade qui s’apprête à leur tomber dessus (et de la pluie, tant les K-way et les cirés sont de sortie), d’autres semblent avoir atterris là un peu par hasard, au détour d’un bosquet ou d’une cascade. Loverman, que l’on ne présente plus, s’apprête à monter sur scène… 17h31, l’amoureux se fait désirer. Puis, un cri de surprise dans la foule, un deuxième, un rire… peu à peu, la foule se tourne vers ce bruit. Loverman se glisse entre les gens, assuré, sourire fier. Il grimpe sur la barrière, bondit sur la scène et hurle « Here comes your Loverman ! » et dans une fanfare qu’il est le seul à gérer, débute sa performance tantôt clownesque, tantôt théâtrale, toujours passionnée. En quarante minutes, Loverman enchaînera les morceaux issus de son premier album, Lovesongs. Le live est une manière pour le chanteur de constamment revisiter ses morceaux, laissant libre cours au moment pour transformer son oeuvre initiale. Des rugissements parsèment soudainement sa folk en clair-obscur. À son habitude, dès le deuxième morceau, Loverman plonge dans la foule sous les regards amusés des fidèles et ceux mal à l’aise des novices. Tambourin en main, éclair dans le regard, il harangue une foule qui grandit de minute en minute et qui, à la manière d’une Mer des Joncs, se scinde en deux pour mieux laisser passer son guide. Il y descendra trois fois dans cette foule adorante, intriguée, attisée par un feu qu’elle peine à domestiquer. Un feu-follet qui court et saute et s’éloigne avant qu’on ne réussisse à le saisir. Les quarante minutes sont passées, on n’a pas vu les aiguilles glisser, malgré les questions redondantes de Loverman : « Quelqu’un a l’heure? » Oui, mais on ne veut pas savoir. Il est 18h10, Loverman laisse son micro à quelqu’un dans l’assistance, il se glisse dans la foule, trombone à la main et disparait. « Euh, il est où? » demande le porteur de micro. Quelques instants plus tard, Loverman est retrouvé à plusieurs mètres de la scène Firestone, à jouer du trombone près de la scène du Bosquet.
Funambule et saltimbanque, insaisissable, il disparait à nouveau. 

Kae Tempest : It was grace

L’art c’est la connexion. Celle qui unie tout le monde en un cercle. C’est sur cette idée que s’ouvre le set de Kae Tempest. L’artiste se présente sur scène et adresse la parole longuement à l’audience, dans ce qui sera, prévient-iel, son seul temps de parole. Parler l’obligerait à sortir de son art, à s’extraire de la musique, hors la musique, parle plus que tous les mots du monde. Et qu’est-ce beau de parcourir le Monde pour communiquer de cette façon ! Point de décors travaillé au programme, juste un fond, simple. Et la beauté d’un texte récité sous forme de spoken word avec une intensité qui transperce les âmes. « Votre solitude est le symptôme, pas le mal » dira-t-iel plus tard sur l’un de ses textes-poèmes. En cette heure de show, ce mal disparait entièrement. Face à un public venu en nombre malgré sa présence sur la petite scène du Bosquet, Kae Tempest unit par des mots et repousse tous les maux. Mais iel sait aussi les décrire, les raconter pour mieux les conjurer. Il faut dire que le ton avait été donné dès les toutes premières notes de « Priority boredom », interprété en intro d’un set qui ne permettra à aucun moment de respirer. Et puis vient le moment de « Grace », récité en immense majorité a capella. « Make love, let me be love. Let me be loving. Let me give love, receive love, and be nothing but love » scande l’immense musien.ne, et sous ses mots nous ne sommes tous.tes qu’amour. Le souffle court, seule une question persiste, comment une intonation et quelques notes susurrées peuvent à ce point ouvrir les coeurs ? C’est la toute la grandeur de l’oeuvre de Kae Tempest et de son immense album « The Line is a curve » dont la perfection du titre n’a de cesse d’émouvoir. Il y a tant à dire sur ce moment bercé par le soleil qui doucement se couche, l’air rafraîchi par la pluie de la journée et les visages tournés, transcendés, et baignés d’espoir. Bien au delà de la musique, de la simple scène, l’artiste est le vaisseau d’émotions à fleur de peau, iel les portent pour nous, les rend plus faciles à accepter. La beauté et la colère peuvent cohabiter, on peut s’oser à les sentir sans être effrayer, sur scène, la route nous a été dégagée. Tout ira bien mieux maintenant. C’est une promesse, il suffit d’y croire. Et lorsque les yeux s’ouvrent après un moment instrumental, il est temps d’accueillir un nouveau titre, promesse d’un album à venir l’an prochain. Les au revoirs se font le sourire aux lèvres alors que l’air a été boulversé. « I saw light » chante-iel avec Grian Chatten, eh bien nous aussi.


Lana del Rey à Rock en Seine 2024 @ crédit : Louis Comar

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Lana Del Rey, il avait suffit de l’évocation de son nom à l’hiver dernier, promise…

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