Ça faisait longtemps qu’on l’attendait celui-ci. Prelude To Ecstasy du quintette The Last Dinner Party a été annoncé en novembre dernier mais voilà au moins deux ans que les filles se déchaînent sur scène. Dans les pubs, les disquaires ou encore en première partie des Rolling Stones, de Florence + The Machine ou d’Hozier, The Last Dinner Party nous ont conviés à de nombreuses fêtes… Maintenant que l’album est entre vos mains, serez-vous de la partie?
Rock en dentelle
Here comes the feminine urge, I know it so well / To nurture the wounds my mother held… Une chose est sûre, Prelude To Ecstasy de The Last Dinner Party, accorde une jolie part à la licence poétique. Le premier album du groupe est comme on l’avait escompté, voire mieux! Sans me laisser aller à une subjectivité défaillante, il est même carrément excellent.
Prelude To Ecstasy débute avec une intro musicale, un prélude à l’extase qui nous attend. La quête nous semble déjà merveilleuse et épique. Que ces femmes en jupons et dentelles ouvrent la voie à un rock théâtral que l’on attend depuis bien trop longtemps… ce prélude nous prépare à une aventure musicale, nos poitrines se gonflent et nos cœurs palpitent. Nos jambes fourmillent alors que l’envie de danser s’installe… et juste comme ça « Burn Alive » commence. Celles et ceux qui étaient au concert d’Hozier en novembre avaient déjà eu l’occasion de l’entendre. Quel plaisir de pouvoir désormais l’écouter à sa guise, en boucle. I am not the girl I set out to be, let me make my grief a commodity!
Furieusement fières
L’album fait plaisir. Il est théâtral, élaboré, la production est impeccable. Les filles ont sorti le grand jeu. Wilde en serait fier, Virginia Woolf encore plus. Chaque morceau y trouve sa place et ils s’enchaînent avec une logique déconcertante. Moment fort ? La transition quasi-idéale entre « Beautiful Boy », « Gjuha » et « Sinner ».
L’énergie féminine y est folle, dévorante, excessive. On se reconnait dans chacune des paroles, soigneusement écrites et rageusement entonnées par Abigail Morris, la chanteuse charismatique à la tignasse brune. Do you feel like a man when I can’t talk back? Do you want me or do you want control?
L’album est peuplé de femmes mystiques, menaçantes, toujours fières. La femme damnée reprend sa place, elle quitte le bûcher et devient reine. The Last Dinner Party se réapproprie le rock à papa, le transformant en un nouveau rock, encore plus fantasque et déluré. Les productions presque Queen-esques de certains morceaux mettent en exergue l’inventivité de ces cinq londoniennes. I’ll be Caesar on a TV screen / Champion of My Fate / No one can tell me to stop / I’ll have everything I want.
Cette épopée baroque pop arrive à son apogée avec « Mirror », ultime cantique de cet opus. Il vient boucler la boucle avec un postlude majestueux, excessive qui ne peut que nous évoquer le prélude de l’album. Le groupe tire sa révérence, nous laisse redescendre sur terre après ce festin extatique. Le premier d’une belle série.
Jolie plante, joli talent
Chaque fois qu’une femme a un peu de succès dans la musique, les puristes sont circonspects. Imaginez donc les réactions quand il y en a cinq. De nombreuses conversations se sont ouvertes autour de The Last Dinner Party. Sont-elles des Industry Plants ? Un plan marketing incroyablement bien ficelé plutôt qu’un talent véritable? Tout le monde sait bien que le rock est affaire de mec. Et ça en fait rager certains de voir des femmes, jeunes, fières, indépendantes et créatives avoir leur mot à dire. Quelle audace de leur part que de vouloir avoir leur place.
Mais aujourd’hui, on troque les pantalons de cuir pour les robes en velours. Le tigré rose pour la toile de Jouy. Les femmes ne sont plus des objets de convoitise. La muse devient la créatrice. Et si c’est le cas, que ce groupe est bel et bien un plan marketing, je ne vois pas trop le problème. Ça voudrait donc dire que la demande a été entendue et que l’industrie se bouge un peu et laisse la place aux femmes.
Ce prélude à l’extase est formidable, que sa suite soit fabuleuse. The Last Dinner Party jouent à la Maroquinerie le 20 février prochain.
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