Kneecap sait déchainer les passions ! Le groupe originaire de Belfast défraie les chroniques, déchire les foules et surtout n’a jamais sa langue dans sa poche. Ce 11 novembre, la formation complétait ses quatre dates parisiennes commencées deux mois plus tôt par un l’Elysée Montmartre plein à craquer. L’occasion de défendre son dernier album en date « Fine Art » mais surtout l’indépendance des peuples et des langues, partout dans le monde. Retour sur un concert sous forme de meeting politique.

Le Kneecap effect
Souvenez-vous d’août dernier. Rock en Seine accueillait le trio Kneecap sur sa plus petite scène. Et voilà que d’un coup, l’info se mettait à circuler, sur la presse, dans les médias, sur les réseaux sociaux. Le groupe pro-Palestienien comme il était appelé, simplement résumé, allait se produire dans le festival francilien. Un procès était alors en cours contre la formation pour avoir brandi le drapeau du Hezbollah sur scène. Mais voilà c’était bien le sujet de la guerre Israélo-Plastienniene qui était au centre du débat. Le groupe jouait-il en faveur du terrorisme s’interrogeait notre gouvernement non informé qui découvrait les fameux rappeurs ? Comme d’habitude en passant complètement à côté du véritable message de Kneecap et de sa réelle force à parler d’oppression et de liberté des peuples. L’opération eu un coût pour le célèbre festival : coupe de subventions par deux fois, le maintient valait donc son addition salée. Et côté public ? Une folie incroyable ! Une foule immense qui prenait d »assaut la petite scène, à tel point qu’il fallait jouer des coudes, d’astuces et de pointes de pieds pour apercevoir la formation. Et en dehors de cette tournure politique ? Le rap plus qu’efficace du groupe avait déjà son goût de trop peu. Il fallait donc voir ça dans un cadre plus accessible, ce Kneecap Effect. Et voilà comment, entre engagement et musique plus que punchy, le groupe remplissait quatre dates parisiennes entre Trianon et Elysée-Montmartre.

Le nord de l’Irlande en plein Paris !
D’entrée le ton est donné. Rien ne fera taire Kneecap, pas même les deux procès gagnés poussant d’ailleurs la foule à crier, plus tard dans la soirée des « DEUX ! ZERO! » pour célébrer ça. Un écran noir ouvre les festivités. Dessus un message sans équivoque rappelle qu’Israël est toujours en train de commettre un génocide. Avant d’ajouter que la France en est complice en permettant au gouvernement israélien d’acheter des armes. « Free ! free ! Palestine » s’écrit d’entrée la foule comme elle le fera à de nombreuses reprises ce soir. Toujours cagoulés aux couleurs de l’Irlande les compères s’engagent sur scène. « ITS BEEN AGES » ouvre les festivités entre phrasé puissant et sonorités de plus en plus techno. Le courant s’invite avec le temps qui passe dans le répertoire des compères. D’un show rap, nous voilà maintenant propulsés dans un univers plus proche de la rave où lumières, écrans et bruitages nous tiennent plus éveillés que la meilleure des drogues. Pas besoin d’attendre longtemps pour que l’indépendantisme irlandais prenne place dans la salle. Le titre « Fenian cunts » résonne déjà pleinement en début de setlist. Le terme fenian est une insulte qui étaient adressée aux personnes qui prônait la réunification et l’indépendance de l’Irlande. Dans la salle d’ailleurs nos voisins sont venus en masse représenter leur pays. Lorsque le groupe interroge quand à l’origine de son audience, nombreuses sont les mains à se lever à l’évocation du mot « Irlande ».
Toute la soirée, sera évidemment tournée autours de thématiques politiques et chaque mot est ainsi choisi avec précaution. Mo Chara, Móglaí Bap et DJ Próvaí préfèrent ainsi parler de Nord de l’Irlande plutôt que d’Irlande du Nord, un vocabulaire volontairement militant. Rien d’étonnant quand on sait que la formation voit ses débuts inspiré par un tague « cearta » (droits) peint en marge de la marche pour les droits de la langue irlandaise par Naoise Ó Cairealláin et un ami. L’ami arrêté refusera de parler une autre langue que l’irlandais à la police. Cette histoire donne naissance au premier titre du groupe « C.E.A.R.T.A » qu’on a le plaisir d’écouter ce soir en milieu de set.
Militants et trèfles à quatre feuilles kneecap

Les drapeaux ? Kneecap dit vouloir les éviter alors lorsqu’ils sont en nombre dans la salle, le groupe s’en amuse mais ne les prend pas sur scène. Voilà qui devrait soulager leur avocat ! On pourrait ne pas savoir ce qu’ils veulent dire, s’amusent à expliquer les enfants terribles d’un ton goguenard. Et puis, pas besoin de drapeaux pour lâcher tout ce qu’ils ont à dire. Voilà donc qu’on retrouve dans la foule le drapeau palestinien en majorité, mais aussi le breton, le basque. Et le groupe ne manque pas de saluer toutes les langues opprimées. Main dans la main, ce sont des frères d’armes! Côté set list, on retrouve seulement cinq titres issus de leurs albums, le reste leur permet d’explorer leurs sonorités et leur large répertoire. On s’amuse clairement sur « Your sniffer dogs are shite » et ses paroles sans équivoque. Les voir affichées sur grand écran permet quelques sourire. Sur scène, la formation harangue la foule sans fin. On en profite pour se mettre à chanter, avec le trio « Un kilomètre à pied ça ouuuse, ça ouuuuse les souliers ! » L’opération se poursuit longuement tout comme l’évocation de slogans anti-fachistes criés à travers la salle. On le disait, le concert à tout du meeting politique. Et c’est aussi tout l’intérêt de ce show sans demie-mesure qui ne se refuse rien et sait faire des doigts d’honneurs géants aux oppresseurs. C’était le punk qui avait ce rôle fut un temps et aujourd’hui le rap prend clairement le relais. Le rap seulement ? Pas vraiment, les copains de Fontaines D.C ont les mêmes idées et les expriment tout aussi fort. D’ailleurs, le duo avec Grian Chatten « Better way to live » fait aussi partie du programme de ce soir. On aurait adoré voir le chanteur débarquer sur scène, mais aucun espoir n’était permis sur le sujet. Il apparaitra à la place en vidéo.

Dernière farandole techno ! kneecap
Le groupe sait aussi remercier. Lui qui taclait la France en ouverture du bal, ne manque pas de la remercier de les laisser jouer. Ce n’est pas le cas en Allemagne ou en Hongrie où ils sont black-listés. Voilà qui fascine. Que l’art puisse encore déranger, au point de se voir censurer. Pourtant Keecap loin de prôner le terrorisme, se bat pour la liberté, la vie. Fiers représentants de peuples opprimés, de culture que l’on tente d’éteindre. Les combats indépendantistes cherchent à valoriser l’unité de chacun.e. Ils le disaient à Rock en Seine et le répètent à chaque occasion, le groupe prône la paix et l’amour.

Après avoir aussi profité de la date pour présenter un nouveau titre, il faut le dire, le nouvel et troisième opus approche rapidement, il est temps de conclure. « H.O.O.D » et « The Recap » sont là pour amorcer la clôture juste après quelques rappels scandés qu’ici personne n’aime la police. Mais il fallait tirer sa révérence en très grandes pompes ! Et rappeler encore une fois, qu’ici l’indépendance des peuples et de l’Irlande en tête de liste est le mot d’ordre. Le groupe se lance ainsi dans une reprise d’un chant révolutionnaire irlandais : « Come out, Ye Black and Tans ». Seulement, sous leurs micros, le titre prend carrément des allures technos. Parce qu’outre les messages, martelés avec soin, il faut savoir s’amuser. Alors, la soirée prend une dernière fois des airs de fête foraine géante, cathartique et délurée. Ca pogotte et ça slam généreusement, groupe inclus, aucune limite n’existe en ces dernières minutes. Cette liberté, elle continuera d’exister bien au-delà de cette fête à l’Elysée Montmartre. L’art n’est pas fait pour être accroché dans vos salons, la musique n’est pas faite pour danser. C’est un cri de rage et d’espoir qu’on porte collectivement.
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