Baxter Dury - Arte Concert Festival

On ne présente plus le Dandy des Dandies, Baxter Dury, au public français. Rattaché en dernière minute à la programmation du Arte Concert Festival après le désistement de James Blake, l’Anglais venait ainsi nous présenter son dernier album Allbarone. Un concert surprise, gratuit et terriblement enivrant. 

Surprise! C’est Baxter Dury à L’appareil

Ça fait dix ans que l’Arte Concert Festival prend ses quartiers à la Gaité Lyrique chaque octobre. Et tous les ans, il y a du beau monde : St Vincent, Damon Albarn, Iggy Pop… Cette année encore, la programmation faisait rêver : Mac Demarco, Sudan Archives, Camille Yembé, Wu Lyf et Silly Boy Blue graciaient le festival de leur présence. Le seul absent ? James Blake, dont l’annulation de dernière minute a fait grincer des dents… avant de déclencher un vent d’euphorie, puisque celui qui le remplaçait n’était autre que Baxter Dury. Cette annonce, survenue moins d’une semaine, avant la date du concert a crée un vent d’enthousiasme chez les fans du Dandy, sauf que manque de chance, le concert était déjà complet depuis la mise en vente des billets (comme chaque année).

Ce remplacement tombait à pic pour Baxter Dury. Celui-ci dévoilait en septembre dernier son neuvième album Allbarone, produit en collaboration avec James Epworth (Adele, Arctic Monkeys, Florence + The Machine…). Un disque qui prend une tournure bien plus électro que sa discographie habituelle. Plus frontal, plus audacieux, plus sexy aussi, on sait déjà qu’il va nous tenir chaud jusqu’à la saison nouvelle tant on va danser dessus tout l’hiver. Belle surprise donc pour le public parisien, qui assistait à la première représentation depuis la sortie du projet.

Tell me if you’re coming to allbarone!

C’est à 22h35 que l’Anglais monte sur la scène centrale de la Gaité Lyrique. Costume gris qui n’a jamais foutu un fil dans un bureau, multitude de chaînes en or autour du cou, chemise entrouverte, regard torve et posture de boxeur; Baxter est en position de combat. Et c’est bien d’un combat dont il s’agit : celui d’un artiste qui refuse de se répéter. Les premières notes de « Alpha Dog » retentissent. Le ton est donné, les morceaux s’enchaînent sans fioriture. Le concert sera brutal, précis, dansant. La setlist alterne habilement entre les titres d’Allbarone et quelques morceaux plus anciens :  « Miami »  , « Palm Trees », « I’m Not Your Dog ». Un dosage parfait, pensé pour raviver la ferveur des fidèles tout en embarquant ceux qui découvrent ce nouveau virage électro.

Monsieur Dury se désinhibe de seconde en seconde, oscillant entre théâtralité et nonchalance, comme s’il s’amusait de son propre rôle. Il multiplie ses pas de danse signature. Genoux pliés, buste penché, bras suspendus, visage figé dans une moue ironique. Il bondit, se recroqueville, s’élance à nouveau, comme traversé par une énergie qu’il peine à contenir.
La lumière vire au rouge, puis au bleu. Chaque changement d’ambiance semble recalibrer sa gestuelle, comme si la musique lui dictait un langage corporel différent à chaque morceau. On a à peine le temps de saisir une attitude qu’il est déjà ailleurs.

Sur scène, Allbarone se métamorphose. Les arrangements gagnent en tension et en densité. Les synthés vrombissent, la basse s’impose, les beats claquent avec une rigueur presque mécanique. Le live révèle une matière plus brute, très club, où le spoken word de Dury se fait incantation. Il est beaucoup plus énervé sur scène, il hurle les paroles, les change un peu, se contorsionne. Derrière lui, la chanteuse joue le contrepoint parfait : une voix élégante, précise, elle adoucit la rudesse de sa diction et prolonge ses répliques qui fait ce son signature. Ensemble, ils bâtissent une ambiance trouble, moite et hypnotique, où la danse côtoie la désillusion.

Gaité dans l’air

Il y a des artistes qui créent des dévotions auprès de leur public. Depuis plus de vingt ans, le chanteur britannique a rassemblé autour de lui une communauté d’enthousiastes : les fidèles de la première heure, ceux qui tombent sur un album et ne le quittent plus, et même ces auditeurs occasionnels qui se souviennent de lui tous les dix ans, le temps d’un disque, avant de replonger dans l’oubli.

Mais ce soir, pas de distance ni de demi-mesure : le public est fan, assurément. Cela se sent dès l’entrée dans la salle, dans les couloirs, autour du bar : malgré l’annonce de dernière minute, tout le monde est là pour lui, et pour lui seul. Pas de curiosité opportuniste ni d’auditeurs perdus au hasard d’un festival : uniquement des visages attentifs, tous heureux d’assister à cette parenthèse imprévue.

Baxter Dury, lui, semble en avoir pleinement conscience. Il sait la bienveillance qui entoure chacune de ses apparitions, et la gratitude affleure entre deux chansons, dans un sourire, un geste vague vers la fosse. Dans une récente interview publiée sur notre site, il confiait combien ce public l’a toujours laissé libre : libre de changer, d’expérimenter, de se réinventer sans craindre la rupture. Cette confiance réciproque est peut-être le secret de sa longévité ; Baxter Dury n’appartient à aucune case, et c’est précisément pour cela qu’on continue de le suivre.

Quand le prince des larmes tire sa révérence

Le concert s’achève sur « Prince of Tears », ce titre emblématique où Baxter Dury laisse tomber le masque du dandy ironique pour révéler sa fragilité. Les premières notes résonnent comme un aveu, le tempo ralentit, la lumière se fait plus froide. Mais ce n’est que de courte durée puisque pour signaler son départ, Baxter Dury rugit un « au revoir » tonitruant. Ce soir, à la Gaîté Lyrique, il ne remplaçait personne. Il rappelait simplement qu’il reste une figure de la pop britannique, capable de transformer la désillusion en fête et la mélancolie en communion.

À noter : il jouera en France les 4 (Paris), 5 (Bordeaux) et 6 (Lyon) décembre 2025.


Baxter Dury - Crédit Photo @Tom Beard

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